Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Sozialrechtliche Abteilungen H 111/2004
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H 111/04

Arr t du 5 avril 2006
IIIe Chambre

MM. les Juges Ferrari, Pr sident, Meyer et Seiler. Greffier : M. Piguet

H.________, recourante,

contre

Caisse de compensation du canton de Fribourg, impasse de la Colline 1, 1762
Givisiez, intim e

Tribunal administratif du canton de Fribourg, Givisiez

(Jugement du 22 avril 2004)

Faits:

A.
La soci t  anonyme E.________ SA (ci-apr s : la soci t )  tait affili e en
tant qu'employeur aupr s de la Caisse de compensation du canton de Fribourg
(ci-apr s : la caisse). Sa faillite a  t  prononc e le 30 ao t 2002 et les
op rations de liquidation ont  t  suspendues pour d faut d'actifs le 18
f vrier 2003.
Le 17 juin 2003, la caisse a adress    H.________, inscrite au registre du
commerce du 6 mars 2001 au 6 f vrier 2002 en qualit  d'administratrice unique
de la soci t , une d cision de r paration de dommage portant sur un montant
de 38'137 fr. 60. Cette somme correspondait aux cotisations paritaires dues
sur les salaires d clar s par la soci t  pour la p riode courant du mois de
janvier 2001 au mois d'ao t 2002.
Saisie d'une opposition, la caisse l'a partiellement admise et r duit le
montant du dommage   35'300 fr. 85. Elle a consid r  qu'il n'y avait pas lieu
de tenir compte des cotisations paritaires dues pour la p riode courant de
janvier   ao t 2002, d s lors que H.________ avait d missionn  de sa fonction
d'administratrice le 9 janvier 2002 (d cision du 19 ao t 2003).

B.
Par jugement du 22 avril 2004, le Tribunal administratif du canton de
Fribourg a rejet  le recours form  par l'int ress e   l'encontre de la
d cision sur opposition du 19 ao t 2003.

C.
H.________ interjette recours de droit administratif contre ce jugement, dont
elle demande, sous suite de frais et d pens, l'annulation. A titre pr alable,
elle requiert  galement la suspension de la proc dure jusqu'  droit connu
dans la proc dure p nale ouverte   l'encontre de D.________, directeur de la
soci t . Elle sollicite pour le surplus le b n fice de l'assistance
judiciaire.
La caisse conclut au rejet du recours, tandis que l'Office f d ral des
assurances sociales a renonc    se d terminer.

Consid rant en droit:

1.
Aux termes de l'art. 6 al. 1 PCF, en corr lation avec les art. 40 et 135 OJ,
le juge peut ordonner la suspension de la proc dure pour des raisons
d'opportunit , notamment lorsque le jugement d'un autre litige peut
influencer l'issue du proc s.
En l'occurrence, il n'y a pas lieu de donner suite   la requ te de suspension
de la proc dure pr sent e par la recourante. D'apr s les pi ces vers es au
dossier, la caisse intim e n'a notifi  sa d cision de r paration de dommage
qu'  H.________; elle n'a en revanche nullement recherch  D.________,
directeur de la soci t . Aussi n'est-il pas n cessaire d'examiner le r le
 ventuel qu'aurait pu avoir cette personne dans le pr judice subi par
l'intim e, car le pr sent litige ne porte que sur la responsabilit 
personnelle de la recourante, et non sur celle de tiers.

2.
La d cision litigieuse n'ayant pas pour objet l'octroi ou le refus de
prestations d'assurance, le Tribunal f d ral des assurances doit se borner  
examiner si les premiers juges ont viol  le droit f d ral, y compris par
l'exc s ou par l'abus de leur pouvoir d'appr ciation, ou si les faits
pertinents ont  t  constat s d'une mani re manifestement inexacte ou
incompl te, ou s'ils sont  t   tablis au m pris de r gles essentielles de
proc dure (art. 132 en corr lation avec les art. 104 let. a et b et 105 al. 2
OJ).

3.
Le litige porte sur la responsabilit  de la recourante au sens de l'art. 52
LAVS dans le pr judice subi par l'intim e en raison du non-paiement des
cotisations paritaires dues par la soci t  pour l'ann e 2001.

3.1 La loi f d rale sur la partie g n rale du droit des assurances sociales
du 6 octobre 2000 (LPGA) est entr e en vigueur le 1er janvier 2003,
entra nant la modification de nombreuses dispositions l gales dans le domaine
de l'AVS, notamment en ce qui concerne l'art. 52 LAVS. Le cas d'esp ce reste
toutefois r gi, sur le plan mat riel, par les dispositions en vigueur
jusqu'au 31 d cembre 2002, eu  gard au principe selon lequel les r gles
applicables sont celles en vigueur au moment o  les faits juridiquement
d terminants se sont produits (ATF 129 V 4 consid. 1.2 et les r f rences;  
propos des d lais pour demander la r paration du dommage, voir consid. 5 de
l'arr t R. du 27 septembre 2005, H 53/05, pr vu pour la publication dans le
Recueil officiel).
En revanche, les dispositions g n rales de proc dure de la LPGA (art. 27   62
LPGA) sont applicables au cas d'esp ce (art. 52 al. 2 LAVS dans sa teneur en
vigueur depuis le 1er janvier 2003, art. 52 et 56 LPGA; cf. ATF 130 V 1).

3.2 Pour le reste, le jugement entrepris expose correctement les dispositions
l gales et r glementaires, ainsi que les principes jurisprudentiels
applicables en mati re de responsabilit  de l'employeur et des organes de
celui-ci, de sorte qu'il suffit d'y renvoyer.

4.
4.1 En tant qu'administratrice unique de la soci t  faillie depuis le 6 mars
2001, H.________ avait indiscutablement qualit  d'organe typique de la
soci t . D'apr s l'int ress e, on ne saurait toutefois lui reprocher une
faute ou une n gligence grave dans le cas d'esp ce. Son cahier des charges
pr voyait en effet qu'elle s'occupe de la gestion technique de la soci t ,  
l'exclusion du domaine financier, lequel  tait assum  par D.________,
directeur et propri taire  conomique de E.________ SA, et de la gestion
comptable, qui  tait g r e par une tierce personne. Malgr  sa fonction
purement technique, elle a n anmoins personnellement et de mani re r p t e
rappel  D.________   ses obligations sans que celui-ci ne r agisse
concr tement. Au vu des promesses que celui-ci lui faisait r guli rement,
elle soutient avoir eu n anmoins des raisons objectives de penser que les
cotisations dues aux assurances sociales seraient vers es dans un d lai
raisonnable.

4.2 L'art. 716a al. 1 CO  num re les attributions intransmissibles et
inali nables des membres du conseil d'administration. En font partie
l'exercice de la haute surveillance sur les personnes charg es de la gestion,
pour s'assurer notamment qu'elles observent la loi, les r glements et les
instructions donn es (ch. 5). Dans le cadre de l'exercice de cette haute
surveillance, l'administrateur r pond de la cura in custodiendo (Adrian
Kammerer, Die un bertragbaren und unentziehbaren Kompetenzen des
Verwaltungsrates, th se Zurich 1997, p. 226). C'est ainsi qu'il a non
seulement le devoir d'assister aux s ances du conseil d'administration, mais
 galement l'obligation de se faire renseigner p riodiquement sur la marche
des affaires (Kammerer, op. cit., p. 186). Il est tenu de prendre les mesures
appropri es lorsqu'il a connaissance ou aurait d  avoir connaissance
d'irr gularit s commises dans la gestion de la soci t  (B ckli, Schweizer
Aktienrecht, 3 me  d., Zurich/B le/Gen ve 2004, p. 1535, 1555, notes 313,
377; Forstmoser/Meier-Hayoz/Nobel, Schweizerisches Aktienrecht, Berne 1996,  
30 note 49). Ce devoir de surveillance incombe   tous les membres du conseil
d'administration qui ne sont pas charg s de la gestion et non pas uniquement
au pr sident ou au vice-pr sident (voir, par exemple, arr t W. du 23 juin
2003, H 217/02, r sum  dans REAS 2003 p. 251).

4.3 En sa qualit  d'organe de la soci t , poss dant de surcro t le droit de
signature individuelle, il incombait   H.________, nonobstant le mode de
r partition interne des taches au sein de la soci t , de s'assurer
personnellement que les cotisations paritaires aff rentes aux salaires vers s
fussent effectivement pay es   la caisse de compensation, conform ment aux
prescriptions l gales (art. 14 al. 1 LAVS en corr lation avec les art. 34 ss
RAVS). En tant que la soci t  ne s'est jamais acquitt e du paiement des
cotisations sociales, la recourante n'a   l' vidence pas rempli ce devoir. En
exer ant un mandat d'administrateur sans en assumer la charge dans les faits,
elle a tout simplement m connu l'une des attributions intransmissibles et
inali nables que lui conf rait l'art. 716a al. 1 CO et viol  ainsi son
obligation de diligence (ATF 122 III 200 consid. 3b; RDAT 1993, I, p. 374
consid. 6). C'est l  une n gligence, qui doit  tre qualifi e de grave au
regard de l'art. 52 LAVS (ATF 112 V 3 consid. 2b), attendu qu'elle aurait d 
se rendre compte qu'elle ne pouvait, dans le cadre de sa fonction, exercer de
surveillance r elle sur les agissements de D.________ et qu'il lui  tait
ainsi impossible de remplir consciencieusement son mandat.
La recourante ne saurait se lib rer de sa responsabilit  en se pr valant du
r le subalterne qu'elle assumait au sein de la soci t  et des appels r it r s
lanc s   l'intention de D.________ pour qu'il se conforme   ses obligations.
La haute surveillance des personnes charg es de la gestion d'une soci t 
anonyme ne saurait en effet se r sumer   leur formuler des injonctions et
compter sur une r action  ventuelle de leur part, mais implique, en cas de
n cessit , l'intervention directe de l'administrateur. A cet  gard, le fait
que celui-ci n'est pas en mesure d'exercer ses fonctions, parce que la
soci t  est dirig e en fait par d'autres personnes, ou qu'il a accept  son
mandat   titre fiduciaire dans le seul but de permettre au conseil
d'administration de satisfaire aux exigences de l'art. 708 al. 1 CO, n'est
pas un motif de suppression ou d'att nuation de la faute commise (Jean-
Fran ois Egli, Aper u de la jurisprudence r cente du Tribunal f d ral
relative   la responsabilit  des administrateurs de soci t  anonyme, in
Publication CEDIDAC 8, 1987, p. 32).
La passivit  de la recourante est, de surcro t, en relation de causalit 
naturelle et ad quate avec le dommage subi par la caisse de compensation. En
effet, si elle avait correctement ex cut  son mandat, elle aurait veill  au
paiement des cotisations d'assurances sociales ou,   tout le moins, pris les
mesures qui s'imposaient. Si elle se trouvait, en raison de l'attitude du
propri taire  conomique de la soci t , dans l'incapacit  de prendre ces
mesures ou m me d'exercer son devoir de surveillance, elle devait
d missionner de ses fonctions. Ne l'ayant pas fait, elle doit r pondre du
dommage qui en est r sult  pour la caisse.

5.
La recourante conteste  galement devoir r pondre de l'ensemble du dommage qui
lui est imput , d s lors que celui-ci porte en partie sur le non-paiement de
cotisations sociales relatives   des salaires qui n'ont pas  t  vers s par la
soci t .

5.1
5.1.1 Le salaire d terminant pour la perception des cotisations comprend toute
r mun ration pour un travail d pendant, fourni pour un temps d termin  ou
ind termin  (art. 5 al. 2 LAVS). Font partie de ce salaire d terminant, par
d finition, toutes les sommes touch es par le salari , si leur versement est
 conomiquement li  au contrat de travail; peu importe,   ce propos, que les
rapports de service soient maintenus ou aient  t  r sili s, que les
prestations soient vers es en vertu d'une obligation ou   titre b n vole. On
consid re donc comme revenu d'une activit  salari e, soumis   cotisations,
non seulement les r tributions vers es pour un travail effectu , mais en
principe toute indemnit  ou prestation ayant une relation quelconque avec les
rapports de service, dans la mesure o  ces prestations ne sont pas franches
de cotisations en vertu de prescriptions l gales express ment formul es (ATF
128 V 180 consid. 3c, 126 V 222 consid. 4a, 124 V 101 consid. 2 et les
r f rences). Selon cette description du salaire d terminant, sont en principe
soumis   l'obligation de payer les cotisations paritaires tous les revenus
li s   des rapports de travail ou de service qui n'auraient pas  t  per us
sans ses rapports. Est vis , sous r serve des exceptions pr vues express ment
par la loi ou l'ordonnance, le revenu  (entier) en esp ce ou en nature tir 
en Suisse ou   l' tranger de l'exercice d'une activit  lucrative d pendante,
y compris les revenus accessoires. Inversement, l'obligation de payer des
cotisations ne concerne que les revenus qui ont  t  effectivement per us par
le travailleur (VSI 2001 p. 217 consid. 4a; RCC 1976 p. 410 consid. 2a).

5.1.2 La dette de cotisations prend naissance   la date   laquelle le salaire
d terminant a  t  r alis  (ATF 115 V 163 consid. 4, 111 V 166 consid. 4a et
les r f rences; RCC 1989 p. 317 consid. 3c, 1985 p. 43 consid. 3a). D'apr s
les principes g n raux de droit fiscal auxquels il convient de se r f rer par
analogie, le revenu est consid r  comme r alis  lorsque le salari  peut
effectivement en disposer, c'est- -dire lorsqu'un bien ou une prestation a
pass  en sa possession ou lorsqu'il a acquis un droit ferme   obtenir un bien
ou une prestation. En r gle g n ral, l'acquisition d'une pr tention est d j 
consid r e comme un revenu dans la mesure o  son ex cution ne para t pas
incertaine. Ce n'est que si cette ex cution para t d'embl e peu probable que
le moment de la perception r elle de la prestation est pris en consid ration
(RDAF 2003 II 626 consid. 3.2.1 et les r f rences; voir  galement Walter
Ryser/Bernard Rolli, Pr cis de droit fiscal suisse, 4e  d., 161 ss; Xavier
Oberson, Droit fiscal suisse, 2  d., n. 12, p. 80; Peter Locher, Kommentar
zum DBG, 1 re partie, n. 18 ss ad art. 16; Jean-Marc Rivier, Droit fiscal
suisse, L'imposition du revenu et de la fortune, 2e  d., p. 326 ss; Markus
Reich, in : Martin Zweifel/Peter Athanas, Kommentar zum schweizerischen
Steuerrecht, I/2a, Bundesgesetz  ber die direkte Bundessteuer (DBG) Art 1-82,
n. 33 ss ad. 16;
En mati re de responsabilit  au sens de l'art. 52 LAVS, le revenu doit  tre
consid r  comme r alis  au moment du paiement, du virement au compte de
ch que ou en banque du salaire. Si celui-ci n'est exceptionnellement pas
vers  mais est acquis par une inscription dans les livres comptables au
cr dit du compte du salari  ou par compensation avec une contre-prestation,
il y a lieu de pr sumer que le moment de la r alisation est identique   celui
auquel le montant a  t  port  au cr dit ou compens  (ATFA 1957 p. 36 consid.
2 et 125 consid. 2; Hans-Peter K ser, Unterstellung und Beitragswesen in der
obligatorischen AHV, 2 me  d., Berne 1996, p. 112 ch. 4.9;
Greber/Duc/Scartazzini, Commentaire des articles 1   16 de la loi f d rale
sur l'assurance-vieillesse et survivants (LAVS), B le 1996, p. 156, n. 17 ad
art. 5). Demeurent r serv s les cas o  la preuve est rapport e que
l'inscription correspond   une simple expectative. On se trouve dans un tel
cas de figure lorsque la situation financi re de l'employeur au moment o  le
salaire a  t  comptabilis  est tr s mauvaise et que le paiement des salaires
port s en compte d pend de la situation ult rieure de l'entreprise (RCC 1976
p. 88 consid. 2). L'op ration consistant   porter au cr dit du b n ficiaire
une certaine somme doit ainsi  tre r alisable (K ser, op. cit., p. 113, n.
4.9).
5.2 Suivant une pratique constante (publi e   la SVR 1999 AHV n  12 p. 33
consid. 4a in fine), la Cour des assurances sociales du Tribunal
administratif du canton de Fribourg estime que la question de la
d termination du dommage subi par la caisse est ind pendante de celle de
savoir si l'employeur a effectivement vers  ou non les salaires promis   ses
employ s. Il faut en effet partir du principe que la couverture d'assurance
AVS est garantie   tout employ  pour le salaire qui lui est d  et qui est
d clar , m me si l'employeur ne verse pas le traitement. Dans cette
hypoth se, la caisse subit en effet un dommage du fait qu'elle maintient ses
prestations tout en n'encaissant pas les cotisations correspondantes. Par
ailleurs, traiter plus favorablement un employeur qui n'aurait ni pay  ses
employ s ni vers  ses cotisations qu'un autre employeur, qui en d pit de ses
difficult s de tr sorerie, se serait n anmoins acquitt  des salaires dus dans
le respect des contrats de travail, aboutirait   un r sultat in quitable,
voire choquant. Pour le premier en effet, on consid rerait qu'il n'aurait pas
caus  de dommage   sa caisse, alors qu'en plus du d faut de cotisations, il
aurait encore viol  ses engagements contractuels; pour le second, on
retiendrait sa responsabilit  nonobstant son m rite   avoir r compens  ses
employ s pour leur travail. Au demeurant, cette solution inciterait les
employeurs   ne verser ni salaires ni cotisations sociales, ce qui n'est bien
 videmment pas admissible.

5.3 Le point de vue soutenu par la Cour des assurances sociales du Tribunal
administratif du canton de Fribourg ne saurait  tre suivi, d s lors qu'il
s' carte de la jurisprudence constante du Tribunal f d ral des assurances,
d'apr s laquelle le jour de la r alisation du revenu d terminant marque celui
de la naissance de la cr ance de cotisations. Ce n'est en effet qu'  partir
de ce moment bien pr cis, moment o  l'employeur doit d'ailleurs d duire du
salaire les cotisations dues (art. 14 al. 1 LAVS), que la cr ance de
cotisations devient exigible et que la caisse de compensation peut en
pr tendre le paiement. Aussi longtemps qu'un revenu n'a pas  t  r alis  au
sens de la jurisprudence (consid. 5.1.2), la caisse ne dispose d'aucune
cr ance   l' gard de l'employeur; elle ne saurait par cons quent subir un
pr judice en raison de l'insolvabilit  de l'employeur et se pr valoir   ce
titre d'une cr ance en r paration du dommage envers les organes responsables.
Contrairement   ce que soutient la juridiction cantonale, du moment o  il n'y
a pas de r alisation d'un revenu soumis   cotisations, la couverture
d'assurance AVS n'est plus garantie (voir art. 29ter al. 2 let. a LAVS).
L'existence pour l'employeur d'une obligation l gale de payer des cotisations
(Beitragspflicht; voir ATF 115 V 163 consid. 4b et les r f rences) ou d'une
obligation contractuelle de verser un salaire ne cr ent   cet  gard aucune
fiction juridique qui irait   l'encontre du principe de la r alisation.
On ne saurait par ailleurs tirer des parall les entre la situation de
l'employeur, qui en d pit de ses difficult s de tr sorerie, se serait
n anmoins acquitt  des salaires dus dans le respect du contrat de travail de
celle d'un autre employeur qui n'aurait ni pay  ses employ s ni vers  les
cotisations paritaires. Dans la premi re hypoth se, le travailleur est en
effet fond    admettre que le salaire vers  par l'employeur repr sente le
salaire net qui lui est d  et que les d ductions sociales ont  t  effectu es
et acquitt es. En revanche, lorsqu'il n'est pas pay , le travailleur doit
supposer que ses droits futurs en mati re d'assurances sociales ne sont pas
non plus garantis. La loi f d rale sur l'assurance-ch mage obligatoire et
l'indemnit  en cas d'insolvabilit  (LACI) garantit toutefois aux personnes
assur es une compensation convenable du manque   gagner provoqu  par
l'insolvabilit  d'un employeur. En effet, lorsque des s ret s ne sont pas
fournies au travailleur dans un d lai convenable pour garantir ses
pr tentions contractuelles, l'insolvabilit  de l'employeur constitue un motif
de r siliation imm diate du contrat de travail (art. 337a CO) qui permet au
travailleur, sans que l'on puisse lui imputer une faute quelconque (arr t K.
du 11 juillet 1986, C 34/86), de b n ficier de l'indemnit  de ch mage, sur
laquelle sont d duites les cotisations l gales aux assurances sociales (art.
22a LACI et 35 sv. OACI). Le travailleur dispose par ailleurs d'une cr ance
de salaire contre son employeur, qu'il peut, le cas  ch ant, faire valoir en
justice (art. 343 CO) ou dans le cadre d'une poursuite pour dettes. Selon les
circonstances, le travailleur peut  galement pr tendre, aux conditions
requises par la loi et la jurisprudence, une indemnit  pour insolvabilit 
(art. 51 LACI), qui donne  galement lieu   un pr l vement   la source des
cotisations l gales aux assurances sociales (art. 52 al. 2 LACI et 76 OACI).

5.4 Dans la mesure o  la juridiction cantonale s'est fond e sur une
conception juridique erron e, elle n'a pas  tabli les faits utiles   la
r solution du cas. Il convient par cons quent de les constater d'office.
Le 8 f vrier 2002, E.________ SA a remis   la caisse deux d clarations de
salaires pour les ann es 2001 et 2002, desquelles il ressort express ment
qu'une partie des r mun rations d clar es n'ont pas  t  pay es par la
soci t . D'apr s le contr le d'employeur de la soci t  r alis  par la caisse
aupr s de l'Office cantonal des faillites, il n'existerait aucun document
comptable relatif   la soci t  (rapport du 26 mars 2003). On peut d s lors
 carter l'hypoth se que les salaires auraient  t  acquis par l'inscription de
ceux-ci dans les livres comptables, sans qu'il soit n cessaire d'examiner si
les montants qui auraient  t  port s au cr dit des employ s  taient
r alisables. Dans ces circonstances, il convient de constater que le montant
du dommage r clam  doit  tre r duit de la somme des salaires qui, certes, ont
 t  d clar s, mais n'ont pas  t  effectivement vers s. Il s'ensuit que le
jugement entrepris doit  tre annul  et la cause renvoy e   l'administration
pour qu'elle calcule   nouveau, conform ment   la jurisprudence, le montant
des cotisations litigieuses (y compris les int r ts moratoires et les frais
de gestion).

6.
6.1 La proc dure n'est pas gratuite (art. 134 OJ a contrario; VSI 2003 p. 166
consid. 1). Ni la recourante, ni la caisse intim e n'obtiennent enti rement
gain de cause, de sorte que les frais judiciaires peuvent  tre r partis par
moiti  entre eux (art. 156 al. 3 en corr lation avec l'art. 135 OJ).

6.2 Invit e   verser une avance de frais, la recourante a demand   
b n ficier de l'assistance judiciaire pour la proc dure f d rale. Selon la
loi (art. 152 OJ) et la jurisprudence, les conditions d'octroi de
l'assistance judiciaire gratuite sont en principe remplies si les conclusions
ne paraissent pas vou es   l' chec, si le requ rant est dans le besoin et si
l'assistance d'un avocat est n cessaire ou du moins indiqu e (ATF 125 V 202
consid. 4a, 372 consid. 5b et les r f rences). En l'occurrence, la demande
d'assistance judiciaire tend   la dispense des frais et la recourante remplit
les conditions pour pouvoir en b n ficier. Son attention est attir e sur le
fait que si elle devient ult rieurement en mesure de rembourser la caisse du
tribunal, elle est tenu de le faire (art. 152 al. 3 en liaison avec l'art.
135 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal f d ral des assurances prononce:

1.
Le recours est partiellement admis et le jugement de la Cour des assurances
sociales du Tribunal administratif du canton de Fribourg du 22 avril 2004
ainsi que la d cision sur opposition de la Caisse de compensation du canton
de Fribourg du 19 ao t 2003 sont annul s; l'affaire est renvoy e   la caisse
pr cit e pour qu'elle fixe le montant du dommage conform ment aux
consid rants.

2.
Les frais de justice, d'un montant de 3'000 fr., sont mis pour moiti    la
charge de la caisse de compensation et pour moiti    la charge de la
recourante.

3.
La demande d'assistance judiciaire est admise; la caisse du tribunal
supportera provisoirement, au titre des frais de justice couverts par
l'assistance judiciaire, un montant de 1'500 fr. en faveur de la recourante.

4.
Le pr sent arr t sera communiqu  aux parties,   la Cour des assurances
sociales du Tribunal administratif du canton de Fribourg et   l'Office
f d ral des assurances sociales.

Lucerne, le 5 avril 2006

Au nom du Tribunal f d ral des assurances

Le Pr sident de la IIIe Chambre: Le Greffier: