Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

II. Zivilabteilung 5P.464/2006
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{T 0/2}
5P.464/2006 /frs

Arrêt du 5 mars 2007
IIe Cour de droit civil

Mmes et M. les Juges Nordmann, Juge présidant,
Meyer et Hohl.
Greffière: Mme Borgeat.

X. ________,
recourant, représenté par Me Pascal Pétroz, avocat,

contre

Y.________ SA,
intimée, représentée par Me Antoine Herren, avocat,
1ère Section de la Cour de justice du canton de Genève, case postale 3108,
1211 Genève 3.

art. 9 Cst. (mainlevée d'opposition),

recours de droit public [OJ] contre l'arrêt de la 1ère Section de la Cour de
justice du canton de Genève
du 28 septembre 2006.

Faits :

A.
A.a En automne 2002, X.________ a chargé l'entreprise Y.________ SA de
procéder à la réfection de la toiture de son immeuble sis à  Carouge. Lors de
l'exécution des travaux, des infiltrations d'eau sont survenues à deux
reprises, provoquant des dommages dans certains appartements.

A.b Le 23 décembre 2003, X.________ a ouvert action en dommages-intérêts
contre Y.________ SA, lui réclamant le paiement de 31'885 fr. 20  avec
intérêts à 5% dès le 20 novembre 2002. De son côté, Y.________ SA, dont la
facture pour les travaux effectués s'élevait encore à 31'413 fr. 70, a conclu
reconventionnellement à ce que X.________ soit condamné à lui verser le solde
contesté de 14'947 fr. 40 avec intérêts à 6% dès le 17 février 2003.

En cours de procédure, X.________ ayant reconnu devoir à Y.________ SA le
montant de 26'466 fr. 80, celle-ci a réduit ses conclusions à la part
contestée de sa créance, soit à 4'946 fr. 90 (31'413 fr. 70 - 26'466 fr. 80).

A.c Dans les considérants de son jugement du 19 mai 2005, le Tribunal de
première instance du canton de Genève a arrêté à 10'800 fr. la créance de
X.________ pour les dommages causés et à 26'991 fr. 60 celle de Y.________ SA
pour les travaux effectués. Constatant que X.________, dans ses dernières
écritures, ne reconnaissait plus que la somme de 22'480 fr. 73 pour les
travaux, le tribunal a retenu que seul un montant de 4'510 fr. 87, arrondi à
4'510 fr. 85, demeurait contesté par celui-ci (26'991 fr. 60 - 22'480 fr.
73). Dans le dispositif de son jugement, il a, sur demande principale,
condamné Y.________ SA à verser à X.________ 10'800 fr. avec intérêts à 5%
dès le 20 novembre 2002 et, sur demande reconventionnelle, condamné
X.________ à payer à Y.________ SA 4'510 fr. 85 avec intérêts à 5% dès le 17
février 2003.

B.
B.aEn se basant sur le dispositif de ce jugement, X.________ a fait notifier
à Y.________ SA un commandement de payer la somme de 10'800 fr., avec
intérêts et frais, sous déduction de 4'510 fr. 85 "versés au créancier le
17.02.2003" (poursuite n° xxxx). Cet acte a été frappé d'opposition.

B.b Par jugement du 7 juillet 2006, le Tribunal de première instance du
canton de Genève a rejeté la requête de mainlevée définitive formée par
X.________; il a admis en substance que la dette de Y.________ SA avait été
éteinte par compensation, la créance compensante - d'un montant de 26'466 fr.
80, ramené ultérieurement à 22'480 fr. 73 - ayant été suffisamment établie
par celle-ci (cf. art. 81 al. 1 LP), même si elle n'était mentionnée que dans
les considérants du jugement du 19 mai 2005.

Statuant le 28 septembre 2006 sur l'appel de X.________, la 1ère Section de
la Cour de justice du canton de Genève l'a rejeté.

C.
Contre cet arrêt, X.________ interjette un recours de droit public au
Tribunal fédéral. Il conclut, principalement, à son annulation, à ce que le
Tribunal fédéral prononce la mainlevée définitive de l'opposition formée par
Y.________ SA au commandement de payer (poursuite n° xxxx) notifié le 23
janvier 2006, à ce qu'il déboute Y.________ SA de ses conclusions contraires
et à ce qu'il la condamne aux frais de la procédure et aux dépens.
Subsidiairement, il conclut au renvoi de la cause à l'autorité cantonale afin
qu'elle statue dans le sens des considérants. Il invoque l'application
arbitraire (art. 9 Cst.) de l'art. 81 al. 1 LP.

Des observations n'ont pas été requises.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
L'arrêt attaqué ayant été rendu avant l'entrée en vigueur, le 1er janvier
2007 (RO 2006 1205, 1242), de la loi fédérale du 17 juin 2005 sur le Tribunal
fédéral (LTF; RS 173.110), l'ancienne loi d'organisation judiciaire (OJ) est
applicable à la présente cause (art. 132 al. 1 LTF).

2.
2.1 Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des
recours qui lui sont soumis (ATF 132 III 747 consid. 4 p. 748).

2.2 Interjeté en temps utile contre une décision qui refuse, en dernière
instance cantonale, la mainlevée définitive de l'opposition (ATF 120 Ia 256
consid. 1a p. 257; 98 Ia 527 consid. 1 p. 532), le présent recours de droit
public est recevable au regard des art. 86 al. 1, 87 (a contrario) et 89 al.
1 OJ. Le recours est également recevable du chef de l'art. 84 al. 1 let. a
OJ, en tant que le recourant invoque l'application arbitraire (art. 9 Cst.)
de l'art. 81 al. 1 LP. Enfin, le recourant, dont la requête de mainlevée
définitive a été rejetée, est personnellement touché par la décision attaquée
et a ainsi qualité pour recourir (art. 88 OJ).

2.3 En principe, vu sa nature cassatoire, le recours de droit public ne peut
tendre qu'à l'annulation de la décision attaquée (ATF 132 III 291 consid. 1.5
p. 294; 124 I 327 consid. 4a et b p. 332/333). Quand, saisi d'un recours de
droit public, le Tribunal fédéral annule une décision par laquelle la
mainlevée d'opposition a été accordée ou refusée, il ne peut donc pas, en
règle générale, se prononcer lui-même sur la mainlevée; il n'y a exception à
cette règle que lorsque le Tribunal fédéral n'examine pas la décision
attaquée uniquement sous l'angle de l'arbitraire et que la situation
juridique peut être considérée comme suffisamment claire (ATF 120 Ia 256
consid. 1b p. 257/258). Dès lors qu'en l'espèce le recourant invoque
exclusivement l'interdiction de l'arbitraire (art. 9 Cst.), son chef de
conclusions tendant au prononcé de la mainlevée définitive par le Tribunal
fédéral se révèle irrecevable. Quant aux chefs de conclusions visant à ce que
le Tribunal fédéral déboute l'intimée de ses conclusions contraires et à ce
qu'il la condamne aux frais de la procédure et aux dépens, ils sont également
irrecevables (cf. ATF 129 I 173 consid. 1.5 p. 176).

3.
D'après la jurisprudence, une décision est arbitraire lorsqu'elle est
manifestement insoutenable, méconnaît gravement une norme ou un principe
juridique clair et indiscuté, ou heurte de manière choquante le sentiment de
la justice et de l'équité (ATF 131 I 57 consid. 2 p. 61; 128 I 273 consid.
2.1 p. 275 et les arrêts cités); il ne suffit pas qu'une solution différente
apparaisse concevable, voire préférable (ATF 129 I 8 consid. 2.1 p. 9; 126
III 438 consid. 3 p. 440); pour que cette décision soit annulée, encore
faut-il qu'elle se révèle arbitraire, non seulement dans ses motifs, mais
aussi dans son résultat (ATF 132 III 209 consid. 2.1 p. 211; 132 I 13 consid.
5.1 p. 17; 131 I 217 consid. 2.1 p. 219).

En vertu de l'art. 90 al. 1 let. b OJ, l'acte de recours doit contenir, sous
peine d'irrecevabilité (cf. ATF 123 II 552 consid. 4d p. 558), un exposé
succinct des droits constitutionnels ou des principes juridiques violés,
précisant en quoi consiste la violation. Dans le cadre d'un recours de droit
public, le Tribunal fédéral n'examine que les griefs expressément soulevés,
et présentés de façon claire et détaillée, le principe iura novit curia étant
inapplicable (ATF 130 I 258 consid. 1.3 p. 261/262; 129 I 113 consid. 2.1 p.
120 et les arrêts cités). Le justiciable qui se plaint d'arbitraire (art. 9
Cst.) ne peut dès lors se contenter de critiquer la décision attaquée comme
il le ferait en instance d'appel, où la juridiction supérieure jouit d'une
libre cognition; en particulier, il ne saurait se limiter à opposer son
opinion à celle de l'autorité cantonale, mais doit démontrer par une
argumentation précise que cette décision se fonde sur une application de la
loi ou une appréciation des preuves manifestement insoutenables (ATF 129 I
113 consid. 2.1 p. 120; 128 I 295 consid. 7a p. 312; 125 I 492 consid. 1b p.
495 et les arrêts cités).

4.
4.1 La Cour de justice a retenu que le jugement du 19 mai 2005 -  produit par
le recourant comme titre de mainlevée définitive (cf. art. 80 al. 1 LP) -
comportait un dispositif clair distinguant les sommes que les parties étaient
condamnées à payer l'une à l'autre et que, dès lors, le premier juge n'a eu à
interpréter ce dispositif et à se référer aux motifs du jugement que dans le
cadre de l'objection de compensation soulevée par l'intimée pour faire échec
à la requête de mainlevée définitive (cf. art. 81 al. 1 LP). La cour
cantonale a constaté que, pour démontrer l'existence et la quotité de la
créance compensante, l'intimée s'était référée au considérant du jugement
précité mentionnant que le recourant a reconnu lui devoir la somme de  22'480
fr. 73 pour les travaux effectués. Elle a estimé que le premier juge n'a pas
violé la loi en admettant l'argumentation de l'intimée et en retenant que sa
dette avait été éteinte par compensation.

4.2 Le recourant relève tout d'abord que la situation confuse, qui résulte du
fait que certaines prétendues prétentions de l'intimée figurent dans les
considérants et non dans le dispositif du jugement du 19 mai 2005, est
imputable à l'intimée qui, probablement pour réaliser quelque économie sur le
montant de l'émolument de mise au rôle, a conclu reconventionnellement au
paiement de la seule partie de sa créance qu'elle estimait litigieuse,
considérant que le solde n'avait pas à faire l'objet d'une condamnation
puisque reconnu, à son avis, par le recourant; l'intimée ne saurait donc se
prévaloir aujourd'hui d'une confusion qu'elle a elle-même créée. Le recourant
reproche à la cour cantonale d'avoir appliqué arbitrairement l'art. 81 al. 1
LP en admettant le moyen libératoire de la compensation. Il constate  que la
créance opposée en compensation par l'intimée était exigible bien avant le
prononcé du jugement du 19 mai 2005 et que, partant, il ne tenait qu'à elle
de faire valoir la compensation dans le cadre de cette procédure. Ne l'ayant
pas fait, elle ne pouvait plus, selon le recourant, s'en prévaloir dans la
procédure de mainlevée qui a suivi. Le recourant estime en outre que l'arrêt
attaqué est arbitraire dans son résultat, puisqu'il le prive de la faculté de
faire exécuter le jugement du 19 mai 2005 dont le dispositif est clair. Il
soutient finalement qu'il n'existe pas de titre prouvant l'extinction de la
dette par compensation. Selon lui, si le dispositif du jugement du 19 mai
2005 condamne l'intimée au paiement de 10'800 fr. en sa faveur, et lui-même
au paiement de 4'510 fr. 85 en faveur de l'intimée, il ne fait en revanche
état d'aucune autre prétention. La Cour de justice devait donc s'en tenir
strictement au dispositif dudit jugement. Le recourant prétend que les
considérants du jugement ne consacrent pas non plus une reconnaissance
inconditionnelle de sa part du montant dû à l'intimée, puisqu'il est patent
que ce document n'est pas muni de sa signature. Pour le reste, s'il a admis,
au cours de la procédure, être débiteur d'un certain montant au titre des
travaux effectués par l'intimée, il n'en demeure pas moins qu'il a à chaque
fois aussitôt déclaré, dans le même document, se prévaloir de la compensation
en relation avec les montants que lui-même réclamait; on ne saurait dès lors
parler de reconnaissance inconditionnelle.

4.3 Le créancier qui est au bénéfice d'un jugement exécutoire peut requérir
du juge la mainlevée définitive de l'opposition (art. 80 al. 1 LP). Lorsque
la poursuite est fondée sur un tel jugement rendu par une autorité du canton
dans lequel la poursuite a lieu, le juge ordonne la mainlevée définitive de
l'opposition, à moins que l'opposant ne prouve par titre que la dette a été
éteinte ou qu'il a obtenu un sursis, postérieurement au jugement, ou qu'il ne
se prévale de la prescription (art. 81 al. 1 LP).

L'extinction de la dette peut notamment intervenir par compensation (ATF 124
III 501 consid. 3b p. 503). Toutefois, un tel moyen n'est opérant que si la
créance compensante découle elle-même d'un titre exécutoire ou qu'elle est
reconnue sans réserve par le poursuivant (ATF 115 III 97 consid. 4 p. 100 et
les références citées). Contrairement à ce qui vaut pour la mainlevée
provisoire (art. 82 al. 2 LP), le poursuivi ne peut se borner à rendre sa
libération vraisemblable; il doit, au contraire, en rapporter la preuve
stricte (ATF 125 III 42 consid. 2b p. 44; 124 III 501 consid. 3a p. 503 et
les références citées).

4.4 La question de savoir si la motivation de la cour cantonale - qui a admis
que l'intimée a prouvé, de manière suffisante, que sa dette a été éteinte par
compensation (cf. consid. 4.1) - constitue une application arbitraire de
l'art. 81 al. 1 LP peut demeurer ouverte en l'espèce, le recourant ne
démontrant pas, conformément aux exigences posées par l'art. 90 al. 1 let. b
OJ, que l'arrêt attaqué serait arbitraire dans son résultat (cf. consid. 3).

En effet, s'il déclare vouloir s'en tenir strictement au dispositif du
jugement du 19 mai 2005 et réclamer la mainlevée définitive à concurrence de
10'800 fr. (avec intérêts et frais), sous déduction de 4'510 fr. 85 (avec
intérêts), reprochant à l'intimée d'avoir créé la confusion et de n'avoir pas
sollicité l'interprétation du dispositif litigieux, le recourant n'en admet
pas moins, dans son recours de droit public, qu'il a tout d'abord reconnu
devoir à l'intimée le montant de 26'466 fr. 80 pour les travaux effectués
(recours de droit public, p. 4, ch. 4) et, après enquêtes, le montant précis
de 22'480 fr. 73 (p. 5, ch. 6). Par là, il admet donc le calcul effectué par
le juge du fond (cf. consid. A.c), qui a retenu que l'intimée avait une
créance pour les travaux s'élevant encore à 26'991 fr. 60, que le recourant
reconnaissait 22'480 fr. 73 (non acquittés) de ce montant et que, dès lors,
il devait être condamné à payer à l'intimée le solde contesté de 4'510 fr.
87, arrondi à 4'510 fr. 85. Le recourant ne démontre pas en quoi le résultat
de l'arrêt attaqué, qui lui refuse la mainlevée définitive, serait
arbitraire, puisqu'en définitive c'est bien lui qui reste le débiteur de
l'intimée pour la différence entre le solde dû pour les travaux effectués
(26'991 fr. 60 avec intérêts) et le montant dû par l'intimée pour les
dommages causés (10'800 fr. avec intérêts). Il admet même précisément le
contraire.

5.
En conclusion, le présent recours doit être déclaré irrecevable, aux frais de
son auteur (art. 156 al. 1 OJ). Il n'y a pas lieu d'allouer de dépens à
l'intimée, qui n'a pas été invitée à répondre.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est irrecevable.

2.
Un émolument judiciaire de 2'500 fr. est mis à la charge du recourant.

3.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des  parties et à la
1ère Section de la Cour de justice du canton de Genève.

Lausanne, le 5 mars 2007

Au nom de la IIe Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse

La Juge présidant:  La greffière: