Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Öffentlich-rechtliche Abteilung 1P.474/2006
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{T 0/2}
1P.474/2006 /col

Arrêt du 11 décembre 2006
Ire Cour de droit public

MM. les Juges Féraud, Président,
Aeschlimann et Fonjallaz.
Greffier: M. Parmelin.

A. ________ et consorts, représentés par Me Marcel Bersier, avocat,
recourants,

contre

TDC Suisse SA,
intimée, représentée par Me Horace Gautier, avocat,
Département des constructions et des technologies de l'information de la
République et canton de Genève, rue David-Dufour 5, case postale 22,
1211 Genève 8.

autorisation de construire une installation de téléphonie mobile en zone à
bâtir,

recours de droit public contre la décision du Département des constructions
et des technologies de l'information de la République et canton de Genève du
30 juin 2006.

Faits :

A.
Le 14 avril 2005, la société TDC Suisse SA a sollicité l'autorisation de
construire une installation de téléphonie mobile sur la parcelle n° 4431 de
la commune de Thônex, sise en 5e zone de construction. Soumis à l'enquête
publique du 13 mai au 13 juin 2005, ce projet a notamment suscité les
oppositions de A.________ et consorts.
Par décision du 16 août 2005, le Département de l'aménagement, de
l'équipement et du logement de la République et canton de Genève, devenu par
la suite le Département des constructions et des technologies de
l'information (ci-après: le Département), a refusé l'autorisation sollicitée.
Statuant le 17 février 2006 sur recours de la constructrice, la Commission
cantonale de recours en matière de constructions a annulé cette décision et
retourné le dossier au Département afin qu'il délivre l'autorisation de
construire, ce que celui-ci a fait en date du 30 juin 2006.

B.
A.________ et consorts ont recouru le 28 juillet 2006 auprès du Tribunal
fédéral et du Tribunal administratif de la République et canton de Genève
(ci-après: le Tribunal administratif) contre la décision du Département du 30
juin 2006 qu'ils considèrent comme nulle.
Le Tribunal administratif a déclaré irrecevable le recours dont il était
saisi au terme d'un arrêt rendu le 31 octobre 2006 et notifié le 13 novembre
2006. L'instruction du recours de droit public, qui avait été suspendue dans
l'attente de cette décision, a été reprise d'office par ordonnance
présidentielle du 14 novembre 2006.
Le Département conclut à l'irrecevabilité du recours de droit public. TDC
Suisse SA propose de le déclarer irrecevable, respectivement de le rejeter
dans la mesure où il est recevable.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
En vertu de l'art. 34 al. 1 et 3 LAT, seule la voie du recours de droit
public est ouverte contre l'octroi d'une autorisation de construire en zone à
bâtir dans la mesure où les recourants font essentiellement valoir une
violation de droits constitutionnels et conventionnels (cf. ATF 123 II 88
consid. 1a/cc p. 92 et les arrêts cités).
En principe, le recours de droit public n'est recevable qu'à l'encontre des
décisions prises en dernière instance cantonale en vertu de l'art. 86 al. 1
OJ. On peut se demander si, nonobstant l'indication figurant sous chiffre 9
de la décision attaquée selon laquelle "la présente autorisation est une
décision d'exécution (...) et n'est donc pas susceptible de recours" en vertu
de l'art. 59 let. b de la loi genevoise sur la procédure administrative, la
Commission cantonale de recours  n'aurait pu être saisie pour constater
d'office la nullité de la décision qu'elle avait prise le 17 février 2006. On
peut en outre se demander si les recourants ne devaient pas également
conclure, à peine d'irrecevabilité, au terme de leur recours de droit public
à l'annulation de cette dernière décision, dont ils demandent au Tribunal
fédéral de constater la nullité (cf. Benoît Bovay, Procédure administrative,
Berne 2000, p. 280). Ces questions peuvent demeurer indécises car le recours
est de toute manière mal fondé.

2.
Le recours dirigé contre une décision d'exécution ne permet pas de remettre
en cause la décision au fond, définitive et exécutoire, sur laquelle elle
repose. On ne saurait faire exception à ce principe que si la décision
tranchant le fond du litige a été prise en violation d'un droit fondamental
inaliénable et imprescriptible du recourant ou lorsqu'elle est nulle de plein
droit (ATF 119 Ib 492 consid. 3c/bb p. 498; 118 Ia 209 consid. 2b p. 212; 115
Ia 1 consid. 3 p. 4 et les arrêts cités). Cela ne signifie pas pour autant
que le recours de droit public formé pour violation d'un tel droit serait
recevable dans tous les cas; celui-ci doit au contraire être invoqué en
relation avec une atteinte qui apparaît en soi comme particulièrement grave
parce qu'elle concerne des aspects fondamentaux de la personnalité ou de la
dignité humaine (ATF 118 Ia 209 consid. 2c p. 213; arrêt 1P.51/1998 du 26
juin 1998 consid. 3a publié in ZBl 101/2000 p. 32).
Les recourants ne font valoir la violation d'aucun droit inaliénable ou
imprescriptible qui leur est propre. Le droit de propriété n'entre pas dans
la catégorie de ces droits (ATF 88 I 260 consid. 3 p. 271; arrêt 1P.51/1998
du 26 juin 1998 consid. 3b publié in ZBl 101/2000 p. 32). Il en va de même du
droit d'être entendu garanti à l'art. 29 al. 2 Cst. (arrêt 4P.110/2006 du 17
juillet 2006 consid. 1.1). Quant à l'art. 11 Cst., également invoqué, il
protège les enfants et les jeunes dans leur intégrité et leur développement
et ne confère aux recourants aucun droit qui leur soit propre (arrêt
2P.7/2001 du 5 décembre 2001 consid. 1d), de sorte qu'il n'y a pas lieu
d'examiner s'il s'agit d'un droit fondamental inaliénable et imprescriptible
et si l'atteinte portée à ce droit revêtirait une intensité suffisante pour
leur permettre de remettre en cause au fond la décision de la Commission
cantonale de recours du 17 février 2006.
Les conditions posées par la jurisprudence pour admettre la nullité de cette
décision ne sont pas réunies. La nullité absolue ne frappe que les décisions
affectées des vices les plus graves, manifestes ou du moins facilement
décelables, et pour autant que la constatation de la nullité ne mette pas
sérieusement en danger la sécurité du droit. Hormis dans les cas expressément
prévus par la loi, il n'y a lieu d'admettre la nullité qu'à titre
exceptionnel, lorsque les circonstances sont telles que le système
d'annulabilité n'offre manifestement pas la protection nécessaire. Des vices
de fond n'entraînent qu'à de rares exceptions la nullité d'une décision; en
revanche, de graves vices de procédure, ainsi que l'incompétence qualifiée de
l'autorité qui a rendu la décision sont des motifs de nullité (ATF 132 II 21
consid. 3.1 p. 27; 130 III 430 consid. 3.3 p. 434; 129 I 361 consid. 2.1 p.
363; 122 I 97 consid. 3a/aa p. 99; 118 Ia 336 consid. 2a p. 340; 116 Ia 215
consid. 2c p. 219; 104 Ia 172 consid. 2c p. 177; arrêt 1P.51/1998 du 26 juin
1998 consid. 3c publié in ZBl 101/2000 p. 32).
Les recourants prétendent en premier lieu que la décision de la Commission
cantonale de recours du 17 février 2006 serait nulle parce que le recours
émanait d'une société inexistante. Ils voient également un motif de nullité
dans les vices graves qui entachaient les deux avis de recours parus dans les
Feuilles d'Avis officielles des 30 septembre et 5 octobre 2005 (indications
de la raison sociale de la recourante, du numéro de dossier et de l'objet du
permis de construire différentes de celles figurant dans la demande
d'autorisation). Ces vices les auraient empêchés de faire le lien entre la
requête originaire et les insertions, de sorte qu'ils auraient été dissuadés
d'intervenir dans la procédure de recours devant la Commission cantonale de
recours.
Les deux avis auxquels font allusion les recourants indiquaient que "par acte
déposé le 16 septembre 2005 au nom de TDC Switzerland Ltd, la commission a
été saisie d'un recours contre la décision du Département du 16 août 2005,
dossier No DD 99-825-2, rejetant la demande d'autorisation d'édifier une
construction sur la parcelle n° 4431, feuille 32, de la commune de Thônex".
Selon l'extrait versé au dossier, l'intimée est inscrite au registre du
commerce du canton de Zurich sous la raison sociale TDC Switzerland AG,
exprimée dans les trois langues nationales, soit TDC Schweiz AG, TDC Suisse
SA et TDC Svizzera SA; en revanche, la raison sociale TDC Switzerland Ltd
n'existe pas en tant que telle. La mention de cette entité comme recourante
résulte d'une inadvertance manifeste qui était susceptible d'être rectifiée
d'office en l'absence de tout risque de confusion sur l'identité réelle de la
société recourante (cf. ATF 131 I 57 consid. 2.2 p. 63; 120 III 11 consid. 1b
p. 13; Benoît Bovay, op. cit., p. 282). Il ne s'agit pas d'un motif de
nullité de la décision de la Commission cantonale de recours du 17 février
2006.
Les avis indiquaient clairement que cette autorité avait été saisie d'un
recours contre la décision du Département du 16 août 2005 rejetant une
demande d'autorisation de construire sur la parcelle n° 4431 de la commune de
Thônex. La divergence qui existait entre le nom de TDC Suisse SA, indiqué
comme requérante, et celui de TDC Switzerland Ltd, mentionné comme
recourante, n'est pas frappante au point qu'elle aurait empêché les opposants
de faire le lien entre les deux procédures et les auraient dissuadés de
participer à la procédure de recours. Il en va de même du fait que les avis
publiés par la Commission cantonale de recours se réfèrent à un dossier
portant le numéro DD 99-825-2 alors que la demande d'autorisation de
construire a été enregistrée sous la cote DD 99'825; au demeurant le courrier
que le Département a adressé le 16 août 2005 aux opposants pour les informer
que la demande d'autorisation avait été refusée et que leurs observations
étaient devenues sans objet, sous réserve d'un éventuel recours, faisait déjà
référence à un dossier N° DD 99'825-2. Enfin, les recourants ne sauraient
sérieusement prétendre avoir été trompés par le fait que les avis ne
spécifiaient pas que la demande d'autorisation de construire litigieuse
portait sur une installation de téléphonie mobile, mais sur une
"construction". Les opposants, parmi lesquels se trouvaient des avocats, ont
été informés de la décision du Département refusant le permis de construire
et d'un possible recours. Ils ne pouvaient ignorer que dans cette
éventualité, un avis serait publié dans la Feuille d'avis officielle à deux
reprises en vertu de l'art. 147 al. 1 de la loi genevoise sur les
constructions et les installations diverses. Ils devaient dès lors se montrer
d'autant plus attentifs à une publication. A la lecture des avis précités, on
pouvait raisonnablement exiger d'eux qu'ils se renseignent sur l'objet du
recours enregistré par la Commission cantonale de recours s'ils avaient un
doute à cet égard.
Vu ce qui précède, les recourants ne sont pas habilités à remettre en cause
sur le fond la décision de la Commission cantonale de recours du 17 février
2006. Aussi, les griefs tirés de la violation des art. 8 CEDH et 11 Cst. sont
irrecevables.

3.
Le recours doit par conséquent être rejeté, dans la mesure où il est
recevable, aux frais des recourants qui succombent (art. 156 al. 1 OJ). Ces
derniers verseront en outre une indemnité de dépens à l'intimée qui obtient
gain de cause avec l'assistance d'un avocat (art. 159 al. 1 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
Un émolument judiciaire de 3'000 fr. est mis à la charge des recourants.

3.
Une indemnité de 2'000 fr. est allouée à TDC Suisse SA à titre de dépens à la
charge des recourants, solidairement entre eux.

4.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties ainsi
qu'au Département des constructions et des technologies de l'information et
au Tribunal administratif de la République et canton de Genève.

Lausanne, le 11 décembre 2006

Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le président:  Le greffier: