Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Sozialrechtliche Abteilungen B 37/2004
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B 37/04

Arrêt du 26 avril 2005
IIIe Chambre

Mme et MM. les Juges Leuzinger, Présidente, Rüedi et Kernen. Greffier : M.
Beauverd

L.________, 1965, recourant, représenté par Me H. de Riedmatten et Me S.
Riand, avocats, avenue Ritz 33, 1950 Sion 2,

contre

Caisse de prévoyance du personnel de l'Etat du Valais (CPPEV), rue de la
Dent-Blanche 8, 1951 Sion, intimée

Tribunal cantonal des assurances, Sion

(Jugement du 2 avril 2004)

Faits:

A.
A.a L.________, né le 6 décembre 1946, est enseignant au service de l'État du
Valais. A ce titre, il est affilié à la Caisse de prévoyance du personnel de
l'État du Valais (ci-après : la caisse).

Le 12 avril 1986, il a épousé E.________. Le mariage a été dissous par le
divorce le 25 janvier 2000, au terme d'une procédure qui a opposé les époux
devant le Juge du district de X.________ (jugement du 9 octobre 1998), le
Tribunal cantonal valaisan (jugement du 12 octobre 1999) et le Tribunal
fédéral (arrêt du 25 janvier 2000).

En exécution du jugement définitif, la caisse a prélevé le montant de 167'464
fr. de la prestation de sortie de son assuré et versé cette somme à la Caisse
de retraite du personnel enseignant en faveur de E.________.

A.b Le 11 février 2000, la caisse a avisé L.________ que la durée possible de
son sociétariat, de 40 années avant le transfert, était ramenée à 29,75
années, que le taux de rente, de 60 % avant le prélèvement, s'élevait
dorénavant à 44,625 % et que la date d'origine des droits qui remontait au
1er janvier 1969 était portée au 1er avril 1979. Le certificat de prévoyance
au 1er février 2000, que la caisse joignait à ses explications, retenait ces
nouveaux éléments. La caisse considérait que le retrait opéré lors du divorce
équivalait à 10,25 années de cotisations. L'assuré pouvait cependant racheter
les années perdues en versant à la caisse le montant de 167'464 fr. (lettres
des 11 février 2000 et 22 janvier 2002).

Le 11 juin 2002, L.________ a demandé à la caisse de revoir sa position quant
aux effets du transfert de la somme de 167'464 fr. sur sa prévoyance; à cet
égard, il se référait à un avis de droit de l'avocat de Riedmatten portant
sur la conformité du calcul de la caisse avec le droit fédéral, et selon
lequel la réduction de la prestation de sortie lors du divorce ne devait
correspondre dans le cas de L.________ qu'à une perte de 4,44, éventuellement
5 années de cotisations. La caisse a rejeté la demande.

B.
Le 23 août 2002, L.________ a saisi le Tribunal cantonal des assurances du
canton du Valais et conclu à ce qu'il soit ordonné à la caisse de procéder à
la rectification de son état de compte pour les postes date d'origine des
droits, années de cotisations acquises, durée possible de sociétariat et taux
de la rente à l'âge statutaire, en ne prenant en considération qu'une
diminution de 4,44 années en lieu et place de 10,25 années.

Après avoir demandé à l'Office fédéral des assurances sociales (OFAS) de se
prononcer sur la réduction des années de cotisations opérées par la caisse
lors du divorce de l'assuré (demande du 18 décembre 2003; avis du 6 février
2004), la juridiction cantonale a rejeté la demande par jugement du 2 avril
2004.

C.
L.________ interjette recours de droit administratif contre ce jugement, dont
il demande l'annulation, en reprenant les conclusions et les moyens
développés devant les premiers juges.

La caisse conclut au rejet du recours, tandis que l'OFAS se réfère à son avis
donné à la juridiction cantonale.

Considérant en droit:

1.
La contestation relève des autorités juridictionnelles mentionnées à l'art.
73 LPP, tant du point de vue de la compétence ratione temporis que de celui
de la compétence ratione materiae (ATF 130 V 104 consid. 1.1, 112 consid.
3.1.2, 128 II 389 consid. 2.1.1, 128 V 258 consid. 2a, 120 V 18 consid. 1a et
les références). Le recours de droit administratif est recevable de ce chef.

2.
2.1 Le recourant conclut à ce que différents postes de son certificat de
prévoyance soient corrigés, en ce sens que la caisse ne retienne le
prélèvement du montant de 167'464 fr. sur sa prestation de sortie lors du
divorce, en terme d'années de cotisations, que jusqu'à concurrence  de 4,44
années. En fait, le litige porte sur l'étendue des prestations futures de la
caisse au recourant, soit les paramètres qui déterminent la quotité des droit
de celui-ci à l'âge terme.

2.2 En principe, l'objet d'une demande en justice ne peut porter que sur des
questions juridiques actuelles dont les conséquences touchent concrètement le
justiciable. La jurisprudence admet cependant la recevabilité d'une action en
constatation si le demandeur a un intérêt digne de protection à la
constatation immédiate de rapports de droit litigieux et ne peut obtenir en
sa faveur un jugement condamnatoire (ATF 119 V 13 consid. 2a et les
références citées). Un intérêt de fait suffit, pour autant qu'il s'agisse
d'un intérêt actuel et immédiat (ATF 119 V 13 consid. 2a). En matière de
prestations futures, l'existence d'un intérêt digne de protection est admise
lorsque le justiciable serait enclin, en raison de l'ignorance de ses droits
ou obligations, à prendre des dispositions ou au contraire à y renoncer, avec
le risque de subir un préjudice de ce fait (ATF 118 V 102 consid. 1). Le juge
retiendra un intérêt pour agir lorsqu'une incertitude plane sur les relations
juridiques des parties et qu'une constatation judiciaire sur l'existence de
l'objet du rapport pourrait l'éliminer. Une incertitude quelconque ne suffit
cependant pas. Il faut bien plutôt qu'en se prolongeant, elle empêche le
demandeur de prendre ses décisions et qu'elle lui soit, de ce fait,
insupportable (ATF 122 III 282 consid. 3a, 120 II 22 consid. 3).

2.3 En l'espèce, la juridiction cantonale a implicitement considéré que le
recourant avait un intérêt digne de protection à la constatation du montant
de la rente à laquelle il aura droit au moment où il aura atteint l'âge de la
retraite, soit des différents paramètres qui entrent dans le calcul de cette
prestation. Ce point de vue doit être partagé.

Le recourant pourra prétendre une rente de vieillesse statutaire dès le 1er
janvier 2009. Alors âgé de 58 ans, il avait un intérêt suffisant pour être
fixé sur l'étendue de ses droits en matière de prévoyance professionnelle
dans un avenir relativement proche au regard des dispositions qu'il pouvait
être amené à prendre, notamment le rachat des années de cotisations perdues
après la réduction de sa prestation de sortie lors du divorce, selon que ses
conclusions seraient ou non admises par le tribunal.

3.
Le jugement entrepris n'a pas pour objet l'octroi ou le refus de prestations
d'assurance au sens de l'art. 132 OJ, ce par quoi il faut entendre des
prestations dont on examine la légitimité lors de la survenance de
l'éventualité assurée (ATF 118 V 102 consid. 2, 116 V 333 consid. 2a et les
références).

Le Tribunal fédéral des assurances doit dès lors se borner à examiner si les
premiers juges ont violé le droit fédéral, y compris par l'excès ou par
l'abus de leur pouvoir d'appréciation, ou si les faits pertinents ont été
constatés d'une manière manifestement inexacte ou incomplète, ou s'ils ont
été établis au mépris de règles essentielles de procédure (art. 132 en
corrélation avec les art. 104 let. a et b et 105 al. 2 OJ).

4.
Selon les premiers juges, le litige doit être tranché à la lumière des
statuts de la caisse entrés en vigueur le 1er janvier 2000. Au regard des
dispositions statutaires prévues en cas de divorce, le prélèvement au 25
janvier 2000 de 167'464 fr. de la prestation de sortie de L.________
correspond, dans le cas de cet assuré, en terme d'années de cotisations à
10,25 années. Pour déterminer ce nombre d'années, il s'agit en effet
d'appliquer le taux de réduction de la prestation de sortie lors du divorce,
soit 32,963 %, au nombre d'années de cotisations acquises par l'assuré à ce
moment-là, en l'espèce 31,066 années (31,066 x 32,963 % = 10,25). Le taux de
réduction de 32,963 %, quant à lui, est déterminé par le rapport entre le
montant de la prestation de sortie avant le divorce, de 508'032 fr. 50, et
après celui-ci, de 340'568 fr. 50 (167'464 [= 508'032,50 - 340'568,50] :
508'032,50 x 100 = 32,963).

Pour le recourant, selon les dispositions de la caisse, il s'agit uniquement
d'appliquer le taux de réduction de la prestation de sortie consécutif au
divorce au nombre d'années de cotisations écoulées entre la date du mariage
et le divorce.

5.
L'intimée, fondation au sens de l'art. 89bis CC, est une institution de
prévoyance de droit public, dont les statuts ont été ratifiés par le Conseil
d'État du canton du Valais. Il s'agit donc de dispositions de droit public
pour lesquelles sont applicables les principes d'interprétation des textes
légaux (par ex. SVR 1997 BVG n° 79 p. 245 consid. 3c). Le Tribunal fédéral
des assurances en examine librement l'application (ATF 118 V 163 consid. 2,
116 V 334 consid. 2b).

La loi s'interprète tout d'abord selon sa lettre. Il n'y a lieu de déroger au
sens littéral d'un texte clair par voie d'interprétation que lorsque des
raisons objectives permettent de penser que ce texte ne restitue pas le sens
véritable de la disposition en cause. De tels motifs peuvent découler des
travaux préparatoires, du but et du sens de la disposition, ainsi que de la
systématique de la loi. Si le texte n'est pas absolument clair, si plusieurs
interprétations de celui-ci sont possibles, il convient de rechercher quelle
est la véritable portée de la norme, en la dégageant de tous les éléments à
considérer (ATF 130 II 71 consid. 4.2, 130 V 50 consid. 3.2.1, 232 consid.
2.2 et les références).

5.1 Du point de vue temporel, la réduction de la prestation de sortie  du
recourant est intervenue le 25 janvier 2000 avec l'arrêt du Tribunal fédéral
du même jour confirmant le jugement de divorce cantonal. L'avenant 1 des
statuts de la caisse, entré en vigueur le 13 septembre 2000, n'est dès lors
pas applicable au litige, ainsi que l'ont retenu les premiers juges. Au
demeurant, les modifications apportées par ce texte, qui adapte les statuts
aux dispositions en matière de prévoyance professionnelle liées au nouveau
droit du divorce en vigueur depuis le 1er janvier 2000, n'ont pas d'incidence
sur le contentieux ici en cause.

5.2 Selon les dispositions de la caisse en vigueur dès le 1er janvier 2000,
lorsqu'un cas de divorce entraîne l'application de l'article 53 alinéa 1
(transfert d'une partie de la prestation de libre passage acquise pendant la
durée du mariage de l'assuré à l'institution de prévoyance de son conjoint ou
affectation de celle-ci au maintien de la prévoyance de ce dernier), il
s'ensuit une perte d'années d'assurance. Le nombre d'années d'assurance
perdues, les incidences de cette perte et la possibilité de leur rachat,
total ou partiel, sont fixés à l'article 53 alinéa 2 (art. 25).

Si le juge fait application de l'art. 53 al. 1, le nombre d'années
d'assurance révolues lors du divorce est réduit dans la proportion entre le
montant attribué au conjoint et le montant de la prestation de libre passage
calculé lors du divorce conformément aux articles 57 et 58. Les années
d'assurance ainsi perdues peuvent être rachetées, en tout ou partie, en
application par analogie de l'article 24 alinéa 6, l'assuré devant se
déterminer dans les 60 jours suivant la communication du jugement de divorce
(art. 53 al. 2).

5.3 Quoi qu'en dise le recourant, on ne voit pas que le "nombre d'années
d'assurance révolues lors du divorce" ne puisse concerner que les seules
années d'assurance écoulées entre le mariage et le divorce; une précision en
ce sens dans le texte même de la disposition qui permettrait une telle
analyse, fait défaut. En outre, l'examen de l'art. 53 al. 2 au regard des
autres dispositions statutaires (art. 23, 57 et 67) ne permet pas de retenir
une interprétation de la notion d'années d'assurance révolues lors du
divorce, autre que celle retenue par les premiers juges, à l'analyse desquels
il n'y a rien à ajouter (art. 36a al. 3 OJ).

5.4 Selon le recourant, les années d'assurance révolues lors du divorce ne
peuvent concerner que celles qui se sont écoulées pendant le mariage car,
selon la loi, seule la prévoyance acquise par les conjoints pendant la durée
du mariage est partagée en cas de divorce.

C'est en vain que le recourant se prévaut des articles 22 ss LFLP en vigueur
dès le 1er janvier 2000. En effet, le divorce de l'assuré a été prononcé
selon l'ancien droit, car le jugement cantonal déclarant le mariage dissous
par le divorce porté devant le Tribunal fédéral a été rendu avant l'entrée en
vigueur de la loi fédérale du 26 juin 1998 modifiant le droit du divorce et
les articles 22 ss LFLP (art. 7b al. 3 tit. fin. CC).

Au demeurant, ces dispositions (art. 22 et 22a LFLP) ne règlent que le
partage de la prévoyance acquise par les conjoints pendant la durée du
mariage et le calcul de celle-ci, selon que l'union a eu lieu avant ou après
le 1er janvier 1995. Elles ne concernent pas les effets du partage sur la
prévoyance résiduelle des ex-conjoints au sein de leur institution de
prévoyance respective, car ces effets dépendent de la forme et du plan de
prévoyance de l'institution.

En l'espèce, le plan de prestations appliqués par la caisse est un plan "dit
en primauté de prestations" (art. 1 al. 4 des statuts), dans le cadre duquel
les années d'assurance en terme de prévoyance prennent de plus en plus de
poids au fil des ans, ainsi que l'ont précisé tant les premiers juges que la
caisse et l'office interpellé et aux considérations desquels on peut renvoyer
s'agissant des questions actuarielles. Dans ce cadre et au regard du pouvoir
d'examen de l'Autorité de céans, on ne voit pas que l'art. 53 al. 2 des
statuts de la caisse viole le droit fédéral, dans la mesure où, en
définitive, le recourant peut retrouver le nombre d'années d'assurance
révolues qu'il avait accumulées dans la caisse avant le divorce, en versant à
la caisse le montant dont sa prestation de sortie a été réduite lors de cet
événement.

6.
Le recourant reproche enfin à la juridiction cantonale d'avoir refusé
d'entendre différents témoins et d'avoir demandé à l'OFAS de se prononcer sur
le litige qui lui était soumis. Sous l'angle de l'appréciation anticipée des
preuves, de la procédure suivie par les premiers juges - qui ont communiqué
au recourant la demande à l'office et l'ont invité à se prononcer sur sa
réponse - et la compétence dudit office (art. 11 al. 3 de l'ordonnance du 28
juin 2000 sur l'organisation du Département fédéral de l'intérieur [Org DFI],
RS 172.212.1; art 4 et 4a OPP1), aucun reproche ne peut être fait à la
juridiction cantonale.

7.
Vu la nature du litige, la procédure n'est pas gratuite (art 134 OJ a
contrario). Le recourant qui succombe doit prendre en charge les frais de
justice. En outre, il n'est pas alloué de dépens (art. 159 al. 2 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Les frais de justice, d'un montant de 500 fr., sont mis à la charge du
recourant et sont compensés avec l'avance de frais qu'il a effectuée.

3.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal cantonal des
assurances du canton du Valais et à l'Office fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 26 avril 2005
Au nom du Tribunal fédéral des assurances

La Présidente de la IIIe Chambre:   Le Greffier: