Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Sozialrechtliche Abteilungen U 393/2004
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U 393/04

Arrêt du 8 février 2006
IIIe Chambre

MM. les Juges Ferrari, Président, Lustenberger et Seiler. Greffière : Mme
Berset

S.________, recourant, représenté par Me Jean-Claude Morisod, avocat, rue de
la Banque 4, 1701 Fribourg,

contre

Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents, Fluhmattstrasse 1,
6004 Lucerne, intimée

Cour des assurances sociales du Tribunal administratif du canton de Fribourg,
Givisiez

(Jugement du 9 septembre 2004)

Faits:

A.
S. ________, né en 1960, travaillait depuis le 23 janvier 1986 en qualité de
monteur au service de l'entreprise T.________ SA. A ce titre, il était assuré
contre le risque d'accidents auprès de la Caisse nationale suisse d'assurance
en cas d'accidents (ci-après : la CNA). Le 27 juin 2001, il tomba d'un
échafaudage d'une hauteur d'environ trois à quatre mètres et subit diverses
fractures. Transporté au service des urgences de l'Hôpital X.________, il fut
hospitalisé jusqu'au 2 juillet 2001. Il présenta une incapacité de travail
totale jusqu'au 20 octobre 2001, date à laquelle une première reprise du
travail à 50 % a été tentée sans succès.

Du 12 décembre 2001 au 11 janvier 2002, le prénommé séjourna à la Clinique
Y.________ de réadaptation de la CNA. Du point de vue orthopédique, il n'y
avait aucun élément objectif susceptible d'empêcher la reprise progressive de
l'activité de monteur en échafaudages (rapport du 12 février 2002 des
docteurs L.________, et E.________. Une nouvelle reprise du travail à 50 % se
solda par un échec. Le 13 mai 2002, les docteurs W.________ et M.________,
respectivement médecin-chef et médecin-assistant du service de rhumatologie
de l'Hôpital X.________, conclurent à l'absence d'atteinte sur le plan
rhumatologique.

Lors d'un examen (final) du 19 septembre 2002, le docteur B.________, médecin
d'agence de la CNA, retint, à titre de séquelles de l'accident, un discret
syndrome vertébral lombaire avec limitation fonctionnelle, sans trouble
neurologique, ainsi qu'une limitation légère de l'épaule droite. En outre,
l'assuré présentait plusieurs atteintes préexistantes, soit une arthrose
cervicale, en particulier une uncarthrose bilatérale de C5 à C7, des troubles
digestifs et des trouble de l'adaptation avec humeur dépressive (rapport du
23 septembre 2002). L'occupation de monteur sur les chantiers n'était plus
exigible. En ce qui concerne les seules séquelles accidentelles, l'intéressé
était apte à exercer, à un taux de 100 %, une activité adaptée, de type
industriel, sur sol plat, avec sollicitation alternée des positions
assise/debout, sans port de charges lourdes, avec un plan de travail situé
entre la ceinture et les épaules (rapport du 3 octobre 2002).

Par deux lettres du 29 janvier 2003, la CNA informa l'assuré qu'elle mettait
fin au paiement de l'indemnité journalière avec effet au 28 février 2003 et
que les conditions d'octroi d'une rente d'invalidité, à compter de cette
date, seraient examinées.

Dans un rapport du 7 février 2003, le docteur R.________, spécialiste en
neurologie, constata l'absence d'anomalie sur le plan neurologique: il n'y
avait pas de déficit neurologique objectivable aux membres inférieurs et un
syndrome du tunnel carpien étant exclu. Une sucharge psychogène était
envisageable.

Par décision du 20 février 2003, la CNA alloua à S.________ une rente
d'invalidité fondée sur un degré d'invalidité de 20 pour cent, avec effet au
1er mars 2003, ainsi qu'une indemnité pour atteinte à l'intégrité de même
taux. L'opposition formée par l'intéressé fut levée par décision du 24 juin
2003.

B.
S.________ recourut contre cette décision devant le Tribunal administratif du
canton de Fribourg, Cour des assurances sociales, en concluant à son
annulation en tant qu'elle concernait l'octroi d'une rente d'invalidité
fondée sur une invalidité de 20 pour cent. Il demandait, notamment, que la
rente soit calculée en fonction d'une capacité résiduelle de travail et de
rendement de 75 % au lieu de 100 %.

Dans la procédure, le recourant produisit un rapport du 29 octobre 2003 des
médecins de la Policlinique médicale universitaire de Lausanne, agissant à
titre de Centre d'observation médicale de l'assurance-invalidité (COMAI). Y
étaient diagnostiqués des troubles somatoformes douloureux persistants sous
forme surtout de lombalgies et cervico-scapulalgies droites, un status après
fracture de l'omoplate droite et des apophyses transverses de L1-L4 à droite,
ainsi que des troubles statiques et dégénératifs radiologiquement modérés du
rachis cervical et lombaire. L'occupation de monteur en échafaudages n'était
plus envisageable. Dans une activité adaptée, la capacité de travail devrait
se situer à 70-80 %.

Par jugement du 9 septembre 2004, le Tribunal administratif rejeta le
recours.

C.
S. ________ interjette recours de droit administratif contre ce jugement dont
il demande l'annulation en concluant, sous suite de dépens, au renvoi de la
cause pour complément d'instruction au sens des considérants, principalement
à l'instance inférieure pour transmission à la caisse intimée,
subsidiairement, à même fin, à la cour des assurances sociales.

La CNA conclut au rejet du recours tandis que l'Office fédéral de la santé
publique a renoncé à se déterminer.

Considérant en droit:

1.
En procédure fédérale, seul demeure litigieux le taux de la rente
d'invalidité à laquelle a droit le recourant.

2.
Le jugement entrepris expose correctement les dispositions légales et les
principes jurisprudentiels relatifs à l'objet de l'assurance (art. 6 al. 1
LAA), aux conditions sous-tendant le droit à une rente d'invalidité de
l'assurance-accidents (art. 18 LAA), à l'évaluation de l'invalidité (art. 16
LPGA) ainsi qu'à la valeur probante des rapports médicaux. On précisera que
l'art. 18 al. 1 LAA (invalidité), dans sa teneur en vigueur depuis le 1er
janvier 2003, ne diffère de sa version antérieure que sur le plan
rédactionnel (sur la notion d'invalidité, cf. ATF 130 V 343, 119 V 470
consid. 2b; SVR 2003 IV n° 35 p. 107; RAMA 2001 n° U 410 p. 73). On peut donc
renvoyer aux considérants des premiers juges sur ces points.

3.
3.1 Le recourant fait grief aux premiers juges d'avoir accordé valeur probante
à l'appréciation du docteur B.________ plutôt qu'à celle des médecins du
COMAI. Il reproche à la cour cantonale d'avoir retenu que le taux
d'incapacité de travail fixé par les experts de l'AI à 20-30 % tenait compte
essentiellement d'affections étrangères à l'accident incriminé et d'avoir
conclu que sa capacité de travail était entière dans une activité adaptée.
Selon lui, la cour cantonale aurait dû demander aux médecins du COMAI de
fixer le taux de sa capacité résiduelle de travail résultant des seules
séquelles accidentelles.

3.2 En se fondant sur l'ensemble de avis médicaux versés au dossier, les
premiers juges ont considéré que l'intéressé ne présentait plus à l'époque
déterminante (début 2003), de troubles somatiques en relation avec
l'accident. Par ailleurs, ils ont retenu qu'il était apte à reprendre, à un
taux de 100 %, une activité adaptée, sujette aux limitations décrites par le
docteur B.________. Ce point de vue est convaincant et il n'y a pas de motif
de le remettre en cause dans la présente procédure. Le recourant n'apporte
d'ailleurs aucun élément concret permettant d'établir que sa capacité de
travail serait diminuée dans une plus large mesure que celle décrite par les
divers spécialistes l'ayant examiné sous l'angle somatique.

4.
4.1 Du point de vue psychique, le recourant a présenté dès la fin décembre
2001 un trouble de l'adaptation avec humeur dépressive (F 43.22), lequel ne
justifiait pas de médication psychotrope, ni de suivi psychothérapeutique. La
symptomatologie douloureuse évoquée par l'assuré était susceptible d'entrer
dans le champ du syndrome douloureux somatoforme persistant (F 45.4), compte
tenu de la discordance manifeste entre les plaintes du patient et les bases
organiques objectives (consilium psychiatrique du 19 décembre 2001 du docteur
F.________, médecin-chef du service psychosomatique de la Clinique
Y.________). Le diagnostic de troubles somatoformes douloureux persistants a
été confirmé par les médecins du COMAI le 29 octobre 2003. A dire d'expert,
cette affection psychique justifie une réduction (maximale) de la capacité de
travail de l'assuré de 20-30 %.

4.2 En l'occurrence, la question de la causalité naturelle entre l'accident
et les troubles psychiques peut rester indécise, dès lors que la causalité
adéquate fait défaut au regard des critères posés par la jurisprudence en
pareilles circonstances (ATF 115 V 140 consid. 6c/aa et 409 consid. 5c/aa).
En l'espèce, si la chute d'un échafaudage d'une hauteur de trois à quatre
mètres a pu subjectivement revêtir chez l'intéressé un caractère relativement
impressionnant, le déroulement de l'accident n'apparaît pas d'un point de vue
objectif, seul déterminant en l'espèce, particulièrement dramatique, dans la
mesure où l'événement litigieux fait partie des risques auxquels un employé
de la construction ou du génie civil est généralement exposé. On doit dès
lors classer l'accident incriminé dans la catégorie des accidents de moyenne
gravité. Il importe dès lors que plusieurs des critères consacrés par la
jurisprudence se trouvent réunis ou revêtent une intensité particulière pour
que l'accident du 27 juin 2001 soit tenu pour la cause adéquate des troubles
psychiques dont souffre le recourant. Or, tel n'est pas le cas en l'espèce.
Les lésions organiques subies par le recourant (fractures de l'omoplate
droite et des apophyses transverses de L1-L4 à droite) ne sauraient être
qualifiées objectivement de graves et propres, selon l'expérience, à
entraîner des troubles psychiques. L'évolution thérapeutique s'est déroulée
normalement à tous points de vue. Rien ne permet en outre de retenir qu'il y
aurait eu une erreur dans le déroulement du traitement médical. Au contraire,
la prise en charge par l'Hôpital X.________ a été immédiate et correcte, avec
une évolution favorable du point de vue orthopédique (rapport des experts du
COMAI du 29 octobre 2003 p. 14 en haut). En automne 2001 déjà, les fractures
étaient consolidées et l'assuré aurait pu reprendre le travail sous l'angle
orthopédique (rapport du 21 novembre 2001 du docteur K.________ cité dans le
rapport du COMAI aux pages 2 et 14). Une année plus tard, le médecin de la
CNA estimait l'état du recourant suffisamment stabilisé pour lui permettre de
reprendre avec un rendement de 100 % une activité professionnelle adaptée
(rapports des 19 septembre et 3 octobre 2002 du docteur B.________).

Reste que le recourant continue encore à ce jour à se plaindre de douleurs
persistantes en relation avec l'accident qui l'empêchent de reprendre une
activité lucrative. L'importance de ces douleurs doit toutefois être
relativisée, dans la mesure où celles-ci sont entretenues par la
problématique psychique. Différents rapports relèvent en effet une
discordance importante entre les plaintes décrites par le recourant et la
situation objective (consilium psychiatrique du docteur F.________ du 28
décembre 2001; rapport du COMAI, p. 14 in fine). Par ailleurs, la chute est
survenue dans un contexte de stress multiple pour le recourant (consultation
du 26 juin 2003 du docteur D.________, spécialiste en psychiatrique, incluse
dans le rapport du COMAI, p. 11 à 13). Ces circonstances, étrangères à
l'atteinte à la santé elle-même, contribuent de toute évidence à entretenir
la symptomatologie psychique du recourant.

Il s'ensuit que la CNA n'a pas à répondre des troubles psychiques du
recourant.

5.
Le dossier médical étant suffisamment étayé, la mise en oeuvre d'une
instruction complémentaire s'avère superflue.

6.
Sur le vu de ce qui précède, le recourant dispose, pour les seules séquelles
de l'accident, d'une capacité pleine et entière dans une activité légère de
type industriel, sur sol plat, avec sollicitation alternée des positions
assise et debout et sans port de charge lourde. Quant aux troubles
psychiques, ils ne sont pas en relation de causalité adéquate avec
l'accident. Par ailleurs, non contestée, l'évaluation proprement dite du taux
d'invalidité n'apparaît pas critiquable. C'est dès lors à juste titre que
l'intimée a alloué au recourant une rente d'invalidité de 20 % (à partir du
1er mars 2003).

Le recours est ainsi mal fondé.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Il n'est pas perçu de frais de justice.

3.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, à la Cour des assurances
sociales du Tribunal administratif du canton de Fribourg et à l'Office
fédéral de la santé publique.

Lucerne, le 8 février 2006

Au nom du Tribunal fédéral des assurances

Le Président de la IIIe Chambre: La Greffière: