Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

II. Zivilabteilung 5P.463/2006
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5P.463/2006 /frs

Arrêt du 31 mai 2007
IIe Cour de droit civil

MM. et Mme les Juges Raselli, Président,
Hohl et Marazzi.
Greffière: Mme Borgeat.

X. ________, (époux),
recourant, représenté par Me Pierre Mathyer, avocat,

contre

dame X.________, (épouse),
intimée, représentée par Me Alexandre Reil, avocat,
Chambre des recours du Tribunal cantonal du canton de Vaud, Palais de justice
de l'Hermitage, route du Signal 8, 1014 Lausanne.

art. 9 et 29 al. 2 Cst. (divorce),

recours de droit public [OJ] contre l'arrêt de la Chambre
des recours du Tribunal cantonal du canton de Vaud
du 3 octobre 2006.

Faits :

A.
X. ________, né le 24 mai 1949, et dame X.________, née le 23 mai 1950, se
sont mariés le 18 août 1978 à Aubonne, sans conclure de contrat de mariage.
Ils ont eu un enfant, A.________, né en 1978.

B.
B.aLe 6 septembre 2000, l'épouse a ouvert action en divorce par une requête
de conciliation adressée au Juge de paix du cercle d'Ecublens.

Par jugement du 13 juin 2005, le Tribunal d'arrondissement de la Côte  a,
notamment, prononcé le divorce des parties (I); ratifié leur convention
relative au partage (par moitié) de la prévoyance professionnelle et ordonné
à l'institution de prévoyance du mari de transférer la somme de 59'000 fr.
sur le compte de prévoyance professionnelle de l'épouse (II et VIII); fixé la
contribution d'entretien due à l'épouse à 3'700 fr. par mois jusqu'à ce que
celle-ci bénéficie des primes (sic) AVS, et à 2'000 fr. par mois ensuite
(III), avec indexation à l'indice suisse des prix à la consommation (IV);
attribué l'immeuble de Romanel-sur-Morges (maison familiale) au mari, fixé la
part due à l'épouse - à titre de liquidation du régime matrimonial - à
821'523 fr. et constaté que le régime matrimonial était ainsi liquidé (V, VI
et VII); enfin, fixé les dépens dus par le mari à l'épouse à 8'200 fr. (X).

B.b Statuant le 3 octobre 2006 sur recours de l'époux et recours joint de
l'épouse, la Chambre des recours du Tribunal cantonal du canton de Vaud a
partiellement admis les recours et a réformé le jugement attaqué sur deux
points (ch. III et X). Elle a fixé la contribution d'entretien due à l'épouse
à 2'700 fr. par mois jusqu'à ce que celle-ci bénéficie de la rente AVS, et à
1'000 fr. par mois ensuite. Elle a en outre augmenté le montant des dépens de
première instance dus par le mari à 22'500 fr.

C.
Parallèlement à un recours en réforme (5C.279/2006), l'époux exerce un
recours de droit public contre cet arrêt, concluant à son annulation. Il
invoque notamment la violation des art. 9 et 29 al. 2 Cst.

Des observations n'ont pas été requises.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
L'arrêt attaqué ayant été rendu avant l'entrée en vigueur, le 1er janvier
2007 (RO 2006 1205, 1242), de la loi fédérale du 17 juin 2005 sur le Tribunal
fédéral (LTF; RS 173.110), l'ancienne loi d'organisation judiciaire (OJ) est
applicable à la présente cause (art. 132 al. 1 LTF).

2.
Aux termes de l'art. 57 al. 5 OJ, il est sursis en règle générale à l'arrêt
sur le recours en réforme jusqu'à droit connu sur le recours de droit public.
Cette disposition souffre toutefois des exceptions dans des situations
particulières, qui justifient l'examen préalable du recours en réforme (ATF
123 III 213 consid. 1 p. 215; 122 I 81 consid. 1 p. 82/83; 120 Ia 377 consid.
1 p. 378/379 et les arrêts cités). Il se peut également que le Tribunal
fédéral soit amené à examiner les deux recours en parallèle (ATF 117 II 630
consid. 1b p. 631; 111 II 398 consid. 1 p. 398/399).

Dans son recours de droit public, le recourant soutient que l'autorité
cantonale a violé le principe de l'interdiction de l'arbitraire en retenant
qu'il a requis l'attribution de la propriété de l'immeuble de
Romanel-sur-Morges, conformément à l'art. 205 al. 2 CC. Ce grief présuppose
que l'on ait admis que l'immeuble appartient en copropriété aux époux, ce
qu'il s'agit de déterminer en premier lieu en examinant la validité de la
cession de la part de copropriété du mari à l'épouse (acte de donation du 10
novembre 1995), question soulevée dans le recours en réforme. Dans ces
circonstances, un examen simultané des deux recours s'impose.

3.
3.1 Déposé en temps utile contre une décision en matière d'effets accessoires
du divorce, prise en dernière instance cantonale, pour violation notamment
des art. 9 et 29 al. 2 Cst., le présent recours de droit public est recevable
du chef des art. 84 al. 1 let. a, 86 al. 1, 87 (a contrario) et 89 al. 1 OJ.

3.2 En vertu de l'art. 90 al. 1 let. b OJ, l'acte de recours doit contenir,
sous peine d'irrecevabilité (cf. ATF 123 II 552 consid. 4d p. 558), un exposé
succinct des droits constitutionnels ou des principes juridiques violés,
précisant en quoi consiste la violation. Dans le cadre d'un recours de droit
public, le Tribunal fédéral n'examine que les griefs expressément soulevés,
et présentés de façon claire et détaillée, le principe iura novit curia étant
inapplicable (ATF 130 I 258 consid. 1.3 p. 261/262; 129 I 113 consid. 2.1 p.
120 et les arrêts cités). Le justiciable qui se plaint d'arbitraire (art. 9
Cst.) ne peut dès lors se contenter de critiquer la décision attaquée comme
il le ferait en instance d'appel, où la juridiction supérieure jouit d'une
libre cognition; en particulier, il ne saurait se limiter à opposer son
opinion à celle de l'autorité cantonale, mais doit démontrer par une
argumentation précise que cette décision se fonde sur une application de la
loi ou une appréciation des preuves manifestement insoutenables (ATF 129 I
113 consid. 2.1 p. 120; 128 I 295 consid. 7a p. 312; 125 I 492 consid. 1b p.
495 et les arrêts cités). Le Tribunal fédéral n'entre pas en matière sur les
critiques de nature appellatoire (ATF 130 I 258 consid. 1.3 p. 261/262; 125 I
492 consid. 1b p. 495).

4.
Dans un premier grief, le recourant reproche à la cour cantonale d'avoir
versé dans l'arbitraire, et donc violé l'art. 9 Cst., en ignorant les pièces
165 et 1004 à 1013 qu'il a produites au dossier, lesquelles attestent de la
valeur au 31 décembre 2002, respectivement au 30 juin 2003, des sociétés dans
lesquelles il détient ou détenait des participations; il estime que ces dates
sont déterminantes pour calculer la valeur des sociétés, et non celle du 1er
septembre 2000 retenue par le notaire commis à la liquidation du régime
matrimonial, auquel se sont ralliés tant les premiers juges que l'autorité
cantonale; les pièces produites par le recourant font état de valeurs
sensiblement plus basses. Le recourant reproche également à la cour
cantonale, pêle-mêle, d'avoir violé l'art. 211 CC, l'art. 29 al. 2 Cst. -
plus particulièrement son droit de faire administrer des preuves -, l'art. 8
CC et d'avoir retenu, sans la moindre preuve et en violation de l'art. 9
Cst., qu'il aurait admis les valeurs arrêtées par le notaire.

Il convient d'écarter d'emblée le grief de violation de l'art. 211 CC, qui
est irrecevable dans le recours de droit public (art. 84 al. 2 OJ et art. 43
al. 1 OJ).

4.1 La cour cantonale a admis la date du 1er septembre 2000 en se basant sur
trois motifs.

4.1.1 Tout d'abord, elle a relevé que les premiers juges ont retenu le 1er
septembre 2000, les valeurs à cette date ayant été acceptées implicitement
par les parties, puisque le recourant, après avoir demandé à l'expert de
tenir compte des plus-values ou moins-values conjoncturelles, ne lui avait
cependant fourni ni explications ni justificatifs à ce sujet; dans son
rapport, l'expert a d'ailleurs relevé qu'à la lecture des comptes, il avait
plutôt l'impression que l'évolution était favorable. L'autorité cantonale a
estimé que ces considérations étaient convaincantes.

4.1.2 Ensuite, elle a considéré que la prise en compte de cette date était
conforme à la jurisprudence appliquée dans le canton de Vaud lorsqu'un
notaire est chargé de liquider le régime matrimonial des parties.

4.1.3 Enfin, elle a constaté que l'expert avait relevé qu'en cas de désaccord
entre les parties à propos des chiffres présentés, il faudrait recourir à une
expertise comptable. Or, les chiffres invoqués par l'époux dans son recours
cantonal ayant été contestés par l'épouse par voie de jonction, on ne saurait
les considérer comme établis. Les parties ont en outre convenu, les 20 et 25
juin 2004, de ne pas s'autoriser à requérir un nouveau rapport d'expertise ou
un complément audit rapport, convention de procédure ratifiée par le juge
instructeur le 5 juillet 2004.

4.2
4.2.1 Dans les contestations civiles, le droit à la preuve découle directement
de l'art. 8 CC (ATF 129 III 18 consid. 2.6 p. 24/25; 126 III 315 consid. 4a
p. 317; 114 II 289 consid. 2a p. 290 et les arrêts cités). Le grief de
violation du droit à la preuve peut ainsi être soulevé par la voie du recours
en réforme (art. 43 al. 1 OJ) lorsque, comme en l'espèce, celui-ci est
ouvert; il ne saurait par conséquent l'être dans un recours de droit public
(art. 84 al. 2 OJ). En revanche, lorsque le juge renonce à administrer une
preuve sur la base d'une appréciation anticipée des preuves, c'est bien la
voie du recours de droit public qui est ouverte pour se plaindre du caractère
arbitraire d'une telle appréciation (art. 9 Cst.; ATF 131 I 153 consid. 3 p.
157 et les arrêts cités; 114 II 289 consid. 2a p. 291 et les arrêts cités).

4.2.2 En l'espèce, c'est en réalité parce qu'elle a admis que la date
déterminante était le 1er septembre 2000 (cf. supra, consid. 4.1) que la cour
cantonale n'a pas pris en considération les pièces invoquées par le
recourant, fondées sur d'autres dates. Ainsi, si la date du 1er septembre
2000 doit être retenue, on ne voit pas en quoi il serait arbitraire d'ignorer
des pièces relatives à une période ultérieure. Dans la mesure où il est tiré
de l'art. 29 al. 2 Cst., le grief est irrecevable.

4.3 La cour cantonale a admis que les valeurs soient arrêtées au 1er
septembre 2000 en se fondant sur plusieurs motivations indépendantes.
Lorsque, comme en l'espèce, chacune de ces motivations est suffisante pour
justifier l'arrêt attaqué, il incombe au recourant d'attaquer chacune d'elles
par le moyen de droit approprié, l'arrêt attaqué ne pouvant être annulé que
si aucune ne résiste à l'examen (ATF 132 I 13 consid. 3 p. 16/17; 121 IV 94
consid. 1b p. 95; 119 Ia 13 consid. 2 p. 16; 115 II 300 consid. 2a p. 302;
111 II 398 consid. 2b p. 399).

Or, la question de la compatibilité de la jurisprudence vaudoise (cf. supra,
consid. 4.1.1) avec la jurisprudence du Tribunal fédéral - concernant le
moment déterminant pour estimer la valeur des acquêts dans la liquidation du
régime matrimonial (cf. art. 214 al. 1 CC) - relève du droit fédéral et donc
du recours en réforme (art. 43 al. 1 OJ).
La question de l'acceptation implicite par les parties des valeurs arrêtées
au 1er septembre 2000 (cf. supra, consid. 4.1.2) et celle de la déduction
tirée de leur renonciation à requérir un nouveau rapport d'expertise ou un
complément à ce rapport (cf. supra, consid. 4.1.3) relèvent quant à elles du
fait et doivent donc être examinées dans le présent recours de droit public.

A ce sujet, le recourant se limite à soutenir qu'il n'existe pas la moindre
preuve qu'il aurait admis, fût-ce implicitement, les valeurs arrêtées par le
notaire et que l'on ne peut en tout cas pas le déduire de sa renonciation à
son droit de requérir un complément d'expertise ou une seconde expertise, ou
du fait qu'il n'a fourni les justificatifs des plus-values et des
moins-values conjoncturelles, non pas au notaire, mais plus tard à l'autorité
de jugement. Il ajoute qu'il n'est pas acceptable d'ignorer les pièces qu'il
a produites au motif que les chiffres qui y sont présentés sont contestés par
l'intimée. Par là, le recourant ne fait qu'opposer sa propre appréciation à
celle de l'autorité cantonale, sans démontrer en quoi l'appréciation de
celle-ci serait insoutenable. Faute de motivation conforme aux exigences de
l'art. 90 al. 1 let. b OJ (cf. supra, consid. 3.2), sa critique est
irrecevable.

5.
Le recourant reproche également à la cour cantonale d'avoir confirmé le fait
qu'il détenait le 51% du capital-actions de Y.________ SA, par
l'intermédiaire de Z.________ SA; un acquêt de 87'500 fr. lui aurait ainsi
été attribué à tort et de manière arbitraire.
Le recourant ne soutient pas qu'il aurait invoqué ce grief dans son recours
cantonal, de sorte que celui-ci doit être considéré comme nouveau et,
partant, irrecevable au regard de l'art. 86 al. 1 OJ (cf. ATF 126 I 257
consid. 1a p. 258). D'ailleurs, l'arrêt attaqué ne contient aucune motivation
sur ce point et le recourant n'a pas soulevé le grief idoine de défaut de
motivation de l'arrêt cantonal (cf. art. 29 al. 2 Cst.).

6.
Le recourant soutient finalement que les juges cantonaux ont arbitrairement
retenu qu'il avait requis - conformément à l'art. 205 al. 2 CC -
l'attribution de la propriété de l'immeuble de Romanel-sur-Morges.

La cour cantonale a constaté que l'époux a conclu, en deuxième instance, à ce
que la répartition "nue-propriété en faveur de l'épouse et usufruit en sa
faveur" soit maintenue. Elle a considéré que cette solution ne pouvait être
suivie car l'immeuble appartenait toujours en copropriété aux parties -
l'acte de donation du 10 novembre 1995 étant simulé - et que le recourant
commettait en outre un abus de droit, au sens de l'art. 2 al. 2 CC, en se
prévalant de cette convention nettement défavorable à l'épouse en cas de
séparation des parties. Elle a toutefois estimé qu'elle ne pouvait pas,
d'office et en l'absence de conclusion du recourant tendant à la vente aux
enchères de la villa - solution qui avait été envisagée par l'expert -,
ordonner cette mesure. Elle a constaté que le recourant vit dans la villa
avec son amie depuis la séparation des parties, qu'il en assume les charges
et qu'il n'a pas déclaré qu'il entendait la quitter en cas de désaccord sur
son attribution. Il n'a envisagé, dans ses conclusions de première instance,
que le maintien du statu quo (nue-propriété en faveur de l'épouse et usufruit
en sa faveur) et la cession en sa faveur de la nue-propriété contre la
reprise de la dette hypothécaire, sans requérir la vente en cas de désaccord.
La cour cantonale a donc estimé qu'il y avait lieu de considérer que les
conclusions du demandeur valaient requête d'attribution au sens de l'art. 205
al. 2 CC.

La cour cantonale a ainsi interprété la volonté du recourant sur la base des
circonstances de fait, de la position subsidiaire qu'il avait adoptée en
première instance et du fait qu'il n'a jamais voulu quitter la villa. Elle a
ainsi déterminé sa volonté subjective (cf. ATF 125 III 305 consid. 2b p.
308). Lorsque le recourant soutient que cette interprétation est totalement
arbitraire parce qu'elle ne ressort pas de ses conclusions formelles prises
en deuxième instance cantonale - soit de son chef de conclusions tendant au
maintien du statu quo (nue-propriété en faveur de l'épouse et usufruit en sa
faveur) -, il ne s'en prend pas à la motivation de l'arrêt attaqué, ni ne
démontre en quoi la déduction de l'autorité cantonale serait arbitraire. Pour
autant qu'il soit recevable (cf. art. 90 al. 1 let. b OJ; supra, consid.
3.2), son grief est infondé.

7.
En conclusion, le présent recours doit être rejeté dans la faible mesure de
sa recevabilité, aux frais de son auteur (art. 156 al. 1 OJ). Il n'y a pas
lieu d'allouer de dépens à l'intimée, qui n'a pas été invitée à répondre.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
Un émolument judiciaire de 3'000 fr. est mis à la charge du recourant.

3.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties et à la
Chambre des recours du Tribunal cantonal du canton de Vaud.

Lausanne, le 31 mai 2007

Au nom de la IIe Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse

Le président:  La greffière: