Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

II. Öffentlich-rechtliche Abteilung 2A.62/2006
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{T 0/2}
2A.62/2006 /viz

Arrêt du 27 juin 2006
IIe Cour de droit public

MM. les Juges Merkli, Président,
Wurzburger et Berthoud, Juge suppléant.
Greffière: Mme Rochat.

A. ________,
recourante,

contre

La Poste Suisse, Direction du groupe,
Commission fédérale de recours en matière de personnel fédéral, avenue Tissot
8, 1006 Lausanne.

résiliation des rapports de service,

recours de droit administratif contre la décision de la Commission fédérale
de recours en matière de personnel fédéral du 7 décembre 2005.

Faits:

A.
A. ________, née le 24 août 1948, a été engagée par la Poste Suisse
(ci-après: la Poste) le 1er novembre 1974 en qualité de buraliste postale à
Ayer. Elle a présenté une incapacité de travail de 100% du 10 octobre 2001 au
16 décembre 2001, de 50% du 17 décembre 2001 au 10 mars 2002, puis à nouveau
de 100% jusqu'au 30 juin 2002. A la suite de la fermeture du bureau postal
d'Ayer le 30 juin 2002, elle a été déplacée à celui de Vissoie dès le 1er
juillet 2002. Le 4 juillet 2002, l'intéressée a toutefois dû interrompre son
activité professionnelle en raison d'une allergie au papier diagnostiquée par
son médecin traitant, le Dr B.________. Le 16 avril 2003, A.________ a été
victime d'un accident de parapente qui a entraîné une incapacité de travail
pendant plusieurs mois.

Après avoir examiné la situation de sa collaboratrice, lors des entrevues des
7 et 27 octobre 2003, la Poste lui a proposé deux postes en distribution,
l'un à 100% à Saint-Léonard, l'autre à Vissoie, à raison de cinq heures par
jour. Se fondant sur l'avis de son médecin traitant, A.________ a refusé ces
postes en raison de son intolérance aux poussières de papier. Lors d'une
audience de conciliation du 21 janvier 2004 consécutive à l'envoi par la
Poste, le 4 décembre 2003, d'une convention de cessation des rapports de
travail, la reprise d'un poste au guichet a été évoquée. A.________ a
cependant produit un certificat médical du Dr B.________ du 28 janvier 2004,
selon lequel elle ne devait en aucun cas pratiquer une profession dans des
locaux où la poussière de papier était dense, ce qui correspondait à toute
activité dans le domaine des postes, même dans les milieux les plus modernes.

Le 6 mai 2004, la Poste a notifié à A.________ une décision mettant fin aux
rapports de service pour le 30 novembre 2004. Cette décision a été confirmée,
sur recours, par le Directeur général de la Poste le 15 avril 2005.

B.
Saisie d'un recours dirigé contre la décision précitée du 15 avril 2005, la
Commission fédérale de recours en matière de personnel fédéral (ci-après: la
Commission fédérale de recours) l'a rejeté, par prononcé du 7 décembre 2005.
Elle a retenu en substance que malgré sa volonté de reprendre une activité
professionnelle, A.________ n'avait pas donné suite aux différents emplois
proposés par la Poste, qu'elle n'avait pas fait preuve de l'attention que son
employeur était en droit d'attendre d'elle pour occuper un autre poste, que
l'exercice du parapente, alors qu'elle était absente de son travail pour
raison de santé, révélait un manque de motivation pour reprendre son travail
et que la Poste avait fait preuve de bienveillance en acceptant de verser à
bien plaire le salaire de sa collaboratrice de novembre 2003 à avril 2004,
soit pendant six mois supplémentaires.

C.
Agissant par la voie du recours de droit administratif, A.________ demande au
Tribunal fédéral, avec suite de frais et dépens, d'annuler la décision de la
Commission fédérale de recours. Elle invoque l'établissement lacunaire de
l'état de fait et conteste avoir fait preuve de mauvaise volonté.

La Commission fédérale de recours se reporte à la décision entreprise et
renonce à déposer une réponse. La Poste renonce à présenter des observations
et conclut au rejet du recours.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recours
qui lui sont soumis (ATF 131 II 58 consid. 1 p. 60 et les arrêts cités, 361
consid. 1 p. 364, 571 consid. 1 p. 573).

1.1 Formé contre une décision rendue par une Commission fédérale de recours
et fondé sur le droit public fédéral, le présent recours est en principe
recevable comme recours de droit administratif en vertu des art. 97 ss OJ.

1.2 Au surplus, la recourante est atteinte par la décision attaquée et a un
intérêt digne de protection à ce qu'elle soit annulée ou modifiée au sens de
l'art. 103 lettre a OJ, de sorte que le recours, déposé en temps utile et
dans les formes prescrites par la loi, est recevable.

2.
La recourante propose l'audition de son médecin traitant et celle du
Professeur Philippe Leuenberger, du Service de pneumologie du CHUV, auteur
d'une expertise du 1er mars 2005, effectuée à la demande du médecin-conseil
de la SUVA. Dans la mesure où l'appréciation médicale de ces médecins ressort
clairement des pièces du dossier, leur audition n'est pas nécessaire, de
sorte que la réquisition de la recourante doit être rejetée (ATF 130 II 425
consid. 2.1 p. 429; 122 II 464 consid. 4a p. 469 et les arrêts cités).

3.
Conformément à l'art. 104 lettres a et b OJ, le recours de droit
administratif peut être formé pour violation du droit fédéral, y compris
l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation, ainsi que pour constatation
inexacte ou incomplète de faits pertinents (ATF 132 II 47 consid. 1.2 p. 49;
128 II 56 consid. 2a p. 60). Le Tribunal fédéral revoit d'office
l'application du droit fédéral qui englobe notamment les droits
constitutionnels du citoyen (ATF 130 III 707 consid. 3.1 p. 709; 130 I 312
consid. 1.2 p. 318 et la jurisprudence citée). Comme il n'est pas lié par les
motifs que les parties invoquent, il peut admettre le recours pour d'autres
raisons que celles avancées par le recourant ou, au contraire, confirmer
l'arrêt attaqué pour d'autres motifs que ceux retenus par l'autorité intimée
(art. 114 al. 1 in fine OJ; ATF 132 II 47 consid. 1.3 p. 50; 131 II 361
consid. 2 p. 366 et les arrêts cités).

Par ailleurs, lorsque le recours est dirigé, comme en l'occurrence, contre la
décision d'une autorité judiciaire, le Tribunal fédéral est lié par les faits
constatés dans la décision, sauf s'ils sont manifestement inexacts ou
incomplets ou s'ils ont été établis au mépris de règles essentielles de
procédure (105 al. 2 OJ; ATF 132 II 21 consid. 2 p. 24). En outre, le
Tribunal fédéral ne peut pas revoir l'opportunité de la décision entreprise,
le droit fédéral ne prévoyant pas un tel examen en la matière (art. 104
lettre c ch. 3 OJ a contrario; ATF 131 II 361 consid. 2 p. 366, 470 consid. 2
p. 475).

4.
Les rapports de travail entre la recourante et la Poste sont régis par la loi
fédérale du 24 mars 2000 sur le personnel fédéral de la Confédération (LPers;
RS 172.220.1) et par la Convention collective de travail conclue par la Poste
avec les associations du personnel pour leur domaine d'activité (ci-après: la
CCT Poste), entrée en vigueur le 1er février 2002. Il n'est pas contesté que
la Poste a respecté en l'espèce son obligation de verser le salaire en cas
d'empêchement de travailler de sa collaboratrice et que le congé, notifié
dans le délai de résiliation légal, est conforme aux dispositions protégeant
le travailleur contre une résiliation en temps inopportun. En fait, la
recourante conteste l'existence d'un motif de résiliation ordinaire de son
contrat. A teneur du chiffre 124 de l'annexe 4 CCT Poste, qui reprend
pratiquement le contenu de l'art. 12 al. 6 LPers, sont considérés comme des
motifs de résiliation ordinaires du contrat:

a) la violation d'obligations légales ou contractuelles importantes;
b) des lacunes au niveau des prestations ou du comportement malgré un
avertissement écrit;
c) les aptitudes ou les capacités insuffisantes pour effectuer le travail
convenu ou la mauvaise volonté pour accomplir ce travail;
d) la mauvaise volonté de l'employé à accomplir un autre travail pouvant
raisonnablement être exigé de lui;
e) des impératifs économiques ou des impératifs d'exploitation majeurs, dans
la mesure où l'employeur ne peut proposer à l'intéressé un autre travail
pouvant raisonnablement être exigé de lui;
f) la disparition de l'une des conditions d'engagement fixées dans la loi ou
dans le contrat de travail.

4.1 Dans le cas particulier, la Poste et l'autorité intimée ont considéré que
la recourante avait fait preuve de mauvaise volonté à poursuivre son activité
ou à accomplir un autre travail pouvant raisonnablement être exigé d'elle, de
sorte que la résiliation des rapports de service pouvait se fonder sur les
lettres c) et d) du chiffre 124 annexe 4 CCT Poste.

Pour sa part, la recourante conteste toute mauvaise volonté, fait valoir
qu'elle s'est toujours fiée à l'appréciation de son médecin traitant, le
Dr B.________, au sujet de son impossibilité d'occuper un emploi la mettant
en présence de poussières de papier et souligne que l'opinion de ce dernier,
dédaignée par le Service médical de la Poste, a été confirmée par le
Professeur Leuenberger.

4.2 Les avis médicaux sur la nature de l'atteinte à la santé de la recourante
et sur sa capacité à poursuivre son activité professionnelle au sein de la
Poste ne sont pas unanimes. Selon le Dr B.________, l'allergie au papier dont
souffre la recourante empêche l'exercice d'une activité pouvant mettre sa
patiente en contact avec de la poussière de papier, cette indication excluant
toute reprise de travail au sein de la Poste, même dans les milieux les plus
modernes. De son côté, le Professeur Leuenberger, qui a diagnostiqué un
asthme chronique et une rhinite chronique avec sinusite polypeuse associée à
une hyper-réactivité nasale à la poussière de vieux papier, a conclu à
l'existence d'une maladie professionnelle au sens de la loi fédérale sur
l'assurance-accidents et à une inaptitude restreinte à l'activité de
manipulation de vieux papier. Il a préconisé une aide à la réinsertion
professionnelle de la recourante.

Pour le Service médical des CFF, de l'administration générale de la
Confédération, de la Poste et de Swisscom (devenu "MedicalService"), la
recourante était capable de reprendre son activité à la Poste de Vissoie
après son incapacité de travail consécutive à son accident de parapente. Il
se fondait notamment sur une expertise du 22 mai 2003 du Dr Frey, du Centre
valaisan de pneumologie de Montana. Par décision du 7 juillet 2004, la SUVA a
considéré que les troubles de la sphère ORL de la recourante ne constituaient
pas une maladie professionnelle. En outre, l'Office cantonal valaisan de
l'Assurance-invalidité fédérale a refusé toutes prestations à la recourante
le 3 août 2004, en relevant que son activité de buraliste postale ne
comportait pas d'exposition significative aux poussières et que ni l'asthme,
ni la rhinite dont elle était affectée ne justifiaient une incapacité de
travail dans sa profession. Cet office s'est référé aux avis médicaux
exprimés par le Dr Frey, le Dr Duc, allergologue à Sion et le Dr Thorens, de
la Division médecine du travail à Lausanne. Après avoir pris connaissance de
l'expertise du Professeur Leuenberger, "MedicalService" a contesté les
modalités du test auquel la recourante avait été soumise, en soutenant que
ses conditions de travail n'étaient pas comparables, et a confirmé l'absence
d'incapacité de travail pour une activité de tri et de distribution effectuée
à raison de 75% en milieu extérieur.

4.3 En présence de telles divergences d'ordre médical quant à sa capacité à
poursuivre son travail au sein de la Poste, on peut se demander si la
recourante n'a pas adopté une attitude trop rigide en se référant
systématiquement et obstinément à l'avis de son médecin traitant pour refuser
toute activité au sein de la Poste, au motif qu'elle serait inévitablement au
contact de poussières de papier. On aurait pu attendre d'elle qu'elle accepte
une tentative de reprise de travail dans les deux postes nouveaux qui lui
avaient été proposés, soit un travail de distribution à la Poste de
Saint-Léonard et une activité au guichet à celle de Sierre. A cet égard, la
recourante n'a pas consenti tous les efforts que son employeur était en droit
d'attendre d'elle. Il est également surprenant que la recourante ait cru bon
de se livrer à des activités sportives de parapente, alors qu'elle se
trouvait dans une période d'incapacité de travail à 100%. L'explication
donnée, selon laquelle l'exercice d'activités sportives lui avait été
recommandé par son médecin traitant, n'était guère convaincante et l'on peut
comprendre que la Poste ait songé à invoquer une violation de ses obligations
contractuelles. Malgré les critiques qui peuvent être adressées à la
recourante, il paraît difficile de lui reprocher d'avoir véritablement fait
preuve de mauvaise volonté pour reprendre son travail. En effet, elle
éprouvait des craintes sérieuses de récidive à l'atteinte à sa santé et elle
était confortée dans ce sentiment par l'appréciation très tranchée du Dr
B.________, qui a tout de même été confirmée ultérieurement, dans une mesure
certaine, par le Professeur Leuenberger.
En définitive, la question de la bonne ou de la mauvaise volonté de la
recourante peut rester ouverte. En effet, si la recourante était totalement
inapte à exercer une quelconque activité au sein de la Poste, comme le
soutenait le Dr B.________, le congé pouvait lui être notifié sur la base de
la lettre c) du chiffre 124 de l'annexe 4 CCT Poste. Cette disposition permet
de mettre un terme aux rapports de service si le collaborateur ne présente
plus les aptitudes nécessaires à l'accomplissement du travail convenu.
Indépendamment de l'asthme et de la rhinite réactive à la poussière de papier
dont elle souffre, la recourante est en bonne santé et souhaite reprendre une
activité professionnelle. Il convient donc qu'elle soit mise au bénéfice de
mesures de réadaptation professionnelle, comme le suggère le Professeur
Leuenberger. Or, cette tâche incombe cas échéant aux organes de
l'Assurance-invalidité et non à la Poste.

Dès lors que la recourante était objectivement inapte à effectuer, non
seulement le travail pour lequel elle avait été engagée mais toute autre
activité au service de son employeur, la Poste était en droit de résilier les
rapports de service.

La décision de l'autorité intimée est ainsi fondée dans son résultat.

5.
Vu ce qui précède, le recours doit être rejeté.

Succombant, la recourante doit supporter les frais judiciaires (art. 156 al.
1, 153 et 153a OJ) et n'a pas droit à des dépens compte tenu de l'issue du
recours (art. 159 al. 2 OJ) et du fait qu'elle a procédé sans l'assistance
d'un avocat.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Un émolument judiciaire de 2'500 fr. est mis à la charge de la recourante.

3.
Le présent arrêt est communiqué en copie à la recourante, à la Poste Suisse
et à la Commission fédérale de recours en matière de personnel fédéral.

Lausanne, le 27 juin 2006

Au nom de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le président:  La greffière: