Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Öffentlich-rechtliche Abteilung 1P.4/2006
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1P.4/2006/col

Arrêt du 12 janvier 2006
Ire Cour de droit public

MM. les Juges Féraud, Président,
Aemisegger et Reeb.
Greffier: M. Parmelin.

A. ________,
recourante,

contre

François Jomini, juge à la Cour civile du Tribunal cantonal du canton de
Vaud, Palais de Justice de l'Hermitage, route du Signal 8, 1014 Lausanne,
intimé,
Cour administrative du Tribunal cantonal du canton de Vaud, Palais de Justice
de l'Hermitage,
route du Signal 8, 1014 Lausanne.

récusation civile,

recours de droit public contre l'arrêt de la Cour administrative du Tribunal
cantonal du canton de Vaud du
28 novembre 2005.

Le Tribunal fédéral considère en fait et en droit:

1.
Dans le cadre d'un litige l'opposant aux héritiers de feu B.________ devant
la Cour civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud, A.________ a été
convoquée à une audience de mesures provisionnelles le 28 novembre 2005.
Le 21 novembre 2005, elle a requis la récusation du juge instructeur,
François Jomini, et de l'ensemble des juges du Tribunal cantonal vaudois en
raison de leur appartenance avérée ou supposée à la franc-maçonnerie. Elle
demandait à ce que la conduite de l'audience prévue le 28 novembre 2005 soit
confiée au juge Philippe Goermer.
Par arrêt du 28 novembre 2005, la Cour administrative du Tribunal cantonal du
canton de Vaud (ci-après: la Cour administrative) a rejeté la requête qu'elle
a estimée manifestement mal fondée.
Le 3 janvier 2006, A.________ a saisi le Tribunal fédéral d'un recours de
droit public contre cet arrêt, dont elle demande l'annulation. Elle a en
outre déposé un recours en nullité au contenu en tout point similaire.
Il n'a pas été demandé de réponse au recours.

2.
Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recours
qui lui sont soumis (ATF 131 II 58 consid. 1 p. 60 et les arrêts cités).
Seule la voie du recours de droit public pour violation des droits
constitutionnels des citoyens au sens de l'art. 84 al. 1 let. a OJ est
ouverte pour contester une décision sur récusation (ATF 129 III 88 consid.
2.2 p. 89/90). Le recours en nullité n'entre dès lors pas en considération.
Vu la nature cassatoire du recours de droit public, la conclusion de la
recourante visant à ce que le Tribunal fédéral ordonne la déclaration sous
serment par tout le personnel judiciaire appelé à traiter le dossier qu'il
n'est pas membre d'une quelconque organisation secrète n'est pas admissible.
Le recours de droit public est recevable contre les décisions incidentes
relatives à la récusation des magistrats, indépendamment de l'existence d'un
préjudice irréparable (art. 87 al. 1 OJ). Aux termes de l'art. 90 al. 1 let.
b OJ, l'acte de recours doit contenir un exposé des droits constitutionnels
ou des principes juridiques violés, précisant en quoi consiste la violation.
Le Tribunal fédéral examine uniquement les griefs soulevés devant lui de
manière claire et détaillée (ATF 130 I 26 consid. 2.1 p. 31; 129 I 113
consid. 2.1 p. 120; 128 II 50 consid. 1c p. 53/54 et les arrêts cités). En
l'occurrence, la recourante n'indique pas les droits constitutionnels ou les
principes juridiques auxquels il aurait été contrevenu. Elle ne prétend pas
que la Cour administrative aurait violé une disposition du droit cantonal de
procédure en statuant elle-même sur la demande de récusation. De même, elle
se borne à réaffirmer que l'appartenance à la franc-maçonnerie de B.________,
de François Jomini et de l'ensemble des juges du Tribunal cantonal aurait dû
conduire à admettre sa demande de récusation sans chercher à établir en quoi
il était arbitraire de l'écarter en l'absence de tout élément propre à étayer
ses accusations. La recevabilité du recours est pour le moins douteuse. Cette
question peut demeurer indécise, car la décision attaquée échappe à toute
critique.
Selon la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme,
l'appartenance à la franc-maçonnerie ne constitue en principe pas en soi une
cause d'incompatibilité avec l'exercice de la charge de magistrat (arrêt de
la CourEDH du 1er juin 1999 dans la cause Kiiskinen c. Finlande, Recueil
CourEDH 1999-V p. 469). La question de savoir si un lien entre un juge et une
partie fondé sur leur appartenance commune à la franc-maçonnerie constitue
une cause de récusation de ce magistrat est en revanche plus délicate. Dans
l'arrêt précité, la Cour européenne des droits de l'homme n'a pas tranché
cette question, car le requérant n'avait produit aucune preuve à l'appui de
son allégation selon laquelle la partie adverse était franc-maçon. Il en va
de même en l'occurrence, dans la mesure où la recourante n'apporte aucun
élément de nature à établir ou, à tout le moins, à rendre vraisemblable
l'appartenance à la franc-maçonnerie de feu B.________, du juge instructeur
de la Cour civile, François Jomini, ou encore des juges qui ont statué sur sa
demande de récusation. Aussi, en l'absence d'éléments propres à étayer les
allégations de la recourante, la Cour administrative pouvait considérer cette
requête comme manifestement mal fondée et la rejeter elle-même sans violer
les art. 30 al. 1 Cst. et 6 CEDH.
La recourante critique en outre la présence des juges Jean-François Meylan et
Dominique Creux au sein de la cour ayant statué sur sa demande de récusation.
Le premier aurait refusé à tort de transmettre à l'autorité de poursuite des
plaintes pénales qu'elle avait déposées au motif qu'elle avait déjà saisi le
Ministère public de la Confédération. Le second ferait partie des juges qui
n'auraient vu aucune irrégularité dans la procédure ayant abouti à la
spoliation de ses biens. La recourante n'a pas demandé la récusation de ces
deux magistrats pour ces motifs. La recevabilité de ces griefs peut rester
indécise, car ils sont de toute manière infondés.
A supposer que le juge Jean-François Meylan ait effectivement cru à tort
pouvoir se dispenser de transmettre les plaintes pénales, dont la recourante
l'avait saisi, parce que la recourante avait également formé une telle
plainte auprès du Ministère public de la Confédération, cette omission ne
revêtirait pas la gravité requise pour fonder objectivement un soupçon de
partialité au sens de la jurisprudence (ATF 116 Ia 135 consid. 3a p. 138; 114
Ia 153 consid. 3b/bb p. 158). Pour le surplus, la recourante n'indique pas à
quel titre et dans quel cadre le juge Dominique Creux serait intervenu
précédemment, de sorte qu'il n'est pas possible de vérifier s'il devait ou
non se récuser d'office. Au vu des éléments évoqués, les conditions pour
admettre une telle hypothèse ne sont pas réunies.

3.
Le recours de droit public doit être rejeté, dans la mesure où il est
recevable, selon la procédure simplifiée prévue par l'art. 36a OJ. Vu les
circonstances, l'arrêt sera exceptionnellement rendu sans frais (art. 154
OJ).

Par ces motifs, vu l'art. 36a OJ, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours de droit public est rejeté, dans la mesure où il est recevable.

2.
Il n'est pas perçu d'émolument judiciaire.

3.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux parties et à la Cour
administrative du Tribunal cantonal du canton de Vaud.

Lausanne, le 12 janvier 2006

Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le président:  Le greffier: