Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Sozialrechtliche Abteilungen B 6/2004
Zurück zum Index Sozialrechtliche Abteilungen 2004
Retour à l'indice Sozialrechtliche Abteilungen 2004


B 6/04

Arrêt du 23 novembre 2004
IIe Chambre

MM. les Juges Borella, Président, Schön et Frésard. Greffier : M. Beauverd

A.________, recourante, représentée par Me Jean-Marie Agier, avocat, FSIH,
place du Grand-Saint-Jean 1, 1003 Lausanne,

contre

Fondation collective LPP de la Rentenanstalt, General-Guisan-Quai 40, 8002
Zürich, intimée

Tribunal administratif de la République et canton de Genève, Genève

(Jugement du 2 décembre 2003)

Faits:

A.
A. ________, née en 1939, a travaillé au service de la Société S.________ du
1er juillet 1990 au 13 juin 1994. A ce titre, elle était affiliée à la
Fondation en faveur du personnel relevant du réseau suisse de la Société
S.________ (ci-après: la Fondation S.________). Depuis le 1er janvier 2002,
les personnes affiliées - y compris les rentiers - à ladite fondation ont été
reprises par la Fondation collective LPP de la Rentenanstalt (ci-après: la
Fondation collective).

Par décision du 20 avril 1995, l'Office de l'assurance-invalidité pour le
canton de Vaud a alloué à A.________ une rente entière d'invalidité à partir
du 1er août 1994.

De son côté, la Fondation S.________ a exonéré l'intéressée du paiement des
primes dès le 13 septembre 1994. Par ailleurs, elle lui a alloué une rente
d'invalidité d'un montant mensuel de 3'055 fr. dès le mois de janvier 1996.
Cette prestation a été adaptée à l'évolution des prix : dès le 1er janvier
2001, le montant annuel de la rente s'est élevé à 36'985 fr. - dont 7'468 fr.
au titre de la rente d'invalidité selon la LPP - soit un montant mensuel de
3'082 fr. 10.

A. ________ ayant atteint l'âge de la retraite, la Fondation collective a
remplacé, à partir du 1er janvier 2002, la rente d'invalidité par une rente
de vieillesse d'un montant annuel de 9'691 fr., soit un montant mensuel de
807 fr. 60. Dès le 1er juillet 2002, ces montants ont été portés à 11'442
fr., respectivement 953 fr. 50.

B.
Par mémoire de demande du 8 mai 2003, l'intéressée a saisi le Tribunal
administratif du canton de Genève (aujourd'hui, en matière d'assurances
sociales : le Tribunal cantonal des assurances sociales du canton de Genève),
en concluant au maintien de son droit, après le 1er janvier 2002, à une rente
d'invalidité viagère d'un montant mensuel de 3'082 fr. 10, avec intérêt à 5 %
l'an à compter du dépôt de la demande, sur la différence entre ledit montant
et la somme de 807 fr. 60.

A l'appui de ses conclusions, elle se fondait sur un arrêt du Tribunal
fédéral des assurances du 24 juillet 2001 (ATF 127 V 259), selon lequel, dans
le domaine de la prévoyance plus étendue, comme en matière de prévoyance
obligatoire, on applique la règle d'après laquelle la rente d'invalidité a un
caractère viager, ce qui implique que la rente de vieillesse doit être au
moins équivalente au montant de la rente d'invalidité servie jusqu'à l'âge
donnant droit à la rente de vieillesse.
Par jugement du 2 décembre 2003, la juridiction cantonale a rejeté la
demande, motif pris, en résumé, que la jurisprudence invoquée par la
demanderesse ne reposait ni sur une base légale, ni sur une clause du contrat
de prévoyance.

C.
A.________ interjette recours de droit administratif contre ce jugement, dont
elle demande l'annulation, en réitérant ses conclusions prises en instance
cantonale, sous suite de dépens.

La Fondation collective conclut au rejet du recours. De son côté, l'Office
fédéral des assurances sociales a renoncé à présenter des déterminations.

Considérant en droit:

1.
La contestation ici en cause relève des autorités juridictionnelles
mentionnées à l'art. 73 LPP, tant du point de vue de la compétence ratione
temporis que de celui de la compétence ratione materiae (ATF 130 V 104
consid. 1.1, 112 consid. 3.1.2, 128 II 389 consid. 2.1.1, 128 V 258 consid.
2a, 120 V 18 consid. 1a et les références), et le recours de droit
administratif est recevable de ce chef.

2.
Le litige porte sur le point de savoir si la recourante peut prétendre le
maintien, dès le 1er janvier 2002, de son droit à une rente d'invalidité de
la prévoyance plus étendue ou l'octroi, à partir de cette date, d'une rente
de vieillesse d'un montant équivalant à celui de la rente d'invalidité servie
jusqu'alors.

3.
3.1 Dans le domaine de la prévoyance professionnelle obligatoire, l'art. 26
al. 3, première phrase, LPP, dispose que le droit aux prestations
d'invalidité s'éteint au décès du bénéficiaire ou dès la disparition de
l'invalidité. Contrairement à la rente de l'assurance-invalidité, la rente
d'invalidité LPP est donc une prestation viagère. Elle n'est pas remplacée
par une rente de vieillesse LPP lorsque le bénéficiaire atteint l'âge légal
de la retraite selon l'art. 13 al. 1 LPP (ATF 118 V 100; cf. aussi ATF 123 V
123 consid. 3a; arrêts B. du 23 mars 2001, B 2/00, et M. du 14 mars 2001, B
69/99; Jürg Brühwiler, Obligatorische berufliche Vorsorge, in:
Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht [SBVR], Soziale Sicherheit, p. 38 ch.
91; Erich Peter, Die Koordination von Invalidenrenten, Zurich 1997, p. 147).
Toutefois, le règlement d'une institution de prévoyance peut prévoir qu'une
rente d'invalidité est remplacée par une rente de vieillesse lorsque le
bénéficiaire atteint l'âge de la retraite. Dans ce cas, le montant de la
rente de vieillesse allouée doit correspondre au moins à celui de la rente
d'invalidité perçue jusqu'alors (arrêt B. du 23 mars 2001, B 2/00, consid.
2b).

3.2 Dans son arrêt ATF 127 V 259, déjà cité, le Tribunal fédéral des
assurances a appliqué au domaine de la prévoyance plus étendue le principe
selon lequel la rente d'invalidité a un caractère viager, ce qui implique que
la rente de vieillesse doit être au moins équivalente au montant de la rente
d'invalidité servie jusqu'à l'âge donnant droit à la rente de vieillesse. A
l'appui de cette jurisprudence, il a considéré que le remplacement d'une
rente d'invalidité par une rente de vieillesse d'un montant inférieur
contredit l'idée qui est à la base du système de la prévoyance
professionnelle voulu par le législateur. D'une part, cette solution n'est
pas compatible avec le principe général valable dans le domaine de la
prévoyance professionnelle, selon lequel l'assuré ayant atteint l'âge de la
retraite doit pouvoir maintenir son niveau de vie habituel. D'autre part, si
le montant de la rente de vieillesse est inférieur à celui de la rente
d'invalidité, cela est dû au fait que l'invalidité a empêché le financement
d'une rente de vieillesse équivalant à la rente d'invalidité. En effet,
l'invalide n'a pas été à même, par ses contributions, d'augmenter son avoir
de vieillesse dans la même mesure que les autres assurés qui ont travaillé
jusqu'à l'âge de la retraite.

4.
Dans un arrêt récent, le Tribunal fédéral des assurances est revenu sur cette
jurisprudence et a jugé que dans le domaine de la prévoyance plus étendue,
les institutions de prévoyance sont libres de limiter le droit à une rente
d'invalidité seulement jusqu'à l'âge ouvrant droit à une rente de vieillesse,
respectivement d'allouer des prestations de vieillesse qui sont inférieures
aux rentes d'invalidité accordées avant l'âge de la retraite (ATF 130 V 369).

4.1 Il a considéré, en résumé, que la motivation de l'arrêt ATF 127 V 259
n'était pas convaincante dans la mesure où elle reposait sur le principe
général propre à la prévoyance professionnelle selon lequel l'assuré ayant
atteint l'âge de la retraite doit pouvoir maintenir son niveau de vie
habituel. Le Tribunal ne pouvait faire du principe général posé à l'art. 113
al. 2 let. a Cst. le fondement d'un droit à prestation dans le domaine de la
prévoyance plus étendue. Il s'agit là d'un simple mandat général à
l'intention du législateur et dont on ne saurait tirer une prétention
concrète à une prestation de la prévoyance professionnelle (ATF 130 V 373 s.
consid. 6.1 et les nombreuses références de doctrine).

4.2 Par ailleurs, le Tribunal fédéral des assurances a remis en cause la
motivation de l'arrêt ATF 127 V 259 selon laquelle la réduction du montant de
la prestation résultant de l'allocation de la rente de vieillesse est due à
l'invalidité qui a empêché l'augmentation de l'avoir de vieillesse. En effet,
la plupart des contrats de prévoyance qui prescrivent l'octroi de rentes
temporaires d'invalidité jusqu'à la survenance de l'âge de la retraite
prévoient l'exonération du paiement des cotisations. Durant la période
d'invalidité, soit jusqu'à l'âge de la retraite, les cotisations afférentes à
la prévoyance-vieillesse continuent d'être portées en compte en fonction du
salaire assuré au moment de la survenance de l'invalidité. De cette manière,
la personne invalide dispose d'un avoir de vieillesse équivalant à celui d'un
assuré actif percevant un même gain assuré (ATF 130 V 374 s. consid. 6.2 et
les références).

4.3 Le Tribunal fédéral des assurances a tenu compte également des critiques
de la doctrine (cf. en particulier Jacques-André Schneider, ATF 127 V 259: La
fin du système de la biprimauté des prestations dans la prévoyance
professionnelle?, in: RSAS 2002 p. 214 ss), selon lesquelles la jurisprudence
inaugurée à l'arrêt ATF 127 V 259 va à l'encontre du principe de
l'équivalence dans la mesure où elle impose, sans base légale contractuelle
claire, une charge de prestations nouvelle, sans que celle-ci soit couverte
par des cotisations correspondantes durant les années d'assurance passées
(ATF 130 V 375 consid. 6.3).
4.4 A l'appui d'un changement de jurisprudence, le Tribunal fédéral des
assurances se réfère en outre au principe selon lequel les institutions de
prévoyance sont libres, dans le domaine de la prévoyance plus étendue, en ce
qui concerne l'aménagement des prestations et leur financement dans les
limites fixées à l'art. 49 al. 2 LPP, pour autant qu'elles se conforment aux
exigences constitutionnelles, telles l'égalité de traitement, l'interdiction
de l'arbitraire et la proportionnalité. En vertu de ce principe, il n'est pas
possible d'imposer aux institutions de prévoyance, également dans le domaine
de la prévoyance plus étendue, qu'elles continuent d'allouer la rente
d'invalidité au-delà de l'âge de la retraite, ni qu'elles accordent des
prestations de vieillesse d'un montant équivalant à celui de la rente
d'invalidité servie jusqu'alors (ATF 130 V 376 consid. 6.4, et les références
de doctrine et de jurisprudence).

4.5 On peut d'ailleurs relever qu'à l'occasion de la première révision de la
LPP, l'art. 49 al. 1 LPP a été complété par la phrase suivante: «elles (les
institutions de prévoyance) peuvent prévoir dans le règlement que les
prestations qui dépassent les dispositions légales minimales ne soient
versées que jusqu'à l'âge de la retraite (RO 2004 1686).

5.
En l'occurrence, tant l'art. 13 du règlement de prévoyance de la Fondation
S.________, dans sa version en vigueur depuis le 1er janvier 1990, que l'art.
15 du règlement de la Fondation collective, dans sa version valable dès le
1er janvier 2002, prévoient que le droit à la rente d'invalidité s'éteint
notamment lorsque l'assuré atteint l'âge de la retraite.

Par ailleurs, aux termes de l'art. 19 al. 6 du règlement de la Fondation
S.________, les cotisations de l'assuré invalide cessent d'être dues
proportionnellement au degré d'invalidité dès l'expiration d'un délai
d'attente de trois mois, au plus tard cependant dès l'exigibilité de la rente
de l'assurance-invalidité. En l'espèce, la recourante a été exonérée du
paiement des primes dès le 13 septembre 1994.

Sur le vu de la jurisprudence posée à l'arrêt ATF 130 V 369, la recourante ne
peut dès lors pas prétendre le maintien, après le 31 décembre 2001, de son
droit à une rente d'invalidité de la prévoyance plus étendue ou l'octroi, à
partir de cette date, d'une rente de vieillesse d'un montant équivalant à
celui de la rente d'invalidité servie jusqu'alors. Par ailleurs, l'intéressée
ne soutient pas dans son recours que les prestations de vieillesse allouées
dès le 1er janvier 2002 reposent sur une application erronée des dispositions
réglementaires précitées, de sorte qu'il n'est pas nécessaire d'examiner ce
point.

Le jugement entrepris n'est dès lors pas critiquable et le recours se révèle
mal fondé.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Il n'est pas perçu de frais de justice.

3.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal cantonal des
assurances sociales du canton de Genève et à l'Office fédéral des assurances
sociales.

Lucerne, le 23 novembre 2004

Au nom du Tribunal fédéral des assurances

Le Président de la IIe Chambre:   Le Greffier: