Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
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Schuldbetreibungs- und Konkurskammer 7B.209/2004
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7B.209/2004 /frs

Arrêt du 30 novembre 2004
Chambre des poursuites et des faillites

Mmes et M. les Juges Escher, Présidente, Meyer et Hohl.
Greffier: M. Fellay.

A. ________  et B.X.________,
recourants, représentés par Me Urs Saal, avocat,

contre

Cour des poursuites et faillites du Tribunal cantonal du canton de Vaud, en
qualité d'autorité supérieure de surveillance, route du Signal 8, 1014
Lausanne.

sursis concordataire et faillite; demande de restitution de rentes AI et
d'allocations familiales,

recours LP contre l'arrêt de la Cour des poursuites et faillites du Tribunal
cantonal du canton de Vaud, en qualité d'autorité supérieure de surveillance,
du 7 octobre 2004.

La Chambre considère en fait et en droit:

1.
En raison du surendettement de son exploitation agricole, A.X.________ a été
mis au bénéfice d'un sursis concordataire de mai 1997 jusqu'au 23 février
1999, date à laquelle sa faillite a été prononcée. Durant la procédure de
sursis concordataire et de faillite, il a continué l'exploitation de son
domaine sous la surveillance du préposé de l'Office des poursuites et
failites d'Yverdon.

En mai 2001, le failli a requis le remboursement de rentes d'invalidité (AI)
et d'allocations familiales, prétendument comptabilisées dans les revenus de
son exploitation jusqu'au 31 mars 2000 à la demande du préposé, sans que
celui-ci l'ait informé du caractère insaisissable de ces prestations. Le
remboursement ayant été refusé, le failli et son épouse B.X.________ ont
déposé plainte auprès du Président du Tribunal d'arrondissement de la Broye
et du Nord vaudois, autorité cantonale inférieure de surveillance. Par
prononcé du 7 novembre 2001, cette autorité a rejeté la plainte, en bref pour
les motifs suivants: le failli avait accepté de son plein gré que sa rente AI
et les allocations familiales soient comptabilisées dans les comptes de
l'exploitation dans le but de démontrer que le domaine était rentable; il
avait disposé librement de ses revenus, rente AI et allocations familiales
comprises, et aucun créancier n'en avait bénéficié.

Statuant le 21 janvier 2003 sur recours du failli et de son épouse, la Cour
des poursuites et faillites du Tribunal cantonal vaudois a qualifié
d'insuffisante l'instruction effectuée en première instance, du fait
notamment qu'elle ne permettait pas de trancher entre les deux versions
contradictoires relatives à l'affectation des rentes et allocations
litigieuses à l'exploitation du failli. Elle a toutefois renoncé à résoudre
la question et à annuler le prononcé attaqué, cela parce que, à son avis, les
conclusions des plaignants tendaient à faire reconnaître qu'ils étaient
titulaires d'une créance contre la masse et que, selon la jurisprudence (ATF
125 III 293; 113 III 148), un tel litige devait être tranché par le juge, non
par les autorités de surveillance. C'est donc pour ce motif que la cour
cantonale a maintenu le prononcé de l'autorité inférieure de surveillance.

2.
Le failli et son épouse ont contesté avec raison ce point de vue devant le
Tribunal fédéral. Par arrêt du 31 mars 2003 (7B.29/2003), celui-ci a en effet
jugé que, contrairement à ce qu'avait retenu la cour cantonale, la voie de la
plainte était bel et bien ouverte pour traiter des conclusions des
recourants, lesquelles portaient simplement sur la délimitation ou
composition de la masse active: il s'agissait de savoir si des revenus du
failli rentraient ou non dans la masse active pour être affectés au
désintéressement des créanciers. Le Tribunal fédéral a donc annulé la
décision de la cour cantonale et renvoyé la cause à cette dernière pour
complément d'instruction et nouvelle décision.

La cour cantonale a renvoyé à son tour la cause à l'autorité cantonale
inférieure de surveillance. Celle-ci, par prononcé du 19 mai 2004 rendu au
terme d'une instruction complète et détaillée, a rejeté la plainte du failli
et de son épouse en considérant que les rentes AI et les allocations
familiales litigieuses avaient été affectées aux besoins de la famille du
failli, conformément à leur destination, et n'avaient pas été comptabilisées
en faveur de la masse. Sur recours du failli et de son épouse, la cour
cantonale a confirmé ce nouveau prononcé de l'autorité inférieure par arrêt
du 7 octobre 2004, notifié le 11 du même mois.

3.
Par acte du 21 octobre 2004, le failli et son épouse ont derechef recouru au
Tribunal fédéral. Ils soulèvent deux griefs de nature formelle, l'un
concernant l'examen des faits et le second, le devoir de célérité; quant au
fond, ils invoquent les griefs d'abus et d'excès du pouvoir d'appréciation,
ainsi que de violation de l'art. 224 LP, disposition qui prescrit à l'office
de laisser à la disposition du failli les biens énumérés à l'art. 92 LP.

3.1 Par leur premier grief de nature formelle, les recourants reprochent à la
cour cantonale de s'être bornée à faire siennes les explications de
l'autorité inférieure, alors que la Chambre de céans lui avait renvoyé la
cause pour nouvelle instruction.

La cour cantonale a renvoyé la cause à l'autorité inférieure afin de garantir
la double instance (arrêt attaqué, p. 7 dernier paragraphe). Elle l'a invitée
à rechercher notamment quelle avait été l'affectation des rentes et
allocations litigieuses pendant la période considérée, de façon à pouvoir
déterminer si ces prestations devaient ou non rentrer dans la masse active et
être affectées au désintéressement des créanciers. Une telle façon de
procéder, à savoir le renvoi de la cause par l'autorité cantonale supérieure
de surveillance à l'autorité cantonale inférieure de surveillance pour que
cette dernière statue à nouveau, n'est pas contraire au droit fédéral (cf.
P.-R. Gilliéron, Commentaire de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes
et la faillite, n. 13 ad art. 21 LP, p. 370). Quant à l'examen des faits de
la cause, une simple lecture de l'arrêt attaqué (consid. II, p. 9 ss) permet
de constater que la cour cantonale ne s'est pas bornée à reprendre purement
et simplement les explications de l'autorité inférieure, mais qu'elle s'est
déterminée à leur propos de manière critique et circonstanciée, exposant dans
le détail les motifs qui l'ont convaincue de se rallier à l'opinion de
l'autorité inférieure.

3.2 Le retard injustifié au sens de l'art. 19 LP se définit comme le défaut
d'accomplissement, dans le délai légal ou dans un délai approprié aux
circonstances, d'un acte valablement requis ou devant être exécuté d'office
(Sandoz-Monod, Commentaire de la loi fédérale d'organisation judiciaire, vol.
II, Berne 1990, p. 808, n. 1.2 et les références). Les autorités cantonales
ayant formellement statué sur les conclusions des recourants, le grief de
déni de justice formel soulevé par ceux-ci est dépourvu d'objet (cf.
Gilliéron, op. cit., n. 108 ad art. 19 LP et la jurisprudence citée). Au
demeurant, les décisions cantonales ont été prises dans un délai raisonnable,
compte tenu de la nécessité du renvoi de la cause en première instance, suite
à l'arrêt du Tribunal fédéral du 31 mars 2003, aux fins d'établir un état de
fait complet permettant de statuer sur les prétentions des recourants tant
pour la période du sursis concordataire que pour celle postérieure à
l'ouverture de la faillite.

3.3 Sur le fond, les recourants se livrent pour l'essentiel à une discussion
et à une contestation des faits retenus dans l'arrêt attaqué, ce qui est
inadmissible au regard de l'art. 63 al. 2 OJ, applicable par renvoi de l'art.
81 OJ, la Chambre de céans étant liée, sous réserve d'exceptions non
réalisées en l'espèce, par les constatations de fait de la cour cantonale.

C'est manifestement à tort, en tout cas, que les recourants font état d'un
consensus entre les autorités cantonales de surveillance, avant l'arrêt du
Tribunal fédéral du 31 mars 2003, sur la question de l'affectation des rentes
et allocations litigieuses à l'exploitation du failli, consensus qui aurait
été entièrement renversé après la décision de renvoi du Tribunal fédéral.
Dans son arrêt du 21 janvier 2003, objet de l'arrêt fédéral précité, la cour
cantonale avait en effet formellement relevé que l'instruction effectuée en
première instance avait été insuffisante et qu'elle n'avait notamment pas
permis de trancher entre les deux versions des faits contradictoires
relatives à l'affectation desdites rentes et allocations à l'exploitation du
failli. C'est dire qu'il n'y avait pas consensus sur la question. Au
demeurant, seul est déterminant, en vertu des art. 63 al. 2 et 81 OJ, l'état
de fait à la base de l'arrêt cantonal présentement attaqué. Or, selon cet
état de fait, les rentes d'invalidité et les allocations familiales
litigieuses ont été affectées aux besoins de la famille du failli,
conformément à leur destination, et n'ont pas été indûment saisies ou
comptabilisées en faveur de la masse.

En soutenant que, pour aboutir à une telle conclusion, la cour cantonale a
"extrapolé les chiffres", les recourants ne soulèvent pas, comme ils le
prétendent, le grief d'abus du pouvoir d'appréciation, qui présuppose la
prise en considération de critères inappropriés ou de circonstances non
pertinentes (ATF 110 III 17 consid. 2 p. 18 et arrêts cités), mais celui de
mauvaise appréciation des pièces disponibles. Or, sous réserve du principe de
la libre appréciation posé à l'art. 20a al. 2 ch. 3 LP et qui n'est pas en
jeu ici, l'appréciation des preuves ne relève pas de l'application du droit
fédéral, seule susceptible de faire l'objet du recours prévu à l'art. 19 LP,
mais du droit cantonal de procédure (art. 20a al. 3 LP; ATF 105 III 107
consid. 5b p. 116), dont la violation ne peut être alléguée que dans un
recours de droit public fondé sur l'art. 9 Cst. (ATF 120 III 114 consid. 3a;
110 III 115 consid. 2 p. 117).

Une conversion du présent recours en un recours de droit public est exclue,
dès lors que la voie de droit a été choisie consciemment par un homme de loi
(ATF 120 II 270 consid. 2 p. 272 et les références).

3.4 Dès lors qu'il est établi, de façon à lier le Tribunal fédéral (art. 63
al. 2 et 81 OJ), que les rentes et allocations litigieuses ont été affectées
aux besoins de la famille du failli et qu'elles n'ont pas été saisies ou
comptabilisées en faveur de la masse, le grief de violation de l'art. 224 LP
tombe manifestement à faux. Par ailleurs, les recourants n'indiquent pas,
d'une façon conforme à l'art. 79 al. 1 OJ, en quoi la cour cantonale aurait,
sur ce point, commis un abus ou un excès de son pouvoir d'appréciation; ils
se contentent en fait d'opposer leur point de vue à celui de l'autorité
cantonale, ce qui est insuffisant.

4.
Il résulte de ce qui précède que le recours doit être rejeté dans la mesure
de sa recevabilité.

Par ces motifs, la Chambre prononce:

1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire des recourants, à
Y.________ SA, Z.________, à l'Office des poursuites et faillites
d'Yverdon-Orbe et à la Cour des poursuites et faillites du Tribunal cantonal
du canton de Vaud.

Lausanne, le 30 novembre 2004

Au nom de la Chambre des poursuites et des faillites
du Tribunal fédéral suisse

La présidente:  Le greffier: