Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

II. Zivilabteilung 5P.117/2006
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5P.117/2006 /frs

Arrêt du 1er mai 2006
IIe Cour civile

M. et Mmes les Juges Raselli, Président,
Escher et Hohl.
Greffière: Mme Jordan.

A. ________,
recourant, représenté par Me Jean-Christophe a Marca, avocat,

contre

B.________,
intimé, représenté par Me Sébastien Pedroli, avocat,

Tribunal cantonal de l'Etat de Fribourg, IIe Cour d'appel, case postale 56,
1702 Fribourg.

art. 9 Cst. (séquestre),

recours de droit public contre l'arrêt du Tribunal cantonal de l'Etat de
Fribourg, IIe Cour d'appel, du 20 mars 2006.

Faits:

A.
Le 25 novembre 2005, A.________ a requis le séquestre de biens de B.________,
se fondant sur une créance résultant de rapports de travail de 160'856 fr. et
invoquant le cas de séquestre de l'art. 271 al. 1 ch. 2 LP.

Par ordonnance du 28 novembre 2005, le Président du Tribunal civil de la
Sarine a prononcé le séquestre des avoirs de B.________ auprès de l'UBS, d'un
véhicule automobile et des meubles, équipements et installations de
l'établissement public que le débiteur exploitait en raison individuelle.

Le 30 janvier 2006, le Président du Tribunal civil a admis l'opposition au
séquestre et annulé son ordonnance.

Statuant le 20 mars 2006, la IIe Cour d'appel du Tribunal cantonal du canton
de Fribourg a rejeté le recours de A.________ et confirmé le jugement
attaqué.

B.
Contre cet arrêt, A.________ forme un recours de droit public au Tribunal
fédéral, concluant à son annulation et au renvoi de la cause à l'autorité
cantonale pour nouvelle décision. Il sollicite en outre l'octroi de
l'assistance judiciaire.

L'intimé propose le rejet du recours. L'autorité cantonale s'en remet à
justice, tout en exposant qu'elle a indiqué par inadvertance manifeste que sa
cognition en fait était limitée à l'arbitraire et qu'elle a procédé en
réalité à un examen libre des griefs.

Par ordonnance du 7 avril 2006, le Président de la IIe Cour civile a accordé
l'effet suspensif au recours et déclaré sans objet la demande de sûretés.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Déposé en temps utile contre une décision sur opposition au séquestre rendue
en dernière instance cantonale (SJ 1998 p. 145 consid. 2 p. 146, non publié
aux ATF 123 III 494), le présent recours est ouvert du chef des art. 84 al.
2, 86 al. 1, 87 et 89 al. 1 OJ.

2.
Le recourant reproche à la cour cantonale d'avoir limité son examen à
l'arbitraire, ce qui serait constitutif d'un déni de justice formel contraire
à l'art. 29 al. 1 Cst. ou d'une violation de son droit d'être entendu garanti
par l'art. 29 al. 2 Cst. Il se plaint en outre d'une interprétation
arbitraire de l'art. 20 de la loi fribourgeoise du 11 mai 1891 concernant
l'exécution de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite
(LELP/FR; RS/FR 28.1).
2.1 Selon la jurisprudence, l'autorité qui restreint son pouvoir d'examen à
l'arbitraire alors que le droit applicable lui attribue un contrôle complet
de la décision attaquée viole le droit d'être entendu garanti par l'art. 29
al. 2 Cst. ou commet un déni de justice formel contraire à l'art. 29 al. 1
Cst. (ATF 131 II 271 consid. 11.7.1 p. 303-304 et les arrêts cités).

2.2 Dans son arrêt, l'autorité cantonale expose, en droit, que sa cognition
est limitée à l'arbitraire conformément à l'art. 299a al. 2 let. b CPC/FR et
précise ce qu'il y a lieu d'entendre par arbitraire. Elle procède ensuite,
sur cette base, à l'examen des critiques du recourant et conclut que celui-ci
n'a pas satisfait à son obligation de tenter de démontrer l'arbitraire de
l'appréciation du premier juge et que, dans cette mesure, on peut
sérieusement douter de la recevabilité de son recours. Elle ajoute encore que
le recours devrait être rejeté, à supposer qu'il soit recevable. En effet, à
l'évidence, l'appréciation du premier juge retenant que, sous l'angle de la
vraisemblance, l'intimé paraît bien établi en Suisse et que le recourant n'a
pas fourni d'indices concrets d'un risque élevé de fuite en France ou en
Chine, résistait au grief d'arbitraire.
Or, d'après l'art. 20 LELP/FR, la décision du Président du tribunal
d'arrondissement, qui connaît de l'opposition à l'ordonnance de séquestre au
sens de l'art. 278 LP (al. 1 let. g), est susceptible d'appel au Tribunal
cantonal (al. 2, 1ère phr.), dont la Cour d'appel revoit librement la cause
en fait et en droit, quelle que soit la valeur litigieuse (al. 2, 2e phr.).
C'est donc à bon droit que le recourant reproche à cette dernière autorité
d'avoir restreint son pouvoir d'examen à l'arbitraire et, partant, d'avoir
commis un déni de justice formel ou violé son droit d'être entendu.

3.
Dans sa réponse au recours, la Cour d'appel expose qu'elle a indiqué par
inadvertance manifeste que sa cognition en fait était limitée à l'arbitraire
et qu'elle a procédé en réalité à un examen libre des griefs. Elle conclut
que le recourant n'a pas satisfait à son obligation de démontrer que
l'appréciation du premier juge était entachée "d'erreur" et qu'à l'évidence
l'appréciation de celui-ci résistait à l'examen.

La violation du droit d'être entendu peut être réparée dans le recours de
droit public lorsque le pouvoir d'examen du Tribunal fédéral n'est pas
restreint par rapport à celui de la dernière autorité cantonale et qu'il n'en
résulte aucun préjudice pour le justiciable (ATF 126 I 68 consid. 2 p. 72;
125 I 209 consid. 9 p. 219 et les arrêts cités). Tel n'est pas le cas en
l'espèce, le pouvoir d'appréciation des preuves par le Tribunal fédéral étant
limité à l'arbitraire.

4.
L'intimé, qui succombe, supportera les frais et dépens de la procédure (art.
156 al. 1 et 159 al. 1 OJ). Dans cette mesure, la demande d'assistance
judiciaire du recourant est sans objet. Quand bien même ne serait-elle pas
sans objet, qu'elle serait rejetée. Le recourant n'a en effet pas démontré
son indigence dans son mémoire de recours, pas plus qu'il n'a produit de
pièces relatives à sa situation financière, se bornant à renvoyer au dossier
judiciaire de première instance (art. 152 al. 1 OJ; ATF 125 IV 161 consid. 4a
p. 164).

Par ces motifs, vu l'art. 36a OJ, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est admis et l'arrêt attaqué est annulé.

2.
Un émolument judiciaire de 2'000 fr. est mis à la charge de l'intimé.

3.
L'intimé versera au recourant une indemnité de 2'000 fr. à titre de dépens.

4.
La requête d'assistance judiciaire du recourant est rejetée, dans la mesure
où elle n'est pas sans objet.

5.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties et au
Tribunal cantonal de l'Etat de Fribourg, IIe Cour d'appel.

Lausanne, le 1er mai 2006

Au nom de la IIe Cour civile
du Tribunal fédéral suisse

Le Président:  La Greffière: