Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

II. Öffentlich-rechtliche Abteilung 2A.4/2006
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{T 0/2}
2A.4/2006

Arrêt du 26 juin 2006
IIe Cour de droit public

MM. et Mme les Juges Merkli, Président,
Wurzburger et Yersin.
Greffière: Mme Mabillard.

A. ________,
recourant,

contre

Administration cantonale des impôts du canton
de Vaud, route de Berne 46, 1014 Lausanne,
Tribunal administratif du canton de Vaud,
avenue Eugène-Rambert 15, 1014 Lausanne.

Impôt fédéral direct 97/98 (frais de déplacement),
recours de droit administratif contre l'arrêt du
Tribunal administratif du canton de Vaud
du 19 décembre 2005.

Faits:

A.
Le 13 janvier 1999, la Commission d'impôt de Lavaux, actuellement l'Office
d'impôt du district de X.________, (ci-après: l'Office de l'impôt) a notifié
à A.________ deux décisions de taxation définitive concernant l'impôt
cantonal et communal sur le revenu et la fortune pour la période 1997/1998.
L'Office de l'impôt a précisé que les frais de déplacement admis à l'impôt
fédéral direct étaient identiques à ceux définis par la loi vaudoise du 26
novembre 1956 sur les impôts directs cantonaux. Les 14 janvier et 8 février
1999, les notifications définitives valables pour l'impôt fédéral direct de
la période 1997/1998 ont été envoyées à A.________.
Le 25 janvier 1999, A.________ a informé l'Office de l'impôt qu'il recourait
contre les décisions de taxation en matière d'impôt fédéral direct. Il s'est
plaint que, pour le calcul de l'impôt fédéral direct, l'autorité a appliqué
le barème cantonal pour le calcul des frais de transport déductibles, en
violation de l'art. 4 aCst. Le 27 janvier 1999, l'Office de l'impôt a motivé
et confirmé sa position. Il a proposé à A.________ de fournir la
justification des frais de transport effectifs et d'indiquer s'il retirait ou
maintenait sa réclamation. L'intéressé ayant déclaré maintenir sa
réclamation, l'Administration cantonale des impôts du canton de Vaud
(ci-après: l'Administration cantonale) l'a rejetée le 1er mars 2001.

A. ________ a attaqué cette décision devant le Tribunal administratif du
canton de Vaud (ci-après: le Tribunal administratif) qui, par arrêt du 19
décembre 2005, a rejeté le recours et confirmé la décision de
l'Administration cantonale.

B.
Par recours de droit administratif au Tribunal fédéral, A.________ a
entrepris l'arrêt du Tribunal administratif du 19 décembre 2005. Il conclut
implicitement à l'annulation de l'arrêt attaqué, sous suite des frais et
dépens. Le recourant reproche à l'autorité intimée de reprendre, pour le
calcul de l'impôt fédéral direct, les déductions forfaitaires kilométriques
prévues par le droit cantonal et ainsi de violer le principe de l'égalité de
traitement. En effet, les contribuables des différents cantons ne sont pas
traités de la même manière par rapport à un même impôt: certains cantons ne
connaissent aucune limitation des déductions permises pour l'utilisation d'un
véhicule privé pour se rendre au lieu de travail, tandis que d'autres
utilisent un système dégressif.
Le Tribunal administratif ainsi que l'Administration cantonale concluent au
rejet du recours.
L'Administration fédérale des contributions conclut également au rejet du
recours, sous suite de frais.

C.
Le 11 mai 2006, sans y avoir été invité, A.________ a fait parvenir au
Tribunal fédéral un courrier dans lequel il répond aux observations de
l'Administration cantonale.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Déposé en temps utile et dans les formes prescrites par la loi contre un
arrêt rendu par une autorité judiciaire statuant en dernière instance
cantonale et fondé sur le droit public fédéral, le présent recours est
recevable en vertu des art. 97 ss OJ ainsi que de la règle particulière de
l'art. 146 de la loi fédérale du 14 décembre 1990 sur l'impôt fédéral direct
(LIFD; RS 642.11).
Le courrier du recourant du 11 mai 2006 est irrecevable en tant qu'il
constitue une réplique spontanée aux observations d'une partie adverse,
intervenue en dehors d'un second échange d'écritures.

2.
Le recours de droit administratif peut être formé pour violation du droit
fédéral, y compris l'abus et l'excès du pouvoir d'appréciation (art. 104
lettre a OJ). Le Tribunal fédéral vérifie d'office l'application du droit
fédéral, qui englobe notamment les droits constitutionnels du citoyen, sans
être lié par les motifs invoqués par les parties (art. 114 al. 1 in fine OJ).
Lorsque, comme en l'espèce, le recours est dirigé contre la décision d'une
autorité judiciaire, le Tribunal fédéral est lié par les faits constatés dans
la décision, sauf s'ils sont manifestement inexacts ou incomplets ou s'ils
ont été établis au mépris de règles essentielles de procédure (art. 104
lettre b et 105 al. 2 OJ).

3.

4.

5.
Le présent recours est dirigé contre la partie de l'arrêt attaqué relative
aux déductions pour frais de déplacement concernant l'impôt fédéral direct de
la période 1997/1998. Dans la mesure où le recours porte aussi sur les
périodes fiscales 1999 à 2001, lesquelles n'ont pas fait l'objet de l'arrêt
attaqué, il est irrecevable, parce qu'il sort du cadre délimité par l'objet
du litige (cf. André Grisel, Traité de droit administratif, vol II p. 933;
Fritz Gygi, Bundesverwaltungsrechtspflege, p. 46; Ulrich Meyer/Isabel von
Zwehl, L'objet du litige en procédure de droit administratif fédéral, in
Mélanges Pierre Moor p. 435 ss, p. 439).

6.
L'art. 26 al. 1 lettre a LIFD prévoit que les frais de déplacement
nécessaires entre le domicile et le lieu de travail peuvent être déduits, à
titre de frais professionnels, du revenu imposable des personnes exerçant une
activité lucrative dépendante. L'art. 26 al. 2 LIFD précise que ces frais de
déplacement sont estimés forfaitairement, mais que le contribuable peut
justifier des frais plus élevés.
Au sens de l'art. 5 de l'ordonnance du 10 février 1993 sur la déduction des
frais professionnels des personnes exerçant une activité lucrative dépendante
en matière d'impôt fédéral direct (ci-après: l'Ordonnance; RS 642.118.1), le
contribuable qui utilise les transports publics pour les déplacements entre
le domicile et le lieu de travail peut déduire ses dépenses effectives. En
cas d'utilisation d'un véhicule privé, il peut déduire les dépenses qu'il
aurait eues en utilisant les transports publics. Exceptionnellement, si le
contribuable établit qu'il ne dispose d'aucun moyen de transport public ou
qu'il n'est pas en mesure de les utiliser, il peut déduire les frais
d'utilisation d'un véhicule privé d'après les forfaits de l'art. 3 de
l'Ordonnance ou justifier de frais professionnels plus élevés (art. 5 al. 3
de l'Ordonnance).
Si le contribuable fait valoir des frais plus élevés, il doit justifier la
totalité des dépenses ainsi que leur nécessité sur le plan professionnel
(art. 4 de l'Ordonnance). Le Département fédéral des finances fixe les
déductions forfaitaires pour chaque année de calcul et les publie dans un
appendice joint à l'Ordonnance (art. 3 de l'Ordonnance); pour les années de
calcul 1995/1996 (période fiscale 1997/1998), les déductions forfaitaires
pour les frais de déplacement avec une voiture privée s'élevaient à 60 ct.
par kilomètre parcouru (Appendice du 29 juin 1994 à l'Ordonnance; ci-après:
l'Appendice; RO 1994 1673). Demeure toutefois réservé l'art. 5 al. 4 de
l'Ordonnance qui prévoit la possibilité pour l'autorité fiscale de fixer un
barème échelonné des déductions forfaitaires en fonction du nombre de
kilomètres parcourus.
Le canton de Vaud a fait usage de l'option prévue à l'art. 5 al. 4 de
l'Ordonnance en adoptant un barème dégressif, identique à celui qu'il
applique aux déductions relatives à l'impôt cantonal et communal. L'art. 23
al. 1 lettre l de la loi vaudoise du 26 novembre 1956 sur les impôts directs
cantonaux, dans sa teneur en vigueur à cette époque, prévoit qu'en cas
d'usage nécessaire d'un véhicule à moteur, le contribuable peut déduire de
son revenu les frais de transports de son domicile à son lieu de travail
selon un système forfaitaire, sur la base d'un tarif kilométrique unique et
dégressif établi par le Département des finances du canton de Vaud, que
celui-ci a fixé à 60 ct. par kilomètre parcouru jusqu'à 15'000 kilomètres,
puis à 20 ct. par kilomètre supplémentaire.

7.
Le recourant se plaint que la pratique du canton de Vaud, reprenant, pour le
calcul de l'impôt fédéral direct, les déductions forfaitaires pour frais
kilométriques prévues par le droit cantonal, soit contraire au principe de
l'égalité de traitement; ce barème serait en effet moins favorable que celui
d'autres cantons et que celui fixé dans l'Ordonnance; les contribuables des
différents cantons ne seraient pas traités sur un pied d'égalité par rapport
au même impôt. A son avis, la déduction pour frais kilométriques en matière
d'impôt fédéral direct devrait être identique à celle prévue à l'art. 5 de
l'Ordonnance, soit 60 ct. sans plafonnement en l'espèce (cf. Appendice).

8.
Un arrêté de portée générale viole le principe de l'égalité de traitement
lorsqu'il établit des distinctions juridiques qui ne se justifient par aucun
motif raisonnable au regard de la situation de fait à réglementer ou
lorsqu'il omet de faire des distinctions qui s'imposent au vu des
circonstances, c'est-à-dire lorsque ce qui est semblable n'est pas traité de
manière identique et ce qui est dissemblable ne l'est pas de manière
différente; cela suppose que le traitement différent ou semblable injustifié
se rapporte à une situation de fait importante (ATF 131 V 107 consid. 3.4.2
p. 114). La question de savoir s'il existe un motif raisonnable pour une
distinction peut recevoir des réponses différentes suivant les époques et les
idées dominantes. Le législateur dispose toutefois d'un large pouvoir
d'appréciation dans le cadre de ces principes et de l'interdiction de
l'arbitraire (ATF 131 I 1 consid. 4.2 p. 7).
En droit fiscal, l'égalité de traitement consacrée à l'art. 8 Cst. se
concrétise par les principes de l'universalité et de l'égalité de
l'imposition ainsi que par celui de l'imposition selon la capacité
contributive (art. 127 al. 2 Cst.) Le Tribunal fédéral a, à plusieurs
reprises, défini la portée de ces principes. Il a ainsi reconnu qu'il n'est
pas réalisable, pour des raisons pratiques, de traiter chaque contribuable de
façon exactement identique d'un point de vue mathématique et que, de ce fait,
le législateur est autorisé à choisir des solutions schématiques. S'il n'est
pas possible d'aboutir à une égalité absolue, il suffit que la réglementation
n'aboutisse pas de façon générale à une charge sensiblement plus lourde ou à
une inégalité systématique à l'égard de certaines catégories de contribuables
(cf. ATF 128 I 240 consid. 2.3 p. 243 et la jurisprudence citée).

9.
9.1 L'art. 26 al. 2 LIFD prévoit que les frais professionnels de déplacement
sont estimés forfaitairement. Le Tribunal fédéral, lié par les lois fédérales
en vertu de l'art. 191 Cst., ne peut pas contrôler la constitutionnalité de
la disposition précitée, laquelle admet implicitement certaines disparités au
nom de la praticabilité de l'impôt. Le principe de la praticabilité de
l'impôt permet au législateur, dans une certaine mesure, de simplifier les
situations imposables et de renoncer à des réglementations de détail afin
d'édicter des normes fiscales d'application efficace et facilitée (Peter
Locher, Praktikabilität im Steuerrecht - unter besonderer Berücksichtigung
des materiellen Rechts der direkten Steuern -, in Steuerrecht: Festschrift
zum 65. Geburtstag von Ernst Höhn, Berne 1995, p. 189 ss, p. 190).
Le Tribunal fédéral peut seulement vérifier la validité des ordonnances
fédérales; il examine en particulier si l'ordonnance ne viole pas le droit
fédéral supérieur, notamment la Constitution (cf. Blaise Knapp, Précis de
droit administratif, p. 70 n. 326 ss). En l'espèce, l'art. 5 al. 4 de
l'Ordonnance laisse aux autorités cantonales la possibilité de fixer un
barème échelonné des déductions forfaitaires en fonction du nombre de
kilomètres parcourus. Il ressort de cette disposition que le Département
fédéral des finances entend laisser une certaine liberté aux autorités
cantonales dans l'établissement des barèmes concernant les frais de
déplacement en matière d'impôt fédéral direct. Le but est essentiellement de
simplifier la taxation en adoptant les mêmes forfaits sur le plan cantonal et
sur le plan fédéral, ce qui profite autant aux contribuables qu'à
l'administration. Ce schématisme, motivé par des considérations d'intérêt
général, peut entraîner certaines disparités de traitement entre les
contribuables du point de vue de l'impôt fédéral direct (Peter Locher, op.
cit. p. 196).

9.2 Ces différences, prises en compte par le législateur, ne constituent
cependant pas une inégalité au sens de l'art. 8 Cst. En effet, l'ampleur de
la disparité n'est pas considérable. Dans le cas du recourant, la différence
d'impôt (due aux montants moins élevés qu'il peut déduire de ses revenus)
s'élèverait à quelques centaines de francs, car A.________ n'était pas imposé
au taux maximum de 11,5 %, comme il le mentionne dans son mémoire de recours,
mais à un taux de 7,03 %. En effet, selon les taxations des 14 janvier et 8
février 1999 en matière d'impôt fédéral direct pour la période fiscale
1997/1998, le montant d'impôts dû par le recourant et son épouse, calculé sur
la base des éléments imposables fixés à 179'800 fr., s'élevait à 12'641 fr.
L'éventuelle surcharge, peu élevée, est d'autant moins critiquable que le
contribuable a toujours la possibilité de faire valoir ses frais effectifs,
même si cela lui demande quelques travaux administratifs supplémentaires. De
manière générale, le contribuable a le choix soit d'utiliser les déductions
forfaitaires, soit, s'il encourt des frais supérieurs aux montants fixés, de
présenter les pièces justificatives. Dans ce dernier cas, il doit supporter
le fardeau de la preuve. Les forfaits correspondent en effet à des moyennes
qui sont réputées correspondre aux dépenses effectives des contribuables,
lesquels peuvent se trouver aussi bien favorisés que défavorisés par le
système. Ainsi, le contribuable qui s'estime défavorisé doit prouver les
frais qui allègent son imposition et assumer les conséquences de l'absence de
justificatifs (cf. Denis Berdoz/Marc Bugnon, La procédure mixte en matière
d'impôts directs, in: Les procédures en droit fiscal, 2ème édition, Berne
2005 p. 527 ss, p. 656).

9.3 La simplification prévue par l'art. 5 al. 4 Ordonnance est donc conforme
au droit fédéral et admissible, même s'il en résulte certaines différences
cantonales, vu la possibilité laissée au contribuable de déduire ses frais
effectifs.

10.
L'argument que le recourant entend tirer de la détermination de la valeur
locative n'est pas convainquant car, même si l'administration fédérale réduit
les différences entre les cantons, cette réduction n'intervient que dans
certaines limites et n'aboutit pas à des valeurs identiques dans toute la
Suisse.
De même, dans la mesure où le recourant développe une argumentation en se
fondant sur l'art. 9 de la loi fédérale du 14 décembre 1990 sur
l'harmonisation des impôts directs des cantons et des communes (LHID; RS
642.14), il ne peut pas être suivi. L'art. 9 al. 1 LHID prévoit que les
dépenses nécessaires à l'acquisition du revenu et les déductions générales
sont défalquées de l'ensemble des revenus imposables, alors que l'al. 2
énumère les déductions générales. D'une part, cette loi concerne les impôts
cantonaux et elle n'était pas encore applicable à l'époque de la taxation
litigieuse de la période 1997/1998 (art. 72 LHID), d'autre part, même si elle
avait été applicable au cas d'espèce, l'art. 9 LHID ne serait d'aucun secours
au recourant. En effet, cette disposition a simplement pour objet de rappeler
que les dépenses nécessaires à l'acquisition du revenu ainsi que les
déductions générales sont défalquées du revenu imposable, mais ne donne
aucune indication sur la façon dont les cantons doivent calculer les
déductions.

11.
Vu ce qui précède, le recours doit être rejeté dans la mesure où il est
recevable. Succombant, le recourant doit supporter les frais judiciaires
(art. 156 al. 1, 153 et 153a OJ) et n'a pas droit à des dépens (art. 159 al.
1 OJ).

12.

13.

14.

15.

16.

17.

18.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
Un émolument judiciaire de 1'500 fr. est mis à la charge du recourant.

3.
Le présent arrêt est communiqué en copie au recourant, à l'Administration
cantonale des impôts et au Tribunal administratif du canton de Vaud ainsi
qu'à l'Administration fédérale des contributions, Division principale de
l'impôt fédéral direct, de l'impôt anticipé et des droits de timbre.

Lausanne, le 26 juin 2006

Au nom de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le président:  La greffière: