Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Sozialrechtliche Abteilungen U 128/2004
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U 128/04

Arrêt du 11 avril 2005
IVe Chambre

MM. et Mme les Juges Ferrari, Président, Widmer et Ursprung. Greffier : M.
Wagner

B.________, recourant, représenté par Me Jean-Claude Morisod, avocat, rue de
la Banque 4, 1701 Fribourg,

contre

Vaudoise Générale, Compagnie d'Assurances, place de Milan, 1007 Lausanne,
intimée

Cour des assurances sociales du Tribunal administratif du canton de Fribourg,
Givisiez

(Jugement du 19 février 2004)

Faits:

A.
B. ________ a travaillé à partir du 1er août 1985 en qualité de chef de
service auprès du restaurant F.________. A ce titre, il était assuré contre
le risque d'accident par la Vaudoise Assurances.
Le 23 décembre 1991, un client du restaurant qui avait cassé trois cendriers
et que B.________ avait retenu parce qu'il voulait sortir de l'établissement,
a sorti une arme et tiré un coup de feu en cherchant à toucher ce dernier,
puis s'est rapproché du bar alors que B.________ se trouvait au téléphone,
tirant un deuxième coup de feu dans sa direction. Ces coups de feu ne l'ont
pas atteint. En revanche, il a présenté par la suite des troubles du sommeil,
des cauchemars, un état de tension et d'angoisse intense, raison pour
laquelle il a consulté à plusieurs reprises le Centre psycho-social
X.________ dès le 30 décembre 1991. Le cas n'a pas été annoncé à la Vaudoise.
En traitement depuis janvier 1995 auprès du Centre psycho-social pour un état
dépressif, B.________ a présenté dès janvier 1996 une incapacité de travail
totale puis partielle. A partir de mars 1996, le docteur T.________,
spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie, a été son médecin traitant.
Le 8 avril 1996, alors que B.________ sortait du restaurant F.________ à
l'heure de la fermeture, il a été victime d'une agression de la part d'un
inconnu, qui l'a frappé au visage et l'a légèrement blessé au ventre par un
objet pointu. Le lendemain, le docteur S.________, chef de clinique à
l'Hôpital Y.________, a diagnostiqué une contusion de la face et une plaie
abdominale superficielle par arme blanche (rapport médical initial LAA, du 23
avril 1996). A la suite d'une tentative de suicide, l'assuré a séjourné à la
clinique Z.________ du 25 avril au 24 mai 1996. Le docteur M.________, chef
de clinique, a posé le diagnostic d'état de stress post-traumatique. Dans un
rapport médical intermédiaire du 3 juin 1996, le docteur T.________ a retenu
les diagnostics de syndrome de stress post-traumatique chronique et d'état
dépressif chronique.
Le docteur H.________, spécialiste FMH en neurologie, a procédé à un examen
le 3 septembre 1996, lequel n'a montré aucun signe d'une affection
neurologique sous-jacente. Il a conclu à des troubles psychogènes dus aux
deux traumatismes des 23 décembre 1991 et 8 avril 1996 (communications au
docteur T.________ du 4 septembre 1996 et au médecin-conseil de la Vaudoise
du 2 octobre 1996).
Selon un rapport d'examen psychologique du 7 octobre 1996, établi par la
psychologue P.________, B.________ présente une organisation psychotique de
la personnalité d'allure schizophrénique.
La Vaudoise a confié une expertise au docteur R.________, spécialiste FMH en
psychiatrie-psychothérapie et médecin répondant du Centre W.________. Dans un
rapport du 30 juin 1997, le docteur R.________ et la psychologue E.________
ont posé le diagnostic de personnalité psychotique décompensée sur un mode
dépressif. Ils indiquaient que l'assuré était atteint d'un trouble
psychiatrique, dont l'évolution devait être considérée comme indépendante de
l'agression, et qu'il n'y avait plus de relation de causalité naturelle avec
les événements des 23 décembre 1991 et 8 avril 1996. Pour ce motif, la
Vaudoise, par décision du 15 juillet 1997, a informé B.________ qu'il n'avait
droit aux prestations de l'assurance-accidents que jusqu'au 31 mai 1996, date
à partir de laquelle son cas relevait de l'assurance-maladie.
L'assuré a formé opposition contre cette décision, en demandant qu'une
nouvelle expertise soit mise en oeuvre, afin que le choix de l'expert et le
questionnaire à poser soient établis d'entente entre les parties.
Par décision du 17 octobre 1997, la Vaudoise a rejeté l'opposition.

B.
B.aB.________ a formé recours contre cette décision devant la Cour des
assurances sociales du Tribunal administratif du canton de Fribourg, en
concluant, sous suite de frais et dépens, à l'annulation de celle-ci, les
prestations dues pour les événements des 23 décembre 1991 et 8 avril 1996
devant continuer à être versées au-delà du 31 mai 1996.
Après qu'un rapport du 10 juin 1998 eut été produit, d'un médecin désirant
rester dans l'anonymat qui avait effectué une évaluation de l'expertise du
Centre W.________ du 30 juin 1997, B.________, sur requête du tribunal, a
déposé le 1er avril 1999 l'original de ce rapport, établi par le docteur
I.________, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie.
Par jugement du 15 septembre 2000, la juridiction cantonale a rejeté le
recours.

B.b Dans un mémoire du 25 octobre 2000, B.________ a interjeté recours de
droit administratif contre ce jugement. Le 11 janvier 2001, il a produit une
expertise psychiatrique du docteur D.________, médecin associé du Service de
psychiatrie adulte et de psychogériatrie, du 18 décembre 2000.
Par arrêt du 17 août 2001, le Tribunal fédéral des assurances, annulant le
jugement attaqué, a renvoyé la cause à la Cour des assurances sociales du
Tribunal administratif pour complément d'instruction au sens des considérants
et nouveau jugement. A ce stade de la procédure, l'expertise du docteur
D.________ ne pouvait être prise en considération, attendu qu'elle avait été
produite après l'échéance du délai de recours. Relevant que les avis médicaux
des docteurs R.________ et T.________ laissaient subsister des divergences de
diagnostics, en particulier quant aux conséquences des atteintes à la santé
imputables aux agressions des 23 décembre 1991 et 8 avril 1996 sur la
capacité de travail de l'assuré sur le plan psychique, la Cour de céans a
considéré qu'il manquait dans le rapport du 30 juin 1997 une détermination du
docteur R.________ sur le rapport intermédiaire du 3 juin 1996 du docteur
T.________, spécialiste comme lui en psychiatrie et psychothérapie, de sorte
que le juge n'était pas en mesure de trancher en connaissance de cause entre
les opinions de ces deux spécialistes. Par ailleurs, il résultait du rapport
du docteur I.________, également spécialiste en psychiatrie et
psychothérapie, qu'une nouvelle expertise était nécessaire, car il paraissait
impossible d'exclure que les agressions dont l'assuré avait été victime les
23 décembre 1991 et 8 avril 1996 aient joué un rôle spécifique dans
l'apparition et l'aggravation des troubles actuels. Dans ces conditions, le
juge n'était pas en mesure d'apprécier le statu quo sine et une expertise
judiciaire était dès lors nécessaire.

B.c La juridiction cantonale a invité les docteurs R.________ et T.________ à
déposer leurs observations, ce qu'ils ont fait respectivement les 24 novembre
et 10 décembre 2001.
Une expertise psychiatrique a été confiée par la Cour des assurances sociales
du Tribunal administratif au docteur A.________, spécialiste FMH en
psychiatrie et psychothérapie. Celui-ci a déposé son rapport d'expertise
judiciaire le 11 novembre 2002. Selon lui, on peut considérer de manière
vraisemblablement prépondérante que les troubles psychiatriques dont est
atteint B.________ sont la conséquence des deux agressions, manifestées sous
la forme d'état de stress post-traumatique.
Invitée à se déterminer sur l'expertise judiciaire, la Vaudoise a demandé aux
docteurs L.________ et C.________, spécialistes FMH en psychiatrie et
psychothérapie, de répondre à un questionnaire ayant trait à la valeur
probante du rapport du docteur A.________. Procédant à une analyse du rapport
d'expertise, ces spécialistes, dans leur réponse du 11 février 2003, ont
conclu que ce rapport ne satisfaisait pas aux exigences permettant de
reconnaître pleine valeur probante à un rapport médical. Partageant le point
de vue des docteurs L.________ et C.________, la Vaudoise, dans ses
déterminations du 26 février 2003, en a déduit que l'atteinte à la santé
présentée par l'assuré à partir du 31 mai 1996 ne relevait plus de
l'assurance-accidents.
De son côté, B.________ a déposé ses observations.
Par jugement du 19 février 2004, la Cour des assurances sociales du Tribunal
administratif a rejeté le recours. Retenant que B.________ est porteur d'une
organisation, d'une structure psychotique préexistante de la personnalité
d'allure schizophrénique que les événements des 23 décembre 1991 et 8 avril
1996 n'avaient pas pu provoquer, elle a considéré que la condition de la
causalité naturelle n'était pas réalisée, ni celle de la causalité adéquate,
pour les mêmes raisons que celles évoquées dans son jugement 15 septembre
2000.

C.
B.________ interjette recours de droit administratif contre ce jugement, en
concluant, sous suite de dépens, à l'annulation de celui-ci. Il invite le
Tribunal fédéral des assurances à constater que le statu quo sine n'est pas
atteint et dire qu'il a droit à l'allocation par la Vaudoise Assurances de
toutes les prestations de l'assurance-accidents dues pour les suites des
événements des 23 décembre 1991 et 8 avril 1996. Il demande que la cause soit
renvoyée à la juridiction de première instance pour fixation des dépens de
l'instance cantonale et à la Vaudoise Générale pour détermination des
prestations légales qui lui sont dues, avec intérêts moratoires.
La Vaudoise Générale conclut au rejet du recours, sans frais ni dépens.
L'Office fédéral de la santé publique n'a pas déposé d'observations.

Considérant en droit:

1.
La contestation et le litige portent sur le point de savoir si le recourant a
droit à des prestations de l'assurance-accidents au-delà du 31 mai 1996, date
à partir de laquelle l'intimée a mis fin au versement de celles-ci. Dans la
mesure où les conclusions du recourant tendent au renvoi de la cause à
l'intimée pour qu'elle fixe les prestations qui lui sont dues, y compris des
intérêts moratoires, celles-ci sortent de l'objet de la contestation,
déterminé par la décision sur opposition du 17 octobre 1997, et sont dès lors
irrecevables.

2.
La loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales du 6
octobre 2000 (LPGA) est entrée en vigueur le 1er janvier 2003, entraînant la
modification de nombreuses dispositions légales dans le domaine de
l'assurance-accidents. Le cas d'espèce reste toutefois régi par les
dispositions de la LAA en vigueur jusqu'au 31 décembre 2002, conformément au
principe général de droit transitoire, selon lequel - même en cas de
changement des bases légales - les règles applicables sont celles en vigueur
au moment où les faits juridiquement déterminants se sont produits (ATF 130 V
445 et les références; cf. aussi ATF 130 V 329).

3.
3.1 Les premiers juges ont retenu qu'au moment de la première agression du 23
décembre 1991 comme de la deuxième du 8 avril 1996, le recourant présentait
une structure psychotique préexistante de la personnalité d'allure
schizophrénique que ces événements n'avaient pas pu provoquer. Ils ont relevé
que selon l'expert D.________, dans des moments d'excitation ou de stress,
l'assuré pouvait devenir confus, faisant alors mal la part des choses,
peinant à raisonner et à réfléchir de manière claire, présentant des troubles
de la pensée et que, dans de tels moments de tension, l'état de stress
post-traumatique chez une personnalité psychotique diminuait la capacité de
jugement et pouvait altérer le contact à la réalité. Se ralliant aux
conclusions de l'expert R.________, telles que reprises dans ses observations
du 24 novembre 2001, la juridiction cantonale a considéré qu'elles étaient
fondées sur des tests psychologiques reconnus et que leur fiabilité et
précision avaient été confirmées par les docteurs L.________ et C.________
dans leur analyse du 11 février 2003.
Dans ces conditions, les premiers juges ont nié que les deux événements des
23 décembre 1991 et 8 avril 1996 aient pu  déstabiliser fondamentalement et
durablement dans sa structure psychique même un homme sociable, chaleureux et
qui avait de bonnes capacités d'adaptation ou à tisser des liens dans la
continuité malgré les difficultés rencontrées et démontrées dans d'autres
circonstances.
En conséquence, la juridiction de première instance a nié toute relation de
causalité naturelle et adéquate entre ces deux événements et les troubles
d'ordre psychique dont est atteint l'assuré, pour les mêmes raisons que
celles évoquées dans le jugement qu'elle avait rendu le 15 septembre 2000.

3.2 Le recourant conteste aussi bien la référence faite par les premiers
juges à la modification durable de la personnalité après une expérience de
catastrophe (F 62.0 CIM-10), diagnostic qui n'a pas été retenu par l'expert
A.________, que leurs conclusions concernant un état préexistant avant la
survenance des événements des 23 décembre 1991 et 8 avril 1996. Relevant que
l'expert a répondu que le trouble psychique qu'il présente depuis plus de
deux ans n'est imputable ni à un trouble antérieur de la personnalité ni à un
autre trouble mental, il reproche à la juridiction cantonale de s'être
écartée sans motifs valables des conclusions du docteur A.________ dans son
expertise judiciaire du 11 novembre 2002, en violation de la règle du
caractère équitable de la procédure engagée devant elle (art. 29 al. 2 Cst.
et 6 § 1 CEDH).
D'autre part, le recourant est d'avis que le statu quo sine n'était pas
atteint, comme l'indique l'expert judiciaire, et que les agressions dont il a
été victime sont en relation de causalité naturelle avec les troubles
manifestés sous la forme d'état de stress post-traumatique. Qu'ils soient
considérés comme graves ou de gravité moyenne, les deux événements
accidentels avaient un caractère particulièrement impressionnant, critère à
propos duquel le recourant affirme qu'il revêt ici une intensité particulière
et que cela suffit pour admettre la causalité adéquate avec les troubles
d'ordre psychique.

4.
Il y a lieu d'examiner en premier lieu si le recourant présente un état
préexistant, antérieur aux deux agressions dont il a été victime les 23
décembre 1991 et 8 avril 1996.

4.1 Si l'on se fonde sur le rapport d'examen psychologique du 7 octobre 1996
de la psychologue P.________, l'expertise du docteur R.________ et de la
psychologue E.________ du 30 juin 1997 - ainsi que le rapport complémentaire
du docteur R.________ du 24 novembre 2001 - et l'expertise du docteur
D.________ du 18 décembre 2000, il se justifie d'admettre l'existence d'un
état antérieur. En effet, dans son rapport d'examen du 7 octobre 1996, la
psychologue P.________ a indiqué que l'analyse des résultats parlait en
faveur d'une organisation psychotique de la personnalité d'allure
schizophrénique. Dans leur rapport d'expertise du 30 juin 1997, le docteur
R.________ et la psychologue E.________ ont constaté que l'assuré présentait
une structure de personnalité psychotique. Enfin, dans l'expertise du 18
décembre 2000, le docteur D.________ est d'avis que l'état de stress
post-traumatique est survenu dans le cadre d'un fonctionnement de
personnalité de type psychotique. Dans ses observations du 24 novembre 2001,
le docteur R.________ préfère dire que les événements sont survenus dans le
cadre d'un fonctionnement de personnalité de type psychotique et que c'est
bien ce fonctionnement qui va être déterminant dans l'évolution
post-traumatique.

4.2 D'un autre côté, le docteur A.________, dans l'expertise judiciaire du 11
novembre 2002, considère que le trouble psychique présenté par l'assuré
existe depuis plus de deux ans, qu'il n'est imputable ni à un trouble
antérieur de la personnalité ni à un autre trouble mental. N'ayant pu mettre
en évidence un éventuel trouble de la personnalité antérieur qui ait pu
causer le trouble actuel, cet expert est d'avis qu'il s'agit là d'une
hypothèse. Selon lui, il n'y a pas d'élément anamnestique qui prouve que
l'expertisé présentait un trouble de la personnalité avant les agressions.
Comme les tests effectués par la psychologue E.________ l'ont été après
l'événement traumatique, il est possible que les résultats soient influencés
par l'effet du stress post-traumatique. Etant donné qu'il n'y a pas de tests
effectués avant le traumatisme, qui auraient pu confirmer ou infirmer un
changement dans la personnalité de l'assuré, les tests en question ne peuvent
pas prouver qu'il y ait eu un trouble antérieur de la personnalité. Le
trouble psychique que présente l'expertisé est , selon cet avis, uniquement
consécutif à l'agression subie en 1991 et à la seconde agression.

4.3 Dans le jugement du 19 février 2004, la juridiction cantonale a indiqué
les raisons pour lesquelles il convenait d'admettre un état préexistant.
Avec les premiers juges, il y a lieu d'admettre un état préexistant,
antérieur aux événements des 23 décembre 1991 et 8 avril 1996, au degré de
vraisemblance prépondérante (ATF 126 V 360 consid. 5b, 125 V 195 consid. 2 et
les références; cf. ATF 130 III 324 s. consid. 3.2 et 3.3). Ainsi que l'a
relevé la juridiction cantonale, tous les médecins reconnaissent que le
recourant a eu une enfance difficile, ayant présenté des troubles du
comportement. De l'avis du docteur D.________, partagé par le docteur
R.________, la survenance de l'état de stress post-traumatique dans le cadre
d'un fonctionnement de personnalité de type psychotique s'illustre par le
fait que le recourant a de la peine à bien percevoir l'autre comme un être
différencié, ayant ses propres besoins, ses propres limites. Ainsi, dans des
moments d'excitation ou de stress, celui-ci peut devenir confus, faisant
alors mal la part des choses, peinant à raisonner et à réfléchir de manière
claire, présentant des troubles de la pensée. Etant donné que sur ce point,
le docteur A.________ n'apporte dans l'expertise judiciaire du 11 novembre
2002 aucun démenti aux constatations du docteur D.________, que pour le
surplus les docteurs L.________ et C.________ confirment le bien-fondé de ces
appréciations de ces experts, la Cour de céans n'a aucune raison de s'écarter
de l'opinion des experts R.________ et D.________ sur l'existence d'un état
antérieur.

5.
Le litige a trait à la causalité naturelle, respectivement la disparition de
tout lien de causalité entre les événements des 23 décembre 1991 et 8 avril
1996 et les troubles que présente encore le recourant.

5.1 Le droit à des prestations découlant d'un accident assuré suppose, entre
l'événement dommageable de caractère accidentel et l'atteinte à la santé, un
lien de causalité naturelle (sur cette notion, cf. ATF 129 V 181 consid. 3.1,
406 consid. 4.3.1, 119 V 337 consid. 1, 118 V 289 consid. 1b et les
références). Une causalité partielle suffit pour admettre l'existence d'un
tel lien de causalité (ATF 117 V 360 consid. 4b in fine; RAMA 1996 n° U 264
p. 287 s. consid. 3a).

5.2 Ainsi que cela ressort du dossier, le recourant a consulté le Centre
Psycho-Social à Fribourg le 30 décembre 1991, à la suite de la première
agression dont il a été victime le 23 décembre 1991. Le tableau présenté à ce
moment-là correspondait à celui d'un syndrome de stress post-traumatique
(rapport du 28 octobre 1996). A la suite de la deuxième agression du 8 avril
1996, il a été examiné le 9 avril 1996 par le docteur S.________ (rapport
médical initial LAA, du 23 avril 1996). Dans un rapport du 3 juin 1996, le
docteur T.________ a attesté un état de stress post-traumatique chronique. Du
25 avril au 24 mai 1996, l'assuré a été hospitalisé à la clinique Z.________.
Le docteur M.________, dans un rapport du 16 juillet 1996, a posé le
diagnostic d'état de stress post-traumatique.
Certes, il subsiste des divergences de diagnostics en ce qui concerne les
conséquences des agressions sur la capacité de travail du recourant. Dans son
expertise du 30 juin 1997, le docteur R.________ a retenu que celui-ci
présentait une personnalité psychotique décompensée sur un mode dépressif et
qu'il n'y avait actuellement plus de relation de causalité naturelle avec les
événements des 23 décembre 1991 et 8 avril 1996, ce qu'il a confirmé dans son
rapport complémentaire du 24 novembre 2001. De son côté, le docteur
D.________, dans l'expertise du 18 décembre 2000, a posé le diagnostic
(CIM-10) d'état de stress post-traumatique (F 43.1) et d'épisode dépressif
sévère (F 32.2), en indiquant que l'état de stress post-traumatique était une
affection consécutive aux agressions, lesquelles avaient de toute évidence
laissé des séquelles psychologiques graves, avec comme conséquence une
angoisse diffuse, une tendance à se méfier de plus en plus de l'autre, à
s'isoler, à vivre une vie de plus en plus ritualisée; comme c'est souvent le
cas, l'état de stress post-traumatique s'était compliqué d'un état dépressif,
lequel était probablement présent de longue date. Pour sa part, le docteur
A.________, dans l'expertise judiciaire du 11 novembre 2002, a posé les
diagnostics et pronostics de syndrome de stress post-traumatique (F 43.1),
état dépressif moyen (F 32.1) et modification de la personnalité suite au
trouble post-traumatique (F 62.0). Ce médecin indiquait que le recourant
n'est plus capable d'avoir les attitudes en société qui sont nécessaires pour
pouvoir exercer une activité professionnelle dans le secteur de la
restauration, la suspicion, l'angoisse et l'hostilité qu'il peut montrer ne
lui permettant plus de diriger une équipe ni d'avoir un contact à la
clientèle. Les troubles de la concentration et de l'attention, la perte de la
confiance en soi et de l'estime de soi diminuent également ses capacités de
travail. Selon le docteur A.________, on peut considérer de manière
vraisemblablement prépondérante que les troubles psychiatriques de l'assuré
sont la conséquence des deux agressions, manifestées sous la forme d'état de
stress traumatique.
Dans tous les cas, il existe au degré de vraisemblance prépondérante un lien
de causalité naturelle entre les agressions des 23 décembre 1991 et 8 avril
1996 et les troubles que le recourant a présentés à la suite de ces
événements. Ainsi qu'on l'a vu, une causalité partielle suffit pour fonder
l'obligation de prester de l'assureur-accidents.

5.3 Avec raison, l'intimée a pris en charge le cas du recourant. En effet, la
condition de la causalité naturelle est donnée. Reste à savoir si l'intimée
était fondée à supprimer le droit à des prestations de l'assurance-accidents
à partir du 31 mai 1996.

5.3.1 Dans le contexte de la suppression du droit à des prestations, la règle
selon laquelle le fardeau de la preuve appartient à la partie qui invoque la
suppression du droit (RAMA 2000 n° U 363 p. 46 consid. 2 et la référence),
entre seulement en considération s'il n'est pas possible, dans le cadre du
principe inquisitoire, d'établir sur la base d'une appréciation des preuves
un état de fait qui au degré de vraisemblance prépondérante corresponde à la
réalité (ATF 117 V 264 consid. 3b et les références). La preuve de la
disparition du lien de causalité naturelle ne doit pas être apportée par la
preuve de facteurs étrangers à l'accident. Il est encore moins question
d'exiger de l'assureur-accidents la preuve négative, qu'aucune atteinte à la
santé ne subsiste plus ou que la personne assurée est dorénavant en parfaite
santé. Est seul décisif le point de savoir si les causes accidentelles d'une
atteinte à la santé ne jouent plus de rôle et doivent ainsi être considérées
comme ayant disparu (arrêts B. du 30 novembre 2004 [U 222/04], C. du 14
octobre 2004 [U 66/04] et N. du 4 octobre 2004 [U 159/04]).

5.3.2 Dans le cas particulier, il n'y a pas d'éléments suffisants pour
interrompre le droit à des prestations de l'assurance-accidents au 31 mai
1996. Aucune pièce au dossier ne permet de considérer que les causes
accidentelles de l'atteinte à la santé du recourant ne jouaient plus de rôle
à ce moment-là. Elles n'avaient donc pas disparu au 31 mai 1996.
C'est d'abord l'avis du docteur A.________, expert judiciaire, qui admet que
les troubles psychiatriques sont la conséquence des deux agressions.
Par ailleurs, on ne saurait déduire de l'expertise du 30 juin 1997, du
docteur R.________, qu'il n'y avait plus de relation de causalité naturelle
entre les troubles et les événements des 23 décembre 1991 et 8 avril 1996 au
31 mai 1996.
Dans ces conditions, il n'est pas établi au degré de vraisemblance
prépondérante que le lien de causalité naturelle entre ces événements et les
troubles que présente le recourant ait disparu.
Il s'ensuit que le recourant a droit à des prestations de
l'assurance-accidents au-delà du 31 mai 1996. Dans cette mesure, il se
justifie dès lors d'annuler le jugement attaqué du 19 février 2004 et la
décision sur opposition du 17 octobre 1997.

6.
Le litige ayant pour objet l'octroi ou le refus de prestations d'assurance,
la procédure est gratuite (art. 134 OJ). Représenté par un avocat, le
recourant, qui obtient gain de cause, a droit à une indemnité de dépens pour
l'instance fédérale (art. 159 al. 1 en corrélation avec l'art. 135 OJ). Il y
a lieu d'inviter la juridiction cantonale à statuer sur les dépens pour la
procédure de première instance (art. 61 let. g LPGA).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce:

1.
Dans la mesure où il est recevable, le recours est admis en ce sens que le
jugement de la Cour des assurances sociales du Tribunal administratif du
canton de Fribourg, du 19 février 2004, et la décision sur opposition de la
Vaudoise Assurances, du 17 octobre 1997, sont annulés.

2.
Il n'est pas perçu de frais de justice.

3.
La Vaudoise Générale versera au recourant la somme de 2500 fr. (y compris la
taxe sur la valeur ajoutée) à titre de dépens pour l'instance fédérale.

4.
La Cour des assurances sociales du Tribunal administratif du canton de
Fribourg statuera sur les dépens pour la procédure de première instance, au
regard de l'issue du procès de dernière instance.

5.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, à la Cour des assurances
sociales du Tribunal administratif du canton de Fribourg et à l'Office
fédéral de la santé publique.

Lucerne, le 11 avril 2005

Au nom du Tribunal fédéral des assurances

Le Président de la IVe Chambre: Le Greffier: