Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Sozialrechtliche Abteilungen I 729/2004
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I 729/04

Arr t du 24 mars 2006
IVe Chambre

MM. et Mme les Juges Ursprung, Pr sident, Widmer et Fr sard. Greffi re : Mme
Gehring

Office cantonal AI Gen ve, rue de Lyon 97, 1203 Gen ve, recourant,

contre

O.________, intim , repr sent  par Me Michel Bergmann, avocat, rue de Hesse
8-10, 1204 Gen ve

Tribunal cantonal des assurances sociales, Gen ve

(Jugement du 12 octobre 2004)

Faits:

A.
O. ________ a exerc  la profession de d m nageur-emballeur depuis le 3
janvier 1992. A la suite d'une entorse au genou droit, il a subi, le 23 mars
1993, une arthroscopie de d bridement du condyle f moral interne. Au cours de
celle-ci, des sympt mes chondromalaciques ont  t  observ s dans
l'articulation f moro-patellaire et f moro-tibiale. L' volution
post-op ratoire s'est d roul e sans complication et l'assur  a pu reprendre
son travail   100 % d s le 1er juin 1993. Le 8 octobre suivant, O.________ a
 t  victime d'une chute et depuis lors, il a pr sent  des troubles
persistants au niveau du genou gauche (douleurs, tum faction constante,
l chages occasionnels). Le docteur M.________ (sp cialiste FMH en chirurgie
orthop dique) a diagnostiqu  une d chirure du m nisque interne et pratiqu 
une premi re m niscectomie it rative sous arthroscopie le 18 janvier 1994,
puis une seconde le 3 janvier 1995. Le 30 janvier 1995, il a fait  tat de
suites op ratoires simples avec  panchement en voie de diminution et constat 
la pr sence de gonarthrose post-traumatique d butante, incompatible avec
l'exercice du m tier de d m nageur-emballeur. O.________ a subi une
ost otomie de valgisation du tibia proximal gauche en date du 21 janvier
1997. D s le 19 septembre suivant, il n'a plus  t    m me d'exercer son
m tier. Son employeur ne disposant d'aucun emploi adapt  son  tat de sant ,
il a  t  licenci  avec effet au 30 avril 1998.

Le 16 mars 1998, O.________ a d pos  une demande de prestations de
l'assurance-invalidit  tendant   l'octroi d'une rente. Proc dant  
l'instruction du dossier, l'Office cantonal AI de Gen ve (ci-apr s :
l'office) a recueilli divers avis m dicaux. Selon le docteur S.________
(sp cialiste FMH en chirurgie orthop dique), O.________ souffre de l sions
d g n ratives aux deux genoux - plus particuli rement   gauche -, entra nant
une incapacit  totale d'exercer le m tier de d m nageur-emballeur (rapports
des 17 avril et 22 juin 1998). Le docteur R.________ (sp cialiste FMH en
m decine interne et des maladies rhumatismales) indique, dans un rapport du
23 septembre 1999, que l'assur  pr sente un  panchement chronique douloureux
du genou gauche ainsi que des lombalgies chroniques mod r es et d crit
l'exercice d'une activit  lucrative sans port de charge sur le dos et le
genou gauche comme adapt  aux troubles pr cit s.

L'office a d s lors soumis O.________   un stage d'observation
professionnelle et   une mesure de r -entra nement au travail au terme
desquels il a  t  reconnu apte   exercer   80 % la profession d'aide-gainier
(rapports des 10 d cembre 1999 et 20 juin 2000 du Centre d'int gration
professionnelle [CIP]). A partir du 26 juin 2000, l'assur  a entrepris son
reclassement dans cette profession sous la forme d'un stage de formation en
entreprise et selon un taux d'occupation de 80 % (rapport du 10 ao t 2000 de
la division de r adaptation professionnelle). En raison d'une recrudescence
des douleurs, il a cependant diminu  son temps de travail   75 %   partir du
13 septembre 2000, puis   50 % d s le 7 f vrier 2001 (certificat du 6 f vrier
2001 du docteur D.________ [sp cialiste FMH en chirurgie orthop dique,
m decin traitant]). Sur demande de l'office, O.________ a tent ,   partir du
26 juin 2001, de recouvrer une capacit  de travail de 75 % (rapport du 9
juillet 2001 de la division de r adaptation professionnelle). Cependant, le
docteur D.________ a attest  une nouvelle incapacit  de travail de l'assur 
de 50 % d s le 27 septembre suivant (certificat du 4 octobre 2001). Au terme
de son reclassement professionnel (30 septembre 2001), O.________ a  t 
engag  en qualit  d'aide-gainier selon un taux d'occupation de 57,48 %. Selon
un rapport  tabli le 10 octobre 2001 par la division de r adaptation
professionnelle, il serait toutefois apte   exercer cette activit    75 %.

Se fondant sur ces derni res conclusions, l'office a allou    O.________ une
rente enti re   partir du 1er septembre 1998 jusqu'au 31 d cembre 1999, puis
  partir du 1er octobre 2001, une demi-rente fond e sur un degr  d'invalidit 
de 56 % (d cision du 12 avril 2002 compl t e le 13 septembre suivant). De son
c t , la Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents (ci-apr s :
CNA) a mis l'assur  au b n fice d'une rente correspondant   un degr 
d'invalidit  de 41 %   partir du 1er octobre 2001  galement; en outre, elle
lui a allou  une indemnit  pour atteinte   l'int grit  de 20 % (d cision du
11 novembre 2002 confirm e sur opposition le 17 janvier 2003).

B.
Par jugement du 12 octobre 2004, le Tribunal cantonal des assurances sociales
de la R publique et canton de Gen ve a admis le recours interjet  par
O.________ contre les d cisions de l'office. Annulant celles-ci, il a renvoy 
le dossier   l'office pour nouvelle d cision en ce sens qu'une rente enti re
fond e sur un degr  d'invalidit  de 70,5 % doit  tre allou e   l'assur  d s
le 1er octobre 2001.

C.
L'office interjette un recours de droit administratif contre ce jugement dont
il requiert l'annulation et demande principalement la confirmation de ses
d cisions des 12 avril et 13 septembre 2002. A titre subsidiaire, il conclut
  ce que la rente de l'assur  soit fix e en regard du degr  d'invalidit 
retenu par la CNA.

O. ________ conclut, sous suite de frais et d pens, au rejet du recours,
tandis que l'Office f d ral des assurances sociales propose l'admission de
celui-ci.

Consid rant en droit:

1.
Le litige porte sur le degr  d'invalidit  de l'intim , en particulier sur sa
capacit  de travail.

2.
2.1 Ratione temporis, la loi f d rale sur la partie g n rale du droit des
assurances sociales (LPGA) du 6 octobre 2000, entr e en vigueur au 1er
janvier 2003, n'est pas applicable au pr sent litige, d s lors que le juge
n'a pas   prendre en consid ration les modifications du droit ou de l' tat de
fait post rieures   la date d terminante de la d cision litigieuse (ATF 127 V
467 consid. 1, 121 V 366 consid. 1b). De m me, les dispositions de la novelle
du 21 mars 2003 modifiant la LAI (4 me r vision), entr e en vigueur le 1er
janvier 2004 (RO 2003 3852) ne sont pas non plus applicables (ATF 127 V 467
consid. 1).

2.2 Selon l'art. 28 al. 1 LAI, l'assur  a droit   un quart de rente s'il est
invalide   40 % au moins,   une demi-rente s'il est invalide   50 % au moins
ou   une rente enti re s'il est invalide   66 2/3 % au moins. D'apr s l'art.
28 al. 2 LAI, dans sa teneur en vigueur jusqu'au 31 d cembre 2002, pour
l' valuation de l'invalidit , le revenu du travail que l'invalide pourrait
obtenir en exer ant l'activit  qu'on peut raisonnablement attendre de lui,
apr s ex cution  ventuelle de mesures de r adaptation et compte tenu d'une
situation  quilibr e du march  du travail, est compar  au revenu qu'il aurait
pu obtenir s'il n' tait pas invalide.

3.
3.1 En l'esp ce, les premiers juges ont d termin  la capacit  de travail de
l'assur  en se r f rant d'une part   un rapport du 8 mai 2002 de son m decin
traitant, le docteur A.________ (sp cialiste FMH en m decine interne). En
substance ce m decin d clare assurer le suivi m dical du patient depuis de
tr s nombreuses ann es. Il indique que celui-ci suit scrupuleusement les
traitements m dicaux qui lui sont prescrits de m me qu'il consulte
r guli rement son orthop diste. Il constate qu'au terme de l'instruction
conduite par la CNA, il s'est vu reconna tre un degr  d'invalidit  de 56 %.
Il ajoute que depuis deux ans, il assume un taux d'occupation professionnel
de 50 % et que celui-ci n'est susceptible d'aucune augmentation compte tenu
des atteintes physiques et psychiques subies. D'autre part, les premiers
juges se sont fond s sur un certificat du 10 mai 2002 du docteur D.________
selon lequel O.________ est atteint d'arthrose post-traumatique s v re au
niveau du genou gauche avec  panchements intermittents; la capacit  de
travail en r sultant ne d passe pas 50 % depuis le 17 septembre 2001.

3.2 S'agissant de la valeur probante d'un rapport m dical, ce qui est
d terminant c'est que les points litigieux aient fait l'objet d'une  tude
circonstanci e, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu'il
prenne  galement en consid ration les plaintes exprim es par la personne
examin e, qu'il ait  t   tabli en pleine connaissance de l'anamn se, que la
description du contexte m dical et l'appr ciation de la situation m dicale
soient claires et enfin que les conclusions de l'expert soient d ment
motiv es. Au demeurant, l' l ment d terminant pour la valeur probante n'est
ni l'origine du moyen de preuve ni sa d signation comme rapport ou comme
expertise, mais bel et bien son contenu (ATF 125 V 352 consid. 3a, 122 V 160
consid. 1c et les r f rences).

3.3 Dans les deux rapports m dicaux pr cit s, les points litigieux n'ont pas
fait l'objet d'une  tude circonstanci e. La description du contexte m dical
et l'appr ciation de la situation m dicale ne sont pas examin es. Les
conclusions ne sont pas motiv es mais proc dent de l'affirmation. En outre,
ils ne donnent aucune indication relative   une activit  lucrative
raisonnablement exigible de l'int ress . De surcro t, le rapport du docteur
A.________ ne fournit aucune appr ciation sur l' tat de sant  de celui-ci.
Dans ces circonstances, les rapports des docteurs D.________ et A.________
sont d pourvus de valeur probante, cela d'autant plus que, selon la
jurisprudence, le m decin traitant est g n ralement enclin, en cas de doute,
  prendre parti pour son patient en raison de la relation de confiance qui
l'unit   ce dernier (ATF 125 V 352 consid. 3a, 122 V 160 consid. 1c et les
r f rences). Ils ne sauraient par cons quent  tre pris en consid ration pour
 tablir la capacit  de travail de l'assur .

4.
4.1 De son c t , l'office consid re que l'intim  dispose d'une capacit  de
travail de 75 % en qualit  d'aide-gainier. A l'appui de ce point de vue, il
se fonde sur les avis du CIP (rapport du 20 juin 2000) et de la division de
r adaptation professionnelle (rapport du 10 octobre 2001).

4.2 Or, cette appr ciation  mane d'institutions de l'assurance-invalidit 
dont la fonction est de compl ter les donn es m dicales en examinant
concr tement dans quelle mesure l'assur  est   m me de mettre en valeur une
capacit  de travail et de gain sur le march  du travail (voir   propos du
r le des COPAI pour l' valuation de l'invalidit : L'instruction des
possibilit s de gain des personnes pr tendant une rente, compte-rendu d'une
s ance du 10 novembre 1989 consacr e aux probl mes de l'expertise m dicale et
professionnelle, RCC 1990 p. 59 ss; Karl Abegg, Coup d'oeil sur l'activit 
des centres d'observation professionnelle de l'AI [COPAI]). Dans
l'assurance-invalidit , l'instruction des faits d'ordre m dical se fonde sur
le rapport du m decin traitant destin    l'office, les expertises de m decins
ind pendants de l'institution d'assurance, les examens pratiqu s par les
centres d'observation m dicale de l'assurance-invalidit  (ATF 123 V 175), les
expertises produites par une partie ainsi que les expertises m dicales
ordonn es par le juge de premi re ou de derni re instance (VSI 1997, p. 318
consid. 3b; St phane Blanc, La proc dure administrative en
assurance-invalidit , th se Fribourg 1999, p. 142). La t che du m decin
consiste   porter un jugement sur l' tat de sant  et   indiquer dans quelle
mesure et pour quelles activit s l'assur  est incapable de travailler. En
outre, les donn es m dicales constituent un  l ment utile pour d terminer
quels travaux on peut encore, raisonnablement, exiger de l'assur  (ATF 125 V
261 consid. 4, 115 V 134 consid. 2, 114 V 314 consid. 3c, 105 V 158 consid.
1).

4.3 En l'esp ce, il est m dicalement  tabli que l'intim  souffre de douleurs
d g n ratives aux genoux entra nant une incapacit  totale de travail dans le
m tier de d m nageur-emballeur (rapports des 17 avril et 22 juin 1998 du
docteur S.________; rapport du 13 novembre 1997 du docteur T.________
[m decin d'arrondissement de la CNA et chirurgien orthop diste]). Dans un
rapport du 23 septembre 1999, le docteur R.________ diagnostique en outre des
lombalgies chroniques mod r es et d crit comme adapt    l' tat de sant  de
l'intim , l'exercice d'une activit  lucrative d pourvue de tout port de
charge sur le genou gauche et sur le dos. En l'occurrence, le m tier
d'aide-gainier a  t   consid r  comme adapt    l' tat de sant  de l'assur .
Cependant, le docteur T.________ consid re l'exercice de cette activit  comme
 tant raisonnablement exigible de l'assur    raison de cinq heures par jour
(rapport du 8 janvier 2002 - non produit au dossier - cf. jugement du 24 ao t
2004 du Tribunal administratif de la R publique et canton de Gen ve dans la
cause opposant l'intim  et la CNA, consid rant 9 p. 7) et non pas   75 %
comme retenu par le CIP et la Division de r adaptation professionnelle. Il
subsiste donc des incertitudes sur le point de savoir si, comme le recourant
le pr tend, l'intim  pourrait travailler dans l'activit  d'aide-gainier dans
une mesure sup rieure au taux d'activit  actuelle. Dans la n gative, on peut
s'interroger sur le point de savoir si une autre activit  lucrative
n'att nuerait pas davantage les cons quences de l'invalidit  de l'assur . A
d faut d'informations suffisantes sur la capacit  de travail de celui-ci dans
sa profession actuelle ou dans une activit  adapt e   son  tat de sant 
(troubles d g n ratifs au niveau des genoux et lombalgies chroniques
mod r es), il n'est pas possible de se prononcer sur le degr  d'invalidit 
qu'il pr sente et donc sur son droit  ventuel   une rente enti re   partir du
1er octobre 2001. Afin de pouvoir se d terminer en connaissance de cause sur
ces questions, il appartenait   l'administration, voire   la juridiction
cantonale, d'instruire la cause en r unissant toutes les informations
n cessaires (art. 88 al. 4 en relation avec l'art. 69 RAI), ce qu'elles n'ont
fait que partiellement. Dans ces circonstances, un compl ment d'instruction
sous la forme d'une expertise m dicale s'impose. Il convient d s lors de
renvoyer la cause   l'office afin qu'il rende une nouvelle d cision apr s
instruction compl mentaire sur la capacit  de travail raisonnablement
exigible de l'int ress  dans sa profession actuelle ou dans une activit 
adapt e   son  tat de sant .

5.
5.1 La d cision litigieuse ayant pour objet l'octroi ou le refus de la
prestations d'assurance, la proc dure est gratuite (art. 134 OJ).

5.2 En tant qu'il succombe, l'intim  n'a pas droit   des d pens (art. 159
OJ).

Par ces motifs, le Tribunal f d ral des assurances prononce:

1.
Le recours est admis. Le jugement du Tribunal cantonal des assurances
sociales de la R publique et canton de Gen ve du 12 octobre 2004 ainsi que
les d cisions de l'Office cantonal AI de Gen ve des 12 avril 2002 et 13
septembre 2002 sont annul s, celles-ci dans la mesure o  elles accordent  
l'intim  une demi-rente   partir du 1er octobre 2001.

2.
La cause est renvoy e audit office pour compl ment d'instruction au sens des
consid rants et nouvelle d cision.

3.
Il n'est pas per u de frais de justice.

4.
Le pr sent arr t sera communiqu  aux parties, au Tribunal cantonal des
assurances sociales de la R publique et canton de Gen ve et   l'Office
f d ral des assurances sociales.

Lucerne, le 24 mars 2006

Au nom du Tribunal f d ral des assurances

Le Pr sident de la IVe Chambre: La Greffi re: