Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Sozialrechtliche Abteilungen I 432/2004
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I 432/04

Arrêt du 24 février 2005
IIIe Chambre

Mme et MM. les Juges Leuzinger, Présidente, Lustenberger et Kernen. Greffier
: M. Piguet

A.________, 1940, recourante, représentée par Me José Nogueira Esmoris,
Avocat, Cuesta de la Palloza, 1 - 3° Dcha., 15006 A Coruña, Espagne,

contre

Office AI pour les assurés résidant à l'étranger, avenue Edmond-Vaucher 18,
1203 Genève, intimé

Commission fédérale de recours en matière d'AVS/AI pour les personnes
résidant à l'étranger, Lausanne

(Jugement du 29 juin 2004)

Faits:

A.
A. ________, ressortissante espagnole, née en 1940, a travaillé en Suisse de
1966 à 1975. Elle est retournée par la suite en Espagne où elle a exercé une
activité dans une conserverie, en tant qu'auxiliaire chargée du nettoyage du
poisson. Depuis 1999, elle a subi plusieurs périodes d'incapacité de travail
prolongée. Du 1er juin 2002 au 31 janvier 2003, elle a bénéficié d'indemnités
pour incapacité de travail du régime espagnol de sécurité sociale.
Le 3 juillet 2002, A.________ a présenté une demande de prestations de
l'assurance-invalidité. Dans le cadre de l'instruction, l'Office AI pour les
assurés résidant à l'étranger (ci-après: l'office AI) a fait produire le
rapport du docteur M.________, médecin à l'Institut national de la sécurité
sociale espagnole (INSS). Celui-ci a diagnostiqué un syndrome du tunnel
carpien bilatéral, opéré à droite le 10 mai 2001 et à gauche le 25 avril 2002
dont l'évolution était favorable, ainsi qu'une hypertension artérielle en
traitement. L'intéressée souffrait également de paresthésies occasionnelles à
la main gauche. L'ensemble de ces affections ne l'empêchait toutefois pas
d'exercer à plein temps son ancienne activité d'auxiliaire dans une
conserverie (rapport du 16 janvier 2003).
Après avoir été informée de l'intention de l'office AI de rejeter la demande
de prestations, A.________ a produit plusieurs rapports médicaux. Par
décision du 11 décembre 2003, confirmée sur opposition le 27 février 2004,
l'office AI a rejeté la demande.

B.
A.________ a déféré la décision sur opposition à la Commission fédérale de
recours en matière d'assurance-vieillesse, survivants et invalidité pour les
personnes résidant à l'étranger (ci-après: la commission), qui l'a déboutée
par jugement du 29 juin 2004.

C.
A.________ interjette recours de droit administratif contre ce jugement, dont
elle demande l'annulation, en concluant à l'octroi d'une rente entière
d'invalidité, subsidairement d'une demi-rente. Elle joint à son recours un
jugement du 31 mai 2004 du Tribunal des affaires sociales n° 4 de La Corogne,
aux termes duquel elle a été reconnue définitivement incapable d'exercer sa
profession habituelle d'auxiliaire dans une conserverie.
L'office AI conclut au rejet du recours, tandis que l'Office fédéral des
assurances sociales a renoncé à se déterminer.

Considérant en droit:

1.
Le litige porte sur le droit de la recourante à une rente ordinaire de
l'assurance-invalidité.

2.
2.1 Les premiers juges ont correctement exposé les dispositions légales et les
principes jurisprudentiels applicables au présent cas. Ils ont précisé à
juste titre que les dispositions de l'Accord du 21 juin 1999 entre la
Confédération suisse, d'une part, et la Communauté européenne et ses Etats,
d'autre part, sur la libre circulation des personnes (ALCP), entré en vigueur
le 1er juin 2002, étaient applicables à la présente procédure. Il suffit de
renvoyer sur ces points au jugement attaqué.
On ajoutera que lorsque l'on examine, comme en l'espèce, le droit éventuel à
une rente d'invalidité pour une période durant laquelle le droit applicable
s'est modifié à plusieurs reprises (entrée en vigueur de l'ALCP le 1er juin
2002, de la LPGA le 1er janvier 2003 et des dispositions de la novelle du 21
mars 2003 modifiant la LAI [4ème révision] le 1er janvier 2004), il y a lieu
d'appliquer le principe général de droit transitoire, selon lequel - même en
cas de changement des bases légales - les règles applicables sont celles en
vigueur au moment où les faits juridiquement déterminants se sont produits.
Aussi, le droit à une rente doit-il être examiné au regard de l'ancien droit
pour la période jusqu'au 31 mai 2002 et, après le 1er juin 2002,
respectivement le 1er janvier 2003 et le 1er janvier 2004, en fonction des
nouvelles normes de l'ALCP, de la LPGA et de la 4ème révision de la LAI (voir
ATF 130 V 445 et les références; voir aussi ATF 130 V 329).

2.2 Même après l'entrée en vigueur de l'ALCP, le taux d'invalidité se
détermine exclusivement selon le droit suisse. En effet, selon l'art. 40 par.
4 du règlement n° 1408/71, la décision prise par l'institution d'un Etat
membre au sujet de l'état d'invalidité du requérant ne s'impose à
l'institution de tout autre Etat membre concerné qu'à la condition que la
concordance des conditions relatives à l'état d'invalidité entre les
législations de ces Etats soit reconnue à l'annexe V, ce qui n'est pas le cas
pour les relations entre la Suisse et chacun des autres Etats membres (ATF
130 V 257 consid. 2.4).

3.
La commission a nié le droit de la recourante à une rente d'invalidité en se
fondant sur l'ensemble de la documentation médicale figurant au dossier,
laquelle ne permettait pas de retenir l'existence de troubles l'empêchant de
reprendre son travail d'ouvrière. Elle a, en particulier, suivi les
conclusions du docteur M.________, selon lesquelles la recourante était en
mesure d'accomplir un travail adapté à son état de santé, y compris celui
qu'elle exerçait en dernier lieu. La recourante jouissait en effet d'un bon
état de santé général, malgré la présence de paresthésies occasionnelles à la
main gauche et d'une hypertension artérielle en traitement.

4.
En l'espèce, il ne ressort du dossier aucun indice concret permettant de
douter du bien-fondé de ces conclusions. Les différentes pièces médicales
produites par la recourante durant la procédure ne lui sont à cet égard
d'aucun secours. Les unes - datées des années 90 - sont trop anciennes pour
avoir une quelconque pertinence pour le droit litigieux et font mention
d'affections (épicondylite, troubles lombaires) que le docteur M.________ n'a
pas relevé lors de l'expertise qu'il a effectuée le 16 janvier 2003. Quant
aux autres pièces, elles font référence au syndrome du tunnel carpien
bilatéral, dont on sait qu'il a évolué favorablement à la suite de deux
interventions chirurgicales.
La recourante se prévaut en outre du jugement du 31 mai 2004 du Tribunal des
affaires sociales de La Corogne, lequel la reconnaît définitivement incapable
de travailler dans sa profession habituelle d'auxiliaire dans une
conserverie. Ce jugement constitue un fait postérieur à la décision
litigieuse et n'est donc pas décisif pour l'issue du présent litige (ATF 121
V 366 consid. 1b). Il ne saurait en outre lier la Cour de céans, dès lors que
la décision prise au sujet de l'état d'invalidité d'un requérant par
l'institution d'un Etat membre de la Communauté européenne ne saurait
s'imposer aux institutions suisses d'assurances sociales (cf. consid. 2).
On peut dès lors tenir pour établi qu'entre le 16 janvier 2003 et le 27
février 2004, date de la décision litigieuse, la recourante ne présentait pas
un taux d'invalidité ouvrant droit à une rente.

5.
En revanche, on ne saurait retenir une telle conclusion pour la période
antérieure au 16 janvier 2003. En effet, il ressort du dossier que la
recourante a été empêchée d'exercer son activité professionnelle en raison
d'un syndrome du tunnel carpien bilatéral depuis 1999 et qu'elle a dû être
opérée pour cette raison les 10 mai 2001 et 25 avril 2002. En l'état, le
dossier ne contient toutefois aucune donnée médicale utile à l'appréciation
de la capacité de travail de la recourante durant cette période, au regard de
la notion d'invalidité en droit suisse. On ne saurait, à l'instar de l'office
AI et des premiers juges, exclure tout caractère invalidant au trouble dont a
souffert la recourante. Il convient donc de renvoyer la cause à l'office
intimé à qui il incombera d'instruire ce point et de rendre une nouvelle
décision.

6.
La recourante, qui obtient partiellement gain de cause, a droit à une
indemnité de dépens réduite à charge de l'intimé (art. 159 al. 3 OJ). Par
ailleurs, la procédure est gratuite, dès lors qu'elle porte sur l'octroi ou
le refus de prestations d'assurance.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce:

1.
Le recours est admis, en ce sens que le jugement de la Commission fédérale de
recours en matière d'AVS/AI pour les personnes résidant à l'étranger du 29
juin 2004 ainsi que la décision sur opposition de l'Office AI pour les
assurés résidant à l'étranger du 27 février 2004 sont annulés, la cause étant
renvoyée à l'office intimé pour instruction complémentaire au sens des
considérants et nouvelle décision.

2.
Il n'est pas perçu de frais de justice.

3.
L'Office AI pour les assurés résidant à l'étranger versera à la recourante la
somme de 1'500 fr. (y compris la taxe à la valeur ajoutée) à titre de dépens
pour l'instance fédérale.

4.
La Commission fédérale de recours en matière d'AVS/AI statuera sur les dépens
pour la procédure de première instance, au regard de l'issue du procès de
dernière instance.

5.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, à la Commission fédérale de
recours en matière d'AVS/AI pour les personnes résidant à l'étranger, à la
Caisse suisse de compensation et à l'Office fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 24 février 2005
Au nom du Tribunal fédéral des assurances

La Présidente de la IIIe Chambre:   Le Greffier: