Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Sozialrechtliche Abteilungen I 241/2004
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I 241/04

Arrêt du 15 juin 2005
IIIe Chambre

Mme et MM. les Juges Leuzinger, Présidente, Rüedi et Kernen. Greffière : Mme
Berset

S.________, recourant, représenté par Me Henri Carron, avocat, rue de Venise
3B, 1870 Monthey,

contre

1. Office cantonal AI du Valais, avenue de la Gare 15, 1951 Sion,
2. Caisse de compensation du canton du Valais, avenue Pratifori 22, 1950
Sion,
intimés

Tribunal cantonal des assurances, Sion

(Jugement du 23 mars 2004)

Faits:

A.
S. ________ est atteint de troubles psychiques et a présenté de nombreux
épisodes de polytoxicomanie. Le 15 juin 2000, il s'est annoncé à l'Office
cantonal AI valaisan (OCAI), lequel lui a accordé des mesures d'ordre
professionnel, sous forme d'un stage du 18 mars au 31 juillet 2000 et d'un
apprentissage du 1er août 2002 au 31 juillet 2005. Par décisions des 2 mai et
27 septembre 2002, l'OCAI a fixé le montant de l'indemnité journalière
allouée avec ces mesures. Par décision du 8 août 2002, il a mis l'assuré au
bénéfice d'une rente d'invalidité pour la période du 1er janvier 2000 au 31
mars 2002; une part de l'arriéré de la prestation était compensée avec des
prétentions du service social X.________.

L'assuré a recouru contre ces décisions devant le Tribunal des assurances du
canton du Valais. Par jugement du 25 avril 2003, la juridiction cantonale a
rejeté les recours formés contre les décisions en matière d'indemnités
journalières, annulé celle portant sur la rente d'invalidité et renvoyé la
cause à l'administration pour nouvelle décision; elle a considéré que le
droit à la rente prenait effet au 1er décembre 1999 et que certaines
compensations n'étaient pas conformes à la loi ou nécessitaient une
instruction complémentaire.

S. ________ a interjeté recours de droit administratif contre ce jugement sur
la question des indemnités journalières (TFA; cause I 396/03).

B.
Le 26 juin 2003, S.________ a demandé à l'OCAI de statuer sans attendre sur
l'arriéré de rentes et la compensation. Le 4 juillet 2003, la Caisse de
compensation du canton du Valais (CCC), à qui la demande avait été soumise, a
informé le requérant qu'elle n'était pas à même d'établir un nouveau décompte
avec précision dans l'immédiat : les pièces de son dossier avaient été
transmises à Lucerne et le montant de la rente devait être diminué, vu la
survenance de l'invalidité à une date antérieure. Le 8 juillet 2003,
S.________ a réitéré sa requête.
Le 19 décembre 2003, l'assuré a déposé plainte pour déni de justice et retard
injustifié contre l'OCAI et la CCC auprès de l'Office fédéral des assurances
sociales. Celui-ci l'a transmise au Tribunal cantonal des assurances comme
objet de sa compétence.

La juridiction a interpellé l'OCAI et lui a fixé un délai pour se déterminer.
Le 28 janvier 2004, la CCC a avisé le recourant qu'elle lui versait le jour
même un montant provisoire de 7'000 fr. et qu'elle allait procéder aux
mesures d'instructions requises à réception de son dossier. Par décision du
17 mars 2004, l'OAI a fixé le montant de la rente d'invalidité due à partir
du 1er décembre 1999 et fixé - après compensations - à 2'850 fr. la quotité
du solde de la prestation au 31 mars 2002. Le 23 mars 2004, la juridiction
cantonale a rayé la cause du rôle le 23 mars 2004, sans allouer de dépens au
recourant.

C.
S.________ interjette recours de droit administratif contre ce jugement. Sous
suite de dépens, il en demande l'annulation et conclut

à ce qu'il soit constaté que «le retard mis par l'OCAI respectivement la CCC
à se plier aux points non contestés du jugement du TCA du 25 avril 2003 et à
rendre, respectivement notifier leurs nouvelles décisions a été, jusqu'à la
reprise de l'instruction après le dépôt de la plainte pour déni de justice et
retard injustifié de M. S.________ du 19 décembre 2003, injustifié et
contraire aux garanties données par la Convention européenne des droits de
l'homme et la Constitution fédérale». Le recourant demande en outre que le
dossier soit renvoyé au Tribunal cantonal des assurances pour qu'il statue
sur les dépens de la procédure cantonale.

L'OCAI et la CCC concluent au rejet du recours. Selon la CCC, un nouveau
calcul du montant de la rente devait être effectué en fonction d'un nouveau
prononcé de l'OCAI après que la juridiction cantonale avait fixé le début du
droit à la rente à une date antérieure; dès lors, le cas n'avait pu être
liquidé immédiatement; par ailleurs, le sort du recours interjeté par
l'assuré, devant le Tribunal fédéral des assurances, était de nature à
influer sur le décompte du paiement de l'arriéré de rentes.

L'Office fédéral des assurances sociales a renoncé à se déterminer.

Considérant en droit:

1.
Les premiers juges ont rayé l'affaire du rôle, considérant que le recours
pour déni de justice et retard injustifié de S.________ était devenu sans
objet, et ne lui ont pas alloué de dépens. Ils ont retenu que le recourant
n'avait plus d'intérêt juridique actuel et pratique au recours, dans la
mesure où les décisions qu'il réclamait avaient été rendues. En outre, ils
ont estimé que le recours aurait été rejeté s'il n'était pas devenu sans
objet, dès lors qu'il ne pouvait être reproché à l'OCAI ou à la CCC d'avoir
statué ou agi avec un retard injustifié.

2.
Le recourant fait grief à la juridiction cantonale d'avoir commis un déni de
justice en radiant la cause du rôle sans se prononcer sur ses conclusions en
constatation, selon lesquelles l'OCAI et la CCC auraient indûment tardé à
statuer. Selon lui, de telles conclusions étaient recevables au regard de la
Convention européenne des droits de l'homme (§ 6 al 1 CEDH), de la
Constitution fédérale (art. 29 al. 1 Cst.) et de la jurisprudence (ATF 129 V
411).

3.
3.1 En cours de procédure cantonale, l'OCAI a rendu la décision requise par le
recourant. Dès lors, celui-ci n'avait plus d'intérêt juridique actuel et
pratique au recours (ATF 123 II 286 sv. consid. 4; décision B. du TFA du 15
octobre 2003, B 64/03); la procédure était devenue sans objet et pouvait être
radiée du rôle.

Contrairement aux allégations du recourant, la juridiction cantonale a
examiné la cause sous l'angle du retard injustifié et de la violation du
principe de célérité avant de se prononcer sur son droit aux dépens devant
elle. Elle a cependant considéré qu'aucun reproche ne pouvait être fait sur
ce point à l'OCAI ou à la CCC. Dès lors, sous l'angle du déni de justice, le
recourant ne peut faire grief aux premiers juges d'avoir omis d'examiner
l'une de ses conclusions, ou de ne pas avoir statué en constatation.

3.2 Reste à examiner si c'est à juste titre que les premiers juges n'ont pas
retenu un retard injustifié ou une violation du principe de célérité de la
part de l'administration et écarté les prétentions en constatation du
recourant.

3.2.1 Selon l'art. 56 al. 2 LPGA, le recours peut aussi être formé lorsque
l'assureur, malgré la demande de l'intéressé, ne rend pas de décision ou de
décisions sur opposition. Cette disposition vise le refus de statuer et le
retard à statuer d'un assureur ou d'une autorité administrative. Il y a
retard injustifié de la part de l'autorité lorsqu'elle diffère sa décision
au-delà de tout délai raisonnable. Le caractère raisonnable de la durée de la
procédure s'apprécie en fonction des circonstances particulières de la cause.
Il faut notamment prendre en considération l'ampleur et la difficulté de
celle-ci, ainsi que le comportement du justiciable, mais non des
circonstances sans rapport avec le litige, telle une surcharge de travail de
l'autorité (ATF 125 V 191 consid. 2a). Sur ce point, la jurisprudence rendue
avant l'entrée en vigueur de la loi demeure applicable, la LPGA n'ayant
apporté aucune modification à la notion du déni de justice (cf. Kieser,
ATSG-Kommentar, Kommentar zum Bundesgesetz über den Allgemeinen Teil des
Sozialversicherungsrechts vom 6. Oktober 2000, Zurich 2003, ch. 10, 13 et 14
ad art. 56).

En particulier, il appartient au justiciable d'entreprendre ce qui est en son
pouvoir pour que l'autorité fasse diligence, que ce soit en l'invitant à
accélérer la procédure ou en recourant, le cas échéant, pour retard
injustifié (ATF 107 Ib 155 consid. 2b et c p. 158 s.). Cette obligation
s'apprécie toutefois avec moins de rigueur en procédure pénale et
administrative (Haefliger/Schürmann, Die Europäische Menschenrechtskonvention
und die Schweiz, Berne 1999, p. 203-204; Auer/ Malinverni/Hottelier, Droit
constitutionnel suisse, vol. II, n. 1243). On ne saurait par ailleurs
reprocher à une autorité quelques temps morts; ceux-ci sont inévitables dans
une procédure (cf. ATF 124 et 119 précités). Dans le cadre d'une appréciation
d'ensemble, il faut également tenir compte du fait qu'en matière d'assurances
sociales le législateur accorde une importance particulière à une liquidation
rapide des procès (ATF 126 V 249 consid. 4a).

3.2.2 En l'espèce, il s'est écoulé moins de six mois entre la requête de
l'assuré à l'OCAI du 26 juin 2003 et sa plainte pour déni de justice du 19
décembre suivant et moins de neuf mois jusqu'aux nouvelles décisions du 17
mars 2004. De surcroît, les injonctions du Tribunal cantonal des assurances
du 25 avril 2003, ont été exécutées moins de onze mois plus tard.

Certes, l'administration n'a pas donné immédiatement satisfaction au
recourant. Elle lui a cependant précisé les raisons pour lesquelles elle ne
pouvait pas répondre tout de suite et avec précision à sa demande. Ainsi,
effectivement, le montant de la rente devait être calculé à nouveau en
fonction de la survenance de l'invalidité fixée par la juridiction cantonale;
ainsi, les prétentions en compensation du service social X.________ devaient
faire l'objet d'une instruction complémentaire; ainsi, également, la question
du chevauchement des indemnités journalières avec le droit à la rente se
posait pour le mois de mars 2002. Il ressort aussi du dossier que la même
problématique se posait à l'administration pour le droit aux rentes
complémentaires de l'épouse et des deux enfants et que, sur ce point, le
recourant était en désaccord avec la procédure suivie jusque-là par
l'administration. Il ne peut être reproché à l'administration d'avoir
souhaité pouvoir rendre des décisions claires et précises qui ne donnent pas
lieu à d'autres contestations. Tout au plus, peut-on faire grief à
l'administration d'avoir attendu quelque peu avant de requérir la production
du dossier que la juridiction cantonale avait transmis au TFA. Grâce à la
vigilance du recourant, ces atermoiements n'ont cependant pas retardé de
façon intolérable la procédure. On doit admettre, à l'instar des premiers
juges, que l'administration n'a pas violé le principe de la célérité ni
statué avec un retard injustifié. Dès lors, la constatation d'un tel vice,
ainsi que l'allocation de dépens n'étaient pas justifiées et le recours
s'avère mal fondé.

4.
Vu la nature de la procédure, celle-ci n'est pas gratuite (art. 134 OJ a
contrario). Succombant, le recourant en supportera les frais.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Les frais de justice, d'un montant de 500 fr., sont mis à charge du recourant
et sont compensés avec l'avance de frais qu'il a versée.

3.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal cantonal des
assurances du canton du Valais et à l'Office fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 15 juin 2005

Au nom du Tribunal fédéral des assurances

La Présidente de la IIIe Chambre:  La Greffière: