Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

II. Öffentlich-rechtliche Abteilung 2A.227/2006
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{T 0/2}
2A.227/2006 /svc

Arrêt du 10 octobre 2006
IIe Cour de droit public

MM. et Mme les Juges Merkli, Président,
Hungerbühler, Wurburger, Müller et Yersin.
Greffier: M. Dubey.

Administration fiscale cantonale de la République
et canton de Genève, 1211 Genève 3,
recourante,

contre

1. Hoirie de feue X.________, soit,

2. A.________,

3. B.________,

4. C.________,

5. D.________,
intimés,
tous les quatre représentés par Me Claude Brechbühl, avocat,
Tribunal administratif du canton de Genève,
case postale 1956, 1211 Genève 1.

Impôt fédéral direct 1997/98, imposition d'après la dépense

recours de droit administratif contre l'arrêt du Tribunal administratif du
canton de Genève du 7 mars 2006.

Faits:

A.
X. ________, veuve de feu E.________ décédé le 2 mars 1985, était
propriétaire depuis cette date de l'ensemble du capital-actions de la société
immobilière F.________ (ci-après: SI F.________): Cette société détenait à
G.________ une parcelle de 80 m2, une autre de 15'999 m2 supportant un
pavillon d'été de 145 m2 et une dernière de 24'528 m2 supportant une
dépendance de 44 m2 et une villa de 265 m2, habitée par les époux X.________
et E.________ depuis 1947.
Depuis 1986, l'Administration fiscale du canton de Genève, agissant également
comme Administration cantonale de l'impôt fédéral direct (ci-après:
l'Administration fiscale), admettait que X.________ soit imposée sur une
dépense annuelle de 1'000'000 fr. Cet accord a été renouvelé pour la dernière
fois pour les années 1996 à 1999.
Pour la période fiscale 1995/1996, X.________ a été imposée sur une dépense
d'un million de francs. L'impôt fédéral direct annuel qui résultait de cette
taxation s'élevait à 115'517 fr. 50.

B.
Dans un courrier du 6 août 1997, X.________ a demandé à l'Administration
fiscale de revoir le montant de la dépense imposable. Elle y indiquait avoir
un train de vie considérable en raison de la très importante propriété
détenue par la SI F.________. Vu les frais importants qu'engendrait celle-ci,
ses avoirs en liquidités ne suffisaient plus à assurer ce train de vie, ce
qui l'amenait à vivre sur sa fortune. Elle avait, en outre, au décès de son
mari en 1985, gratifié chacun de ses quatre enfants d'une donation de 10
millions de francs et envisageait de liquider la SI F.________ afin de
préparer les morcellements éventuels qui pourraient survenir après son décès.
Cette opération devait entraîner un prélèvement d'impôt de 2'500'000 fr. Dans
ces conditions, il fallait retenir une valeur de 1'800'000 fr. pour la villa
et le terrain ainsi qu'une valeur locative de 54'000 fr. (3% de la valeur de
l'ensemble), ce qui, après multiplication par cinq, portait le montant de la
dépense à 270'000 fr.
Le 2 septembre 1997, un nouvel accord, entré en vigueur dès 1998, pour les
années 1998 à 2000, a fixé la dépense annuelle imposable pour l'impôt fédéral
direct à 270'000 fr., sous réserve notamment que ce montant ne soit pas
inférieur à cinq fois la valeur locative des locaux occupés comme locataire,
actionnaire ou propriétaire selon les modalités d'application de l'impôt à
forfait ni à celui, calculé selon le régime du droit commun qui serait dû sur
les éléments de revenu énumérés à l'art. 14 al. 3 lettres a à f de la loi
fédérale du 14 décembre 1990 sur l'impôt fédéral direct (LIFD; RS 642.11).
Le 20 janvier 1998, la SI F.________ est entrée en liquidation. La valeur des
immeubles qu'elle détenait a été arrêtée à 17'500'000 fr. Par acte notarié du
28 janvier 1998, ces immeubles ont été transférés à son actionnaire unique
X.________.

C.
Par décision de taxation notifiée le 28 décembre 1998, l'Administration
fiscale a arrêté le montant imposable à 1'455'800 fr. pour l'impôt fédéral
direct de la période fiscale 1997/1998 et fixé l'impôt dû à 167'417 fr. pour
1997 et à un montant identique pour 1998. Le montant de la dépense correspond
à 7% de la valeur comptable (4'159'455 fr.), dans le bilan de la SI
F.________, de l'immeuble occupé par l'intéressée multipliée par cinq.
Le 2 juillet 1999, X.________ a contesté cette taxation par la voie de la
réclamation. Par décision du 19 novembre 2001, l'Administration fiscale a
rejeté la réclamation.
Le 19 décembre 2001, X.________ a demandé à la Commission cantonale de
recours en matière d'impôt fédéral direct (ci-après: la Commission de
recours) d'annuler la taxation du 28 décembre 1998 ainsi que la décision sur
réclamation rendue le 19 décembre 2001 par l'Administration fiscale et de
calculer l'impôt fédéral direct sur un montant de 270'000 fr. pour l'année
1998. Par décision du 8 juin 2005, la Commission de recours a déclaré la
réclamation recevable et rejeté le recours.
Le 20 juillet 2005, l'hoirie de l'intéressée, décédée le 25 juillet 2002, a
demandé au Tribunal administratif du canton de Genève d'annuler la taxation
du 28 décembre 1998, la décision sur réclamation du 19 décembre 2001 ainsi
que la décision rendue le 8 juin 2005 par la Commission de recours et de
calculer l'impôt fédéral direct sur un montant de 270'000 fr. pour l'année
1998.

D.
Le 7 mars 2006, le Tribunal administratif a admis le recours. Il a annulé la
taxation du 28 décembre 1998 en tant qu'elle concerne l'année 1998 et renvoyé
le dossier à l'Administration pour nouvelle décision au sens des
considérants. Il relevait que l'accord du 2 septembre 1997 fixait non
seulement le montant imposable, mais aussi la valeur locative de
l'intéressée. L'Administration fiscale avait violé le principe de la bonne
foi en revenant sur cet accord. Pour calculer la valeur locative au sens de
l'art. 1 de l'ordonnance du 15 mars 1993 sur l'imposition d'après la dépense
en matière d'impôt fédéral direct (OIDIFD; RS 642.123), il fallait appliquer
les critères de l'art. 21 al. 2 LIFD. En suivant les critères fixés dans le
"questionnaire adressé à tous les propriétaires d'appartements et de villas"
dans le but d'établir la valeur locative pour le calcul de l'impôt fédéral
direct pour la période fiscale 1997/1998, l'intéressée avait démontré qu'elle
obtenait une valeur locative de 43'721 fr. 80. Le fait qu'au 1er janvier
1997, les immeubles étaient encore propriété de la SI F.________ n'y
changeait rien, puisque l'intéressée était propriétaire de l'intégralité du
capital-action de la société. L'Administration fiscale ne pouvait dès lors
retenir la valeur comptable de ces immeubles.

E.
Agissant par la voie du recours de droit administratif, l'Administration
fiscale demande au Tribunal fédéral d'annuler, sous suite de frais, l'arrêt
du Tribunal administratif du 7 mars 2006. Elle fait valoir une violation des
art. 9 Cst. et 14 LIFD.
Le Tribunal administratif renvoie aux considérants et au dispositif de son
arrêt. L'Administration fédérale des contributions conclut à l'admission du
recours. L'hoirie de feue X.________, soit, A.________, B.________,
C.________ et D.________, conclut, sous suite de frais et dépens, au rejet du
recours et au renvoi de la cause à l'Administration fiscale pour nouvelle
décision au sens des considérants.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
1.1 Déposé en temps utile contre une décision rendue par une autorité
judiciaire statuant en dernière instance cantonale et fondée sur le droit
public fédéral, le présent recours est recevable au regard des art. 97 ss OJ
et de l'art. 146 LIFD, qui confèrent précisément le droit de recourir à
l'administration  cantonale de l'impôt fédéral direct (art. 103 lettre c OJ).

1.2 Le recours de droit administratif peut être formé pour violation du droit
fédéral, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation, ainsi que
pour constatation inexacte ou incomplète de faits pertinents (art. 104 lettre
a et b OJ; ATF 132 II 47 consid. 1.2 p. 49). Le Tribunal fédéral revoit
d'office l'application du droit fédéral qui englobe notamment les droits
constitutionnels du citoyen (ATF 130 III 707 consid. 3.1 p. 709; 130 I 312
consid. 1.2 p. 318; 129 II 183 consid. 3.4 p. 188). Comme il n'est pas lié
par les motifs que les parties invoquent, il peut admettre le recours pour
d'autres raisons que celles avancées par le recourant ou, au contraire,
confirmer la décision attaquée pour d'autres motifs que ceux retenus par
l'autorité intimée (art. 114 al. 1 in fine OJ; ATF 132 II 257 consid. 2.5
p. 262). En matière de contributions publiques, il peut en outre aller
au-delà des conclusions des parties, à l'avantage ou au détriment de
celles-ci, lorsque le droit fédéral est violé ou lorsque des faits ont été
constatés de manière inexacte ou incomplète (cf. art. 114 al. 1 OJ). Lorsque
le recours est dirigé, comme en l'espèce, contre la décision d'une autorité
judiciaire, le Tribunal fédéral est en revanche lié par les faits constatés
dans cette décision, sauf s'ils sont manifestement inexacts ou incomplets, ou
s'ils ont été établis au mépris de règles essentielles de procédure (cf. art.
105 al. 2 OJ). Par ailleurs, il ne peut revoir l'opportunité de l'arrêt
entrepris, le droit fédéral ne prévoyant pas un tel examen en la matière.

2.
La recourante reproche au Tribunal administratif d'avoir violé l'art.14 LIFD.

2.1 D'après l'art. 14 LIFD, les personnes physiques qui, pour la première
fois ou après une absence d'au moins dix ans, prennent domicile ou séjournent
en Suisse au regard du droit fiscal, sans y exercer d'activité lucrative, ont
le droit, jusqu'à la fin de la période fiscale en cours, de payer un impôt
calculé sur la dépense au lieu des impôts sur le revenu (al. 1). Lorsque ces
personnes ne sont pas des ressortissants suisses, le droit de payer l'impôt
calculé sur la dépense est accordé au-delà de cette limite (al. 2). L'impôt
est calculé sur la base de la dépense du contribuable et de sa famille et il
est perçu d'après le barème de l'impôt ordinaire. Il ne doit toutefois pas
être inférieur aux impôts calculés d'après le barème ordinaire sur l'ensemble
des éléments bruts comprenant les revenus provenant de la fortune immobilière
sise en Suisse, les revenus provenant des objets mobiliers se trouvant en
Suisse, les revenus des capitaux mobiliers placés en Suisse, y compris les
créances garanties par gage immobilier, les revenus provenant de droits
d'auteur, de brevets et d'autres droits semblables exploités en Suisse, les
retraites, rentes et pensions de source suisse ainsi que les revenus pour
lesquels le contribuable requiert un dégrèvement partiel ou total d'impôts
étrangers en application d'une convention conclue par la Suisse en vue
d'éviter les doubles impositions (al. 3). Le Conseil fédéral édicte les
dispositions nécessaires à la perception de l'impôt calculé sur la dépense
(al. 4).

2.2 Selon l'art. 1 de l'ordonnance du 15 mars 1993 sur l'imposition d'après
la dépense en matière d'impôt fédéral direct (OIDIFD; RS 642.123), l'impôt
sur la dépense est calculé en fonction des frais annuels occasionnés, pendant
la période de calcul, par le train de vie du contribuable. Il se fonde au
minimum pour les contribuables chefs de ménage sur un montant égal au
quintuple du loyer du contribuable locataire ou au quintuple de la valeur
locative du logement qu'il occupe et dont il est propriétaire, pour les
autres contribuables, sur un montant égal au double du prix de la pension
pour le logement et la nourriture. S'il résulte de l'art. 14 al. 3 LIFD un
impôt plus élevé, celui-ci prévaut.
Dans la circulaire n° 9 du 3 décembre 1993 (Archives 62, p. 482 ss),
l'Administration fédérale des contributions précise que la dépense imposable
est égale au total des frais annuels, en Suisse et à l'étranger, afférents au
train de vie du contribuable et des personnes qui sont à sa charge et vivent
en Suisse; la dépense déterminante est celle qui est faite pendant la période
de calcul concernée. En font partie, les frais de nourriture et
d'habillement, les frais de logement, y compris les frais de chauffage, de
nettoyage, d'entretien de jardins, etc., les charges totales pour le
personnel (prestations en espèces et en nature) attaché au service du
contribuable, les dépenses pour la formation, les loisirs, le sport, etc.,
les dépenses pour les voyages, les vacances, les cures, etc., les frais
d'entretien d'animaux domestiques coûteux (chevaux de selle, etc.); les frais
d'entretien et d'utilisation d'automobiles, de bateaux à moteur, de yachts,
d'avions, etc., tous les autres frais afférents au train de vie. Comme valeur
locative de la maison ou du logement qu'il occupe et qui lui appartient, le
contribuable indiquera le loyer annuel qu'il devrait payer pour un objet de
même nature dans une situation semblable. Il n'y a pas de réduction en cas de
sous-utilisation. Pour chaque période fiscale, on déterminera aussi bien la
dépense annuelle effective du contribuable que le loyer ou la valeur locative
ou le prix de pension déterminant pour une année. Aucune déduction n'est
admise sur le montant imposable (frais afférents au train de vie ou multiple
du loyer ou de la valeur locative ou du prix de pension). Le montant ainsi
déterminé sert de base de calcul à moins que le calcul de contrôle ne
conduise à un montant d'impôt plus élevé (chiffre 2.1).
Selon la doctrine, afin d'éviter à l'autorité fiscale un contrôle, souvent
impossible, des revenus provenant de l'étranger, l'impôt est d'abord calculé
sur le train de vie du contribuable (Bernhard Zwahlen, in: Kommentar zum
Schweizerischen Steuerrecht, Bundesgesetz über die direkte Bundessteuer
(DBG), I/2a, Bâle 2000, n° 24 ad art. 14 LIFD, p. 119 s.; Peter Locher,
Kommentar zum DBG, Therwil/Bâle 2001, 1ère partie, n° 16 ad art. 14 LIFD,
p. 249; Richner/Frei/Kaufmann, Handkommentar zum DBG, Verlag Zürcher
Steuerrecht 2003, n° 25 ad art. 14 LIFD, p. 126; Danielle Yersin, L'égalité
de traitement en droit fiscal, RDS 111, n° 186, p. 256 et n° 190 p. 258; cf.
aussi la Circulaire n° 9 du 3 décembre 1993 de l'Administration fédérale des
contributions relative à l'OIDIFD, n° 2.1). Par voie de simplification,
l'estimation du train de vie peut être fixée en fonction de la valeur
locative (art. 1 OIDIFD). Il ne s'agit pas de soumettre à l'impôt la valeur
locative pour elle-même, mais de faire usage d'une dépense du contribuable
consentie en Suisse aux fins d'estimer son train de vie qui seul fait objet
de l'impôt d'après la dépense, ce qui comme le précise la Circulaire n° 9
exclut une réduction en cas de sous-utilisation (Peter Locher, op. cit., n°
23 ad art. 14 LIFD, p. 251; Richner/Frei/Kaufmann, op. cit., n° 30 ad art. 14
LIFD, p. 127; contra: Bernhard Zwahlen, op. cit., n° 28 ad art. 14 LIFD, p.
120 s. qui souligne qu'aucune déduction organique ne saurait diminuer la
valeur locative puisqu'il faut la considérer comme partie d'un calcul spécial
conduisant au revenu imposable, n° 29, p. 121).
L'impôt fait ensuite l'objet d'un second calcul dit de contrôle. En effet, le
train de vie ne doit pas être inférieur aux impôts calculés d'après le barème
ordinaire sur l'ensemble des éléments bruts décrits par l'art. 14 al. 3
lettres a à f LIFD (Peter Locher, op. cit., n° 39 ad art. 14 LIFD, p. 255;
Bernhard Zwahlen, op. cit., n° 43 ad art. 14 LIFD, p. 124).

2.3 En l'espèce, la décision de taxation pour l'impôt fédéral direct de la
période fiscale 1995/1996 rendue le 18 juillet 1996 a arrêté la dépense
imposable de l'intimée à un million de francs. Cette taxation est entrée en
force. Rien au dossier ne démontre que la situation qui prévalait durant la
période de calcul antérieure au 1er janvier 1995 ait subi des modifications
essentielles qui puissent justifier une réduction du montant de la dépense
consentie durant les années de calcul 1995/1996 servant à l'imposition pour
la période fiscale 1997/1998, seule en cause ici. Ni le statut personnel de
l'intimée ni la propriété des immeubles qu'elle occupait ne se sont modifiés.
En particulier, au 1er janvier 1997, date déterminante pour l'impôt fédéral
direct de la période fiscale 1997/1998 (cf. art. 42 lettre a LIFD), les
immeubles occupés par l'intimée étaient dans la propriété de la SI de
Tulette. Le Tribunal administratif ne pouvait dès lors pas confondre les
entités juridiques distinctes que constituaient l'intimée et la société
immobilière, quand bien même le capital-actions de cette dernière était
entièrement détenu par l'intimée, pour confirmer un montant de la dépense
fixée à 270'000 fr. Au surplus, l'art. 21 al. 2 LIFD n'avait pas
d'application. Comme indiqué ci-dessus, dans le cadre de l'art. 14 LIFD,
c'est la dépense du contribuable qui est déterminante, dont la valeur
locative n'est qu'un facteur de calcul. Dès lors, il n'y a pas lieu de la
déterminer dans le détail au sens de l'art. 21 LIFD.
Pour le surplus, l'intimée ne démontre pas que sa situation aurait subi des
modifications ni que ses dépenses ont diminué durant les années de calcul.
Les motifs qu'elle invoque à cet effet n'autorisent pas une telle réduction.
En particulier, le fait qu'elle ait entamé sa fortune pour financer son train
de vie et qu'elle ait effectué en 1985 des donations importantes à ses
enfants n'est pas déterminant pour fixer le montant de la dépense servant au
calcul de l'imposition pour la période fiscale en cause. A défaut de preuves
du contraire, l'âge de l'intimée pris pour lui-même n'autorise pas non plus
une réduction du montant des dépenses. En effet, avec l'âge, les dépenses
certes changent mais ne diminuent pas forcément. Enfin, les impôts résultant
de la liquidation de la société immobilière ne justifient pas non plus une
baisse des dépenses imposables. Il n'existe pas de droit à une charge fiscale
constante. A cela s'ajoute que la liquidation de la société immobilière,
intervenue en janvier 1998, a eu lieu en dehors de la période de calcul
servant à fixer l'imposition pour la période fiscale 1997/1998.
Il s'ensuit qu'une dépense imposable fixée à 270'000 fr. est dénuée de tout
fondement et ne saurait être retenue pour la période fiscale 1997/1998. Il
reste à examiner si l'administration fiscale pouvait arrêter la dépense à
1'455'800 fr.

2.4 L'Administration fiscale a considéré que le montant imposable devait
correspondre à 7% de la valeur comptable (4'159'455 fr.), multipliée par
cinq, de l'immeuble occupé par l'intimée. Ce calcul ne peut être confirmé.
Dans la mesure où l'intimée et la SI F.________ sont des entités juridiques
distinctes, la valeur locative servant de base de calcul de la dépense
devrait correspondre au montant du loyer qui pourrait être obtenu pour cet
objet, ce qui ne saurait résulter automatiquement de sa valeur comptable.
L'Administration fiscale n'indique pas non plus que la société immobilière
aurait effectué d'autres prestations à l'intimée. Enfin, la liquidation, et
par conséquent l'excédent de liquidation obtenu par l'intimée, sont
intervenus en 1998, alors que les années de calcul de la période fiscale en
cause sont les années 1995/1996. Il n'y a dès lors pas lieu d'examiner dans
quelle mesure cet excédent de liquidation constituerait un revenu de source
suisse au sens de l'art. 14 al. 3 LIFD.
La valeur retenue par la recourante dans sa taxation est par conséquent
également dépourvue de fondement.

3.
La recourante reproche au Tribunal administratif d'avoir violé l'art. 9 Cst.,
en considérant qu'elle était tenue par l'accord passé entre elle et l'intimée
le 2 septembre 1997.

3.1 Une convention ou un arrangement fiscal visent à établir une
réglementation valable pour un état de fait concret, unique ou se répétant,
quant à l'existence, à l'étendue ou au mode de l'assujettissement,
réglementation qui déroge aux dispositions légales (arrêt 2A.53/1998 du 12
novembre 1998 in RF 54/1999 p.118, consid. 7b/aa; ATF 101 Ia 92 consid. 2 p.
98; Archives 58 p. 210 consid. 2b p. 213). Selon la jurisprudence, un
arrangement accordant un privilège au contribuable peut faire l'objet d'un
contrat de droit administratif qui lie l'autorité fiscale. Il doit toutefois
être autorisé par la loi ou, du moins, ne pas être expressément exclu par
celle-ci. La jurisprudence et la doctrine ne font exception à cette règle que
si la base légale est incertaine et si l'autorité procède selon la règle que
le législateur aurait adoptée s'il avait voulu prendre en considération le
cas d'espèce (cf. arrêt 2A.53/1998 du 12 novembre 1998 in RF 54/1999 p. 118,
consid. 7b/aa; ATF 103 Ia 31 consid. 2b p. 34, 505 consid. 3a-b p. 512/513;
Archives 63 p. 661 consid. 5a p. 670; 58 p. 210 consid. 2b-c p. 213; 39 p. 35
consid. 2 p. 35/36). La jurisprudence admet également que, si, dans le cadre
de la procédure de taxation, ni le fisc ni le contribuable n'ont une
connaissance exacte des éléments de fait et que leur détermination
nécessiterait des efforts considérables, ils peuvent conclure un accord sur
ce point, même en l'absence de base légale; une telle convention ne doit
toutefois pas être contraire au droit matériel (arrêt 2A.53/1998 du 12
novembre 1998 in RF 54/1999 p. 118, consid. 7b/aa; Archives 63 p. 661
consid. 5a p.  670; 41 p. 28 consid. 1a p. 31; 39 p. 33 consid. 3 p. 36/37;
17 p. 391 consid. 3 p. 393/394 et les références citées).
L'arrêté du Conseil fédéral du 9 décembre 1940 concernant l'impôt fédéral
direct ne contenait aucune base légale à cet égard, de sorte que de tels
arrangements n'étaient pas admissibles en matière d'impôt fédéral direct
(arrêt 2A.53/1998 du 12 novembre 1998 in RF 54/1999 p. 118, consid. 7b/aa;
Archives 58 p. 210 consid. 2c p. 213 et les références citées). Il en va de
même de la loi fédérale du 14 décembre 1990 qui ne contient pas non plus de
base légale à cet égard, de sorte que de tels arrangements ne sont en
principe pas autorisés.

3.2 L'imposition d'après la dépense se substitue à l'imposition ordinaire sur
le revenu (art. 14 al. 1 LIFD). Elle ne constitue ni un arrangement fiscal ni
un "privilège", mais bien une procédure légale de taxation qui trouve son
épilogue dans la notification d'une décision de taxation ordinaire au sens de
l'art. 131 LIFD (art. 6 OIDIFD; cf. Bernhard Zwahlen, op. cit., n° 1 ad art.
14 LIFD, p. 114 s.; Peter Locher, op. cit., n° 5 ad art. 14 LIFD, p. 246;
Richner/Frei/Kaufmann, op. cit., n° 5 ad art. 14 LIFD, p. 123; Danielle
Yersin, op. cit., p. 145 ss, n° 187 p. 257 et n° 192 p. 259 et les références
citées). Instauré pour des raisons pratiques, ce régime spécial doit être
accordé, sur demande du contribuable, lorsque les conditions en sont
remplies. Toutefois, le contribuable peut renoncer à l'impôt forfaitaire dès
le début de l'assujettissement ou après un certain temps. Le droit de
renoncer peut en principe être exercé lors de chaque période fiscale (cf.
arrêt 2A.45/2001 du 12 juillet 2001, consid. 2; Bernhard Zwahlen, op. cit.,
n° 1 à 6 ad art. 14 LIFD, p. 114 s.; Peter Locher, op. cit., n° 4, 7 et 38 ad
art. 14 LIFD, p. 245 s. et p. 255; Danielle Yersin, op. cit., n° 190 p. 258;
Richner/Frei/Kaufmann, op. cit., n° 4 ad art. 14 LIFD, p. 123).
Il suit de ce qui précède que les difficultés auxquelles pourrait donner lieu
la détermination des éléments imposables des contribuables autorisés à
demander une imposition d'après la dépense font précisément l'objet des
simplifications prévues par les dispositions de l'art. 14 LIFD et de son
ordonnance d'exécution du 15 mars 1993 sur l'imposition d'après la dépense en
matière d'impôt fédéral direct. Dans ces conditions, un arrangement fiscal
ayant pour objet l'imposition d'après la dépense et fixant le revenu
imposable pour plusieurs périodes doit être considéré en principe comme nul.
Si tel n'était pas le cas, il lierait l'autorité fiscale contra legem,
empêchant le cas échéant le calcul de contrôle de l'art. 14 al. 3 LIFD ou la
prise en considération de circonstances nouvelles.
Il n'est toutefois pas nécessaire de trancher définitivement la question de
la validité de l'arrangement litigieux, relativisé par les clauses de
précaution qu'il contenait, réservant certains aspects légaux, car, conclu en
septembre 1997, il est douteux qu'il puisse influencer la dépense des années
de calcul 1995/1996 en cause (cf. art. 1 OIDIFD) et avoir un effet rétroactif
sur des éléments de fait.

3.3 En l'espèce, il ne fait pas doute que l'arrangement fixant la dépense à
270'000 fr. était contraire à la réglementation de l'art. 14 LIFD, comme cela
a été relevé ci-dessus (cf. consid. 2.3). Toutefois, même nul, un arrangement
peut engager la bonne foi des contribuables et autorités qui y sont parties.
Reste à examiner si l'accord du 2 septembre 1997 contenait une promesse qui
liait l'Administration fiscale dans les conditions de l'art. 9 Cst.

4.
4.1 Découlant directement de l'art. 9 Cst. et valant également en droit
fiscal, le principe de la bonne foi protège le citoyen dans la confiance
légitime qu'il met dans les assurances reçues des autorités, lorsqu'il a
réglé sa conduite d'après des décisions, des déclarations ou un comportement
déterminé de l'administration (ATF 131 II 627 consid. 6.1 p. 636 s.; 129 I
161 consid. 4.1 p. 170; 128 II 112 consid. 10b/aa p. 125; 126 II 377 consid.
3a p. 387 et les arrêts cités). Selon la jurisprudence, un renseignement ou
une décision erronés de l'administration peuvent obliger celle-ci à consentir
à un administré un avantage contraire à la réglementation en vigueur, à
condition que (a) l'autorité soit intervenue dans une situation concrète à
l'égard de personnes déterminées, (b) qu'elle ait agi ou soit censée avoir
agi dans les limites de ses compétences et (c) que l'administré n'ait pas pu
se rendre compte immédiatement ("ohne weiteres") de l'inexactitude du
renseignement obtenu. Il faut encore qu'il se soit fondé sur les assurances
ou le comportement dont il se prévaut pour (d) prendre des dispositions
auxquelles il ne saurait renoncer sans subir de préjudice, et (e) que la
réglementation n'ait pas changé depuis le moment où l'assurance a été donnée
(ATF 131 II 627 consid. 6.1 p. 636 s.; 129 I 161 consid. 4.1 p. 170; 122 II
113 consid. 3b/cc p. 123 et les références citées).

4.2 En l'espèce, certaines des conditions pour admettre, comme l'a fait le
Tribunal administratif dans l'arrêt attaqué, que l'Administration fiscale
était tenue par une promesse contenue dans l'accord du 2 septembre 1997, ne
sont pas remplies. En effet, comme l'intimée était représentée par un
mandataire professionnel, on peut se demander dans quelle mesure ce dernier
ne devait pas se rendre compte immédiatement que les motifs qu'il invoquait
pour diminuer la dépense imposable ainsi que le calcul qu'il proposait, fondé
sur une prétendue valeur vénale de l'immeuble et de son rendement, ne
trouvaient aucun appui dans la réglementation de l'art. 14 LIFD (cf. consid.
2.3 ci-dessus). La question peut demeurer indécise, puisque l'intimée n'a en
aucune manière démontré quelles dispositions elle aurait prises et auxquelles
elle ne saurait renoncer sans subir de préjudice. Par conséquent, en jugeant
que l'Administration fiscale était tenue par la promesse de fixer le montant
de la dépense à 270'000 fr., le Tribunal administratif a mal appliqué le
principe de la protection de la bonne foi.

5.
Dans ces conditions, force est de constater que ni l'intimée ni
l'Administration fiscale ne sont parvenus à démontrer que les conditions pour
s'écarter du statu quo, soit d'une dépense arrêtée à un million de francs,
étaient remplies en l'espèce.
Selon le dispositif de l'arrêt attaqué, le Tribunal administratif a "annulé
la décision de la Commission cantonale de recours du 8 juin 2005 (qui
confirmait la décision sur réclamation), la décision sur réclamation de
l'Administration fiscale du 19 novembre 2001 et le bordereau d'impôt du 28
décembre 1998 en tant qu'il concerne 1998". Même si le Tribunal administratif
n'a fixé la dépense que pour l'année de taxation 1998, il faut néanmoins
admettre que ni la taxation pour l'année fiscale 1997 ni celle pour 1998 ne
sont entrées en force. Cela serait contraire aux art. 40 al. 1 et 2 et 43 al.
1 LIFD qui disposent que l'impôt sur le revenu est fixé pour une période
fiscale comprenant deux années civiles consécutives, perçu chaque année
fiscale et calculé sur la base du revenu moyen du contribuable pendant les
deux années civiles ayant précédé la période fiscale. Il s'ensuit que le
revenu imposable de l'intimée au sens de l'art. 14 LIFD doit être rectifié
pour chaque année de calcul et fixé à 1'000'000 fr. en moyenne pour
l'imposition de la période 1997/1998.

6.
Les considérants qui précèdent conduisent à l'admission partielle du recours
de droit administratif. Partant, l'arrêt rendu le 7 mars 2006 par le Tribunal
administratif est annulé. La dépense annuelle est fixée à un million de
francs pour l'impôt fédéral direct de la période fiscale 1997/1998. La cause
est renvoyée à l'Administration fiscale pour nouvelle décision au sens des
considérants et au Tribunal administratif pour nouvelle décision sur les
frais de la procédure devant lui.
Les frais de justice en instance fédérale, d'un montant de 6'000 fr., seront
supportés pour 1/3 par la recourante, dont les intérêts pécuniaires sont en
cause (art. 156 al. 2 OJ), et pour 2/3 par l'intimée (art. 153, 153a et 156
al. 3 OJ). L'intimée, qui succombe pour l'essentiel, n'a pas droit à une
indemnité de dépens (art. 159 al. 3 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est partiellement admis et l'arrêt rendu le 7 mars 2006 par le
Tribunal administratif du canton de Genève est annulé.

2.
La cause est renvoyée à l'Administration fiscale cantonale (agissant comme
Administration cantonale de l'impôt fédéral direct) pour nouvelle décision au
sens des considérants et au Tribunal administratif pour nouvelle décision sur
les frais de la procédure devant lui.

3.
Un émolument judiciaire de 6'000 fr. est mis à hauteur de 2'000 fr. à la
charge de l'Administration fiscale cantonale et à concurrence de 4'000 fr. à
la charge de A.________, B.________, C.________ et D.________, solidairement
entre eux.

4.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux parties et au Tribunal
administratif du canton de Genève ainsi qu'à l'Administration fédérale des
contributions, Division juridique de l'impôt fédéral direct.

Lausanne, le 10 octobre 2006

Au nom de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le président:  Le greffier: