Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Sozialrechtliche Abteilungen I 654/2004
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I 654/04

Arrêt du 21 juillet 2005
IVe Chambre

MM. les Juges Ferrari, Président, Meyer et Ursprung. Greffier : M. Pellegrini

D.________, recourante, représentée par Me Henri Carron, avocat, rue de
Venise 3B, 1870 Monthey,

contre

Office cantonal AI du Valais, avenue de la Gare 15, 1951 Sion, intimé

Tribunal cantonal des assurances, Sion

(Jugement du 8 septembre 2004)

Faits:

A.
D. ________, née en 1967 a occupé divers postes de serveuse avant de
travailler, dès le 1er décembre 1998, comme aide de cuisine à temps complet à
l'Hôpital X.________. Depuis l'année 1999, elle s'est trouvée à de nombreuses
reprises en arrêt de travail en raison de diverses atteintes à la santé.
N'ayant pas repris son activité lucrative à la suite d'une nouvelle
incapacité de travail, elle a été licenciée avec effet au 31 octobre 2001. Le
13 septembre 2001, D.________ a présenté à l'Office cantonal AI du Valais
(ci-après : l'office AI) une demande de prestations de l'assurance-invalidité
tendant à l'octroi d'une orientation professionnelle et d'une rente.

Lors de l'instruction, l'office AI a confié un mandat d'expertise
pluridisciplinaire au Centre d'observation médical de l'Assurance Invalidité
de Lausanne (COMAI). Dans un rapport du 28 avril 2003, les docteurs
L.________ et C.________ ont diagnostiqué un état de stress post-traumatique
(F43.1), un épisode dépressif sévère sans symptôme psychotique (F32.2), une
personnalité à traits paranoïaques (F60.0), un possible syndrome de
Dejerine-Roussy après infarctus latéro-thalamique gauche (I69.3), des
douleurs chroniques irréductibles (R51.1) ainsi qu'une spondylarthrose et des
possibles séquelles de la maladie de Scheuermann (M47). Selon les experts, en
raison de ces affections, la capacité de travail de l'assurée est de 30 %
dans son activité d'aide de cuisine et de l'ordre de 50 % à 60 % dans une
activité adaptée.

Après avoir examiné les possibilités de réadaptation de l'assurée, l'office
AI a considéré que de telles mesures n'étaient pas envisageables eu égard aux
capacités d'adaptation limitées de D.________.

Par décision du 8 janvier 2004, l'office AI a alloué à l'assurée une
demi-rente dès le 1er août 2001 se fondant sur un degré d'invalidité de 51 %.
Il a retenu un revenu sans invalidité de 41'890 fr. et un revenu d'invalidité
de 20'558 fr. Il a en outre renoncé à faire bénéficier l'assurée de mesures
d'ordre professionnel. Par décision du 6 mai 2004, l'office AI a
partiellement admis l'opposition de l'assurée en ce sens qu'un arrérage de
rente de 19'147 fr. lui était dû et a rejeté l'opposition pour le surplus.

B.
L'assurée a déféré la décision sur opposition du 6 mai 2004 au Tribunal
cantonal des assurances du canton du Valais en concluant  principalement à
l'allocation d'une rente entière fondée sur un taux d'invalidité de 66 2/3 %
au moins et subsidiairement à un trois-quarts de rente fondé sur un taux
d'invalidité de 60 % au moins, avec effet au 1er août 2001.

Par jugement du 8 septembre 2004, le recours de l'assurée a été rejeté.

C.
D.________ interjette recours de droit administratif contre ce jugement, dont
elle demande l'annulation, sous suite de dépens, en concluant principalement
à l'allocation d'une rente entière à partir du 1er août 2001, fondée sur un
taux d'invalidité de 66 2/3 % au moins et, subsidiairement, à un trois-quarts
de rente fondé sur un taux d'invalidité de 60 % au moins dès le 1er janvier
2004. A titre subsidiaire également, elle requiert le renvoi du dossier à la
juridiction inférieure pour nouvelle décision.

L'office AI conclut au rejet du recours. De son côté, l'Office fédéral des
assurances sociales n'a pas présenté de déterminations.

Considérant en droit:

1.
Le litige porte sur le degré d'invalidité de la recourante, singulièrement
sur la détermination des revenus avec et sans invalidité qui doivent être
pris en compte pour la comparaison des revenus.

2.
La décision sur opposition litigieuse, rendue le 6 mai 2004, est postérieure
à l'entrée en vigueur le 1er janvier 2003 de la loi fédérale sur la partie
générale des assurances sociales du 6 octobre 2000 (LPGA) ainsi qu'à l'entrée
en vigueur le 1er janvier 2004 des modifications de la loi fédérale sur
l'assurance-invalidité du 21 mars 2003 (4ème révision). En vertu du principe
général de droit transitoire, selon lequel - en cas de changement de bases
légales - les règles applicables sont celles en vigueur au moment où les
faits juridiquement déterminants se sont produits, il y a lieu d'examiner le
droit à une rente au regard de l'ancien droit pour la période jusqu'au 31
décembre 2002 (LPGA), respectivement 31 décembre 2003 (LAI) et en fonction de
la nouvelle réglementation légale après cette date (ATF 130 V 455 et les
références). Les modifications légales contenues dans la LPGA constituent, en
règle générale, une version formalisée dans la loi, de la jurisprudence
relative aux notions correspondantes avant l'entrée en vigueur de la LPGA; il
n'en découle aucune modification du point de vue de leur contenu, de sorte
que la jurisprudence développée à leur propos peut être reprise et appliquée
(ATF 130 V 345 consid. 3).

3.
Est réputée invalidité l'incapacité de gain totale ou partielle qui est
présumée permanente ou de longue durée (art. 8 al. 1 LPGA). L'invalidité peut
résulter d'une infirmité congénitale, d'une maladie ou d'un accident (art. 4
al. 1 LAI). Elle est réputée survenue dès qu'elle est, par sa nature et sa
gravité, propre à ouvrir droit aux prestations entrant en considération (art.
4 al. 2 LAI).

4.
Selon une jurisprudence constante, l'administration est tenue, au stade de la
procédure administrative, de confier une expertise à un médecin indépendant,
si une telle mesure se révèle nécessaire. Lorsque de telles expertises sont
établies par des spécialistes reconnus, sur la base d'observations
approfondies et d'investigations complètes, ainsi qu'en pleine connaissance
du dossier, et que les experts aboutissent à des résultats convaincants, le
juge ne saurait les écarter aussi longtemps qu'aucun indice concret ne permet
de douter de leur bien-fondé (ATF 125 V 353 consid. 3b/bb, 122 V 161 consid.
1c et les références).

En l'occurrence, le rapport d'expertise du COMAI du 28 avril 2003 remplit
toutes les conditions auxquelles la jurisprudence précitée soumet la valeur
probante de tels documents. La recourante ne le conteste d'ailleurs pas. Dès
lors, c'est à juste titre que l'administration et les premiers juges ont
retenu une incapacité de travail de 50% sur la base de l'évaluation faite par
les experts.

5.
Chez les assurés actifs, le degré d'invalidité doit être évalué sur la base
d'une comparaison des revenus. Pour cela, le revenu que l'assuré aurait pu
obtenir s'il n'était pas invalide est comparé avec celui qu'il pourrait
obtenir en exerçant l'activité qui peut raisonnablement être exigée de lui
après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du
travail équilibré (art. 16 LPGA). La comparaison des revenus s'effectue, en
règle générale, en chiffrant aussi exactement que possible les montants de
ces deux revenus et en les confrontant l'un avec l'autre, la différence
permettant de calculer le taux d'invalidité. Dans la mesure où ces revenus ne
peuvent être chiffrés exactement, ils doivent être estimés d'après les
éléments connus dans le cas particulier, après quoi l'on compare entre elles
les valeurs approximatives ainsi obtenues (méthode générale de comparaison
des revenus; ATF 128 V 30 consid. 1, 104 V 136 consid. 2a et 2b; cf. ATF 130
V 348 consid. 3.4).

En règle générale, le revenu hypothétique de la personne valide se détermine
en établissant au degré de la vraisemblance prépondérante ce qu'elle aurait
effectivement pu réaliser au moment déterminant si elle était en bonne santé
(ATF 129 V 224 consid. 4.3.1 et la référence). Il doit être évalué de manière
aussi concrète que possible si bien qu'il convient, en règle général, de se
référer au dernier salaire que l'assuré a obtenu avant l'atteinte à la santé.
Pour déterminer le revenu que l'on peut encore raisonnablement attendre de
l'assuré en dépit de son atteinte à la santé (revenu d'invalide), il doit
être tenu compte avant tout de la situation professionnelle concrète de
l'intéressé. En l'absence d'un revenu effectivement réalisé - soit lorsque
l'assuré, après la survenance de l'atteinte à la santé, n'a pas repris
d'activité ou alors aucune activité adaptée, normalement exigible - la
jurisprudence admet la possibilité de se référer aux données statistiques,
telles qu'elles résultent de l'enquête sur la structure des salaires (ESS)
publiée par l'Office fédéral de la statistique (ATF 126 V 76 consid. 3b/aa et
bb). On se réfère alors à la statistique des salaires bruts standardisés, en
se fondant toujours sur la médiane ou valeur centrale (ATF 124 V 323 consid.
3b/bb).

6.
6.1 La recourante reproche aux premiers juges ainsi qu'à l'administration de
ne pas avoir tenu compte, dans l'évaluation du degré d'invalidité, du niveau
des salaires dans le canton du Valais, alléguant qu'il serait notoirement
inférieur à la moyenne nationale. Pour compenser cette différence de salaire,
elle soutient que son revenu sans invalidité aurait dû être déterminé, à
l'instar du revenu d'invalide, sur la base des statistiques. Elle demande en
outre qu'un abattement de 25 % soit appliqué à son revenu d'invalide.

6.2 Contrairement à ce que soutient l'intéressée, le revenu sans invalidité
ne saurait être déterminé sur la base des statistiques. En effet, ce revenu
doit être évalué de manière aussi concrète que possible, soit en se fondant,
selon la jurisprudence, sur le dernier salaire réalisé par la recourante (ATF
129 V 224 consid. 4.3.1). Ce n'est que lorsque ce revenu ne correspond
manifestement pas à ce que l'assuré aurait été en mesure de réaliser, au
degré de la vraisemblance prépondérante, s'il n'était pas devenu invalide,
compte tenu de sa situation personnelle et de ses aptitudes professionnelles,
qu'il y a lieu de s'en écarter (RAMA 2000 N° U 400 p. 381 consid. 2a et la
référence; Meyer-Blaser, Bundesgesetz über die Invalidenversicherung [IVG],
1997, p. 205-206; RCC 1985 p. 662 ss.).

En l'occurrence, aucun élément du dossier ne justifie de s'écarter du dernier
salaire de la recourante, si bien que c'est à juste titre que les premiers
juges ont tenu compte d'un salaire mensuel de 3'125 fr. 40 (versé 13 fois
l'an), soit de 40'630 fr. 20 par année en se référant au questionnaire de
l'employeur.

Quoiqu'en dise la recourante, ce montant correspond au revenu statistique
dans le domaine de l'hôtellerie/restauration (L'enquête suisse sur la
structure des salaires 2000, table TA1, p.31) où le revenu médian pour une
femme est de 3'111 fr. par mois (12 x par année). On doit aussi constater que
le salaire que la recourante obtenait concrètement à l'Hôpital X.________
était en réalité légèrement supérieur à celui de la moyenne suisse. Il est
par conséquent erroné d'affirmer, comme la recourante le fait longuement dans
son écriture, que les salaires en Valais sont notoirement inférieurs à la
moyenne suisse, à tout le moins dans le secteur de l'hôtellerie.

6.3 En ce qui concerne le revenu d'invalide, les premiers juges étaient
fondés à se référer aux données statistiques qui résultent de l'enquête sur
la structure des salaires publiée par l'Office fédéral de la statistique
puisque la recourante n'a pas repris d'activité lucrative depuis le dépôt de
sa demande de prestations de l'assurance-invalidité (ATF 124 V 323 consid
3b/aa). Le salaire statistique de l'ESS est en effet suffisamment
représentatif de ce que la recourante serait en mesure de réaliser en tant
qu'invalide dès lors qu'il recouvre un large éventail d'activités variées et
non qualifiées compatibles avec des limitations fonctionnelles peu
contraignantes (ATF 129 V 472). Aussi, ne saurait-on reprocher à la
juridiction cantonale d'avoir évalué le salaire d'invalide sur la base des
statistiques salariales élaborées sur le plan national. Au demeurant, on
n'aboutirait pas à un résultat plus favorable pour la recourante en se
référant à la table TA 13 LSE et en prenant en compte le salaire mensuel brut
de la région lémanique soit des cantons de Genève, Vaud et Valais.

6.4 La recourante ne saurait davantage être suivie dans son argumentation,
supposé même réalisée l'hypothèse de salaires inférieurs à la moyenne suisse
dans la région Y.________.

En effet, l'exercice d'une activité lucrative dans un autre lieu que celui de
son domicile est raisonnablement exigible lorsque l'assuré peut rentrer chez
lui tous les jours (Peter Omlin, die Invalidität in der obligatorischen
Unfallversicherung : mit besonderer Berücksichtigung der älteren
Arbeitnehmerinnen und Arbeitnehmer, Diss. Fribourg 1994, 2 Aufl. 1999 p.
207). Ainsi, le changement du lieu de travail peut, même si l'on tient compte
de considérations liées au libre choix du lieu de travail, constituer une
mesure propre à atténuer autant que possible les conséquences de
l'invalidité. Les exigences posées à l'obligation, pour l'assuré, de prendre
de telles mesures (obligation de réduire le dommage), doivent être appliquées
de manière stricte lorsqu'il est question de demander à l'AI une forte
contribution, par exemple lorsque le fait de renoncer à de telles mesures
risquerait d'ouvrir droit à des rentes (RCC 1987 p. 458; Meyer-Blaser, op.
cit. p. 211). Ainsi, dans un arrêt ancien, la Cour de céans a estimé qu'un
trajet en train de 45 minutes était raisonnable (RCC 1968 p. 581).

Dans ces conditions, on pourrait aussi exiger de la recourante qu'elle se
déplace dans la région Z.________ ou W.________ pour exercer une activité
lucrative adaptée à son état de santé si les salaires offerts devaient y être
plus élevés comme elle le soutient.

De plus, on peut également, en l'espèce, raisonnablement exiger de la
recourante qu'elle exerce une activité adaptée dans un autre domaine que
celui de l'hôtellerie/restauration où les salaires sont généralement
inférieurs (cf. le salaire mensuel moyen de 3'663 fr. dans les services et de
3641 fr. dans la production, TA1 de la LSE). En effet, selon les conclusions
des experts du COMAI, la capacité de travail de la recourante qui n'est que
de 30 % dans son ancienne activité est de  50 % environ dans une activité
adaptée (rapport du 28 avril 2003, p. 19-20). Dès lors, en retenant le
montant de 46'905 fr. 60 à titre de revenu d'invalide, les premiers juges ont
correctement appliqué les règles de calcul posées par la jurisprudence.

Quant au facteur de réduction sur le salaire statistique prévu par la
jurisprudence (ATF 126 V 78), l'administration l'a fixé à juste titre à 15 %.
En effet, il tient équitablement compte de la situation personnelle de la
recourante (pour des cas similaires : arrêt L. du 4 septembre 2002, I 774/01;
arrêt non publié S. du 30 novembre 2001, I 430/01). Le revenu d'invalide
s'élève ainsi à 19'934 fr. 88 (compte tenu d'une incapacité de travail de 50
%). Au demeurant, comme l'ont relevé à juste titre les premiers juges, même
en appliquant l'abattement maximum de 25 % admis par la jurisprudence (ATF
126 V 75), le degré d'invalidité se monterait à 57 % et n'ouvrirait ni droit
à une rente entière jusqu'au 31 décembre 2003, ni même à un trois-quarts de
rente dès le 1er janvier 2004.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Il n'est pas perçu de frais de justice.

3.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal cantonal des
assurances du canton du Valais et à l'Office fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 21 juillet 2005

Au nom du Tribunal fédéral des assurances

Le Président de la IVe Chambre: Le Greffier: