Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Sozialrechtliche Abteilungen I 661/2004
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I 661/04

Arrêt du 31 mars 2005
IIe Chambre

MM. les Juges Borella, Président, Schön et Frésard. Greffière : Mme Fretz

S.________, recourant, représenté par Me Jean-Claude Morisod, avocat, rue de
la Banque 4, 1701 Fribourg,

contre

Office AI du canton de Fribourg, impasse de la Colline 1, 1762 Givisiez,
intimé

Cour des assurances sociales du Tribunal administratif du canton de Fribourg,
Givisiez

(Jugement du 26 août 2004)

Faits:

A.
A.a S.________, né en 1949, a travaillé depuis 1989 en qualité de manoeuvre
au service de l'entreprise C.________. Le 3 juin 2000, il a été victime d'un
accident de la circulation, entraînant une fracture intra-articulaire du
radius droit. Il a été opéré d'urgence le même jour par le docteur Z.________
(ostéosynthèse), puis une seconde fois en décembre 2000 (ablation du matériel
d'ostéosynthèse). La Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents
(ci-après : la CNA) a pris en charge le cas.

Le 26 mars 2001, souffrant de douleurs au poignet droit ainsi qu'au coude
gauche, S.________ a consulté son médecin traitant, le docteur B.________,
généraliste. Ce dernier a diagnostiqué une épicondylite radiale gauche et a
attesté une incapacité de travail de 100 % (cf. rapport du 4 avril 2001).

A.b Le 5 avril 2001, après avoir examiné l'assuré, le docteur D.________,
médecin d'arrondissement de la CNA, a considéré qu'au vu de l'importante
limitation fonctionnelle du poignet et de la diminution de la force de la
main, S.________ n'était probablement pas en mesure de reprendre son activité
d'ouvrier sur les chantiers navals; il a attesté qu'il disposait néanmoins
d'une capacité de travail entière, dans une activité industrielle ne
comportant pas le port de charges lourdes et n'exigeant pas une force totale
de la main.

Par décision du 30 août 2001, la CNA a alloué à l'assuré une rente
d'invalidité, fondée sur une incapacité de gain de 20 %, à partir du 1er
juillet 2001, ainsi qu'une indemnité pour atteinte à l'intégrité d'un taux de
10 %.

A.c Le 14 novembre 2001, S.________ a présenté une demande de prestations de
l'assurance-invalidité. L'Office AI du canton de Fribourg (ci-après :
l'Office AI) a recueilli l'avis du docteur G.________, spécialiste FMH en
rhumatologie et médecine interne. Dans un rapport du 29 septembre 2002, ce
dernier a diagnostiqué un status après fracture intra-articulaire du radius
droit, un status après algo-neurodystrophie post-traumatique, stade II, de la
main droite et une périarthrite humero-scapulaire tendinique à gauche. Il a
estimé qu'en comparaison de l'arthrose post-traumatique avancée du poignet
droit, l'affection de l'épaule gauche, d'origine maladive, devait être
relayée à l'arrière-plan, tant au niveau de l'intensité des douleurs que des
conséquences sur la capacité de travail. Eu égard à la seule problématique de
l'épaule gauche, une activité légère pouvait raisonnablement être exigée de
S.________ à 100 %. Quant à l'affection du poignet droit, il a considéré
qu'après une arthrodèse, le prénommé pourrait reprendre une activité légère,
à condition de pouvoir bénéficier d'une aide au placement de la part de
l'Office AI. Pour sa part, le docteur H.________, chirurgien de la main, a
émis certains doutes quant à une disparition complète des douleurs à la suite
d'une éventuelle arthrodèse. Selon lui, il n'était pas exigible d'imposer une
telle intervention à l'assuré qui s'y était par ailleurs opposé (cf. rapport
du 3 décembre 2002). Dans sa réponse à la question de l'Office AI concernant
l'exigibilité, à 100 %, d'une activité sans utilisation répétitive du
poignet, respectivement de la main droite - telle que la surveillance de
machines - le docteur G.________ a admis l'exigibilité d'une activité
excluant toute charge sur le poignet droit (cf. rapport du 13 janvier 2003).

Se fondant sur ces avis ainsi que sur le dossier médical de la CNA, l'Office
AI, par décision du 5 août 2003, a alloué une aide au placement, ainsi qu'une
demi-rente du 1er au 30 juin 2001. Au-delà de cette date, il a considéré que
S.________ était en mesure d'exercer une activité légère à plein temps, qui
lui permettrait de réaliser un revenu de 44'066 fr.; la perte économique de
23 % en résultant, par comparaison avec le revenu obtenu avant l'invalidité
(57'339 fr.), n'était pas susceptible d'ouvrir le droit à une rente.

A.d Mandaté par l'assuré, le docteur B.________ a formé opposition contre la
décision du 5 août 2003. Il a conclu à ce que son patient fût examiné par un
spécialiste en rhumatologie ou orthopédie, ou qu'il pût séjourner dans un
COMAI aux fins d'évaluer son état psychique. Cette opposition a été complétée
par Me Morisod les 15 septembre et 20 octobre 2003. L'avocat a repris, pour
l'essentiel, les conclusions du docteur B.________, à savoir la demande d'une
expertise pluridisciplinaire en COMAI et un stage COPAI. Il a en outre conclu
à l'octroi d'une rente entière, subsidiairement à une demi-rente à partir du
1er juin 2001.

Par décision du 24 novembre 2003, l'Office AI a rejeté l'opposition.

B.
S.________ a déféré cette décision au Tribunal administratif du canton de
Fribourg en concluant, sous suite de dépens, à la mise en oeuvre d'une
expertise pluridisciplinaire en COMAI, d'un stage en COPAI, et à l'octroi
d'une rente d'invalidité entière, subsidiairement d'une demi-rente dès le 1er
juin 2001.

Par jugement du 26 août 2004, la juridiction cantonale a rejeté le recours.

C.
L'assuré interjette recours de droit administratif contre ce jugement dont il
requiert l'annulation. Sous suite de dépens, il conclut au renvoi de la
cause, principalement à la juridiction cantonale, subsidiairement à
l'administration, pour complément d'instruction sous la forme d'une expertise
en COMAI et d'un stage en COPAI.

L'Office AI conclut implicitement au rejet du recours, tandis que l'Office
fédéral des assurances sociales a renoncé à se déterminer.

Par lettre du 8 novembre 2004, le représentant du recourant informe le
Tribunal fédéral des assurances qu'il a déposé une demande de «révision» du
droit à la rente de son mandant. Il produit les avis des docteurs A.________
(cf. rapport du 9 juillet 2004) et Z.________ (cf. rapport du 3 novembre
2004).

Considérant en droit:

1.
Le litige porte sur le droit du recourant à une rente d'invalidité.

2.
Le recourant se prévaut tout d'abord d'une violation de son droit d'être
entendu, au sens de l'art. 61 let. h LPGA, en tant que les premiers juges
n'auraient pas suffisamment motivé leur jugement dans la préférence qu'ils
ont donnée à l'avis du docteur G.________, au détriment de celui du docteur
B.________. En outre, le recourant invoque le grief de partialité des
premiers juges (art. 30 al. 1 Cst.), dont le jugement serait empreint de
qualifications dépréciantes à l'égard du docteur B.________.
En l'espèce, il est indéniable que le jugement entrepris satisfait aux
exigences de motivation découlant du droit d'être entendu. En effet, les
juges cantonaux ont exposé pourquoi ils ont donné la préférence aux
conclusions du docteur G.________ plutôt qu'à celles contenues dans les
autres avis médicaux figurant au dossier. Leur prononcé contient ainsi tous
les éléments permettant à l'intéressé d'en comprendre les motifs et de
l'attaquer devant l'autorité de recours. S'il est vrai, par ailleurs, que les
considérants du jugement attaqué contiennent certaines remarques à caractère
polémique à l'endroit du docteur B.________, ce n'est pas un motif suffisant
pour admettre un manquement des premiers juges au devoir d'impartialité au
sens de l'art. 30 al. 1 Cst.

3.
3.1 Sur le fond, le jugement entrepris expose correctement les dispositions
légales applicables en matière d'évaluation du taux d'invalidité, ainsi que
les principes jurisprudentiels sur la valeur probante d'un rapport médical,
si bien qu'il suffit d'y renvoyer sur ces différents points. On ajoutera que
le Tribunal fédéral des assurances a récemment précisé (cf. ATF 130 V 343)
que les principes développés jusqu'alors par la jurisprudence sur les notions
d'incapacité de travail, d'incapacité de gain et d'invalidité, notamment,
conservent leur validité sous l'empire de la loi fédérale sur la partie
générale du droit des assurances sociales (LPGA).

3.2 Pour pouvoir calculer le degré d'invalidité, l'administration (ou le
juge, s'il y a eu un recours) a besoin de documents que le médecin,
éventuellement aussi d'autres spécialistes, doivent lui fournir. La tâche du
médecin consiste à porter un jugement sur l'état de santé et à indiquer dans
quelle mesure et pour quelles activités l'assuré est incapable de travailler.
En outre, les données médicales constituent un élément utile pour déterminer
quels travaux on peut encore, raisonnablement, exiger de l'assuré (ATF 125 V
261 consid. 4 et les références).

3.3 Par ailleurs, il faut préciser qu'en ce qui concerne la coordination des
taux d'invalidité entre les différentes branches de l'assurance sociale, l'AI
n'est pas liée par l'évaluation à laquelle a procédé la CNA (ATF 126 V 288),
lorsque - comme en l'espèce - l'assuré souffre d'affections d'origine
maladive qui n'engagent pas la responsabilité de cet assureur-accidents.

4.
Les diagnostics posés par les médecins ayant examiné S.________ concordent.
En revanche, leurs appréciations divergent quant aux conséquences de ces
affections sur la capacité de travail du recourant. Tandis que le docteur
G.________ retient une capacité de travail de 100 % dans une activité légère,
excluant toute charge sur le poignet droit, le docteur B.________ atteste une
incapacité de travail totale du recourant.

En l'espèce, c'est à bon droit que les premiers juges ont accordé un poids
décisif aux conclusions du docteur G.________. D'une part, celui-ci est
spécialiste en rhumatologie et son rapport remplit toutes les exigences
relatives à la valeur probante d'un tel document (cf. ATF 125 V 352 consid.
3a). D'autre part, le médecin traitant est, selon l'expérience, généralement
enclin, en cas de doute, à prendre parti pour son patient en raison de la
relation de confiance qui l'unit à ce dernier (ATF 125 V 352 consid. 3a, 122
V 160 consid. 1c et les références). Dans ces conditions, il ne s'avère pas
nécessaire d'ordonner de plus amples investigations sur le plan médical.

5.
5.1 Le recourant reproche à la juridiction cantonale de ne pas avoir donné
suite à sa requête de suivre un stage en COPAI aux fins d'évaluer ses chances
de réadaptation. Il se plaint d'une instruction incomplète du dossier sur ce
point.

5.2 Contrairement à ce qu'allègue le recourant, l'administration n'a pas omis
d'examiner, comme le droit fédéral le prescrit (priorité de la réadaptation
sur la rente, cf. ATF 108 V 212s., 99 V 48), les chances de succès d'une
éventuelle mesure de réadaptation du seul fait qu'elle n'a pas ordonné un
stage en COPAI. En effet, au vu des aptitudes limitées du recourant et de la
capacité de travail exigible dans des activités de production industrielle
légère, l'Office AI a jugé qu'une mesure d'aide au placement était la mesure
la plus adéquate en l'espèce.

6.
Sur cette base, il y a lieu de constater que le recourant dispose d'une
capacité de travail de 100 % dans une activité adaptée, au sens des
constatations et conclusions du rapport du docteur G.________ du 29 septembre
2002.

Pour procéder à la comparaison des revenus, il convient de se placer au
moment de la naissance possible du droit à la rente : les revenus avec et
sans invalidité sont déterminés par rapport à un même moment; les
modifications de ces revenus, susceptibles d'influencer le droit à la rente,
survenues jusqu'au moment où la décision est rendue, sont également prises en
compte (ATF 129 V 223-224 consid. 4.2). En l'occurrence, la comparaison doit
se faire au regard de la situation existant en 2001.

6.1 Le revenu annuel d'assuré valide de 57'339 fr., que l'administration a
pris en compte, n'est pas contesté en tant que tel et n'apparaît pas
critiquable. Il sera donc retenu pour appliquer l'art. 28 al. 2 LAI.

6.2 Quant au revenu d'invalide, il doit être fixé à la lumière des
statistiques salariales ressortant de l'enquête suisse sur la structure des
salaires publiée par l'Office fédéral de la statistique (ATF 124 V 321).
Selon la table TA1 relative à l'année 2000 (p. 31), il faut ainsi partir d'un
gain déterminant, toutes activités confondues dans le secteur privé, de 4'437
fr. par mois (valeur standardisée) pour des travaux simples et répétitifs
(niveau 4) exercés par un homme. Ce salaire mensuel hypothétique de 4'437 fr.
doit être adapté à l'évolution des salaires pour l'année 2001 (+ 2,5  %;
Annuaire statistique 2004, p. 211, T3.4.3.1), soit 4'547 fr. 90. Comme il se
base sur une durée hebdomadaire de travail de 40 heures, inférieure à la
moyenne usuelle dans les entreprises, il y a lieu de l'ajuster à 41,7 heures
par semaine (Annuaire statistique 2004, p. 200, T3.2.3.5), soit un salaire
mensuel de 4'741 fr. 20, ou annuel de 56'894 fr. 40. Par conséquent, dans
l'éventualité la plus favorable au recourant, en appliquant un facteur -
maximal - de réduction de 25 % à ce gain annuel statistique (cf. ATF 124 V
321, 126 V 75), on obtiendrait un résultat intermédiaire de 25,58 %, soit un
taux d'invalidité arrondi (ATF 130 V 121) à 26 %.
Par conséquent, le jugement entrepris n'est pas critiquable dans son résultat
et le recours se révèle mal fondé.

7.
Après le délai de recours, le recourant a produit un rapport de la doctoresse
A.________, qui conclut à une incapacité de travail de 40 % au maximum, ainsi
qu'une attestation du docteur Z.________. Ce dernier relève une aggravation
de l'état de santé du recourant survenue après la décision sur opposition. A
la lecture de ces pièces, on est fondé à considérer qu'elles se rapportent à
des faits postérieurs à la décision sur opposition litigieuse, de sorte
qu'elles ne doivent pas être prises en considération dans la présente
procédure (ATF 121 V 366 consid. 1b et les arrêts cités).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Il n'est pas perçu de frais de justice.

3.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, à la Cour des assurances
sociales du Tribunal administratif du canton de Fribourg et à l'Office
fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 31 mars 2005
Au nom du Tribunal fédéral des assurances

Le Président de la IIe Chambre:  La Greffière: