Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Sozialrechtliche Abteilungen I 106/2004
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I 106/04

Arrêt du 23 novembre 2004
IIIe Chambre

Mme et MM. les Juges Leuzinger, Présidente, Rüedi et Kernen. Greffier : M.
Piguet

B.________, recourant, représenté par Me José Nogueira Esmoris, Avocat,
Cuesta de la Palloza,
1 - 3° Dcha., 15006 A Coruña, Espagne,

contre

Office AI pour les assurés résidant à l'étranger, avenue Edmond-Vaucher 18,
1203 Genève, intimé

Commission fédérale de recours en matière d'AVS/AI pour les personnes
résidant à l'étranger, Lausanne

(Jugement du 20 janvier 2004)

Faits:

A.
B. ________, ressortissant espagnol, né en 1947, a travaillé en Suisse de
1966 à 1969. Il a par la suite résidé quelques années en Allemagne, avant de
retourner en Espagne où il a exercé la profession de chauffeur de bus pour
les transports publics. En raison de troubles dorsaux, l'Institut national de
la sécurité sociale espagnole (INSS) l'a reconnu définitivement incapable
d'exercer sa profession dès le 21 mai 2002 (rapport du 5 août 2002). Depuis
le 1er octobre 2002, B.________ est au bénéfice d'une rente entière
d'invalidité espagnole.

L'INSS a transmis le dossier à l'Office AI pour les assurés résidant à
l'étranger (ci-après : l'office AI), afin qu'il se prononce sur le droit de
B.________ à des prestations de l'assurance-invalidité suisse. Après avoir
soumis le cas pour appréciation à son médecin-conseil, le docteur F.________,
qui a estimé que les atteintes à la santé de l'intéressé n'empêchaient pas
celui-ci de poursuivre une activité de chauffeur de bus, l'office AI a rejeté
la demande (décision du 25 juin 2003 confirmée sur opposition le 7 octobre
2003).

B.
B.________ a déféré cette décision à la Commission fédérale de recours en
matière d'assurance-vieillesse, survivants et invalidité pour les personnes
résidant à l'étranger (ci-après : la commission), qui l'a débouté par
jugement du 20 janvier 2004.

C.
B.________ interjette recours de droit administratif contre ce jugement, en
concluant à l'octroi d'une rente d'invalidité.
L'office AI conclut au rejet du recours tandis que l'Office fédéral des
assurances sociales a renoncé à se déterminer.

Considérant en droit:

1.
Le litige porte sur le droit du recourant à une rente d'invalidité,
singulièrement le taux d'invalidité qu'il présente.

2.
Les premiers juges ont correctement exposé les dispositions légales sur la
notion d'invalidité (art. 4 LAI et 8 al. 1 LPGA), l'incapacité de travail
(art. 6 LPGA) et de gain (art. 7 LPGA), l'échelonnement des rentes selon le
taux d'invalidité (art. 28 al. 1 LAI) et la naissance du droit à la rente
(art. 29 al. 1 LAI). Ils ont précisé à juste titre que les dispositions de
l'Accord du 21 juin 1999 entre la Confédération suisse, d'une part, et la
Communauté européenne et ses Etats, d'autre part, sur la libre circulation
des personnes (ALCP), entré en vigueur le 1er juin 2002, étaient applicables
à la présente procédure. Sur ces points, il suffit d'y renvoyer, en précisant
que les modifications de la LAI du 21 mars 2003 (4ème révision de la LAI),
entrées en vigueur au 1er janvier 2004, n'entrent pas en ligne de compte (ATF
129 V 4 consid. 1.2. et les références).
On ajoutera encore que même après l'entrée en vigueur de l'ALCP, le degré
d'invalidité d'un assuré qui prétend une rente de l'assurance-invalidité est
déterminé exclusivement d'après le droit suisse (ATF 130 V 257 consid. 2.4).

3.
Le recourant conteste l'estimation de sa capacité de travail, retenue par
l'office AI et les premiers juges sur la base des conclusions du docteur
F.________. Il estime qu'il y a lieu de s'en tenir aux conclusions de l'INSS
qui admet l'existence d'une incapacité de travail définitive dans sa
profession et lui a accordé de ce fait une rente entière d'invalidité. Il
ajoute que les affections dorsales dont il souffre sont suffisamment
documentées et objectivées, et prouvent à l'évidence qu'il n'est plus en
mesure de reprendre une activité de chauffeur.

4.
4.1 A l'issue d'un examen clinique complet, ainsi que des résultats des bilans
radiologiques pratiqués (TAC lombaire; IRM et EMG), la doctoresse C.________,
médecin à l'INSS, a posé le diagnostic de lombarthrose avec hernie discale
L3-L4, L4-L5 et L5-S1, ainsi que d'une radiculopathie motrice chronique
d'intensité modérée L4-L5 droite. Ces affections entraînaient une diminution
fonctionnelle significative qui était incompatible avec une activité de
chauffeur de bus; elles ne constituaient en revanche pas un obstacle à
l'exercice d'une activité légère et adaptée à plein temps permettant de
fréquents changements de position. B.________ devait toutefois éviter de se
pencher, de monter ou de transporter des objets (rapport du 5 août 2002).

Contrairement à l'opinion de l'intimé et de la commission, on ne voit pas de
motifs sérieux de s'écarter de cet avis. Dans deux notes du 27 avril et 18
juin 2003, le docteur F.________ (qui n'a pas examiné l'assuré) se contente
en effet d'aboutir à des conclusions contraires, sans remettre en cause les
diagnostics retenus par son confrère espagnol ni expliquer les raisons de son
désaccord.

4.2 Cela étant, le simple fait que le recourant soit incapable d'exercer son
ancienne profession ne signifie pas encore qu'il est invalide au regard du
droit suisse. D'après la jurisprudence, on applique de manière générale dans
le domaine de l'assurance-invalidité le principe selon lequel un invalide
doit, avant de requérir des prestations de l'assurance-invalidité,
entreprendre de son propre chef tout ce qu'on  peut raisonnablement attendre
de lui pour atténuer le mieux possible les conséquences de son invalidité;
c'est pourquoi un assuré n'a pas droit à une rente lorsqu'il serait en
mesure, au besoin en changeant de profession, d'obtenir un revenu excluant
une invalidité ouvrant droit à une rente (ATF 123 V 96 consid. 4c, 113 V 28
consid. a; Meyer-Blaser, Bundesgesetz über die Invalidenversicherung [IVG] ad
art. 28 LAI, p. 221). La réadaptation par soi-même est un aspect de
l'obligation de diminuer le dommage et prime aussi bien le droit à une rente
qu'à celui des mesures de réadaptation (art. 21 al. 4 LPGA).

Dès lors que la doctoresse C.________ a conclu qu'une activité légère et
adaptée était encore exigible de la part du recourant à temps complet (sous
réserve de certaines limitations), il faut par conséquent déterminer si
l'exercice d'une telle activité entraînerait une diminution de sa capacité de
gain propre à ouvrir le droit à une rente d'invalidité.

5.
5.1
5.1.1Chez les assurés actifs, le degré d'invalidité doit être évalué sur la
base d'une comparaison des revenus. Pour cela, le revenu que l'assuré aurait
pu obtenir s'il n'était pas invalide est comparé avec celui qu'il pourrait
obtenir en exerçant l'activité qui peut raisonnablement être exigée de lui
après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du
travail équilibré (art. 16 LPGA). La comparaison des revenus s'effectue, en
règle ordinaire, en chiffrant aussi exactement que possible les montants de
ces deux revenus et en les confrontant l'un avec l'autre, la différence
permettant de calculer le taux d'invalidité (méthode générale de comparaison
des revenus; ATF 130 V 348 consid. 3.4, 128 V 30 consid. 1, 104 V 136 consid.
2a et 2b). Pour procéder à la comparaison des revenus, il convient de se
placer au moment de la naissance du droit à la rente; les revenus avec et
sans invalidité doivent être déterminés par rapport à un même moment et les
modifications de ces revenus susceptibles d'influencer le droit à la rente,
survenues jusqu'au moment où la décision est rendue, doivent être prises en
compte (ATF 129 V 223 consid. 4.1, 128 V 174).

5.1.2 Le revenu d'invalide doit être évalué avant tout en fonction de la
situation professionnelle concrète de l'intéressé. En l'absence d'un revenu
effectivement réalisé, il y a lieu de se référer aux données statistiques,
telles qu'elles résultent des enquêtes sur la structure des salaires de
l'Office fédéral de la statistique (ATF 126 V 76 consid. 3b/aa et bb). La
mesure dans laquelle les salaires ressortant des statistiques doivent être
réduits, dépend de l'ensemble des circonstances personnelles et
professionnelles du cas particulier (limitations liées au handicap, âge,
années de service, nationalité/catégorie d'autorisation de séjour et taux
d'occupation) et résulte d'une évaluation dans les limites du pouvoir
d'appréciation. Une déduction globale maximum de 25 % sur le salaire
statistique permet de tenir compte des différents éléments qui peuvent
influencer le revenu d'une activité lucrative (cf. ATF 126 V 78 consid. 5).

5.2
5.2.1En l'espèce, le recourant présente une incapacité totale de travail dans
son activité de chauffeur de bus depuis le 21 mai 2002. L'ouverture du droit
à une éventuelle rente d'invalidité, déterminante pour la comparaison des
revenus, n'entre donc pas en considération avant l'année 2003 (art. 29 al. 1
let. b LAI).

5.2.2 Pour le revenu d'invalide, le salaire de référence est celui auquel
peuvent prétendre les hommes effectuant des activités simples et répétitives
(niveau de qualification 4) dans le secteur privé, à savoir 54'684 fr. par
année (Enquête suisse sur la structure des salaires 2002, TA1, p.43). Au
regard du large éventail d'activités simples et répétitives que recouvrent
les secteurs de la production et des services, on doit en effet convenir
qu'un certain nombre d'entre elles sont légères et adaptées aux problèmes
dorsaux du recourant. Comme les salaires bruts standardisés tiennent compte
d'un horaire de travail de 40 heures, soit une durée hebdomadaire inférieure
à la moyenne usuelle dans les entreprises en 2002 (41,7 heures; La Vie
économique, 10-2004, p. 90, B9.2), ce montant doit être porté à  57'008 fr.
05. Après adaptation de ce chiffre à l'évolution des salaires selon l'indice
des salaires nominaux pour les hommes de l'année 2003 (1,4 %; La Vie
économique, 10-2004, p. 91, B10.2), on obtient un revenu annuel de 57'806 fr.
20. Vu l'âge du recourant et ses handicaps - les autres critères
d'appréciation ne jouant en l'espèce aucun rôle -, il se justifie de procéder
à un abattement de ce salaire statistique à hauteur de 5 %. Il en résulte un
revenu d'invalide de 54'915 fr. 90.

5.2.3 Pour le calcul du revenu sans invalidité, il y a également lieu de s'en
tenir aux données statistiques suisses. En raison de la disparité des niveaux
de rémunération et des coûts de la vie entre la Suisse et l'Espagne, on ne
saurait en effet retenir le montant du dernier salaire obtenu par le
recourant dans son état de résidence (cf. ATF 110 V 276 consid. 4b).

Eu égard à l'activité précédemment exercée par le recourant, le salaire de
référence est celui auquel peuvent prétendre les hommes actifs dans le
domaine des transports dans le secteur public (niveau de qualification 4), à
savoir 62'736 fr. par année (Enquête suisse sur la structure des salaires
2002, TA2, p. 46). Adapté à un horaire de 42 heures par semaine (usuel dans
la branche des transports en 2002) ainsi qu'à l'évolution des salaires dans
le secteur des transports pour l'année 2003 (+ 1,6 %), ce montant s'élève à
66'926 fr. 75.

5.3 La comparaison des revenus donne un taux d'invalidité arrondi au pour
cent supérieur de 18 % ([66'926 fr. 75 - 54'915 fr. 90] x 100 : 66'926 fr.
75). Ce taux est inférieur au seuil ouvrant le droit à une rente de
l'assurance-invalidité suisse (art. 28 LAI).

6.
Le recours se révèle par conséquent mal fondé. Vu la nature du litige, il
n'est pas perçu de frais (art. 134 OJ a contrario).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Il n'est pas perçu de frais de justice.

3.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, à la Commission fédérale de
recours en matière d'AVS/AI pour les personnes résidant à l'étranger et à
l'Office fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 23 novembre 2004
Au nom du Tribunal fédéral des assurances

La Présidente de la IIIe Chambre:   Le Greffier: