Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Sozialrechtliche Abteilungen I 494/2004
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I 494/04

Arrêt du 16 mars 2006
IVe Chambre

MM. les Juges Ferrari, Président, Meyer et Ursprung. Greffier : M. Wagner

A.________, recourant, représenté par Me Gaëtan Coutaz, avocat, place du Midi
27, 1950 Sion,

contre

Office cantonal AI du Valais, avenue de la Gare 15, 1951 Sion, intimé

Tribunal cantonal des assurances, Sion

(Jugement du 28 juin 2004)

Faits:

A.
A.a A.________, né en 1958, a été engagé dès le 1er septembre 1989 en qualité
de machiniste par l'entreprise de travaux X.________. Il a exercé cette
activité jusqu'au 17 novembre 2000, date à partir de laquelle il a été
annoncé à l'arrêt de travail à sa caisse-maladie, qui a versé des indemnités
journalières.
Le 28 mars 2001, A.________ a présenté une demande de prestations de
l'assurance-invalidité. Dans un rapport médical du 9 août 2001, le docteur
F.________, spécialiste FMH en médecine générale et médecin traitant de
l'assuré, a posé le diagnostic de cervico-dorso-lombalgies chroniques sur
troubles dégénératifs, syndrome somatoforme douloureux et état dépressif
réactionnel. Il indiquait que le patient présentait une incapacité totale de
travail depuis le 17 novembre 2000. Il produisait copie d'une expertise du 19
février 2001 du docteur V.________, spécialiste FMH en médecine interne et
spécialiste en maladies rhumatismales, effectuée pour le compte de la
caisse-maladie de l'assuré, et d'une expertise psychiatrique du docteur
M.________, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie. Selon ce
dernier (rapport du 12 juin 2001), A.________ présentait un syndrome
somatoforme douloureux persistant (F 45.4) sans comorbidité psychiatrique
significativement invalidante.
Dans un projet de décision du 31 janvier 2002, l'Office cantonal de
l'assurance-invalidité du Valais a avisé A.________ qu'il ne présentait, du
point de vue physique et psychique, aucune atteinte à la santé susceptible de
diminuer sa capacité de travail et de gain comme machiniste ou dans n'importe
quel autre emploi et qu'il ne remplissait donc pas les conditions du droit à
des mesures d'ordre professionnel ni du droit à une rente d'invalidité.
Contestant la position de l'office AI, A.________ a produit une lettre du 13
février 2002 du docteur Y.________, spécialiste FMH en neurochirurgie, dont
il ressort qu'il était urgent que le patient travaille au moins à 50 % dans
une activité adaptée à son dos.
Sur requête du docteur F.________, A.________ a séjourné du 15 avril au 10
mai 2002 à l'hôpital Z.________ pour une évaluation de son état psychique.
Les docteurs G.________, chef de clinique, et S.________, médecin-assistant,
ont posé le diagnostic de troubles somatoforme douloureux persistant (F45.4)
avec épisode dépressif moyen avec syndrome somatique (F32.11), et de
personnalité psychotique (rapport du 4 juillet 2002). Dans un rapport du 4
juin 2002, ils ont avisé le docteur F.________ que le patient présentait une
comorbidité psychiatrique invalidante, ce qui le rendait incapable de
travailler. De son côté, ce médecin, dans un rapport médical du 23 juin 2002,
a informé l'assurance-invalidité que l'assuré présentait une incapacité
totale de travail de manière définitive. Interpellé par l'office AI sur la
date à partir de laquelle remontait l'aggravation de l'état de santé du
patient, le docteur F.________, dans une communication du 16 septembre 2002,
a répondu que depuis le 17 novembre 2000, l'état de santé du patient s'était
progressivement dégradé, tant sur le plan physique que psychique, et que même
dans une activité légère et sans efforts, celui-ci n'aurait pas pu
travailler.
Dans un nouveau projet de décision du 3 octobre 2002, l'office AI a avisé
A.________ que jusqu'à l'hospitalisation du 15 avril 2002, il n'avait jamais
souffert, du point de vue physique et psychique, d'une atteinte à la santé
susceptible de diminuer sa capacité de travail et de gain comme machiniste ou
dans n'importe quel autre emploi. Sa demande de prestations devait donc être
rejetée pour la période antérieure à son hospitalisation. Il l'invitait à
déposer une nouvelle demande à l'échéance du délai d'attente d'une année,
soit en avril 2003.
Par décision du 5 novembre 2002, l'office AI a rejeté la demande. Sur recours
de l'assuré contre cette décision, le Tribunal cantonal des assurances du
canton du Valais, par jugement du 2 juillet 2003, a annulé celle-ci et
renvoyé la cause à l'office AI pour instruction complémentaire éventuelle et
nouvelle décision dans le sens des considérants. Il a considéré qu'en
présence d'avis médicaux divergents, l'administration devait soit procéder à
une expertise pluridisciplinaire, afin de fixer de manière claire et précise
le taux et la durée de l'incapacité de travail dès le 17 novembre 2000, soit,
si elle n'entendait suivre que l'avis du docteur M.________ et non ceux des
autres experts et médecins qui s'étaient penchés sur le dossier, indiquer de
manière claire et circonstanciée les raisons pour lesquelles elle ne pouvait
suivre l'avis de ces praticiens, ce qu'elle n'avait manifestement pas fait.

A.b A.________ a bénéficié d'un suivi psychiatrique ambulatoire à l'hôpital
Z.________ auprès du docteur S.________ du 11 mai 2002 au 4 mars 2003. Depuis
le 5 mars 2003, il est en traitement auprès du Service de consultation
psychiatrique, à U.________. Le 31 mars 2003, le docteur F.________ a
présenté une nouvelle demande de prestations de l'assurance-invalidité pour
le compte de son patient. Dans un document du 13 mars 2003, il indiquait que
la capacité de travail de l'assuré devait être désormais considérée comme
définitivement nulle, y compris dans des activités de type occupationnel.
Selon un rapport médical du 29 avril 2003 des docteurs O.________,
médecin-chef, et R.________, médecin assistant du Service de consultation
psychiatrique, A.________ présente depuis une dizaine d'années un trouble
somatoforme douloureux persistant qui se greffe sur une structure psychotique
de la personnalité. Celui-ci souffre d'alexithymie, c'est-à-dire qu'il est
incapable d'exprimer ses émotions comme la tristesse ou l'angoisse. La
recherche de symptômes dépressifs relève donc de la quadrature du cercle et
l'on doit donc considérer sa symptomatologie somatique comme étant la seule
manière pour lui d'exprimer ses angoisses. Il s'agit donc d'une maladie
psychiatrique grave. Il est clair que la capacité de travail du patient est
nulle et ceci de manière probablement durable.
Dans un avis du 26 juin 2003, le docteur H.________, médecin de l'office AI,
a considéré qu'il y avait discordance dans les avis médicaux. Il a confié une
expertise psychiatrique au professeur I.________, spécialiste FMH en
psychiatrie et psychothérapie. Dans un rapport du 31 juillet 2003, l'expert a
constaté l'existence de discordances comportementales inexplicables
médicalement qui conduisaient à faire admettre chez A.________ l'absence
d'une affection psychiatrique réellement invalidante. Parmi les catégories
cliniques de la « Classification Internationale des troubles mentaux et des
troubles du comportement. Descriptions cliniques et directives pour le
diagnostic » CIM-10 dont il était possible de faire état, il a retenu les
diagnostics de trouble hypocondriaque (F45.2), de majoration de symptômes
physiques pour des raisons psychologiques (F68.0) et de production
intentionnelle ou simulation de symptômes ou d'une incapacité, soit
physiques, soit psychologiques (trouble factice [F68.1]). A la question de
savoir quelle était l'influence de l'atteinte à la santé sur la capacité de
travail de l'assuré, il a répondu que la conduite dans laquelle celui-ci
s'était enfermé l'empêchait de reprendre une activité professionnelle, sans
que l'on puisse retenir, sur le plan psychique, une incapacité de travail.
Afin de compléter l'instruction médicale sous l'angle somatique, l'office AI
a confié une expertise au docteur B.________, médecin responsable du service
ambulatoire de la Clinique C.________. Dans un rapport du 6 octobre 2003, ce
praticien a posé le diagnostic de syndrome douloureux somatoforme persistant.
De l'avis du docteur B.________, si l'on prenait en compte le caractère
chronique de l'état douloureux sans rémission durable, la durée de plusieurs
années avec des symptômes allant s'aggravant et l'échec de tous les
traitements, on devait admettre que le pronostic était très sombre et, comme
tous les médecins avant lui, ce praticien avait la conviction que A.________
ne reprendrait plus d'activité professionnelle. Pour sa part, il avait
l'impression que l'assuré avait épuisé ses ressources et qu'il existait un
trouble de la personnalité relativement grave, traduit par les diagnostics de
trouble hypochondriaque et autre trouble de la personnalité posés par le
professeur I.________.
Le 13 octobre 2003, l'office AI a avisé A.________ que selon les pièces en sa
possession, il ne présentait, du point de vue tant physique que psychique,
aucune atteinte à la santé susceptible de diminuer sa capacité de travail
comme machiniste ou dans n'importe quel autre emploi de son choix. Etant
donné qu'il ne remplissait pas les conditions du droit à des mesures d'ordre
professionnel ni du droit à une rente d'invalidité, sa demande était rejetée.

A. ________ a formé opposition contre cette décision. Il produisait une
lettre du 4 août 2003 du docteur K.________, médecin-adjoint à l'hôpital
Z.________, qui indiquait que le séjour du patient pendant plus de trois
semaines entre le 15 avril et le 10 mai 2002 aurait été impensable, si cette
hospitalisation n'était pas entièrement justifiée du point de vue médical. Le
suivi ambulatoire jusqu'en mars 2003 par le docteur S.________ était de
nature psychothérapeutique.
Par décision du 10 février 2004, l'office AI a rejeté l'opposition.

B.
A.________ a formé recours contre cette décision devant le Tribunal cantonal
des assurances du canton du Valais, en concluant, sous suite de frais et
dépens, à l'annulation de celle-ci et à l'allocation d'une rente entière
d'invalidité. Il produisait une prise de position du docteur F.________ du 21
février 2004, dans laquelle le médecin traitant de l'assuré partageait l'avis
des médecins de l'hôpital Z.________ en ce qui concerne l'existence d'une
affection psychiatrique et leurs évaluations. Par la suite, il a produit
également une lettre du 27 février 2004 du docteur N.________,
médecin-directeur de l'hôpital Z.________, et un certificat médical établi le
25 mai 2004 par les docteurs D.________, cheffe de clinique, et E.________,
médecin assistante au Service de consultation psychiatrique de U.________.
Par jugement du 28 juin 2004, le Tribunal cantonal des assurances a rejeté le
recours.

C.
Dans un mémoire du 31 août 2004, A.________ interjette un recours de droit
administratif contre ce jugement, en concluant, sous suite de frais et
dépens, à l'allocation d'une rente entière d'invalidité avec effet au 1er
novembre 2000. Il produit copie de plusieurs documents, dont un rapport du 3
août 2004 du Service de médecine de l'hôpital de U.________ - relatif à une
hospitalisation du 13 au 22 juillet 2004 - et une attestation médicale du 31
août 2004 de la doctoresse E.________.
Par lettre du 3 septembre 2004, A.________ requiert la mise en oeuvre d'une
contre-expertise, qu'il propose de confier au professeur J.________,
responsable de l'Unité d'expertises de l'hôpital L.________.
L'Office cantonal AI du Valais conclut au rejet du recours. L'Office fédéral
des assurances sociales n'a pas déposé d'observations.

Considérant en droit:

1.
Le litige concerne le droit éventuel du recourant à une rente de
l'assurance-invalidité et porte sur le point de savoir si celui-ci présente
une atteinte à la santé psychique diminuant sa capacité de travail et de gain
dans une mesure suffisante pour fonder un droit à une rente entière.

2.
2.1 La loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales du
6 octobre 2000 (LPGA) est entrée en vigueur le 1er janvier 2003, entraînant
la modification de nombreuses dispositions légales dans le domaine de
l'assurance-invalidité. La décision sur opposition litigieuse, du 10 février
2004, est postérieure à l'entrée en vigueur de la LPGA. Conformément au
principe général de droit transitoire, selon lequel - même en cas de
changement des bases légales - les règles applicables sont celles en vigueur
au moment où les faits juridiquement déterminants se sont produits, il y a
lieu d'examiner le droit à une rente au regard de l'ancien droit pour la
période jusqu'au 31 décembre 2002 et en fonction de la nouvelle
réglementation légale après cette date (ATF 130 V 445 et les références; cf.
aussi ATF 130 V 329).
Pour les mêmes motifs, les dispositions de la novelle du 21 mars 2003
modifiant la LAI (4ème révision), entrée en vigueur le 1er janvier 2004, sont
applicables.

2.2 En vertu de l'art. 4 al. 1 LAI (dans sa teneur en vigueur jusqu'au 31
décembre 2002), l'invalidité au sens de la présente loi est la diminution de
la capacité de gain, présumée permanente ou de longue durée, qui résulte
d'une atteinte à la santé physique, ou mentale provenant d'une infirmité
congénitale, d'une maladie ou d'un accident.
Selon l'art. 7 LPGA, est réputée incapacité de gain toute diminution de
l'ensemble ou d'une partie des possibilités de gain de l'assuré sur un marché
du travail équilibré dans son domaine d'activité, si cette diminution résulte
d'une atteinte à sa santé physique, mentale ou psychique et qu'elle persiste
après les traitements et les mesures de réadaptation exigibles. D'après
l'art. 8 al. 1 LPGA, est réputée invalidité l'incapacité de gain totale ou
partielle qui est présumée permanente ou de longue durée.
Les définitions de l'incapacité de travail, l'incapacité de gain,
l'invalidité, de la méthode de comparaison des revenus et de la révision (de
la rente d'invalidité et d'autres prestations durables) contenues dans la
LPGA correspondent aux notions précédentes dans l'assurance-invalidité telles
que développées à ce jour par la jurisprudence (ATF 130 V 343).

2.3 Les atteintes à la santé psychique peuvent, comme les atteintes
physiques, entraîner une invalidité au sens de l'art. 4 al. 1 LAI en liaison
avec l'art. 8 LPGA. On ne considère pas comme des conséquences d'un état
psychique maladif, donc pas comme des affections à prendre en charge par
l'assurance-invalidité, les diminutions de la capacité de gain que l'assuré
pourrait empêcher en faisant preuve de bonne volonté; la mesure de ce qui est
exigible doit être déterminée aussi objectivement que possible (ATF 102 V
165; VSI 2001 p. 224 consid. 2b et les références; cf. aussi ATF 127 V 298
consid. 4c in fine).

La reconnaissance de l'existence d'une atteinte à la santé psychique, soit
aussi de troubles somatoformes douloureux persistants, suppose d'abord la
présence d'un diagnostic émanant d'un expert (psychiatre) et s'appuyant lege
artis sur les critères d'un système de classification reconnu (ATF 130 V 398
ss consid. 5.3 et consid. 6). Comme pour toutes les autres atteintes à la
santé psychique, le diagnostic de troubles somatoformes douloureux
persistants ne constitue pas encore une base suffisante pour conclure à une
invalidité. Au contraire, il existe une présomption que les troubles
somatoformes douloureux ou leurs effets peuvent être surmontés par un effort
de volonté raisonnablement exigible. Le caractère non exigible de la
réintégration dans le processus de travail peut résulter de facteurs
déterminés qui, par leur intensité et leur constance, rendent la personne
incapable de fournir cet effort de volonté. Dans un tel cas, en effet,
l'assuré ne dispose pas des ressources nécessaires pour vaincre ses douleurs.
La question de savoir si ces circonstances exceptionnelles sont réunies doit
être tranchée de cas en cas à la lumière de différents critères. Au premier
plan figure la présence d'une comorbidité psychiatrique importante par sa
gravité, son acuité et sa durée. D'autres critères peuvent être déterminants.
Ce sera le cas des affections corporelles chroniques, d'un processus maladif
s'étendant sur plusieurs années sans rémission durable (symptomatologie
inchangée ou progressive), d'une perte d'intégration sociale dans toutes les
manifestations de la vie, d'un état psychique cristallisé, sans évolution
possible au plan thérapeutique, résultant d'un processus défectueux de
résolution du conflit, mais apportant un soulagement du point de vue
psychique (profit primaire tiré de la maladie, fuite dans la maladie), de
l'échec de traitements ambulatoires ou stationnaires conformes aux règles de
l'art (même avec différents types de traitement), cela en dépit de l'attitude
coopérative de la personne assurée (ATF 130 V 352). Plus ces critères se
manifestent et imprègnent les constatations médicales, moins on admettra
l'exigibilité d'un effort de volonté (Meyer-Blaser, Der Rechtsbegriff der
Arbeitsunfähigkeit und seine Bedeutung in der Sozialversicherung, in: Schmerz
und Arbeitsunfähigkeit, St. Gall 2003, p. 77).

Si les limitations liées à l'exercice d'une activité résultent d'une
exagération des symptômes ou d'une constellation semblable, on conclura, en
règle ordinaire, à l'absence d'une atteinte à la santé ouvrant le droit à des
prestations d'assurance. Au nombre des situations envisagées figurent la
discordance entre les douleurs décrites et le comportement observé,
l'allégation d'intenses douleurs dont les caractéristiques demeurent vagues,
l'absence de demande de soins, les grandes divergences entre les informations
fournies par le patient et celles ressortant de l'anamnèse, le fait que des
plaintes très démonstratives laissent insensible l'expert, ainsi que
l'allégation de lourds handicaps malgré un environnement psychosocial intact
(voir Kopp/Willi/Klipstein, Im Graubereich zwischen Körper, Psyche und
sozialen Schwierigkeiten, in: Schweizerische Medizinische Wochenschrift 1997,
p. 1434, avec référence à une étude approfondie de Winckler et Foerster; voir
sur l'ensemble du sujet ATF 131 V 50 s. consid. 1.2).

3.
L'appréciation par les premiers juges de l'expertise psychiatrique du
professeur I.________ est au centre du litige.

3.1 Les premiers juges ont accordé pleine valeur probante au rapport du
professeur I.________ du 31 juillet 2003. Ils ont constaté qu'elle était
complète, compte tenu des droits contestés. Le professeur I.________ s'était
fondé sur l'étude du dossier de l'assuré, y compris les rapports antérieurs
de ses confrères, et il avait établi une anamnèse consciencieuse et
approfondie. L'expert avait procédé à une importante série d'examens (tests)
de l'intéressé; son appréciation tenait compte des nombreuses affections dont
se plaignait celui-ci et des traitements effectués. L'exposé du contexte
médical était cohérent, son appréciation de la situation médicale était
claire et ses conclusions dûment motivées.

3.2 Contestant que le rapport du professeur I.________ du 31 juillet 2003 ait
pleine valeur probante, le recourant fait valoir que l'expertise
psychiatrique est imprécise, parfois incompréhensible, souvent
contradictoire, et que ses conclusions sont simplistes. Se référant au
jugement de renvoi du Tribunal cantonal des assurances du 2 juillet 2003, il
relève qu'aucune expertise pluridisciplinaire n'a été réalisée jusque-là et
requiert la mise en oeuvre d'une contre-expertise.

3.3 L'expertise du professeur I.________ du 31 juillet 2003 remplit toutes
les conditions auxquelles la jurisprudence soumet la valeur probante d'un tel
document (ATF 125 V 352 consid. 3a, 122 V 160 consid. 1c et les références).
Il comprend les éléments anamnestiques, le status, le diagnostic et les
conclusions du médecin. Dans son examen médical, le professeur I.________
s'est fondé sur deux consultations des 25 et 30 juillet 2003. Selon ses
constatations, l'existence de discordances comportementales inexplicables
médicalement conduisent à faire admettre chez le recourant l'absence d'une
affection psychiatrique réellement invalidante. Tout se passe comme si le
patient ajustait constamment sa conduite à l'image qu'il se fait de lui et
qu'il veut en donner. Celui-ci semble imperturbable dans la décision de
l'office AI à son sujet, mais paraît susceptible, s'il n'obtient pas ce à
quoi il s'attend, de réactions éventuelles, en particulier contre lui-même.
Ainsi que cela ressort du rapport d'expertise (I. Questions cliniques, ch. 4
[Diagnostic] et 5 [Appréciation du cas et pronostic]), le professeur
I.________ a retenu les diagnostics de « Trouble hypocondriaque » (F45.2), de
« Majoration de symptômes physiques pour des raisons psychologiques » (F68.0)
et de « Production intentionnelle ou simulation de symptômes ou d'une
incapacité, soit physiques, soit psychologiques (trouble factice) » [F
68.1]).
L'expertise du professeur I.________ est complète. En particulier, ce
praticien s'est exprimé sur l'existence d'une « structure psychotique de la
personnalité » (examen du 26 avril 2002 par le psychologue P.________ lors du
séjour de l'assuré à l'Hôpital Z.________) ou d'une « personnalité
psychotique » (lettre de sortie du 4 juillet 2002). A ce propos, on relèvera
que le recourant a bénéficié d'un suivi psychiatrique ambulatoire à l'Hôpital
Z.________ entre le 11 mai 2002 et le 4 mars 2003. Depuis le 5 mars 2003,
celui-ci est en traitement auprès du Service de consultation psychiatrique de
U.________.
A la différence du rapport du professeur I.________ du 31 juillet 2003, le
rapport médical du 29 avril 2003 des docteurs O.________ et R.________ est un
document émanant des médecins traitants de l'assuré, lequel a moindre valeur
probante que l'expertise du professeur I.________ en raison du rapport de
confiance qui lie le médecin traitant à son patient (ATF 125 V 353 consid.
3b/cc; comp. ATF 124 I 175 consid. 4).

3.4 De l'avis de la majorité des médecins qui ont examiné le recourant,
celui-ci présente un syndrome douloureux somatoforme persistant (CIM-10
F45.4). Seul le professeur I.________ a retenu le diagnostic de trouble
hypocondriaque (CIM-10 F45.2).
Les avis médicaux divergent en ce qui concerne la capacité de travail du
recourant d'un point de vue psychique. D'un côté, le docteur M.________, dans
son expertise du 12 juin 2001, a nié toute comorbidité psychiatrique et n'a
retenu aucune incapacité de travail sur le plan psychiatrique. Tel est
également l'avis du professeur I.________, qui déclare dans son expertise du
31 juillet 2003 que la conduite dans laquelle le recourant s'est enfermé
l'empêche de reprendre une activité professionnelle, sans que l'on puisse
retenir, sur le plan psychique, une incapacité de travail. D'un autre côté,
les docteurs G.________ et S.________, dans leur rapport du 4 juin 2002, ont
constaté dans leur observation clinique durant l'hospitalisation du 15 avril
au 10 mai 2002 que le patient présentait un trouble somatoforme et également
un trouble dépressif et que les examens psychologiques avaient évoqué en plus
une structure psychotique de la personnalité, avec des défenses
obsessionnelles défaillantes, qui ne parvenaient plus à combler l'angoisse.
Au vu de ces éléments, ils étaient de l'avis que le recourant présentait une
comorbidité psychiatrique invalidante et que cela le rendait incapable de
travailler. Selon le rapport du 29 avril 2003 des docteurs O.________ et
R.________, au vu de la structure psychotique de la personnalité de l'assuré,
avec des défenses obsessionnelles effondrées, de l'alexithymie qui l'empêche
d'avoir accès à ses émotions et entraîne un très grave tableau clinique du
type trouble somatoforme douloureux persistant et de l'évolution chronique,
il est clair que la capacité de travail du recourant est nulle et ceci de
manière probablement durable.
Il apparaît ainsi que les experts ont un avis différent que les médecins
traitants en ce qui concerne la capacité de travail du recourant.

3.5 Dans son expertise du 31 juillet 2003, le professeur I.________ a discuté
le diagnostic de structure psychotique de la personnalité et de personnalité
psychotique retenu par le psychologue P.________ et les médecins de l'Hôpital
Z.________. Il convient dès lors d'examiner si les avis des médecins de
l'Hôpital Z.________ et du Centre de consultation psychiatrique de U.________
sont propres à mettre en doute les conclusions de l'expert I.________.
Dans le rapport médical du 29 avril 2003, les docteurs O.________ et
R.________ ont retenu le diagnostic de structure psychotique de la
personnalité, diagnostic qui avait été évoqué par les examens psychologiques
effectués lors du séjour du recourant à l'Hôpital Z.________ (examen du
psychologue P.________ du 26 avril 2002, rapport médical des docteurs
G.________ et S.________ du 4 juin 2002). Dans la lettre de sortie de
l'Hôpital Z.________ du 4 juillet 2002, les docteurs G.________ et S.________
avaient retenu le diagnostic de personnalité psychotique.
Selon les docteurs O.________ et R.________, le recourant présente depuis une
dizaine d'années un trouble somatoforme douloureux persistant qui se greffe
sur une structure psychotique de la personnalité. Celui-ci souffre
d'alexithymie. La recherche de symptômes dépressifs relève donc de la
quadrature du cercle et l'on doit considérer sa symptomatologie somatique
comme étant la seule manière pour lui d'exprimer ses angoisses. Il s'agit
donc d'une maladie psychiatrique grave (rapport médical du 29 avril 2003).
Il n'est toutefois pas établi au degré de la vraisemblance prépondérante que,
du point de vue médical, le recourant soit atteint d'une maladie
psychiatrique grave (sur le terme « psychotique », cf. les explications du
professeur I.________ dans son expertise du 31 juillet 2003). Si l'on s'en
tient aux seules constatations des docteurs O.________ et R.________
mentionnées ci-dessus, il est difficilement compréhensible que le patient
présente une maladie psychiatrique grave. A tout le moins, on ne comprend pas
comment ces médecins sont arrivés à une telle conclusion.

3.6 Il est établi au degré de la vraisemblance prépondérante que le recourant
présente un syndrome douloureux somatoforme persistant (CIM-10 F45.4).
Même si le professeur I.________ a retenu le diagnostic de production
intentionnelle ou simulation de symptômes ou d'une incapacité, soit physique
soit psychologique [trouble factice] (CIM-10 F68.1), la Cour de céans s'en
tient sur ce point à l'avis du docteur M.________. Dans son expertise du 12
juin 2001, ce spécialiste a retenu le diagnostic de syndrome somatoforme
douloureux persistant sans comorbidité psychiatrique significativement
invalidante, tout en rappelant qu'il ne s'agissait en aucun cas d'une
production intentionnelle de symptôme pour des motifs conscients qui
renverrait alors au diagnostic très rare de « simulation ».
Ainsi, il convient d'examiner les critères consacrés par la jurisprudence,
dont l'existence permet d'admettre le caractère non exigible de la reprise du
travail (ATF 131 V 50 s. consid. 1.2 déjà cité). D'emblée, on relèvera que le
docteur B.________, dans son expertise médicale du 6 octobre 2003, a constaté
que l'examen clinique ne permettait aucune appréciation objective, le
comportement de l'assuré étant incohérent. Le recourant annonçait en effet
des douleurs systématiques ou s'opposait à tout mouvement par des
contractions musculaires volontaires, ce qui ôtait à l'examen toute
pertinence. Finalement, si l'on faisait abstraction du comportement
ostensiblement douloureux, si l'on admettait que l'examen était parasité par
une collaboration très imparfaite, on devait admettre qu'il existait une
disproportion énorme entre les plaintes et les éléments dont on pouvait juger
objectivement. Dans tous les cas, on pouvait affirmer que le socle somatique
était insuffisant à soutenir l'édifice des plaintes, raison pour laquelle on
retenait le diagnostic de trouble somatoforme douloureux.
Au nombre des situations envisagées permettant de conclure à l'absence d'une
atteinte à la santé ouvrant le droit à des prestations d'assurance, figure la
discordance entre les douleurs décrites et le comportement observé (ATF 131 V
51 consid. 1.2).
D'un autre côté, on ne saurait non plus faire abstraction des conclusions du
docteur B.________. Dans son rapport d'expertise du 6 octobre 2003, ce
praticien a indiqué que si l'on prenait en compte le caractère chronique de
l'état douloureux sans rémission durable, la durée de plusieurs années avec
des symptômes qui sont allés s'aggravant et l'échec de tous les traitements,
on devait admettre que le pronostic était très sombre et, comme tous les
médecins avant lui, il avait la conviction que l'assuré ne reprendrait plus
d'activité professionnelle. Pour sa part, le docteur B.________ avait
l'impression que le recourant avait épuisé ses ressources et qu'il existait
un trouble de la personnalité relativement grave, traduit par les diagnostics
de trouble hypocondriaque et autre trouble de la personnalité par le
professeur I.________.
Dès lors il se justifie de renvoyer la cause à l'office AI pour qu'il examine
plus avant la situation de l'assuré. En ce qui concerne la présence d'une
comorbidité psychiatrique importante par sa gravité, son acuité et sa durée,
il importe de savoir si, comme l'affirment les médecins du Service de
consultation psychiatrique de U.________, le recourant est atteint d'une
maladie psychiatrique grave. Cela nécessite  une instruction complémentaire,
qu'il paraîtrait opportun de confier à la Clinique romande de réadaptation à
Sion afin qu'elle puisse également se prononcer sur les autres critères
déterminants, en particulier l'existence d'un état psychique cristallisé. Sur
ce point, on relèvera que selon l'expertise du professeur I.________ du 31
juillet 2003, le recourant s'est donné psychiquement une allure d'invalide
qui s'est structurée de telle manière qu'il ne lui est plus possible de s'en
déprendre.

4.
Le litige ayant pour objet l'octroi ou le refus de prestations d'assurance,
la procédure est gratuite (art. 134 OJ a contrario). Représenté par un
avocat, le recourant a droit à une indemnité de dépens pour l'instance
fédérale (art. 159 al. 1 en corrélation avec l'art. 135 OJ). Il y a lieu
d'inviter l'autorité de l'instance précédente à statuer sur les dépens de
cette instance (art. 61 let. g LPGA).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce:

1.
Le recours est admis en ce sens que le jugement du Tribunal cantonal des
assurances du canton du Valais, du 28 juin 2004, et la décision sur
opposition du 10 février 2004 sont annulés, la cause étant renvoyée à
l'Office cantonal AI du Valais pour instruction complémentaire au sens des
considérants et nouvelle décision.

2.
Il n'est pas perçu de frais de justice.

3.
L'Office cantonal AI du Valais versera au recourant la somme de 2'500 fr. (y
compris la taxe sur la valeur ajoutée) à titre de dépens pour l'instance
fédérale.

4.
Le Tribunal cantonal des assurances du canton du Valais statuera sur les
dépens pour la procédure de première instance, au regard de l'issue du procès
de dernière instance.

5.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal cantonal des
assurances, à la Caisse de compensation du canton du Valais et à l'Office
fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 16 mars 2006

Au nom du Tribunal fédéral des assurances

Le Président de la IVe Chambre: Le Greffier: