Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

II. Zivilabteilung 5P.360/2006
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{T 0/2}
5P.360/2006 /frs

Arrêt du 17 novembre 2006
IIe Cour civile

MM. et Mme les Juges Raselli, Président,
Hohl et Marazzi.
Greffière: Mme Mairot.

dame X.________,
recourante, représentée par Me Alain Thévenaz, avocat,

contre

Tribunal administratif du canton de Genève,
case postale 1956, 1211 Genève 1.

avance d'aliments (art. 293 al. 2 CC),

recours de droit public contre l'arrêt du Tribunal administratif du canton de
Genève du 26 juillet 2006.

Faits:

A.
Par prononcé de mesures protectrices de l'union conjugale du 28 mai 2003, le
Président du Tribunal civil de l'arrondissement de la Côte a, notamment,
autorisé les époux X.________ à vivre séparés jusqu'au 31 décembre 2004, ce
dernier devant contribuer à l'entretien des siens - soit son épouse et sa
fille - par le versement d'une contribution d'entretien de 600 fr. par mois,
allocations familiales comprises.

Aux termes d'une convention ratifiée par le juge le 2 juillet 2004 pour
valoir ordonnance de mesures protectrices de l'union conjugale, les époux
sont convenus de continuer à vivre séparés jusqu'au 30 juin 2005 et de
confirmer le prononcé du 28 mai 2003 en ce qui concerne la contribution
d'entretien.

Le 24 septembre 2004, l'épouse a introduit action en divorce devant le même
tribunal. L'audience de mesures provisionnelles du 22 mars 2005 n'a pas porté
sur la question de l'entretien.

B.
Par requête du 1er mars 2006, l'épouse a sollicité l'intervention du Service
cantonal d'avance et de recouvrement des pensions alimentaires du canton de
Genève (ci-après: SCARPA) pour les mois de février et mars 2006.

Le SCARPA a rejeté la requête le 10 avril 2006, pour le motif que le jugement
de mesures protectrices du 28 mai 2003 avait été prononcé pour une durée
déterminée et ne produisait plus d'effets.

Par arrêt du 26 juillet 2006, le Tribunal administratif du canton de Genève a
rejeté le recours formé par l'épouse contre cette décision.

C.
Agissant par la voie du recours de droit public pour arbitraire, dame
X.________ demande au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt du 26 juillet 2006.
Elle soutient que des mesures protectrices de l'union conjugale prises avant
l'ouverture du procès en divorce restent en vigueur tant qu'elles n'ont pas
été supprimées ou modifiées par des mesures provisionnelles, ce qui serait le
cas ici.
Elle sollicite en outre le bénéfice de l'assistance judiciaire.
L'autorité cantonale n'a pas formulé d'observations et a persisté dans les
considérants et le dispositif de son arrêt.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Formé en temps utile - compte tenu de la suspension des délais prévue par
l'art. 34 al. 1 let. b OJ - contre une décision prise en dernière instance
cantonale, le recours est recevable au regard des art. 86 al. 1 et 89 al. 1
OJ.

2.
La recourante reproche au Tribunal administratif d'avoir arbitrairement
estimé que son droit à une contribution d'entretien était devenu caduc le 30
juin 2005, soit à l'échéance des mesures protectrices de l'union conjugale.
Comme cette contribution n'a été ni modifiée, ni supprimée lors de l'audience
de mesures provisionnelles du 22 mars 2005, elle demeurait selon elle en
vigueur pendant le procès en divorce. La recourante en déduit qu'elle était
ainsi au bénéfice d'une décision exécutoire, au sens de l'art. 3 du règlement
d'application de la loi genevoise sur l'avance et le recouvrement des
pensions alimentaires (E 1 25.01). Par conséquent, cette disposition aurait
été interprétée de manière insoutenable par l'autorité cantonale.

2.1 Il est exact que les mesures protectrices de l'union conjugale prises
avant l'ouverture de l'action en divorce restent en vigueur aussi longtemps
qu'elles n'ont pas été modifiées ou supprimées par des mesures provisoires
selon l'art. 137 al. 2 CC (ATF 101 II 1 p. 2/3; 129 III 60 consid. 2 p. 61).
Il n'en demeure pas moins que les mesures protectrices ordonnées pour une
durée limitée cessent de produire leurs effets à l'expiration du délai fixé
(cf. ATF 120 III 67 consid. 2a p. 69; Hasenböhler/Opel, Commentaire bâlois,
3e éd., n. 7 ad art. 179 CC; Hausheer/Reusser/Geiser, Commentaire bernois, n.
6a ad art. 179 aCC; idem, Kommentar zum Eherecht, n. 5 ad art. 179 aCC; Bräm,
Commentaire zürichois, n. 39 ad art. 179 aCC; Lemp, Commentaire bernois, n. 4
ad art. 172 aCC; Stettler/Germani, Droit civil III, Effets généraux du
mariage, 2e éd., ch. 412 p. 265; Piquerez, La procédure des mesures
protectrices de l'union conjugale selon les art. 172ss CC, in RJJ 1993 p.
127; Deschenaux/Steinauer, Le nouveau droit matrimonial, Berne 1987, p. 153),
et ce même si les conjoints n'ont pas repris la vie commune (Petitpierre/de
Montmollin/Guinand/Hausheer, FJS n° 106 p. 4 let. d); dans ce cas, et si les
conditions légales sont encore remplies, il appartient aux époux de requérir
de nouvelles mesures ou la prorogation des anciennes (Schwander, Commentaire
bâlois, 3e éd., n. 9 ad art. 175 CC; Bachmann, Die Regelung des
Getrenntlebens nach Art. 176 und 179 ZGB sowie nach zürcherischem
Verfahrensrecht, thèse Zürich 1995, p. 52/53). Il s'ensuit, d'une part, que
les mesures protectrices ne subsistent après l'ouverture de l'action en
divorce que si leur durée n'était pas échue à ce moment-là (Bühler/Spühler,
Commentaire bernois, n. 30 ad art. 145 aCC) et, d'autre part, que
l'ordonnance de mesures protectrices de durée limitée qui n'a pas été
prolongée par le juge après son expiration ne vaut plus titre juridique
exécutoire, en particulier pour les contributions d'entretien (Hausheer/
Reusser/Geiser, Kommentar zum Eherecht, n. 18 ad art. 175 CC).

2.2 En l'occurrence, il est constant qu'après le 30 juin 2005, les époux
n'ont pas repris la vie commune et que les mesures protectrices de l'union
conjugale ordonnées jusqu'à cette date, soit pour une durée déterminée, n'ont
pas été reprises ou modifiées dans la procédure en divorce introduite par la
recourante. Vu les principes exposés ci-dessus, le Tribunal administratif n'a
donc pas fait preuve d'arbitraire en considérant que ces mesures étaient
devenues automatiquement caduques à l'échéance du délai fixé, de sorte que,
contrairement à l'art. 3 du règlement cantonal précité, l'épouse ne pouvait
se fonder sur aucune décision exécutoire concernant les mois de février et
mars 2006. Certains auteurs considèrent certes que les mesures relatives aux
enfants restent en vigueur, nonobstant leur durée limitée, tant que la
séparation du couple subsiste dans les faits (Hausheer/Reusser/Geiser,
Commentaire bernois, n. 6a ad art. 179 aCC; Stettler/Germani, op. cit., loc.
cit.; Graf, Der Eheschutz nach Art. 169-172 ZGB, thèse Bâle 1978, p. 80;
contra: Bräm, Commentaire zürichois, n. 40 ad art. 179 aCC). Indépendamment
de savoir si et dans quelle mesure la disposition prévoyant le versement par
le mari d'une contribution à l'entretien des siens entre dans cette catégorie
de mesures, il n'y a pas lieu de se prononcer à ce sujet. Le Tribunal
administratif, qui s'est conformé à la règle générale, ne saurait en effet se
voir reprocher d'être tombé dans l'arbitraire du seul fait qu'une autre
solution serait concevable, voire préférable (ATF 132 I 13 consid. 5.1 p. 17;
132 III 209 consid. 2.1 p. 211; 131 I 57 consid. 2 p. 61).

3.
En conclusion, le recours se révèle manifestement mal fondé et doit dès lors
être rejeté. Les ressources de la recourante sont faibles, mais ses
conclusions étaient d'emblée vouées à l'échec. Sa demande d'assistance
judiciaire ne peut donc être agréée (art. 152 al. 1 OJ). Toutefois, compte
tenu des données particulières de l'espèce, il convient de renoncer à
percevoir un émolument judiciaire, en dérogation à la règle générale de
l'art. 156 al. 1 OJ. Par ailleurs, il n'y a pas lieu d'allouer des dépens.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
La requête d'assistance judiciaire est rejetée.

3.
Il n'est pas perçu d'émolument judiciaire.

4.
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire de la recourante et au
Tribunal administratif du canton de Genève.

Lausanne, le 17 novembre 2006

Au nom de la IIe Cour civile
du Tribunal fédéral suisse

Le président:  La greffière: