Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

II. Zivilabteilung 5P.343/2006
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{T 0/2}
5P.343/2006 /frs

Arrêt du 13 novembre 2006
IIe Cour civile

M. et Mmes les Juges Raselli, Président,
Nordmann et Hohl.
Greffière: Mme Mairot.

X. ________,
recourant,

contre

Y.________,
intimée,
Autorité de surveillance des tutelles du canton de Genève, case postale 3108,
1211 Genève 3.

art. 9, 8 al. 3 et 29 Cst. (curatelle selon l'art. 308 al. 2 CC),

recours de droit public contre la décision de l'Autorité de surveillance des
tutelles du canton de Genève du 14 juin 2006.

Faits:

A.
Par jugement du 11 mars 2003, confirmé pour l'essentiel le 30 mars 2004 par
la Cour d'appel de Lyon, le Tribunal de Grande Instance de St-Etienne a
prononcé le divorce de X.________ et de Y.________. Le droit de garde et
l'autorité parentale sur leur fils Z.________, né le 24 février 1998, ont été
attribués à la mère. Le père s'est vu réserver un droit de visite à raison
d'un week-end sur deux, du vendredi à 19h00 jusqu'au dimanche à 19h00, ainsi
que durant la moitié des vacances scolaires.

Dans son arrêt du 30 mars 2004, la Cour d'appel de Lyon a relevé le conflit
aigu qui existait entre les parties, notamment au sujet de leur enfant auquel
chacune était profondément attachée. Six expertises judiciaires avaient ainsi
été versées aux débats. Parallèlement, des procédures pénales les avaient
opposées.

Dès mars 2004, la mère s'est établie à Genève avec l'enfant, tandis que le
père restait domicilié en France.

B.
Le 20 janvier 2005, Y.________ a saisi le Tribunal tutélaire de Genève d'une
requête tendant à la suspension du droit de visite.

Selon un premier rapport du Service de protection de la jeunesse (SPJ) du 7
mars 2005, l'éducateur en charge du dossier avait rencontré chacun des
parents, mais le père avait refusé de s'exprimer jusqu'à ce que le Tribunal
tutélaire se prononce sur sa compétence, qu'il contestait. La multiplication
des procédures judiciaires entre les parties et leurs dissensions avaient des
répercussions néfastes sur l'enfant, qui se trouvait déstabilisé et dont les
résultats scolaires se détérioraient. Un appui pédagogique semblait opportun,
de même qu'une curatelle d'assistance éducative et de surveillance des
relations personnelles.

Le Tribunal tutélaire a, dans un premier temps, suspendu la cause jusqu'à
droit connu sur l'action en modification du jugement de divorce pendante
devant le Tribunal de Grande Instance de Privas. Le 30 mai 2005, cette
juridiction a débouté le père de ses conclusions visant à obtenir l'autorité
parentale ainsi que le droit de garde sur l'enfant.
La procédure tutélaire a dès lors été reprise. Dans un second rapport, du 4
octobre 2005, le SPJ a indiqué au Tribunal tutélaire que le droit de visite
se déroulait désormais normalement et que les relations entre le père et le
fils semblaient bonnes. La remise de l'enfant lors de l'exercice du droit de
visite constituait néanmoins un moment pénible en raison des tensions qui
persistaient entre les parents. Le préavis en faveur d'une curatelle de
surveillance des relations personnelles restait donc valable.

Par ordonnance du 5 décembre 2005, le Tribunal tutélaire a, entre autres
points, estimé qu'une curatelle d'organisation et de surveillance des
relations personnelles était nécessaire vu les conflits subsistant entre les
parties.

Après avoir entendu celles-ci en comparution personnelle le 2 juin 2006,
l'Autorité de surveillance des tutelles du canton de Genève a, par décision
du 14 juin suivant, rejeté le recours déposé par le père contre cette
ordonnance, qu'elle a par conséquent confirmée.

C.
Parallèlement à un recours en réforme, X.________ interjette un recours de
droit public au Tribunal fédéral contre la décision du 14 juin 2006, dont il
demande l'annulation. Il sollicite en outre le bénéfice de l'assistance
judiciaire. Des observations n'ont pas été requises.

D.
La requête d'effet suspensif présentée par le recourant a été considérée
comme dépourvue d'objet, vu le dépôt d'un recours en réforme connexe
suspendant de plein droit l'exécution de la décision attaquée (art. 54 al. 2
OJ).

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Conformément à la règle de l'art. 57 al. 5 OJ, il convient de traiter le
recours de droit public en premier lieu.

2.
Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recours
qui lui sont soumis (ATF 132 III 291 consid. 1 p. 292; 131 III 667 consid. 1
p. 688 et les arrêts cités).

2.1 Le présent recours est recevable au regard de l'art. 86 al. 1 OJ, mais
seulement en tant qu'il vise le prononcé de l'autorité de dernière instance.
Vu la nature cassatoire du recours de droit public (ATF 132 III 291 consid.
1.5 p. 294), le chef de conclusions tendant à l'obtention de dédommagements
est irrecevable. Le recours a par ailleurs été déposé en temps utile (art. 89
al. 1 OJ).

2.2 En vertu de l'art. 90 al. 1 let. b OJ, l'acte de recours doit, à peine
d'irrecevabilité, contenir un exposé succinct des droits constitutionnels ou
des principes juridiques violés et préciser en quoi consiste la violation.
Saisi d'un recours de droit public, le Tribunal fédéral n'a donc pas à
vérifier de lui-même si l'arrêt attaqué est en tous points conforme au droit
et à l'équité. Il n'examine que les griefs d'ordre constitutionnel invoqués
et suffisamment motivés dans l'acte de recours. Le recourant ne saurait se
contenter de soulever de vagues griefs ou de renvoyer aux actes cantonaux
(ATF 130 I 26 consid. 2.1 p. 31; 129 I 113 consid. 2.1 p. 120, 185 consid.
1.6 p. 189; 125 I 71 consid. 1c p. 76). Le Tribunal fédéral n'entre pas non
plus en matière sur les critiques de nature appellatoire (ATF 125 I 492
consid. 1b p. 495).

3.
3.1 Le recourant se plaint de violations de l'art. 29 Cst. Il expose que
l'éducateur du SPJ a refusé de l'entendre, se contentant d'avaliser les
déclarations de l'intimée sans daigner écouter la voix de l'enfant, et
soutient que la comparution personnelle des parties n'a rien réparé. Il
reproche en outre à l'autorité cantonale de n'avoir pas statué sur
l'intégralité de ses exceptions et conclusions.

3.2 Après avoir rappelé qu'elle revoyait la décision attaquée avec un plein
pouvoir d'examen, l'Autorité de surveillance des tutelles a considéré que les
parties ayant personnellement comparu devant elle, les conséquences d'une
éventuelle violation de l'art. 368B al. 3 LPC/GE ou du droit d'être entendu
de l'intéressé découlant de l'art. 29 al. 2 Cst. avaient été réparées. A bon
droit (cf. ATF 126 I 68 consid. 2 p. 72; 118 Ib 111 consid. 4b p. 120 s.). Le
recourant le conteste, sans toutefois démontrer aucune violation (art. 90 al.
1 let. b OJ). L'autorité cantonale ne s'est d'ailleurs pas uniquement fondée
sur les rapports du SPJ pour prendre sa décision, mais également sur le
résultat de la comparution personnelle des parties; or le recourant ne se
plaint pas d'une appréciation arbitraire des preuves sur ce point. Au
demeurant, la décision attaquée retient que c'est le recourant lui-même qui a
refusé de s'exprimer devant l'éducateur.
Le recourant se plaint aussi de ce que le SPJ n'a pas daigné entendre
l'enfant, ce qui constituerait une violation de l'art. 29 al. 2 Cst. Ce moyen
revient cependant à critiquer l'interprétation et l'application faite par
l'autorité cantonale du droit fédéral pertinent, à savoir l'art. 314 al. 1
CC. Or cette question ressortit au recours en réforme (art. 43 al. 1 OJ)
lorsque, comme en l'espèce, celui-ci est ouvert (art. 44 let. d OJ). Il en va
de même de la violation, également soulevée par le recourant, de la
Convention des Nations Unies relative aux droits de l'enfant (CDE; RS 0.107).
Ces critiques sont par conséquent irrecevables dans le recours de droit
public (art. 84 al. 2 OJ).

Enfin, le recourant reproche à l'autorité cantonale d'avoir omis de statuer
sur l'intégralité des exceptions et conclusions présentées par lui, sans
toutefois mentionner lesquelles. Dès lors, ce grief n'apparaît pas
suffisamment motivé (art. 90 al. 1 let. b OJ). Il en va de même des critiques
visant l'établissement du procès-verbal lors de l'audience de comparution
personnelle des parties, le recourant n'indiquant même pas quelle disposition
du droit cantonal de procédure aurait été violée à cet égard.

4.
4.1 Le recourant reproche en outre à l'Autorité de surveillance des tutelles
d'avoir violé le droit d'être entendu de son fils, garanti par l'art. 12 CDE
et par la jurisprudence du Tribunal fédéral (ATF 131 III 553, relatif à
l'art. 144 al. 2 CC), en écartant l'enregistrement de l'audition du mineur
par son père.

4.2 Comme indiqué ci-dessus (cf. consid. 3.2, 2e §), la violation du droit
fédéral, y compris les traités internationaux conclus par la Confédération,
doit être soulevée dans le recours en réforme (art. 43 al. 1 OJ) lorsque
cette voie est ouverte, ce qui est le cas ici (art. 44 let. d OJ). Compte
tenu de la subsidiarité absolue du recours de droit public, ces griefs sont
donc a priori irrecevables (art. 84 al. 2 OJ). Mais la critique du recourant
porte en réalité sur un autre point. En effet, il ne reproche pas à
l'Autorité de surveillance des tutelles d'avoir refusé d'entendre l'enfant
personnellement, comme le prévoient les art. 144 al. 2, 314 al. 1 CC et 12
CDE, mais d'avoir écarté l'enregistrement audiovisuel d'un entretien entre
son fils et lui; or un tel grief relève du droit à la preuve, qui découle de
l'art. 8 CC. Cette disposition implique en effet la faculté pour une partie
d'être admise à apporter la preuve de ses allégués dans les procès civils
(cf. ATF 129 III 18 consid. 2.6 p. 24 s.). Ainsi, le juge viole le droit à la
preuve lorsqu'il ne donne pas suite aux offres de preuve d'une partie sur des
faits pertinents pour l'appréciation juridique de la cause; ce grief peut
être soulevé par la voie du recours en réforme (ATF 114 II 289 consid. 2a p.
290) lorsque celle-ci est, comme en l'espèce, ouverte. Il n'y a dès lors pas
lieu d'entrer en matière sur le moyen tiré de la violation du droit d'être
entendu (art. 84 al. 2 OJ). En revanche, lorsque le juge renonce à
administrer une preuve sur la base d'une appréciation anticipée des preuves,
seule la voie du recours de droit public est ouverte pour se plaindre du
caractère arbitraire d'une telle appréciation (ATF 131 I 153 consid. 3 p.
157; 114 II 289 consid. 2a p. 291). En l'occurrence, le recourant ne prétend
pas que l'appréciation de l'autorité cantonale, qui a considéré que le
dossier était suffisamment complet pour statuer sur le fond, serait
arbitraire. On peut au demeurant douter de la fiabilité du moyen de preuve
proposé, l'enfant répondant devant une caméra à des questions posées par son
propre père et risquant pour le moins d'être influencé.

5.
Le recourant soutient par ailleurs que la décision attaquée contrevient au
principe d'égalité de traitement entre hommes et femmes prévu par l'art. 8
al. 3 Cst. et apparaît arbitraire.

Le principe de l'égalité juridique de l'homme et de la femme ancré à l'art. 8
al. 3, 1ère phrase Cst. consacre certes un droit constitutionnel directement
applicable au sens de l'art. 84 al. 1 let. a OJ (ATF 125 I 21 consid. 3a p.
24 et les références). S'adressant à l'État, il ne produit toutefois pas
d'effet horizontal direct dans les relations entre personnes privées (ATF 114
Ia 329 consid. 2b p. 330/331 et les arrêts cités). Le recourant ne peut ainsi
s'en prévaloir à l'appui d'un recours de droit public dirigé contre une
décision rendue dans une affaire opposant deux particuliers. Le moyen est par
conséquent irrecevable sous l'angle de l'art. 88 OJ. Enfin, le grief
d'arbitraire (art. 9 Cst.) n'est absolument pas motivé (art. 90 al. 1 let. b
OJ) et ne peut donc pas être pris en considération.

6.
Sur le vu de ce qui précède, le recours se révèle mal fondé et doit être
rejeté, dans la mesure où il est recevable. Comme les conclusions du
recourant étaient d'emblée vouées à l'échec, sa requête d'assistance
judiciaire ne peut être agréée (art. 152 OJ). Les frais judiciaires seront
dès lors mis à sa charge (art. 156 al. 1 OJ). Il n'y a pas lieu d'allouer des
dépens, des observations n'ayant pas été requises.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
La requête d'assistance judiciaire du recourant est rejetée.

3.
Un émolument judiciaire de 2'000 fr. est mis à la charge du recourant.

4.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux parties et à l'Autorité de
surveillance des tutelles du canton de Genève.

Lausanne, le 13 novembre 2006

Au nom de la IIe Cour civile
du Tribunal fédéral suisse

Le président:  La greffière: