Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Sozialrechtliche Abteilungen I 551/2004
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I 551/04

Arrêt du 6 janvier 2006
IIIe Chambre

MM. les Juges Ferrari, Président, Lustenberger et Seiler. Greffière : Mme von
Zwehl

R.________, recourante, représentée par Me Jean-Luc Addor, avocat, avenue de
Tourbillon 3, 1950 Sion,

contre

Office cantonal AI Genève, 97, rue de Lyon, 1203 Genève, intimé

Tribunal cantonal des assurances sociales, Genève

(Jugement du 14 juillet 2004)

Faits:

A.
A.a R.________, a travaillé comme documentaliste pour la société D.________
SA de 1980 à 1990. Par la suite, elle a géré une boutique de vêtements de
sport à C.________ qu'elle a fermée fin avril 1997. Le 23 octobre 1998, elle
a présenté une demande de prestations de l'assurance-invalidité, en indiquant
souffrir d'hypotension d'une part, et de douleurs au dos et à la nuque, de
difficultés de concentration ainsi que d'une fatigue permanente depuis un
accident de la circulation survenu en 1986 d'autre part.

Les mesures d'instruction mises en oeuvre par l'Office AI du canton du Valais
ont révélé que l'assurée présentait des «troubles neuropsycho-logiques
sévères [...] incompatible(s) avec un fonctionnement socio-professionnel même
minimal» (voir notamment le rapport du 14 mars 2000 du docteur A.________ et
l'avis du 4 avril 2000 du docteur T.________, médecin-conseil). Sur cette
base, ledit office a rendu, le 17 juillet 2000, une décision par laquelle il
a alloué à R.________ une rente entière d'invalidité avec effet au 1er mai
1998. La prénommée ayant déposé entre-temps ses papiers à Genève, son dossier
a été ensuite transmis à l'autorité compétente du canton de Genève. La
décision est entrée en force.

A.b Le 29 octobre 2002, R.________ s'est adressée à l'Office AI du canton de
Genève (ci-après : l'office AI) en demandant la «reconsidé-ration» de la
décision du 17 juillet 2000. A l'appui de sa requête, elle a produit quatre
rapports médicaux (des docteurs N.________, J.________/P.________/I.________
de l'Unité d'épileptologie clinique et d'électroencéphalographie de l'Hôpital
X.________, L.________ et Z.________, respectivement des 8, 23 et 30
septembre 1999, et 18 janvier 2000), qui établissaient, selon elle, que la
survenance de son invalidité remontait au moins à l'année 1991.

Par décision du 11 février 2003, l'office AI a refusé de donner suite à cette
demande. Saisi d'une opposition, il a confirmé cette prise de position dans
une nouvelle décision du 23 mai 2003.

B.
Le Tribunal cantonal genevois des assurances sociales a rejeté le recours
formé par l'assurée contre la décision sur opposition de l'office AI
(jugement du 14 juillet 2004).

C.
R.________ interjette recours de droit administratif contre ce jugement, dont
elle requiert l'annulation. Sous suite de frais et dépens, elle conclut,
principalement, à ce que le droit à une rente d'invalidité lui soit reconnu
depuis 1991 ou du moins depuis une date antérieure au 1er mai 1997 et,
subsidiairement, à ce que le dossier soit renvoyé à l'autorité cantonale
compétente pour nouvelle décision au sens des considérants.

L'office AI conclut au rejet du recours, tandis que l'Office fédéral des
assurances sociales a renoncé à se déterminer.

Considérant en droit:

1.
A titre préliminaire, la recourante conteste la conformité de la juridiction
genevoise à la constitution cantonale. Sur le fond, elle soutient que les
pièces médicales qu'elle a produites et qui ne figuraient pas dans son
dossier AI contiennent des faits nouveaux propres à modifier la décision du
17 juillet 2000. Les médecins l'ayant examinée seraient en effet unanimes
pour reconnaître l'existence d'un lien de causalité entre ses troubles
actuels et l'accident de circulation qu'elle avait subi en date du 21 mai
1986. Elle invite par ailleurs le Tribunal fédéral des assurances à assouplir
sa jurisprudence en matière de reconsidération des décisions formellement
passées en force.

2.
Le Tribunal fédéral a expressément admis que le Tribunal cantonal genevois
des assurances sociales reposait sur des bases constitutionnelles et légales
suffisantes (ATF 130 I 366; voir également ATF 130 I 226). Il a également
retenu que la solution consistant à rendre des arrêts par trois juges
régulièrement élus, comme le prévoit, dans l'attente de l'élection des juges
assesseurs par le peuple, la loi cantonale du 13 février 2004 modifiant la
loi d'organisation judiciaire du 22 novembre 1941, était non seulement
conforme au droit fédéral, mais également la plus rationnelle (ATF 130 I 226
consid. 3.4). Il n'y pas lieu de revenir sur ces points, à propos desquels la
controverse a pris fin.

3.
Selon l'art. 53 LPGA, les décisions et les décisions sur opposition
formellement passées en force sont soumises à révision si l'assuré ou
l'assureur découvre subséquemment des faits nouveaux importants ou trouve des
nouveaux moyens de preuve qui ne pouvaient être produits auparavant (al. 1);
l'assureur peut revenir sur les décisions ou les décisions sur opposition
formellement passées en force lorsqu'elles sont manifestement erronées et que
leur rectification revêt une importance notable (al. 2); jusqu'à l'envoi de
son préavis de l'autorité de recours, l'assureur peut reconsidérer une
décision ou une décision sur opposition contre laquelle un recours a été
formé (al. 3).

4.
4.1 Contrairement à l'opinion de la recourante, les rapports médicaux auxquels
elle se réfère n'ont rien de nouveau au sens de l'art. 53 al. 1 LPGA. On
rappellera que la notion de faits ou moyens de preuve nou-veaux s'apprécie de
la même manière en cas de révision (procédurale) d'une décision
administrative (art. 53 al. 1 LPGA), de révision d'un jugement cantonal (art.
61 let. i LPGA) ou de révision d'un arrêt fondée sur l'article 137 lettre b
OJ; or, sont «nouveaux» au sens de ces dispositions, les faits qui se sont
produits jusqu'au moment où, dans la procédure principale, des allégations de
faits étaient encore rece-vables, mais qui n'étaient pas connus du requérant
malgré toute sa diligence. En l'occurrence, on peut constater que les pièces
en cause ont toutes été établies antérieurement à la décision du 17 juillet
2000 et que la recourante ne fournit aucune explication quant aux raisons qui
l'auraient empêchée d'en faire état dans la procédure AI. Elle ne saurait dès
lors se prévaloir d'un motif de révision (procédurale). Par surabondance, on
ajoutera que les éléments ressortant des quatre rapports médicaux ne sont pas
de nature à modifier l'état de fait qui est à la base de la décision d'octroi
de la rente. A cet égard, on peut renvoyer la recourante aux considérants de
l'arrêt de la Cour de céans dans le litige dirigé contre
l'assureur-accidents, la Winterthur Assurances (cause U 278/04).

4.2 Une reconsidération n'entre pas davantage en ligne de compte. Selon la
jurisprudence rendue sous l'ancien droit, ni l'assuré ni le juge ne peuvent
exiger que l'administration reconsidère sa décision (ATF 117 V 12 consid. 2a
et les références). Il n'existe pas de droit à la reconsidération que
l'assuré pourrait déduire en justice. Cependant, lorsque l'administration
entre en matière sur une demande de reconsidération et examine si les
conditions d'une reconsidération sont remplies, avant de statuer au fond par
une nouvelle décision de refus, celle-ci est susceptible d'être attaquée par
la voie d'un recours; le contrôle juridictionnel dans la procédure de recours
subséquente se limite alors au point de savoir si les conditions d'une
reconsidération (inexactitude manifeste de la décision initiale et importance
notable de la rectification) sont réunies (ATF 117 V 13 consid. 2a, 116 V
62). L'introduction de la LPGA n'a rien changé à cet égard. Le législateur,
qui n'a pas voulu déroger à ces principes, n'a fait que codifier cette
pratique jurisprudentielle (voir notamment Ueli Kieser, ATSG-Kommentar,
Zurich 2003, note 22 ad art. 53; FF 1991 II 258). Par conséquent, l'intimé
n'étant pas entré en matière sur la demande de la recourante, les conclusions
de celle-ci tendant à la reconsidération de la décision du 17 juillet 2000
doivent être rejetées.

Le jugement entrepris n'est pas critiquable et le recours se révèle en tous
points mal fondé.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Les frais de justice, d'un montant de 500 fr., sont mis à la charge de
R.________ et sont compensés avec l'avance de frais qu'elle a effectuée.

3.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal cantonal genevois
des assurances sociales et à l'Office fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 6 janvier 2006

Au nom du Tribunal fédéral des assurances

Le Président de la IIIe Chambre: La Greffière: