Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Sozialrechtliche Abteilungen I 423/2004
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I 423/04

Arrêt du 2 juin 2005
IIIe Chambre

Mme et MM. les Juges Leuzinger, Présidente, Rüedi et Kernen. Greffier : M.
Beauverd

S.________, recourant, représenté par le Centre de contact Suisses-Immigrés,
route des Acacias 25, 1227 Les Acacias,

contre

Office cantonal AI Genève, 97, rue de Lyon, 1203 Genève, intimé

Tribunal cantonal des assurances sociales, Genève

(Jugement du 1er juin 2004)

Faits:

A.
S. ________, né en 1964, ressortissant de l'ex-Yougoslavie, a été victime
d'un accident de travail le 24 novembre 1992 alors qu'il travaillait au
service d'une entreprise de peinture sise à X.________. L'intéressé ne
bénéficiait ni d'une autorisation de séjour en Suisse ni d'une autorisation
de travail.

La Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents (CNA) a pris en
charge le cas et a notamment alloué des indemnités journalières durant la
période du 27 novembre 1992 au 31 mars 1994.

L'intéressé a bénéficié d'une autorisation de séjour de courte durée (permis
L) depuis le 13 avril 1995.

Le 16 décembre 1993, S.________ a présenté une demande tendant à l'octroi de
prestations de l'assurance-invalidité. Par décision du 22 juin 1995, l'Office
AI pour les assurés résidant à l'étranger a rejeté la demande au motif que
l'atteinte à la santé n'entraînait pas une incapacité de gain suffisante pour
ouvrir droit à prestations.

Saisie d'un recours, la Commission cantonale de recours en matière d'AVS/AI
du canton de Genève a annulé cette décision et renvoyé la cause à
l'administration pour nouvelle décision après complément d'instruction sous
la forme d'une expertise psychiatrique. Après avoir confié une expertise au
docteur C.________ (rapport du 17 juin 1997), l'Office cantonal de
l'assurance-invalidité du canton de Genève (ci-après : l'office AI) a rendu
une décision, le 9 octobre 1997, par laquelle il a indiqué « maintenir (la)
décision de refus du 22 juin 1995 ».

B.
Le 16 septembre 1998, S.________ a présenté une nouvelle demande de
prestations de l'assurance-invalidité.

Après avoir confié une expertise aux médecins du Centre d'observation
médicale de l'assurance-invalidité (Medizinische Abklärungsstelle der
Eidgenössischen Invalidenversicherung [MEDAS]), à B.________ (rapport du 27
avril 2001), l'office AI a rejeté la demande par décision du 3 janvier 2002.
Il a considéré que l'intéressé ne pouvait pas se prévaloir d'une durée de
cotisation suffisante au 24 novembre 1993, date à partir de laquelle il
présentait un taux d'invalidité (100 %) suffisant pour ouvrir droit à une
rente.

C.
Saisi d'un recours contre cette décision, le Tribunal cantonal des assurances
sociales du canton de Genève l'a rejeté par jugement du 1er juin 2004.

D.
S.________ interjette recours de droit administratif contre ce jugement, dont
il requiert l'annulation, en demandant au Tribunal fédéral des assurances de
constater qu'il était assuré au moment de la survenance de l'invalidité et
qu'il satisfaisait à la condition d'une année de cotisation au sens de la
Convention de sécurité sociale entre la Suisse et la Yougoslavie et, pour ce
faire, d'ordonner à la caisse de compensation compétente de rendre une
décision pour le paiement des cotisations à partir du 27 novembre 2002.

L'office intimé conclut au rejet du recours, tandis que l'Office fédéral des
assurances sociales a renoncé à se déterminer.

Considérant en droit:

1.
1.1
Selon l'art. 128 OJ, le Tribunal fédéral des assurances connaît en dernière
instance des recours de droit administratif contre des décisions au sens des
art. 97, 98 let. b à h et 98a OJ, en matière d'assurances sociales. Dans la
procédure juridictionnelle administrative, ne peuvent être examinés et jugés,
en principe, que les rapports juridiques à propos desquels l'autorité
administrative compétente s'est prononcée préalablement d'une manière qui la
lie, sous la forme d'une décision. Dans cette mesure, la décision détermine
l'objet de la contestation qui peut être déféré en justice par voie de
recours. En revanche, dans la mesure où aucune décision n'a été rendue, la
contestation n'a pas d'objet, et un jugement sur le fond ne peut pas être
prononcé (ATF 125 V 414 consid. 1a, 119 Ib 36 consid. 1b et les références
citées).

1.2 Par la décision litigieuse du 3 janvier 2002, l'office intimé a nié le
droit du recourant à des prestations de l'assurance-invalidité, motif pris
que l'intéressé ne pouvait pas se prévaloir d'une durée de cotisation
suffisante au moment de la survenance de l'invalidité. Dans son recours de
droit administratif, le recourant conclut notamment à ce que le Tribunal
fédéral des assurances ordonne à la caisse de compensation compétente de
rendre une décision de perception des cotisations à partir du 27 novembre
2002 (recte : 27 novembre 1992, date à partir de laquelle la CNA a alloué des
indemnités journalières à l'intéressé). Dans la mesure toutefois où aucune
décision n'a été rendue en ce qui concerne la perception de cotisation durant
la période d'inactivité qui a suivi l'accident (cf. art. 10 al. 1 LAVS, en
relation avec l'art. 2 LAI), la conclusion susmentionnée est irrecevable.

2.
Le litige porte sur le point de savoir si les conditions du droit à des
prestations de l'assurance-invalidité sont réalisées.

2.1 La loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales
du 6 octobre 2000 (LPGA) est entrée en vigueur le 1er janvier 2003,
entraînant la modification de nombreuses dispositions légales dans le domaine
de l'assurance-invalidité. Cependant, le cas d'espèce reste régi par les
dispositions de la LAI en vigueur jusqu'au 31 décembre 2002, eu égard au
principe selon lequel les règles applicables sont celles en vigueur au moment
où les faits juridiquement déterminants se sont produits (ATF 127 V 467
consid. 1). En outre, le Tribunal fédéral des assurances apprécie la légalité
des décisions attaquées, en règle générale, d'après l'état de fait existant
au moment où la décision litigieuse a été rendue (ATF 121 V 366 consid. 1b).

Pour les mêmes motifs, les dispositions de la novelle du 21 mars 2003
modifiant la LAI (4ème révision), entrée en vigueur le 1er janvier 2004 (RO
2003 3852) ne sont pas non plus applicables.

2.2 Le jugement entrepris expose de manière exacte les règles légales et
réglementaires, ainsi que les dispositions de la convention entre la
Confédération suisse et la République populaire fédérative de Yougoslavie
relative aux assurances sociales du 8 juin 1962, applicables au présent cas.
Il suffit donc d'y renvoyer.

3.
3.1 Dans leur rapport d'expertise du 27 avril 2001, les médecins du MEDAS ont
attesté que les graves troubles psychiques dont souffre le recourant
(schizophrénie paranoïde) empêchaient la mise en oeuvre de toute mesure de
réadaptation d'ordre médical et professionnel. Cela étant, il convient
d'examiner si les conditions du droit à une rente d'invalidité sont
réalisées.

3.2
3.2.1Selon l'art. 2 (applicable en l'occurrence - après l'éclatement de
l'Etat yougoslave [Pra 1993 no 44 p. 148]) de la Convention de sécurité
sociale entre la Suisse et la Yougoslavie, les ressortissants yougoslaves
jouissent en principe de l'égalité de traitement par rapport aux
ressortissants suisses quant aux droits découlant de la législation suisse
sur l'assurance-invalidité. Un ressortissant de l'ex-Yougoslavie doit dès
lors satisfaire aux mêmes conditions qu'un citoyen suisse pour avoir droit
aux prestations de l'assurance-invalidité suisse. Il doit ainsi être invalide
au sens de l'art. 4 al. 1 LAI et, en ce qui concerne le droit à une rente
ordinaire d'invalidité, compter, lors de la survenance de l'invalidité, une
année entière au moins de cotisations (art. 36 al. 1 LAI).

En ce qui concerne le droit à une rente, l'invalidité est réputée survenue au
moment où le droit prend naissance, conformément à l'art. 29 al. 1 LAI, soit
dès que l'assuré présente une incapacité de gain durable de quarante pour
cent au moins (variante I) ou dès qu'il a présenté, en moyenne, une
incapacité de travail de quarante pour cent au moins pendant une année sans
interruption notable (variante II), mais au plus tôt le premier jour du mois
qui suit le dix-huitième anniversaire de l'assuré (art. 29 al. 2 LAI; RCC
1984 p. 464 s. consid. 1).

3.2.2 En l'espèce, il est constant que l'invalidité propre à ouvrir droit à
une rente est survenue le 24 novembre 1993, soit au terme d'une période d'une
année durant laquelle le recourant a subi une incapacité de travail de
quarante pour cent au moins sans interruption notable (variante II de l'art.
29 al. 1 LAI).

Par ailleurs, il n'est pas contesté que l'intéressé ne comptait pas, à cette
date, une année entière au moins de cotisations.

3.3
3.3.1Le recourant fait toutefois valoir qu'il avait toujours la qualité
d'assuré après son accident du 24 novembre 1992 et que la Caisse suisse de
compensation aurait dû prélever des cotisations sur les indemnités
journalières allouées par la CNA durant la période du 27 novembre 1992 au 31
mars 1994, et dont un décompte avait été dûment communiqué à ladite caisse.

3.3.2 En ce qui concerne la condition du paiement de cotisations ouvrant
droit à prestations de l'assurance-invalidité (art. 36 al. 1 LAI et art. 8
let. a de la Convention entre la Suisse et la Yougoslavie), l'art. 8 let. f
de la Convention dispose :

Les ressortissants de la RSF de Yougoslavie non domiciliés en Suisse qui ont
dû abandonner leur activité dans ce pays à la suite d'un accident ou d'une
maladie et qui y demeurent jusqu'à la réalisation du risque assuré, sont
considérés comme étant assurés au sens de la législation suisse pour l'octroi
des prestations de l'assurance-invalidité. Ils doivent continuer à acquitter
des cotisations à l'assurance-vieillesse, survivants et invalidité comme
s'ils avaient leur domicile en Suisse.

Tant qu'ils n'exercent pas d'activité lucrative, les ressortissants
yougoslaves sont donc soumis à l'obligation de s'acquitter de cotisations en
qualité d'assurés n'exerçant aucune activité lucrative (art. 10 LAVS, en
relation avec l'art. 2 LAI), le défaut de l'autorisation de travail exigée
par le droit public n'excluant pas le droit à des prestations de
l'assurance-invalidité, lorsqu'un travailleur étranger tombe malade ou est
victime d'un accident en Suisse (ATF 118 V 79). Au besoin, les prestations
exigibles peuvent être compensées avec des cotisations dues. Demeure réservée
l'éventualité où les cotisations sont périmées (arrêt non publié M. du 28
juin 1993 I 416/91).

En l'espèce, des cotisations éventuelles pour la période du 27 novembre 1992
au 24 novembre 1993 n'ont pas été fixées par décision notifiée dans un délai
de cinq ans à compter de la fin de l'année civile pour laquelle elles sont
dues, de sorte qu'elles ne peuvent plus être exigées ni payées (art. 16 al. 1
LAVS). Par ailleurs, il n'est pas nécessaire d'examiner si la lacune de
cotisation est due à un comportement de l'administration contraire aux
dispositions légales, une telle éventualité n'ouvrant pas la possibilité de
s'acquitter de cotisations périmées (ATF 100 V 157 s. consid. 3c et la
référence).

Enfin, il convient de relever que le recourant ne peut pas non plus prétendre
une rente extraordinaire d'invalidité du moment qu'il n'a pas le même nombre
d'années d'assurance que les personnes de sa classe d'âge (cf. art. 39 al. 1
LAI en liaison avec l'art. 42 al. 1 LAVS).

3.4 Vu ce qui précède, le jugement entrepris n'est pas critiquable et le
recours se révèle mal fondé.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Il n'est pas perçu de frais de justice.

3.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal cantonal des
assurances sociales du canton de Genève, à la Caisse suisse de compensation
et à l'Office fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 2 juin 2005

Au nom du Tribunal fédéral des assurances

La Présidente de la IIIe Chambre: Le Greffier: