Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Öffentlich-rechtliche Abteilung 1P.81/2006
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1P.81/2006 /col

Arrêt du 12 mai 2006
Ire Cour de droit public

MM. les Juges Aemisegger, Juge présidant,
Aeschlimann et Fonjallaz.
Greffière: Mme Angéloz.

Banque A.________,
recourante, représentée par Me Claude Brechbuhl, avocat,

contre

B.________ et C.________,
intimés, représentés par Me Charles Poncet, avocat,
Procureur général du canton de Genève,
case postale 3565, 1211 Genève 3,
Chambre d'accusation du canton de Genève,
case postale 3108, 1211 Genève 3.

levée de saisie pénale conservatoire,

recours de droit public contre l'ordonnance de la Chambre d'accusation du
canton de Genève du
14 décembre 2005.

Faits:

A.
Par ordonnance du 14 décembre 2005, la Chambre d'accusation du canton de
Genève a rejeté le recours formé par la banque A.________ contre une décision
du juge d'instruction du 5 octobre 2005, qu'elle a confirmée, par laquelle ce
magistrat avait levé la saisie pénale conservatoire opérée sur les avoirs de
B.________ et C.________ déposés sur le compte n° xxx auprès de la banque
D.________.

B.
Cette ordonnance retient, en substance, ce qui suit.

B.a Le 17 juin 1996, le juge d'instruction au Tribunal de Grande Instance de
Paris a adressé à la Suisse une commission rogatoire, complétée le 27
novembre 1996, dans le cadre d'une enquête ouverte pour abus de confiance,
faux dans les titres et usage de faux. La requête exposait qu'un détournement
de l'ordre de 15 millions de US$ avait été commis au préjudice de la banque
publique iranienne A.________. Le dirigeant de la succursale parisienne de
cette banque, E.________, était soupçonné d'avoir viré une partie des fonds,
environ 8 millions de US$, sur un compte n° yyy, ouvert au nom d'une société
F.________, avec siège à Paris, auprès de la banque G.________ à Genève. La
société F.________ avait pour gérant H.________, un certain I.________
semblant, de fait, en être l'animateur. Tant  E.________ que H.________ et
I.________ avaient disparu de leur domicile parisien depuis le constat des
détournements, en décembre 1995.
Le 26 octobre 1998, le magistrat français a décerné une nouvelle commission
rogatoire. Selon cette demande, l'enquête avait révélé que des virements
avaient été effectués auprès de divers établissements bancaires suisses, à
partir du compte n° yyy, appartenant en réalité à K.________ I.________. En
particulier, le 19 septembre 1995, un montant de 1 million de US$ avait été
versé en faveur du compte n° zzz, ouvert auprès de la banque L.________,
devenu ensuite le compte n° aaa; ces avoirs avaient été finalement transférés
auprès de la banque M.________ de Genève, le 30 janvier 1998, sur instruction
des titulaires, soit les époux B.________ et C.________.

B.b Au juge d'instruction genevois en charge de la procédure d'entraide, les
époux B.________ et C.________ ont indiqué être totalement étrangers aux
faits instruits en France. Ils ont expliqué que la somme de 1 million de US$
provenait d'un patrimoine familial légitime, soit du commerce de tapis
exploité par B.________, de la vente - en Iran, en 1979, 1991 et 1993 - de
différents biens immobiliers pour une valeur totale de 3.400.000 FRF, étant
précisé que ces ventes étaient demeurées confidentielles afin d'éviter des
confiscations, et d'un héritage de 400.000 FRF, consécutif au décès du père
de B.________ en 1985. Ayant obtenu, en 1993, le statut de réfugiés
politiques en France, ils avaient décidé de mettre ce patrimoine, géré en
Iran par la mère de C.________, à l'abri, à l'étranger. A cette fin, ils
avaient fait appel à un bureau de change officiel, F.________, qui offrait
ses services aux Iraniens en France. Au décès, en 1995, de la mère de
C.________, la somme transférée au bureau F.________ de Paris ascendait à 1
million de US$, qu'ils avaient fait virer, le 19 septembre 1995, sur un
compte n° zzz, ouvert auprès de la banque L.________ à Genève. Pour des
raisons qu'ils ignoraient, F.________ avait effectué le paiement par le biais
d'un compte dont elle disposait auprès de la banque G.________.

B.c Le 14 septembre 2000, la banque A.________ a déposé plainte pénale auprès
du Procureur général pour blanchiment d'argent, défaut de vigilance en
matière d'opérations financières et recel, reprenant à l'appui les faits à la
base de la demande d'entraide française.
Le 17 octobre 2001, le juge d'instruction a fait notifier à E.________ une
inculpation de blanchiment d'argent. Le 24 novembre 2003, il a décerné un
mandat d'arrêt international contre I.________, des chefs d'escroquerie et de
blanchiment d'argent.
Le 10 décembre 2003, ce magistrat a adressé une commission rogatoire au
Parquet général du Grand Duché du Luxembourg. Il exposait que des fonds,
ayant transité par le compte n° yyy ouvert auprès de la banque G.________,
avaient été virés à la banque M.________ et que deux transferts, l'un de
1.100.000 US$ (valeur 26 mai 1999) et l'autre de 100.000 US$ (valeur 28 juin
1999), avaient ensuite été effectués en faveur du compte n° xxx auprès de la
banque N.________ (devenue la banque D.________). Il demandait à l'autorité
luxembourgeoise d'effectuer toutes recherches utiles concernant le
cheminement des fonds litigieux et de procéder à leur saisie conservatoire.
Suite à cette requête, le compte bancaire n° xxx des époux B.________ et
C.________ auprès de la banque D.________, sur lequel figuraient des avoirs
d'un montant de quelque 752.000 euros, a fait l'objet d'une saisie pénale
conservatoire au Luxembourg.

B.d Le 13 août 2004, les époux B.________ et C.________ ont requis la levée
du séquestre opéré sur leur compte, reprenant à l'appui les explications
qu'ils avaient fournies dans le cadre de la procédure d'entraide française.
Ils ont ajouté que le compte n° zzz, outre le montant de 1 million de US$,
avait été subséquemment crédité de huit chèques entre octobre 1995 et février
1996, d'un montant total de 1.048.118 FRF, qui correspondait également à des
fonds en provenance d'Iran, n'ayant, eux, fait l'objet d'aucun soupçon.
L'intégralité de ces avoirs, soit l'équivalent de 1.224.396,47 US$, avait
ensuite été transférée à la banque M.________, sur un compte bbb, la banque
L.________ ne leur donnant pas satisfaction, puis au Luxembourg, car ils
craignaient que des informations les concernant ne soient communiquées aux
autorités françaises, consécutivement à la commission rogatoire décernée par
ces autorités. La gestion de ces valeurs était toujours restée identique et
se limitait à des dépôts fiduciaires ainsi qu'à des opérations de change;
différents prélèvements avaient été effectués en faveur d'une amie de longue
date de la famille, d'une tante et de la soeur de C.________.
Entendus le 18 octobre 2004 par le juge d'instruction, les époux B.________
et C.________ ont persisté dans leurs explications. Ils ont précisé que,
jusqu'en 2001, le contrôle des changes en Iran était très strict, de sorte
que les Iraniens étaient contraints de recourir à des bureaux de change pour
leurs transferts de fonds. Concrètement, X.________ recevait, "sur une base
de confiance", l'argent liquide à Téhéran; le lendemain, eux-mêmes recevaient
de F.________, respectivement de H.________, frère de X.________, un chèque
de garantie; à réception des fonds, ces chèques étaient restitués au bureau
de change, sans être encaissés. Deux chèques émis par F.________, de 300.000
FRF et 40.000 FRF, encaissés le 6 octobre 1995, avaient complété le virement
de 1 million de US$ à la banque L.________; les six chèques supplémentaires
représentaient des économies de proches, qui transitaient sur leur compte
pour des motifs fiscaux.

Y. ________, fondé de pouvoir auprès de la banque M.________ entre 1995 et
1997, a déclaré que les époux B.________ et C.________ lui avaient été
présentés par I.________, qui était déjà en relation avec la banque pour des
opérations de change; ils avaient une gestion plutôt conservatrice de leurs
avoirs, s'agissant d'économies personnelles accumulées pendant plusieurs
années.

B.e Pour étayer ses dires, B.________ a versé plusieurs justificatifs à la
procédure, soit l'acte de décès de son père, le titre de propriété d'un
appartement vendu en 1979 pour le prix de 1.300.000 FRF, l'acte de transfert
du 21 décembre 2001 d'un immeuble appartenant à son épouse, l'opération y
relative (vente de la parcelle et de l'habitation et commissions sur la
promotion immobilière), ayant rapporté la somme de 2 millions de FRF (40
millions de tomans), l'acte de cession d'un terrain agricole vendu en 1993 au
prix de 100.000 FRF et deux attestations, selon lesquelles, conformément à
une pratique usuelle en matière immobilière, les prix mentionnés dans les
actes officiels iraniens ne correspondent pas à ceux effectivement payés.

B.f En bref, l'autorité cantonale a estimé que les investigations menées
n'avaient pas révélé d'indices suffisants de ce que les époux B.________ et
C.________ seraient d'une quelconque manière impliqués dans les malversations
commises au préjudice de la banque A.________ ni que les avoirs saisis en
seraient le résultat, les explications fournies par les époux B.________ et
C.________, en grande partie étayées par pièces, apparaissant parfaitement
plausibles. Les conditions de l'art. 181 al. 1 CPP/GE, sur lequel se fondait
la saisie, n'étaient ainsi plus réunies, de sorte que la levée de cette
mesure s'avérait justifiée.

C.
La Banque A.________ forme un recours de droit public au Tribunal fédéral. Se
plaignant d'arbitraire dans l'établissement des faits et dans l'application
de l'art. 181 al. 1 CPP/GE, elle conclut à l'annulation de la décision
attaquée. Parallèlement, elle a sollicité l'effet suspensif.
Les intimés concluent à l'irrecevabilité du recours, subsidiairement à son
rejet. Le Procureur général, qui s'en remet à justice quant à sa
recevabilité, et l'autorité cantonale concluent au rejet du recours.
Par ordonnance du 1er mars 2006, la Ire Cour de droit public du Tribunal
fédéral a admis la requête d'effet suspensif.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recours
qui lui sont soumis (ATF 130 I 312 consid. 1 p. 317; 130 II 249 consid. 2 p.
250, 302 consid. 3 p. 303/304, 306 consid. 1.1 p. 308 et les arrêts cités).

1.1 La décision attaquée ordonne, en dernière instance cantonale, la levée
d'un séquestre pénal en application de l'art. 181 CPP/GE, soit du droit
cantonal de procédure. Le recours de droit public est donc ouvert à son
encontre.

1.2 Le prononcé par lequel le juge ordonne, refuse, maintient ou lève un
séquestre pénal constitue une décision incidente, dont la jurisprudence admet
qu'elle peut entraîner un dommage irréparable au sens de l'art. 87 al. 2 OJ
(ATF 128 I 129 consid. 1 p. 130/131; 126 I 97 consid. 1b p. 100/101). Pour
qu'un préjudice puisse être qualifié d'irréparable, il faut qu'il cause un
inconvénient juridique, qui ne puisse être réparé ultérieurement par un
jugement final ou une autre décision favorable au recourant (ATF 127 I 92
consid. 1c p. 94; 126 I 207 consid. 2 p. 210).
En l'espèce, la levée du séquestre litigieux a pour effet que la recourante
est exposée à ce que les avoirs libérés ne soient plus disponibles ni,
partant, confiscables par le juge du fond et ne puissent dès lors servir à
l'exécution d'une créance compensatrice, dont elle aurait pu demander
l'allocation selon l'art. 60 CP. La décision attaquée est dès lors
susceptible de causer un préjudice juridique, donc irréparable, à la
recourante, et non un simple préjudice de fait, comme le soutiennent les
intimés. Le recours est ainsi recevable sous l'angle de l'art. 87 OJ.

1.3 La recourante a un intérêt personnel et juridiquement protégé à
l'annulation de la décision attaquée, en tant que cette dernière la prive de
la possibilité d'obtenir la réparation du dommage qu'elle invoque par
l'allocation, en application de l'art. 60 CP, de la créance compensatrice à
l'exécution de laquelle eussent pu servir les avoirs libérés. Elle a donc
qualité pour recourir selon l'art. 88 OJ.
Les intimés le contestent vainement au motif que la recourante, n'étant pas
une victime au sens de l'art. 2 LAVI, ne serait recevable à se plaindre que
d'une violation de ses droits de partie à la procédure, équivalent à un déni
de justice formel, qu'elle n'invoque pas. La restriction dont ils se
prévalent n'est applicable qu'au recours de droit public formé par le lésé
contre un acquittement, un non-lieu ou un classement; elle se justifie en
effet du fait que, le droit de punir n'appartenant qu'à l'Etat, le lésé n'est
pas habilité à contester un tel prononcé sur le fond (ATF 131 I 455 consid.
1.2.1 p. 458/459; 128 I 218 consid. 1.1 p. 219/220; 126 I 97 consid. 1a p.
99; 125 I 253 consid. 1b p. 255).

1.4 Saisi d'un recours d'un recours de droit public, le Tribunal fédéral ne
peut examiner que les griefs d'ordre constitutionnel invoqués et suffisamment
motivés dans l'acte de recours (cf. art. 90 al. 1 let. b OJ; ATF 130 I 258
consid. 1.3 p. 261/262; 129 I 113 consid. 2.1 p. 120, 185 consid. 1.6 p.
189). Sous peine d'irrecevabilité, le recourant doit donc non seulement
indiquer quels droits constitutionnels auraient, selon lui, été violés, mais
démontrer, pour chacun d'eux, en quoi consiste cette violation.

2.
La recourante se plaint d'arbitraire dans l'établissement des faits et d'une
violation arbitraire de l'art. 181 al. 1 CPP/GE, plus précisément de la
première phrase de cette disposition, qui prévoit que "le juge d'instruction
saisit les objets et documents ayant servi à l'infraction ou qui en sont le
produit".

2.1 Le second grief ainsi soulevé n'a pas en l'espèce de portée propre par
rapport au premier. La recourante se borne en effet à déduire la violation
arbitraire de l'art. 181 al. 1 CPP/GE qu'elle invoque de l'appréciation
arbitraire des éléments de preuve sur laquelle reposerait, selon elle, la
décision attaquée.

2.2 La notion d'arbitraire a été rappelée dans divers arrêts récents,
auxquels on peut donc se référer. En bref, il ne suffit pas, pour qu'il y ait
arbitraire, que la décision attaquée apparaisse discutable ou même
critiquable; il faut qu'elle soit manifestement insoutenable et cela non
seulement dans sa motivation mais dans son résultat (ATF 129 I 8 consid. 2.1
p. 9, 173 consid. 3.1 p. 178; 128 I 177 consid. 2.1 p. 182, 273 consid. 2.1
p. 275 et les arrêts cités). Conformément à l'art. 90 al. 1 let. b OJ,
l'arbitraire allégué doit par ailleurs être suffisamment démontré (cf. supra,
consid. 1.4).
2.3 La recourante reproche d'abord à l'autorité cantonale d'avoir admis
arbitrairement que les pièces produites par les intimés attestent qu'ils
disposaient d'une certaine fortune en Iran.
Que ces pièces ne soient pas des originaux, comme l'allègue la recourante, ne
suffit pas à faire admettre que, sauf arbitraire, au sens défini ci-dessus,
il devait leur être dénié toute valeur probante.
S'agissant de la différence entre les montants résultant de ces pièces et
ceux des prix allégués par les intimés, la décision attaquée ne la nie pas,
mais estime qu'elle s'explique par le fait, allégué par les intimés et
corroboré par diverses attestations émanant de professionnels de
l'immobilier, que, conformément à une pratique usuelle, les prix mentionnés
dans les actes officiels iraniens ne correspondent pas à ceux effectivement
payés, sans que la recourante ne démontre d'arbitraire sur ce point.
Quant au taux de change qui serait déterminant pour évaluer les montants, en
FRF et finalement en US$, que les intimés ont retirés des cessions de leurs
biens, la décision attaquée constate qu'aucune des parties ne l'a évoqué. A
cela, la recourante objecte qu'elle avait produit au juge d'instruction le 6
mai 2005 un tableau récapitulant le taux de change pour l'année 1992.
Quoiqu'il en soit, cela ne démontre pas que, sous peine d'arbitraire, le taux
de change à prendre en compte serait celui du 19 septembre 1995, soit celui
de la date du transfert par les intimés de leurs fonds sur le compte auprès
de la banque L.________ à Genève, comme le prétend la recourante, qui relève
elle-même que les fonds sont sortis d'Iran entre 1993 et 1995 et, au
demeurant, ne conteste pas les déclarations de l'intimé du 18 octobre 2004,
selon lesquelles l'argent est sorti d'Iran en une dizaine de fois durant
cette période.
Qu'il était manifestement insoutenable d'admettre que les intimés disposaient
d'une certaine fortune, approchant de l'équivalent de 1 million de US$, n'est
dès lors pas établi conformément aux exigences de motivation de l'art. 90 al.
1 let. b OJ, d'autant moins que la fortune des intimés ne se réduisait pas
aux montants qu'ils ont retirés des cessions de leurs biens immobiliers, mais
comprenait aussi des sommes provenant d'un commerce de tapis et d'un
héritage.

2.4 La recourante fait ensuite valoir que la manière dont la fortune des
intimés est sortie d'Iran est toujours restée peu claire.
La décision attaquée relève qu'il est établi qu'à l'époque des faits
incriminés, les transferts de fonds entre l'Iran et l'Europe s'effectuaient
par le biais de mécanismes de compensation, via des bureaux de change, et
qu'il est notoire que ces transactions, qui contournent les réglementations
de contrôle des changes, s'effectuent sur une base de confiance et ne sont
généralement pas documentées. Il n'était pas manifestement insoutenable de
tenir ce schéma de rapatriement progressif des fonds, décrit de manière
précise et constante par les intimés lors de leurs auditions, notamment lors
de celle du 18 octobre 2004, pour vraisemblable. Là encore, la recourante,
qui se borne pratiquement à le contester, n'en fait pas la démonstration
contraire conformément aux exigences de motivation de l'art. 90 al. 1 let. b
OJ. Au demeurant, un fait notoire, et celui qui a été tenu pour tel pouvait
l'être sans arbitraire qui soit établi, n'a pas à être prouvé (ATF 117 II 321
consid. 2 p. 323).

2.5 Dans la mesure où la recourante laisse entendre que, pour les intimés,
I.________ était plus qu'une simple connaissance, elle se borne à proposer sa
propre interprétation des faits, voire à émettre des hypothèses, sans
démonstration d'un quelconque arbitraire et sans même critiquer la
raisonnement que lui oppose la décision attaquée sur ce point.

2.6 La recourante se prévaut de la quasi simultanéité du transfert des fonds
des intimés et des détournements commis à son préjudice. Elle ne montre
toutefois ni même ne dit en quoi il était manifestement insoutenable de
considérer que cette quasi simultanéité ne suffisait pas pour conclure à une
connexité évidente entre le transfert et les détournements et, à plus forte
raison, entre les valeurs sur lesquelles ils portent. Elle ne conteste même
pas qu'elle peut aussi s'expliquer par le décès de la mère de l'intimée, en
juillet 1995, laquelle gérait jusqu'alors les fonds de ceux-ci en Iran. Que
le raisonnement de la décision attaquée sur ce point serait arbitraire n'est
dès lors aucunement établi.

2.7 Pour le surplus, le recours, se réduit largement à de pures affirmations
et suggestions quant à l'origine des fonds et au rôle prétendument illicite
des intimés, aux fins de faire admettre que la décision attaquée serait
"également arbitraire dans son résultat".

2.8 En conclusion, que la décision attaquée reposerait sur une appréciation
arbitraire des preuves, ayant conduit à confirmer la levée du séquestre
litigieux en violation arbitraire de l'art. 181 al. 1 CPP/GE, n'est pas
établi, du moins d'une manière suffisante au regard des exigences de
motivation de l'art. 90 al. 1 let. b OJ.

3.
Le recours de droit public doit ainsi être rejeté autant qu'il est recevable.
La recourante, qui succombe, supportera les frais (art. 156 al. 1 OJ) et une
indemnité de dépens sera allouée aux intimés pour la procédure devant le
Tribunal fédéral, à la charge de la recourante (art. 159 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
Un émolument judiciaire de 4'000 fr. est mis à la charge de la recourante.

3.
Une indemnité de dépens de 3'000 fr. est allouée aux intimés, à la charge de
la recourante.

4.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties, au
Procureur général et à la Chambre d'accusation du canton de Genève.

Lausanne, le 12 mai 2006

Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le juge présidant:  La greffière: