Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

II. Öffentlich-rechtliche Abteilung 2A.404/2006
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{T 0/2}
2A.404/2006 /svc

Arrêt du 9 février 2007
IIe Cour de droit public

MM. et Mme les Juges Merkli, Président,
Wurzburger et Yersin.
Greffière: Mme Mabillard.

X. ________,
recourante, représentée par Me Joanna Bürgisser, avocate,

contre

Etat de Genève, rue de l'Hôtel-de-Ville 2, 1206 Genève, représenté par Me
Gilda Modoianu, avocate,
chemin Frank-Thomas 52, 1223 Cologny,
Tribunal administratif du canton de Genève,
rue du Mont-Blanc 18, case postale 1956,
1211 Genève 1

Harcèlement sexuel dans le cadre du travail,

recours de droit administratif contre l'arrêt du
Tribunal administratif du canton de Genève
du 16 mai 2006.
Faits :

A.
X. ________ a été engagée le 1er octobre 1986 en qualité de secrétaire 1 à
l'Office W.________. Elle a été nommée fonctionnaire le 23 août 1989, puis
promue secrétaire 2 le 2 mars 1990. Le 12 janvier 2001, elle a déposé une
plainte pour harcèlement sexuel et psychologique contre l'un de ses anciens
chefs de service. A la suite d'une enquête interne, l'Office du personnel de
l'Etat du canton de Genève (ci-après: l'Office du personnel) a constaté que
la plainte de l'intéressée était infondée, ce qu'a confirmé le Conseil d'Etat
du canton de Genève le 8 octobre 2003. L'arrêté n'a pas été contesté.

B.
Le 1er octobre 2001, X.________ a été transférée auprès de Y.________,
rattaché au Département cantonal genevois de l'instruction publique
(ci-après: le Département cantonal). Le 26 août 2002, Z.________ est entré en
fonction comme administrateur de Y.________.

X. ________ et Z.________ ont, dès le 16 septembre 2002, échangé de nombreux
courriers électroniques sur leur place de travail. A partir du mois de mars
2003, leurs relations se sont dégradées, à tel point que, le 25 mars 2003,
X.________ a demandé au directeur de Y.________ d'intervenir. Z.________ a
été en incapacité de travailler dès la mi-juin 2003 et ses rapports de
service avec le canton de Genève ont pris fin le 31 août 2003.
A son retour de vacances, le 22 septembre 2003, X.________ a refusé de
reprendre son service "tant que la direction ne prendrait pas les mesures
adéquates pour protéger sa personnalité". Après un entretien du 26 septembre
2003 avec le directeur de Y.________ et un responsable des ressources
humaines du Département cantonal, l'intéressée a été provisoirement affectée,
à partir du 1er octobre 2003, à la Direction générale de U.________. Ce
transfert a ensuite été confirmé avec effet au 1er juin 2004.

C.
Par courrier du 29 décembre 2003, X.________ a exigé du Département cantonal
de lui trouver une autre place de travail et de lui transmettre une lettre
d'excuses. Elle a également demandé que l'Etat de Genève lui verse une
indemnité de 25'000 fr. sur la base des art. 4 et 5 de la loi fédérale du 24
mars 1995 sur l'égalité entre femmes et hommes (ci-après: LEg ou la loi sur
l'égalité; RS 151.1). Dans sa réponse du 3 février 2004, le Département
cantonal a refusé d'entrer en matière sur les prétentions de l'intéressée.
Le 8 mars 2005, X.________ a déposé une action en constatation et en paiement
contre l'Etat de Genève auprès de la Juridiction des Prud'hommes du canton.
Ses conclusions tendaient notamment à ce qu'il soit constaté qu'elle avait
fait l'objet d'actes de harcèlement sexuel dans le cadre de son travail au
sein de Y.________ et à ce que l'Etat de Genève soit condamné à lui verser
32'085 fr. à titre d'indemnité pour harcèlement sexuel et tort moral. La
cause ayant été déclarée non conciliée le 2 mai 2005, l'intéressée a saisi le
Tribunal administratif du canton de Genève (ci-après: le Tribunal
administratif).

D.
Par arrêt du 16 mai 2006, le Tribunal administratif a rejeté l'action en
constatation et en paiement de X.________ contre l'Etat de Genève, en tant
qu'elle était recevable. Il a considéré en substance que l'intéressée n'avait
pas fait l'objet d'actes de harcèlement sexuel dans le cadre de son travail
au sein de Y.________ et que, en tout état de cause, elle n'avait droit à
aucune indemnité de la part de l'Etat de Genève.

E.
X.________ a interjeté un recours de droit administratif au Tribunal fédéral
contre l'arrêt du Tribunal administratif du 16 mai 2006. Elle demande, sous
suite de dépens, de constater qu'elle a fait l'objet d'actes de harcèlement
sexuel dans le cadre de son travail au sein de Y.________ et de condamner
l'Etat de Genève à lui verser une indemnité de 32'085 fr. plus intérêts ainsi
que, subsidiairement, de renvoyer la cause au Tribunal administratif pour
complément d'instruction. Elle se plaint de la violation des art. 29 al. 2 et
30 al. 1 Cst., 4 et 5 al. 3 LEg, y compris d'excès et d'abus du pouvoir
d'appréciation, ainsi que d'une constatation manifestement inexacte et
incomplète des faits pertinents. Elle requiert en outre la production du
dossier de l'autorité intimée.
Le Tribunal administratif a renoncé à formuler des observations et déclare
persister dans les considérants et le dispositif de son arrêt. L'Etat de
Genève conclut, sous suite de dépens, au rejet du recours en tant qu'il est
recevable et à la confirmation de l'arrêt entrepris.
Le Bureau fédéral de l'égalité entre femmes et hommes propose l'admission du
recours.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
1.1 La loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF; RS 173.110) est
entrée en vigueur le 1er janvier 2007 (RO 2006 p. 1205 ss, p. 1242). L'acte
attaqué ayant été rendu avant cette date, la procédure reste régie par la loi
fédérale d'organisation judiciaire du 16 décembre 1943 (ci-après: OJ; art.
132 al. 1 LTF).

1.2 Selon l'art. 97 OJ en relation avec l'art. 5 PA, la voie du recours de
droit administratif est ouverte contre les décisions fondées sur le droit
public fédéral à condition qu'elles émanent des autorités énumérées à l'art.
98 OJ et pour autant qu'aucune des exceptions prévues aux art. 99 à 102 OJ ou
dans la législation spéciale ne soit réalisée. La loi sur l'égalité n'est pas
seulement une loi-cadre ou une loi limitée aux principes que le législateur
cantonal devrait encore concrétiser; elle pose au contraire des règles et des
principes directement déductibles en justice. Aussi bien, même lorsqu'elles
concernent des rapports de travail soumis au droit public cantonal, les
décisions de dernière instance cantonale (cf. art. 13 al. 1 LEg en relation
avec l'art. 98 lettre g OJ) prises en application de la loi sur l'égalité
peuvent faire l'objet d'un recours de droit administratif au Tribunal fédéral
(ATF 131 II 361 consid. 1.1 p. 364/365). Déposé en temps utile et dans les
formes prescrites par la loi, le présent recours de droit administratif est
recevable.

1.3 La recourante demande la production de l'ensemble du dossier de
l'autorité intimée. Le Tribunal administratif ayant déposé le dossier
conjointement à sa réponse, la réquisition d'instruction de la recourante est
satisfaite.

2.
Le recours de droit administratif peut être formé pour violation du droit
fédéral, y compris l'abus et l'excès du pouvoir d'appréciation (art. 104
lettre a OJ). Le Tribunal fédéral revoit d'office l'application du droit
fédéral sans être lié par les motifs invoqués par les parties (art. 114 al. 1
in fine OJ). Lorsque le recours est dirigé contre la décision d'une autorité
judiciaire, le Tribunal fédéral est lié par les faits constatés dans la
décision, sauf s'ils sont manifestement inexacts ou incomplets ou s'ils ont
été établis au mépris de règles essentielles de procédure (art. 104 lettre b
et 105 al. 2 OJ). En outre, le Tribunal fédéral ne peut pas revoir
l'opportunité de l'arrêt entrepris, le droit fédéral ne prévoyant pas un tel
examen dans ce domaine (art. 104 lettre c ch. 3 OJ).

3.
La recourante voit une violation des art. 30 al. 1 Cst. et 6 par. 1 CEDH dans
le fait que le juge en charge du dossier a refusé, lors des audiences, de
poser certaines questions aux témoins et aurait ajouté: "vous allez vous en
plaindre au Tribunal fédéral". De plus, dans l'arrêt attaqué, le Tribunal
administratif aurait démontré sa partialité en reprochant à la recourante de
n'avoir pas produit l'intégralité des échanges de courriers électroniques
dont elle se prévalait, contrairement aux règles de la bonne foi.

3.1 Selon l'art. 30 al. 1 Cst., toute personne dont la cause doit être jugée
dans une procédure judiciaire a droit à ce que sa cause soit portée devant un
tribunal établi par la loi, compétent, indépendant et impartial. L'art. 6
par. 1 CEDH n'accorde pas, à cet égard, une protection plus étendue que celle
offerte par la Constitution (ATF 131 I 24 consid. 1.1 p. 25).
Cette garantie permet d'exiger la récusation d'un juge dont la situation et
le comportement sont de nature à faire naître un doute sur son impartialité;
elle tend notamment à éviter que des circonstances extérieures à la cause ne
puissent influencer le jugement en faveur ou au détriment d'une partie (ATF
131 I 24 consid. 1.1 p. 25, 113 consid. 3.4 p. 116; 128 V 82 consid. 2a p.
84; 127 I 196 consid. 2b p. 198 et la jurisprudence citée dans ces arrêts).
Le grief tiré de la prévention du juge doit être soulevé aussitôt que
possible. Celui qui omet de dénoncer immédiatement un tel vice et laisse le
procès se dérouler sans intervenir, agit contrairement à la bonne foi et voit
se périmer son droit de se plaindre ultérieurement de la violation qu'il
allègue (ATF 130 III 66 consid. 4.3 p. 75 et les arrêts cités).

3.2 En l'occurrence, s'agissant du comportement du juge en charge du dossier,
les faits dont la recourante se plaint sont survenus lors des audiences des 8
décembre 2005 et 23 janvier 2006, alors que l'arrêt attaqué a été rendu le 16
mai 2006. En ne demandant pas immédiatement la récusation du juge en question
et en ne faisant valoir la prévention de ce dernier qu'une fois l'arrêt
prononcé, l'intéressée n'a pas agi à temps et son moyen est irrecevable.
Supposé admissible, le grief devrait de toute manière être rejeté car le juge
pouvait, sans se montrer prévenu, renoncer à poser aux témoins les questions
requises (cf. consid. 4.3 ci-après).

3.3 Par ailleurs, c'est en vain que la recourante tente de s'appuyer sur les
considérations de l'arrêt attaqué pour dénoncer la partialité des membres
siégeant du Tribunal administratif: les termes utilisés dans l'arrêt ne
permettent pas d'établir que ceux-ci avaient déjà une idée préconçue en se
saisissant de l'affaire. Au surplus, elle perd de vue que ce sont les
déclarations avant ou pendant la procédure qui peuvent fonder une
dénonciation pour apparence de prévention (ATF 125 I 119 consid. 3a p. 122)
et non pas les motifs à l'appui de l'arrêt finalement rendu, même s'ils
condamnent, comme en l'espèce, un comportement que l'intéressée dément avoir
eu.

4.
Invoquant l'art. 29 al. 2 Cst., la recourante affirme que le Tribunal
administratif aurait violé son droit d'être entendue en ne procédant pas à
l'audition dûment requise de son époux et de deux témoins et en refusant de
poser certaines questions.

4.1 Le contenu du droit d'être entendu est déterminé en premier lieu par les
dispositions cantonales de procédure, dont le Tribunal fédéral ne contrôle
l'application et l'interprétation que sous l'angle de l'arbitraire.
S'agissant de l'audition de son époux à titre de renseignement, la recourante
se fonde également sur les art. 28 al. 1 et 31 lettre f de la loi cantonale
genevoise du 12 septembre 1985 sur la procédure administrative (ci-après:
LPA). L'art. 28 al. 1 LPA prévoit que, lorsque les faits ne peuvent être
éclaircis autrement, les juridictions administratives peuvent au besoin
procéder à l'audition de témoins. Selon l'art. 31 lettre f LPA, le conjoint
ne peut être entendu qu'à titre de renseignement.
Selon la jurisprudence, le droit d'être entendu comprend pour les
justiciables notamment le droit d'obtenir l'administration des preuves
pertinentes et valablement offertes, de participer à l'administration des
preuves essentielles et de se déterminer sur son résultat lorsque cela est de
nature à influer sur la décision à rendre (ATF 126 I 15 consid. 2a/aa p. 16;
124 I 49 consid. 3a p. 51; 122 I 53 consid. 4a p. 55 et les arrêts cités). Le
droit d'être entendu ne peut être exercé que sur les éléments qui sont
déterminants pour décider de l'issue du litige. Il est ainsi possible de
renoncer à l'administration de certaines preuves offertes lorsque le fait à
établir est sans importance pour la solution du cas, qu'il résulte déjà de
constatations ressortant du dossier ou lorsque le moyen de preuve avancé est
impropre à fournir les éclaircissements nécessaires. L'appréciation anticipée
des preuves ne constitue pas une atteinte au droit d'être entendu directement
déduit de l'art. 29 al. 2 Cst. (ATF 125 I 127 consid. 6c/cc p. 135,
417 consid. 7b p. 430; 124 I 208 consid. 4a p. 211, 241 consid. 2 p. 242; 124
V 180 consid. 1a p. 181 et les arrêts cités). Au même titre que toute
appréciation des preuves, l'appréciation anticipée de celles-ci est soumise à
l'interdiction de l'arbitraire (ATF 124 I 274 consid. 5b p. 285 et les
références citées).
En l'espèce, les dispositions cantonales invoquées par la recourante
n'accordent pas un droit plus étendu à une audition de témoin, de sorte que
le grief soulevé doit être examiné exclusivement à la lumière des principes
déduits directement de l'art. 29 al. 2 Cst. (ATF 131 I 91 consid. 3.1 p. 95;
126 I 15 consid. 2a p. 16 et les arrêts cités).

4.2 La recourante estime que l'audition de son époux aurait permis d'éclairer
les juges sur les répercussions des faits dénoncés dans sa vie de couple. Or,
le témoignage de son époux était d'emblée sujet à caution, étant donné que
celui-ci avait assisté aux audiences d'enquête. En outre, le Tribunal
administratif pouvait s'estimer suffisamment renseigné par les déclarations
écrites de l'intéressée et les autres témoignages. Dès lors, il pouvait, par
une appréciation anticipée dénuée d'arbitraire, renoncer à entendre l'époux
de la recourante.

4.3 L'intéressée est d'avis que l'autorité intimée ne pouvait se passer
d'instruire les questions ayant trait à la distribution d'un catalogue de
lingerie féminine, à la consultation de sites pornographiques par le
personnel de Y.________, aux plaisanteries des doyens sur les candidates à
l'enseignement ainsi que sur les mesures générales adoptées par le
Département cantonal pour éviter le harcèlement sexuel. Or, le Tribunal
administratif a renoncé, sans verser dans l'arbitraire, à administrer ces
preuves, en tant qu'elles étaient sans rapport direct avec l'objet du litige,
celui-ci étant limité à la question du harcèlement sexuel dont la recourante
se prétendait victime. Pour cette même raison, le Tribunal administratif
pouvait écarter la requête visant à l'audition de deux autres témoins. Ces
derniers, étrangers aux faits litigieux, ne pouvaient apporter aucun
renseignement utile pour l'appréciation du cas particulier.

4.4 Le grief de violation du droit d'être entendu est dès lors mal fondé.

5.
La recourante demande qu'un certain nombre de précisions et de compléments
soit apporté à l'état de fait établi par le Tribunal administratif. Or, les
faits invoqués par la recourante n'ont pas été ignorés par l'autorité
intimée, mais ils ne représentaient pas des faits pertinents à ses yeux. La
recourante estime par ailleurs que l'autorité intimée "aurait dû citer ne
serait-ce qu'une dizaine de courriers de Z.________ pour pouvoir ensuite se
prononcer sur leur caractère répétitif et discriminatoire". L'autorité ne
saurait être tenue de retranscrire dans sa décision tous les éléments du
dossier en détail. Dans le cas d'espèce, le Tribunal administratif a indiqué
avoir pris connaissance des courriers électroniques échangés entre la
recourante et Z.________, dont il a manifestement tenu compte pour former son
opinion. Ainsi, les faits constatés par l'autorité intimée ne sont pas
manifestement inexacts ou incomplets au sens de l'art. 105 al. 2 OJ. Au
demeurant, dans la mesure où la recourante s'en prend à la qualification et à
l'appréciation juridique de certains faits, elle soulève une question de
droit que l'autorité de céans examine de toute façon librement (ATF 131 III
182 consid. 3 p. 184 et l'arrêt cité).

6.
Sur le fond, la recourante soutient qu'en niant l'existence d'un harcèlement
sexuel, l'autorité intimée a violé l'art. 4 LEg.

6.1 Il est interdit de discriminer les travailleurs à raison du sexe (art. 3
al. 1 LEg). Par comportement discriminatoire, on entend tout comportement
importun de caractère sexuel ou tout autre comportement fondé sur
l'appartenance sexuelle, qui porte atteinte à la dignité de la personne sur
son lieu de travail, en particulier le fait de proférer des menaces, de
promettre des avantages, d'imposer des contraintes ou d'exercer des pressions
de toute nature sur une personne en vue d'obtenir d'elle des faveurs de
nature sexuelle (art. 4 LEg). Selon la jurisprudence, les remarques sexistes
et les commentaires grossiers ou embarrassants entrent dans la définition du
harcèlement sexuel. Bien que l'art. 4 LEg ne se réfère qu'à des cas d'abus
d'autorité, la définition englobe tous les comportements importuns de
caractère sexuel, soit également ceux qui contribuent à rendre le climat de
travail hostile, par exemple des plaisanteries déplacées (ATF 126 III 395
consid. 7b/bb p. 397 et les références; arrêt 4C.187/2000 du 6 avril 2001,
consid. 2b). Le fait que l'employée qui se plaint de harcèlement ait
elle-même eu recours au même vocabulaire ne saurait en principe justifier
l'admission par l'employeur de remarques sexistes, grossières ou
embarrassantes, en particulier de la part d'un supérieur hiérarchique dont le
comportement peut déteindre sur celui de ses subordonnés, sous réserve de
l'hypothèse où un tel langage aurait été utilisé dans un contexte a priori
personnel, comme des messages échangés entre collègues de travail
(ATF 126 III 395 consid. 7d p. 399; arrêt 4C.60/2006 du 22 mai 2006, consid.
3.1).
6.2 Il ressort des nombreux courriers électroniques figurant au dossier que,
entre septembre 2002 et mars 2003, la recourante et Z.________ ont entretenu
des rapports empreints de complicité et de confiance. Les protagonistes
s'adressaient des compliments, des remarques d'ordre personnel, des
encouragements et des conseils. Il n'apparaît nulle part que la recourante
aurait été gênée par les compliments de Z.________ ou importunée par ses
messages et qu'elle aurait tenté d'y mettre fin. Au contraire, son attitude
et ses réponses systématiques, parfois même instantanées, indiquaient
clairement qu'elle acceptait et appréciait ces échanges. Au surplus, aucun
message de Z.________ ne contient de propos, voire d'allusions ou de
sous-entendus, à connotation sexuelle, ni de déclarations ou insinuations
propres à porter atteinte à la personnalité de l'intéressée. Il en est de
même pour la peluche et le disque offert par Z.________ à cette dernière,
ainsi d'ailleurs qu'à d'autres collaboratrices.
Les relations entre les protagonistes se sont dégradées à la suite d'un
différend d'ordre professionnel survenu le 18 mars 2003. A partir de ce
moment-là, la recourante a complètement changé d'attitude vis-à-vis de
Z.________. Dans un premier temps, elle l'a dénoncé auprès du directeur pour
ses manoeuvres subversives au sein de Y.________, puis, six mois plus tard,
elle l'a accusé de harcèlement sexuel. La recourante ne cite toutefois dans
son mémoire de recours que des passages de courriers électroniques, parfois
même sortis de leur contexte, où Z.________ lui adresse des compliments et
elle leur donne une interprétation très orientée. Elle omet systématiquement,
comme elle le faisait déjà en instance cantonale, de reproduire les réponses
où elle le remercie et le complimente à son tour.
Par ailleurs, l'autorité intimée a interrogé plusieurs personnes qui
travaillaient à Y.________ à l'époque des faits. Il en ressort que Z.________
tentait d'établir des rapports plus amicaux avec le personnel de Y.________
et souhaitait améliorer l'ambiance au travail. Il avait toutefois des
problèmes relationnels, autant avec la direction qu'avec les collaboratrices,
et sa présence créait des tensions entre les secrétaires. Plusieurs témoins
ont relevé que Z.________ tenait des propos déplacés, particulièrement sur le
compte de collègues féminines, mais que la recourante n'était pas la cible
privilégiée de ces remarques. Au demeurant, à part l'un des doyens de
Y.________, aucun ancien collègue de la recourante ne se souvient que cette
dernière se soit plainte du comportement de Z.________. Le directeur de
Y.________ a constaté que, jusqu'à la fin de l'année 2002, il existait une
certaine complicité entre les protagonistes. En outre, alors que les doyens
n'étaient pas satisfaits du travail de la recourante, Z.________ le jugeait
excellent. Les témoignages confirment ainsi que, jusqu'à l'incident du 18
mars 2003, les relations entre les protagonistes n'étaient pas problématiques
et que la recourante s'accommodait des manières de Z.________, même si elles
étaient parfois inadéquates de la part d'un supérieur hiérarchique.
Dans ces circonstances, c'est à bon droit que le Tribunal administratif a nié
l'existence de harcèlement sexuel.

6.3 En l'absence de harcèlement sexuel, la recourante ne saurait prétendre
valablement à une indemnité sur la base de l'art. 5 al. 3 LEg. En tout état
de cause, lorsque la recourante a informé le directeur de Y.________, en mars
2003, du différend qui l'opposait à Z.________, et lui a remis une partie des
messages électroniques échangés, elle n'a fait aucune allusion à des actes de
harcèlement sexuel et lui a expressément demandé de garder ces documents
confidentiels. Elle a ainsi empêché la direction de Y.________ de prendre
d'éventuelles mesures fondées sur l'art. 2B al. 1 de la loi générale
genevoise du 4 décembre 1997 relative au personnel de l'administration
cantonale et des établissements publics médicaux, lequel prévoit qu'il est
veillé à la protection de la personnalité des membres du personnel, notamment
en matière de harcèlement psychologique et de harcèlement sexuel, par des
mesures de prévention et d'information. Par ailleurs, ce n'est que par un
courrier du 22 septembre 2003, adressé au Conseiller d'Etat en charge du
Département cantonal, qu'elle s'est plainte de harcèlement sexuel, alors que
Z.________ ne travaillait plus à Y.________. Quoi qu'il en soit, après avoir
obtenu un entretien le 26 septembre 2003 avec le directeur de Y.________ et
un responsable des ressources humaines du Département cantonal, elle était
déjà affectée à un autre poste à partir du 1er octobre 2003. Il s'ensuit que
l'Etat de Genève a donné rapidement suite aux doléances de la recourante et a
agi de façon adéquate.

7.
Il résulte de ce qui précède que l'autorité intimée n'a pas constaté les
faits de manière incomplète ou inexacte ni au mépris de règles essentielles
de procédure; elle les a appréciés correctement et n'a pas violé le droit
fédéral, en particulier la loi sur l'égalité, en prenant la décision
attaquée.
Partant, le recours doit être rejeté. Il n'est pas perçu de frais, la
procédure étant gratuite (art. 13 al. 5 LEg), et l'Etat de Genève n'a pas
droit à des dépens (art. 159 al. 2 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Il n'est pas perçu de frais.

3.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties et au
Tribunal administratif du canton de Genève ainsi qu'au Bureau fédéral de
l'égalité entre femmes et hommes.

Lausanne, le 9 février 2007

Au nom de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le président:  La greffière: