Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Sozialrechtliche Abteilungen I 839/2004
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I 839/04

Arrêt du 12 juillet 2005
IIIe Chambre

Mme et MM. les Juges Leuzinger, Présidente, Lustenberger et Kernen. Greffier
: M. Piguet

W.________, recourante, représentée par Me Jean-Marie Agier, avocat, FSIH,
place du Grand-Saint-Jean 1, 1003 Lausanne,

contre

Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud, avenue
Général-Guisan 8, 1800 Vevey, intimé

Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne

(Jugement du 18 août 2004)

Faits:

A.
W. ________, née en 1944, travaillait en qualité de serveuse au Bar
R.________. Souffrant d'une insuffisance rénale en phase terminale, la
prénommée a présenté dès le 11 décembre 1995 une incapacité totale de
travailler. Le 23 juillet 1997, elle a subi une transplantation rénale.
Entre-temps, le 8 janvier 1996, W.________ a déposé une demande de
prestations de l'assurance-invalidité tendant à l'octroi d'une rente. Après
avoir recueilli divers renseignements d'ordre médical et économique, l'Office
de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud (ci-après: l'office AI) a,
par décision du 15 août 2001, octroyé à l'assurée une rente entière
d'invalidité pour la période du 1er décembre 1996 au 31 octobre 1997. Il a
considéré en effet qu'à partir de cette date, l'assurée disposait d'une
pleine capacité de travail et de gain dans une activité adaptée, en position
assise et ne nécessitant pas le port de charges lourdes.

B.
Saisi d'un recours de W.________ contre cette décision, le Tribunal des
assurances du canton de Vaud a confié à l'Hôpital X.________ le soin de
procéder à une expertise sur la personne de l'assurée. Dans leur rapport du 7
décembre 2003, les experts mandatés ont retenu, notamment, les diagnostics de
trouble dépressif récurrent, d'ostéoporose, de status post-fracture du
poignet gauche (septembre 2002) suivie d'une algoneurodystrophie de Sudeck et
d'ancienne fracture-tassement L3 avec protrusion discale circonférentielle.
Selon eux, l'assurée disposait d'une capacité résiduelle de travail de 20 à
30% dans une activité adaptée, en position assise et ne requérant pas le port
de charges lourdes.
Par jugement du 18 août 2004, notifié le 13 décembre suivant, la juridiction
cantonale a partiellement admis le recours et accordé à l'assurée une rente
entière d'invalidité pour la période du 1er décembre 1996 au 31 janvier 1998.
Elle lui a par ailleurs alloué une mesure d'aide au placement.

C.
W.________ interjette recours de droit administratif contre ce jugement, dont
elle demande la réformation, en ce sens qu'une rente entière d'invalidité lui
soit accordée postérieurement au 31 janvier 1998. Subsidiairement, elle
conclut à l'annulation dudit jugement et à la mise en oeuvre d'un complément
d'instruction.
L'office AI conclut au rejet du recours, tandis que l'Office fédéral des
assurances sociales a renoncé à se déterminer.

Considérant en droit:

1.
Le litige porte sur le droit de la recourante à une rente de
l'assurance-invalidité.

1.1 La loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales
du 6 octobre 2000 (LPGA), entrée en vigueur le 1er janvier 2003, de même que
les dispositions de la novelle du 21 mars 2003 modifiant la LAI (4ème
révision), entrée en vigueur le 1er janvier 2004, ne sont pas applicables au
présent litige, dès lors que le juge des assurances sociales n'a pas à
prendre en considération les modifications du droit ou de l'état de fait
postérieures à la date déterminante de la décision litigieuse du 15 août 2001
(ATF 129 V 4 consid. 1.2 et les références).

1.2 Le jugement entrepris expose correctement les dispositions légales et les
principes jurisprudentiels relatifs à la notion d'invalidité (art. 4 LAI),
son évaluation chez les assurés actifs (art. 28 al. 2 LAI), l'échelonnement
des rentes (art. 28 al. 1 LAI), ainsi que la valeur probante des rapports et
expertises médicaux (ATF 125 V 352 consid. 3a et les références). Il convient
donc d'y renvoyer.
On ajoutera que selon l'art. 41 LAI, si l'invalidité d'un bénéficiaire de
rente se modifie de manière à influencer le droit à la rente, celle-ci est,
pour l'avenir, augmentée, réduite ou supprimée. Tout changement important des
circonstances, propres à influencer le degré d'invalidité, donc le droit à la
rente, peut donner lieu à une révision de celle-ci. Le point de savoir si un
tel changement s'est produit doit être tranché en comparant les faits tels
qu'ils se présentaient au moment de la décision initiale de rente et les
circonstances régnant à l'époque de la décision litigieuse (ATF 125 V 369
consid. 2 et la référence; voir également ATF 112 V 372 consid. 2b et 390
consid. 1b). Si la capacité de gain d'un assuré s'améliore, il y a lieu de
considérer que ce changement supprime, le cas échéant, tout ou partie de son
droit aux prestations dès qu'on peut s'attendre à ce que l'amélioration
constatée se maintienne durant une assez longue période. Il en va ainsi
lorsqu'un tel changement déterminant a duré trois mois déjà, sans
interruption notable et sans qu'une complication prochaine soit à craindre
(art. 88a RAI en relation avec l'art. 41 LAI; cf. ATF 125 V 417 consid. 2d;
VSI 2001 p. 275 consid. 1a et les références).

2.
En l'espèce, les premiers juges ont considéré que l'état de santé de la
recourante avait évolué de manière favorable à la suite de la transplantation
rénale du 23 juillet 1997, justifiant la suppression du droit à la rente au
1er février 1998.
Selon les pièces au dossier, la recourante a souffert dès 1979 d'une
néphropathie revêtant la forme d'une polykystose rénale d'origine
héréditaire. L'insuffisance rénale s'est progressivement aggravée au fil des
années pour atteindre le stade terminal au mois de décembre 1995. A partir de
ce moment, la recourante a dû s'astreindre à une hémodialyse à raison de
trois séances par semaine et a été déclarée incapable d'exercer son activité
de serveuse. La recourante a bénéficié d'une transplantation de rein le 23
juillet 1997. Dans un rapport du 28 octobre 1997, le docteur G.________,
médecin assistant au service de néphrologie-dialyse de l'Hôpital Y.________,
a indiqué que la reprise d'une activité lucrative adaptée était «
envisageable » dans une activité sans contrainte physique et n'exposant pas
l'assurée au tabagisme passif. Par la suite, l'évolution favorable de l'état
de santé de la recourante sur le plan néphrologique a également été confirmée
par les docteurs J.________, médecin assistant au service de
néphrologie-dialyse de l'Hôpital Y.________ (rapport du 10 mars 1999), et
B.________, spécialiste en médecine interne et médecin traitant de la
recourante (rapport du 5 mai 2000), ainsi que par l'Hôpital X.________,
lequel ne cite plus la néphropathie de la recourante parmi les atteintes
ayant une influence sur sa capacité de travail (rapport d'expertise du 7
décembre 2003).
C'est donc à juste titre et conformément aux dispositions légales et aux
principes jurisprudentiels applicables (cf. consid. 1.2) que les premiers
juges ont accordé une rente entière d'invalidité à l'assurée pour la période
du 1er décembre 1996 au 31 janvier 1998. Dans cette mesure, le jugement
cantonal doit être confirmé.

3.
Cela étant, la disparition de la cause de l'incapacité de travail ayant
justifié l'attribution d'une rente n'exclut pas la survenance d'un nouveau
cas d'assurance avant la date déterminante de la décision litigieuse, lequel
pourrait engendrer une nouvelle incapacité de travail, partant une nouvelle
incapacité de gain.

3.1 En l'occurrence, il ressort de l'anamnèse établie par les experts de
l'Hôpital X.________ que la recourante a successivement été victime en 1998,
à des dates indéterminées, d'une embolie pulmonaire, d'un zona ophtalmique et
d'un tassement vertébral L3 (rapport d'expertise du 7 décembre 2003, p. 2).
Si les deux premières affections mentionnées n'ont apparemment pas eu de
conséquences durables sur l'état de santé de la recourante, il semble par
contre que le tassement vertébral ait entraîné des séquelles au niveau des
vertèbres lombaires. Aussi bien le docteur J.________ (rapport du 22 février
1999) que le docteur B.________ (rapport du 5 mai 2000) ont indiqué que les
plaintes de la recourante se concentraient dorénavant sur des lombalgies
chroniques. Si le premier médecin cité a estimé que W.________ était
néanmoins en mesure d'exercer une activité lucrative à 100 %, pour autant que
ce travail puisse être effectué en position assise et sans port de charges
lourdes, ladite capacité ne s'élevait pour le docteur B.________ qu'à 50 %
(rapport du 22 juin 2002). Au regard de ces points de vue contradictoires et
du peu d'informations médicales relatives à cette question, rien ne
permettait d'affirmer, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges,
que les troubles lombaires dont souffrait la recourante ne présentaient pas
un caractère de gravité susceptible d'influencer la capacité de travail de la
recourante, y compris dans l'exercice d'une activité adaptée. On peut
regretter à cet égard que l'office AI ou les experts n'aient pas jugé utile
de requérir un avis rhumatologique circonstancié ou de verser au dossier les
pièces relatives à la prise en charge du tassement vertébral, alors même que
le docteur B.________ avait indiqué que la recourante avait été suivie pour
cette affection par le service de rhumatologie de l'Hôpital Y.________
(rapport du 5 mai 2000).

3.2 Le rapport d'expertise du 7 décembre 2003 de l'Hôpital X.________ n'est
pas susceptible d'offrir les réponses nécessaires aux interrogations posées
par l'évolution de l'état de santé de la recourante de 1998 à mi-août 2001.
Se référant à la situation médicale de la recourante telle qu'elle se
présentait en 2003, soit à un état de fait postérieur à la date déterminante
de la décision litigieuse du 15 août 2001 (cf. consid. 2.1), l'expertise ne
contient aucune indication relative à l'évolution de la capacité de travail
depuis 1998, alors même que les experts avaient été expressément invités à se
prononcer sur cette question par la juridiction cantonale. Cette carence vaut
tant d'un point de vue global ou pluridisciplinaire que d'un point de vue
somatique et psychiatrique, sans qu'il soit pour l'heure nécessaire d'entrer
en matière sur l'évaluation de la capacité de travail effectuée sur ce
dernier plan par les spécialistes et le collège des experts. Pour ces
raisons, il convient de dénier toute valeur probante à cette expertise pour
trancher le présent litige.

4.
Au vu de ce qui précède, les renseignements médicaux versés au dossier ne
permettent pas de connaître les incidences de l'ensemble des troubles
somatiques et psychiques de la recourante apparus depuis 1998 sur sa capacité
de travail dans une activité exigible. Il convient dès lors de renvoyer la
cause à l'office intimé pour qu'il complète l'instruction et rende une
nouvelle décision.

5.
La recourante, qui obtient gain de cause, a droit à une indemnité de dépens à
charge de l'intimé (art. 159 al. 1 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce:

1.
Le recours est admis et le jugement du Tribunal des assurances du canton de
Vaud du 18 août 2004 ainsi que la décision sur opposition de l'Office de
l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud du 15 août 2001 sont annulés,
dans la mesure où ils nient le droit de la recourante à une rente de
l'assurance-invalidité pour la période postérieure au 1er février 1998.

2.
La cause est renvoyée à l'office intimé pour instruction complémentaire au
sens des considérants et nouvelle décision.

3.
Il n'est pas perçu de frais de justice.

4.
L'office intimé versera à la recourante la somme de 2'500 fr. (y compris la
taxe à la valeur ajoutée) à titre de dépens pour l'instance fédérale.

5.
Le Tribunal des assurances du canton de Vaud statuera à nouveau sur les
dépens de l'instance cantonale, au regard de l'issue du procès.

6.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal des assurances du
canton de Vaud et à l'Office fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 12 juillet 2005

Au nom du Tribunal fédéral des assurances

La Présidente de la IIIe Chambre: Le Greffier: