Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Sozialrechtliche Abteilungen I 351/2004
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I 351/04
I 400/04

Arrêt du 28 juillet 2005
IIe Chambre

MM. les Juges Borella, Président, Schön et Frésard. Greffière : Mme Berset

I 351/04
N.________, recourant, représenté par Christine Bulliard, Forum Santé,
boulevard Helvétique 27, 1207 Genève,

contre

Office cantonal de l'assurance-invalidité, rue de Lyon 97, 1211 Genève 13,
intimé,

et

I 400/04
Office fédéral des assurances sociales, Effingerstrasse 20, 3003 Berne,
recourant,

contre

N.________, intimé, représenté par Christine Bulliard, Forum Santé, boulevard
Helvétique 27, 1207 Genève

Tribunal cantonal des assurances sociales, Genève

(Jugement du 25 mai 2004)

Faits:

A.
A.a N.________, né le 21 juin 1945, de nationalité brésilienne, est arrivé en
Suisse avec le statut de réfugié politique le 5 novembre 1973. Souffrant de
schizophrénie, il a déposé le 8 janvier 1996 une demande de prestations de
l'assurance-invalidité. Par décision du 3 décembre 1996, l'Office cantonal
genevois de l'assurance invalidité (ci-après : OCAI) a rejeté cette demande
au motif que les conditions d'assurance n'étaient pas réalisées, dès lors que
l'invalidité était survenue en 1966, soit à une date antérieure à l'arrivée
du requérant en Suisse. Par jugement du 12 octobre 2000, la Commission
cantonale de recours AVS/AI (ci-après : commission de recours) a rejeté le
recours formé contre cette décision par l'intéressé.

A.b Le 11 mars 2002, N.________ a déposé une nouvelle demande de prestations
tendant à l'octroi d'une rente. Par décision du 31 octobre 2002, l'OCAI a
derechef rejeté la demande. Il a considéré que l'invalidité de l'intéressé
était fondée sur les mêmes troubles psychiques que la demande du 8 janvier
1996 et que la survenance de ces affections remontait à une période
antérieure à l'entrée de celui-ci sur le territoire helvétique.

B.
Par lettre du 26 novembre 2002 adressée à l'OCAI, N.________ a contesté cette
décision. Le 22 janvier 2003, l'OCAI a transmis ce recours à la commission de
recours comme objet de sa compétence.

En cours de procédure, l'intéressé a produit un rapport du 8 mai 2003 du
docteur B.________, spécialiste en rhumatologie, dont il ressort qu'il
présente une incapacité de travail totale en raison d'une fibromyalgie. Par
jugement du 25 mai 2004, le Tribunal cantonal des assurances du canton de
Genève, devenu entre-temps compétent, a admis le recours, en ce sens qu'il a
octroyé à l'intéressé une rente entière d'invalidité.

C.
Par actes séparés, l'Office fédéral des assurances sociales (OFAS) et
N.________ interjettent recours de droit administratif contre ce jugement.

L'OFAS demande l'annulation du jugement entrepris. N.________ conclut, sous
suite de dépens, au rejet du recours (cause I 400/04).

N. ________ requiert implicitement la réformation du jugement cantonal en ce
sens qu'une indemnité de dépens de 750 fr. lui soit octroyée pour la
procédure de recours de première instance (cause I 351/04). Invité à verser
dans un délai de 14 jours une avance de frais de 500 fr. par ordonnance du
Tribunal fédéral des assurances notifiée à son mandataire le 13 septembre
2004, il a sollicité, le 4 octobre 2004, le bénéfice de l'assistance
judiciaire gratuite.

Considérant en droit:

1.
Les recours de droit administratif portent sur le même jugement, opposent les
mêmes parties et portent sur un état de faits identique de sorte qu'il se
justifie de les réunir et de les liquider dans un seul arrêt (cf. ATF 128 V
126 consid. 1 et les références), même si, comme on le verra ci-après, le
recours de N.________ sera déclaré sans objet.

2.
Il convient d'examiner en premier lieu le recours de l'OFAS qui conteste le
droit reconnu par les premiers juges de Paul Neves Benchimol à une rente de
l'assurance-invalidité.
Dans la procédure de recours concernant l'octroi ou le refus de prestations
d'assurance, le pouvoir d'examen du Tribunal fédéral des assurances n'est pas
limité à la violation du droit fédéral - y compris l'excès et l'abus du
pouvoir d'appréciation - mais s'étend également à l'opportunité de la
décision attaquée. Le tribunal n'est alors pas lié par l'état de fait
constaté par la juridiction inférieure, et il peut s'écarter des conclusions
des parties à l'avantage ou au détriment de celles-ci (art. 132 OJ).

3.
3.1 Selon l'art. 6 al. 2 aLAI, en vigueur jusqu'au 31 décembre 1996, les
étrangers et les apatrides n'avaient droit aux prestations (sous réserve de
l'art. 9 al. 3 LAI) qu'aussi longtemps qu'ils conservaient leur domicile
civil en Suisse et que si, lors de la survenance de l'invalidité, ils
comptaient au moins dix années entières de cotisations ou quinze années
ininterrompues de domicile en Suisse. Cette disposition - qui apparaissait
contestable sous l'angle du droit à l'égalité de traitement (ATF 121 V 247
consid. 1b) - a été modifiée avec l'entrée en vigueur de la dixième révision
de l'AVS, le 1er janvier 1997. En effet, aux termes du nouvel art. 6 al. 2
LAI - dans sa teneur en vigueur jusqu'au 31 décembre 2002, applicable en
l'espèce - les étrangers ont droit aux prestations aussi longtemps qu'ils
conservent leur domicile et leur résidence habituelle en Suisse, mais
seulement s'ils comptent, lors de la survenance de l'invalidité au moins une
année entière de cotisations (cf. art. 36 al. 1 LAI) ou dix années de
résidence ininterrompue en Suisse (cf. ATF 126 V 7 consid. 1a).

Par cet assouplissement de la réglementation en matière
d'assurance-invalidité, le législateur a adopté un régime analogue à celui
prévu à l'art. 18 al. 2 LAVS, relatif aux rentes de l'AVS en faveur des
étrangers et de leurs survivants qui ne possèdent pas la nationalité suisse
(Message concernant la dixième révision de l'assurance-vieillesse et
survivants du 5 mars 1990, FF 1990 II 113; Meyer-Blaser, Bundesgesetz über
die Invalidenversicherung, Zurich 1997, p. 36 sv.).

Demeurent toutefois réservées, notamment, les dispositions dérogatoires des
conventions bilatérales de sécurité sociale conclues par la Suisse avec un
certain nombre d'Etats pour leurs ressortissants respectifs. En l'occurrence,
la Suisse n'a pas conclu de convention de sécurité sociale avec le Brésil.

Il sied d'ajouter que la loi fédérale sur la partie générale du droit des
assurances sociales (LPGA), du 6 octobre 2000, entrée en vigueur le 1er
janvier 2003, n'est pas applicable en l'espèce, le juge des assurances
sociales n'ayant pas à tenir compte des modifications du droit ou de l'état
de fait survenues après que la décision administrative litigieuse (in casu du
31 octobre 2002) a été rendue (ATF 130 V 230 consid. 1.1).

Pour les mêmes motifs, les dispositions de la novelle du 21 mars 2003
modifiant la LAI (4ème révision), entrée en vigueur le 1er janvier 2004 (RO
2003 3852) ne sont pas non plus applicables.

Les dispositions ci-après seront citées dans leur version applicable en
l'espèce ratione temporis.

3.2 Selon l'art. 36 al. 2 LAI, les dispositions de la LAVS sont (sous réserve
de l'art. 36 al. 3 LAI) applicables par analogie au calcul des rentes
ordinaires (voir à ce propos ATF 124 V 159); le Conseil fédéral peut édicter
des prescriptions complémentaires. Selon l'art. 32 al. 1 RAI en corrélation
avec les art. 50 RAVS et 29ter al. 2 LAVS, une année de cotisations est
entière lorsqu'une personne a été assurée au sens des art. 1er ou 2 LAVS
pendant plus de onze mois au total et que, pendant ce temps-là, soit elle a
versé la cotisation minimale (variante I), soit son conjoint au sens de
l'art. 3 al. 3 LAVS a versé au moins le double de la cotisation minimale
(variante II) ou, enfin, elle peut se prévaloir de bonifications pour tâches
éducatives ou pour tâches d'assistance (variante III). A la différence de la
situation qui existait avant l'entrée en vigueur de la dixième révision de
l'AVS (cf. ATF 111 V 106 consid. 1b, 110 V 280 consid. 1a), un assuré peut
donc, selon le nouveau droit, satisfaire à l'exigence de la période minimale
de cotisations d'une année ouvrant droit à une rente ordinaire de l'AVS/AI,
sans avoir payé personnellement des cotisations (ATF 125 V 253). Ces
dispositions légales plus favorables introduites par la 10ème révision de
l'AVS ne s'appliquent toutefois pas aux cas d'assurance survenus sous
l'empire de l'ancien droit et pour lesquels le droit à une rente a été nié,
parce que la condition de la durée minimale de cotisations n'était pas
réalisée (ATF 126 V 8 consid. 1b).

4.
4.1 Selon les dispositions transitoires relatives à la modification de la LAI,
dans le cadre de la dixième révision de l'AVS, les dispositions transitoires
concernant l'art. 18 al. 2 LAVS sont applicables par analogie (al. 4). Ce
renvoi concerne la lettre h des dispositions transitoires de la dixième
révision de l'AVS, qui est ainsi rédigée: «L'art. 18, 2e alinéa, s'applique
également lorsque l'événement assuré est survenu avant le 1er janvier 1997
pour autant que les cotisations n'aient pas été remboursées à l'assuré. Le
droit à la rente ordinaire prend naissance au plus tôt à l'entrée en vigueur
(...)».

Quant à l'art. 18 al. 2 LAVS, auquel il est fait référence, il prévoit (dans
sa version en vigueur depuis le 1er janvier 1997) que les étrangers et leurs
survivants qui ne possèdent pas la nationalité suisse n'ont droit à une rente
qu'aussi longtemps qu'ils ont leur domicile et leur résidence habituelle en
Suisse (première phrase).

En d'autres termes, lorsque le cas d'assurance (invalidité) est survenu avant
le 1er janvier 1997 et que le droit à une rente a été refusé au requérant
(ressortissant d'un Etat avec lequel la Suisse n'a pas conclu de convention
de sécurité sociale), parce qu'il ne ne comptait pas dix années entières de
cotisations ou quinze années ininterrompues de domicile en Suisse, cette
personne peut désormais prétendre une telle rente si elle remplit les
conditions prévues par le nouveau droit (art. 6 al. 2 LAI), en particulier la
condition d'une durée minimale de cotisations d'une année lors de la
survenance de l'invalidité. Les dispositions transitoires ne suppriment pas
cette dernière condition: elles n'ont pas pour objet de placer les assurés
auxquels elles s'appliquent dans une situation plus avantageuse que les
personnes pour lesquelles le cas d'assurance est survenu après le 1er janvier
1997. Quant au droit à la rente, il prend au plus tôt naissance, le cas
échéant, dès l'entrée en vigueur de la dixième révision de l'AVS, à moins que
les cotisations n'aient été remboursées sous le régime de l'ancien droit.

Il est en outre nécessaire, conformément à la règle générale de l'art. 6 al.
1 LAI, valable aussi bien pour les ressortissants suisses et étrangers, que
la personne ait été assurée, par exemple à raison de son domicile en Suisse
(art. 1er al. 1 let. a LAVS en corrélation avec l'art. 1er LAI), au moment de
la survenance de l'invalidité (cf. sur ces divers points ATF 126 V 8 consid.
2a).

4.2 Selon l'art. 4 al. 2 LAI, l'invalidité est réputée survenue dès qu'elle
est, par sa nature et sa gravité, propre à ouvrir droit aux prestations
entrant en considération. Ce moment doit être déterminé objectivement,
d'après l'état de santé; des facteurs externes fortuits n'ont pas
d'importance. Il ne dépend en particulier ni de la date à laquelle une
demande a été présentée, ni de celle à partir de laquelle une prestation a
été requise, et ne coïncide pas non plus nécessairement avec le moment où
l'assuré apprend, pour la première fois, que l'atteinte à sa santé peut
ouvrir droit à des prestations d'assurance.

S'agissant du droit à une rente, la survenance de l'invalidité se situe au
moment où celui-ci prend naissance, conformément à l'art. 29 al. 1 LAI, soit
dès que l'assuré présente une incapacité de gain durable de 40 pour cent au
moins ou dès qu'il a présenté, en moyenne, une incapacité de travail de 40
pour cent au moins pendant une année sans interruption notable, mais au plus
tôt le 1er jour du mois qui suit le dix-huitième anniversaire de l'assuré
(art. 29 al. 2 LAI; ATF 126 V 9 consid. 2b et les références; consid. 4.3.1
de l'arrêt P. du 1er mai 2003, I 780/02).

4.3 Selon les pièces médicales figurant au dossier, l'histoire de l'intéressé
est classique avec le début des troubles à l'adolescence (et même avant) avec
une décompensation aiguë vers l'âge de 20 ans (diagnostic de schizophrénie)
et une première hospitalisation au Brésil en 1966 (voir les rapports des
docteurs J.________ et O.________ de l'Hôpital X.________, respectivement du
16 octobre 1975 et de mars 1980; cf. aussi le jugement de la commission de
recours du 12 octobre 2000). Sur Ia base de ces éléments, on peut retenir que
l'invalidité est survenue en 1966, soit bien avant que l'intéressé n'arrive
en Suisse. Ce dernier n'a ainsi pas pu, avant cette survenance, satisfaire
aux conditions de l'art. 6 al. 2 LAI (teneur du 1er janvier 1997 au 31
décembre 2002), notamment la condition relative au paiement de cotisations
pendant une année au moins avant la survenance de l'invalidité.

5.
5.1 Se pose la question de savoir si ultérieurement il y a eu des
interruptions notables de l'incapacité de gain qui permettraient d'admettre
l'existence, depuis l'arrivée en Suisse de l'intéressé, d'un nouveau cas
d'assurance (cf. ATF 126 V 10 consid. 2c). Pour y répondre, il convient de
confronter l'anamnèse du recourant et les données relatives à sa situation
professionnelle.

5.2 Selon les premiers rapports psychiatriques établis en Suisse, l'intéressé
a été hospitalisé, en octobre 1975, pour tentamen au cours d'une
décompensation d'allure autistique chez un schizophrène. Est alors posé le
diagnostic de schizophrénie paranoïde. Après sa sortie de l'Hôpital
X.________, il a passé par une phase dépressive et répressive importante; il
a été recueilli par des amis et est resté sans travail pendant plusieurs
mois. Après avoir occupé des emplois subalternes, il a trouvé en automne 1978
une place d'aide-éducateur à E.________ où il a rencontré de grandes
difficultés avec son entourage professionnel. En mars 1980, il a été à
nouveau hospitalisé à la clinique psychiatrique universitaire pour
décompensation psychiatrique. A sa sortie, il a repris un travail à mi-temps
chez son ancien employeur. Du 9 au 23 septembre 1991, il a fait un séjour à
la Clinique de psychiatrie Y.________, pour décompensation psychotique où
prédominaient des idées délirantes de persécution entraînant une
désorganisation dans la gestion de sa vie quotidienne (alimentation,
relations sociales, légalisation de son statut, permis etc.). Les docteurs
R.________, chef de clinique, et P.________, médecin assistant, ont
diagnostiqué principalement une schizophrénie paranoïde chronique avec
exacerbation aiguë (rapport du 26 septembre 1991). En 1996, à l'appui de la
première demande de rente de l'intéressé, le docteur U.________, spécialiste
en psychiatrie et psychothérapie, a fait état d'une incapacité de travail
totale attribuable à une schizophrénie chronique, type résiduel et /ou
paranoïde. Il précisait que l'évolution est chronique avec encore quelques
phases actives, délirantes et hallucinations (rapport du 11 février 1996).
Par la suite, l'intéressé a été hospitalisé semble-t-il à trois reprises au
Département de psychiatrie de l'Hôpital Z.________, la dernière fois du 5 au
24 décembre 2001. La cheffe de clinique, la cheffe de clinique de médecine
interne ainsi qu'un médecin interniste ont fait état, au titre de diagnostic
principal, d'un trouble schizo-affectif type mixte. Les autres diagnostics
incluaient un BPCO sévère (sur tabagisme), une suspicion de fibromyalgie, une
hypoesthésie du dos de la main droite et une hypertension artérielle (rapport
du 4 janvier 2002). Pour sa part, le docteur B.________, qui a vu le patient
à trois reprises, a déclaré que ce dernier présentait une incapacité de
travail de 100 % attribuable à une fibromyalgie dont les symptômes se
différenciaient très nettement de ceux de la schizophrénie (rapport du 8 mai
2003).

5.3  Il ressort de l'ensemble des appréciations psychiatriques ainsi que du
rapport pluridisciplinaire des de l'Hôpital Z.________ du 4 janvier 2002 que
l'intéressé souffre essentiellement d'une schizophrénie ou de troubles
schizo-affectifs. Selon la définition du Manuel diagnostique et statistique
des troubles mentaux (DSM-IV-TR), 4ème éd. de l'Association des psychiatres
américains, la schizophrénie (F.20.x) est une affection qui dure au moins six
mois et inclut au moins un mois de symptômes de la phase active (c'est-à-dire
deux [ou plus] des manifestations suivantes : idées délirantes,
hallucinations, discours désorganisé, comportement grossièrement désorganisé
ou catatonique, symptômes négatifs). Les définitions des sous-types de
schizophrénie (paranoïde [F20.0x], désorganisé [F20.1x], catatonique
[F20.2x], indifférencié [F20.3x] et résiduel [F20.5x]) sont également
incluses dans cette section (p. 344, cf. aussi p. 349). Les symptômes
caractéristiques de la schizophrénie impliquent une série de
dysfonctionnements cognitifs et émotionnels qui incluent la perception, la
pensée déductive, le langage et la communication, le contrôle comportemental,
l'affect, la fluence et la productivité de la pensée et du discours, la
capacité hédonique, la volonté et le dynamisme. Aucun symptôme isolé n'est
pathognomonique de la schizophrénie; le diagnostic implique la reconnaissance
d'une constellation de signes et de symptômes associés à une altération du
fonctionnement social ou des activités (op. cit. p. 345 in initio). La
schizophrénie implique un dysfonctionnement dans un ou plusieurs domaines
majeurs du fonctionnement (par. ex. les relations interpersonnelles, le
travail ou les études, ou encore les soins personnels). Si cependant
l'affection débute pendant l'enfance ou l'adolescence, il peut y avoir une
incapacité à atteindre le niveau auquel on aurait pu s'attendre plutôt qu'une
détérioration du fonctionnement. Beaucoup de sujets sont incapables de garder
un emploi pendant des périodes prolongées (op. cit. p. 348 in fine). Quant au
trouble schizo-affectif (F25.x), il est caractérisé par l'existence d'une
période ininterrompue de maladie au cours de laquelle il existe à un moment
donné un épisode dépressif majeur, un épisode maniaque ou un épisode mixte en
même temps que (deux ou plus) des symptômes typiques de la schizophrénie
(idées délirantes, hallucinations, discours désorganisé, comportement
grossièrement désorganisé ou catatonique, symptômes négatifs; op. cit. p.
369).

5.4 Tous les médecins psychiatres (et internistes) qui ont été appelés à se
prononcer sur la symptomatologie de l'intéressé ont mentionné, comme
diagnostic principal, la schizophrénie ou les troubles schizo-affectifs qui
incluent les symptômes caractéristiques de cette affection en sus d'un autre
épisode, soit dépressif majeur, soit maniaque, soit mixte et apparaissent
donc comme une forme aggravée de la schizophrénie. L'analyse des documents
médicaux met en évidence une grande continuité et constance dans le
diagnostic qui n'a pas varié au cours des trente-six ans qui séparent le
premier épisode dépressif de l'intéressé en 1966 et la date de la décision
litigieuse (31 octobre 2002). L'anamnèse est marquée par un certain nombre
d'hospitalisations, toutes motivées par une aggravation des troubles
psychiques. Le parcours professionnel est chaotique et s'inscrit dans le
cadre typique des manifestations de la schizophrénie. Aussi bien, au Brésil,
au Chili qu'en Suisse, l'intéressé a travaillé de manière irrégulière dans
des postes subalternes. Ces périodes de travail ont été entrecoupées de
périodes inactives (attribuables le plus souvent aux effets de la
schizophrénie). Au cours des vingt années prises en considération par la
commission de recours dans son jugement du 12 octobre 2000 (1974 à 1994), les
revenus ont varié de 4'733 fr. (en 1983) à 50'729 fr. (en 1981). Par
ailleurs, l'intéressé n'a pas réalisé de gain en 1975, 1976, 1986, 1987, 1990
et 1991. Le montant total des revenus acquis au cours de cette période de
vingt ans s'élève à 213'473 fr., ce qui donne une moyenne de 10'674 fr. par
an. Par la suite, l'intéressé a travaillé quelque peu en 1995 et en janvier
1996 (date à laquelle il a cessé d'exercer une activité lucrative et déposé
sa première demande de prestations de l'assurance-invalidité). Ces variations
sont caractéristiques de la schizophrénie.

5.5 Sur le vu de ce qui précède, on doit convenir qu'aucun rapport médical ne
mentionne une rémission de la schizophrénie et qu'aucun élément du dossier ne
permet de conclure à la disparition de cette affection. Or la schizophrénie
entraîne des répercussions sur la capacité de travail dès la survenance, en
1966, des premiers symptômes (cf. rapport du docteur C.________ du 1er avril
1997). Ces effets ont perduré jusqu'à la date de la décision litigieuse et
perdureront au-delà. Il ne fait aucun doute que la schizophrénie a toujours
occupé le premier plan. Dans ce contexte, la fibromyalgie dont fait état le
rhumatologue B.________, dans un rapport postérieur à la décision litigieuse,
ne saurait être invoquée comme un nouveau cas d'assurance. Cette maladie joue
un rôle tout à fait secondaire dans l'invalidité de N.________ causée de
manière prépondérante et durable par la schizophrénie. Par ailleurs, au
contraire des médecins de l'Hôpital Z.________, en particulier, ce praticien
n'a pas eu une vue d'ensemble de l'état de santé de l'intéressé. Quoi qu'il
en soit, même si l'appréciation du docteur B.________ se rapportait à des
faits antérieurs à la décision litigieuse, elle ne serait pas propre à
établir que la fibromyalgie se trouve désormais au premier plan au titre de
maladie invalidante.

5.6 Dans ces circonstances, le refus de rente de l'OCAI était justifié.

6.
Comme le relève l'OFAS, l'intéressé peut demander à ce qu'on examine son
droit à des prestations complémentaires au sens de l'art. 2c let. b LPC (cf.
chiffre 3 du recours).

7.
Sur le vu de ce qui précède, le recours de l'OFAS est bien fondé et, Paul
Neves Benchimol, qui succombe, n'a pas droit à des dépens (art. 159 al. 1 OJ
en corrélation avec l'art. 135 OJ).

8.
L'issue de la procédure conduit à l'annulation du jugement cantonal. Par
conséquent, Paul Neves Benchimol ne peut prétendre des dépens pour la
procédure cantonale. Son recours est donc sans objet. Il y a lieu de statuer
sans frais, de sorte qu'on peut se dispenser de statuer sur la demande
d'assistance judiciaire déposée par l'intéressé.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce:

1.
Les causes I 351/04 et I 400/04 sont jointes.

2.
Le recours de l'OFAS est admis et le jugement du 25 mai 2004 du Tribunal
cantonal des assurances sociales est annulé.

3.
Il est constaté que le recours I 351/04 est devenu sans objet.

4.
Il n'est pas perçu de frais de justice.

5.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties et au Tribunal cantonal des
assurances sociales du canton de Genève.

Lucerne, le 28 juillet 2005

Au nom du Tribunal fédéral des assurances

Le Président de la IIe Chambre: La Greffière: