Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Kassationshof in Strafsachen 6A.71/2004
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6A.71/2004 /rod

Arrêt du 29 novembre 2004
Cour de cassation pénale

MM. les Juges Schneider, Président,
Wiprächtiger et Kolly.
Greffière: Mme Kistler.

X. ________,
recourant,

contre

Commission de libération du canton de Vaud,
p.a. Service pénitentiaire, rue Cité-Devant 14, 1014 Lausanne,
Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de cassation pénale, rte du Signal
8, 1014 Lausanne.

Refus de la libération conditionnelle (art. 38 ch. 1 CP),

recours de droit administratif contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton
de Vaud, Cour de cassation pénale, du 20 octobre 2004.

Faits:

A.
Par jugement du 23 décembre 2003 du Tribunal correctionnel de
l'arrondissement de Lausanne, confirmé par arrêt du 14 avril 2004 de la Cour
de cassation pénale du Tribunal cantonal vaudois, X.________, né le 15
février 1959, ressortissant du Sénégal, a été reconnu coupable d'extorsion
qualifiée, d'infraction grave et de contravention à la loi fédérale sur les
stupéfiants et d'infraction à la loi fédérale sur le séjour et
l'établissement des étrangers. Il a été condamné, pour ces infractions, à la
peine de deux ans et demi d'emprisonnement, sous déduction de 418 jours de
détention préventive, et frappé d'une mesure d'expulsion du territoire suisse
pour une durée de sept ans.

X. ________ est détenu depuis le 2 novembre 2002. Le terme de sa peine échoit
le 1er mai 2005. Les deux tiers de celle-ci ont été atteints le 1er juillet
2004.

B.
Par décision du 26 août 2004, la Commission de libération du Département de
la sécurité et de l'environnement du canton de Vaud (ci-après: la Commission
de libération) a refusé la libération conditionnelle à X.________.

C.
Par arrêt du 20 octobre 2004, la Cour de cassation pénale du Tribunal
cantonal vaudois a rejeté le recours de X.________ et confirmé la décision de
refus de libération conditionnelle.

L'autorité cantonale note que tant le Service pénitentiaire que le membre
visiteur de la Commission de libération ont émis un préavis défavorable à
l'élargissement de X.________. Dans un rapport établi le 1er juillet 2004, la
direction de la prison de l'établissement pénitentiaire où X.________
exécutait sa peine relève que le comportement de ce dernier a été moyennement
bon; X.________ a certes effectué les tâches qui lui étaient confiées, mais
sans trop de motivation et a en outre fait l'objet d'une sanction
disciplinaire de trois jours de cellule forte pour insultes, menaces et
mauvais comportement envers le personnel.

Pour l'autorité cantonale, X.________ n'a opéré aucune véritable prise de
conscience et ses projets de vie n'apparaissent ni suffisants, ni crédibles.
Dans ces circonstances et eu égard au fait que X.________ était un toxicomane
de longue date condamné notamment pour infraction grave à la loi fédérale sur
les stupéfiants, l'autorité cantonale a considéré que le risque de récidive
était supérieur à celui qui est admissible dans des cas de cette nature et
qu'une libération conditionnelle ne pouvait être accordée.

D.
X.________ forme un recours de droit administratif contre cet arrêt. Il
conclut à l'annulation de l'arrêt attaqué et au renvoi de la cause à
l'autorité cantonale pour qu'elle ordonne sa libération avec effet immédiat.
En outre, il sollicite l'assistance judiciaire.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
1.1 S'agissant d'une décision en matière d'exécution de la peine que le Code
pénal ne réserve pas au juge (art. 38 ch. 1 al. 1 CP), la décision attaquée
est susceptible d'un recours de droit administratif au Tribunal fédéral (art.
97 al. 1, 98 let. g OJ et 5 PA; ATF 124 I 231 consid. 1 a/aa p. 233).

1.2 Le recours de droit administratif au Tribunal fédéral peut être formé
pour violation du droit fédéral, y compris l'excès ou l'abus du pouvoir
d'appréciation (art. 104 let. a OJ). Le Tribunal fédéral n'est pas lié par
les motifs invoqués, mais il ne peut aller au-delà des conclusions des
parties (art. 114 al. 1 OJ). En revanche, lorsque le recours est, comme en
l'espèce, dirigé contre la décision d'une autorité judiciaire, le Tribunal
fédéral est lié par les faits constatés dans l'arrêt attaqué, sauf s'ils sont
manifestement inexacts ou incomplets ou s'ils ont été établis au mépris de
règles essentielles de la procédure (art. 105 al. 2 OJ). Cette disposition
interdit donc d'alléguer de nouvelles constatations de fait et d'invoquer de
nouveaux moyens de preuve (ATF 125 II 217 consid. 3a p. 221).

2.
2.1 Conformément à l'art. 38 ch. 1 al. 1 CP, lorsqu'un condamné à la réclusion
ou à l'emprisonnement aura subi les deux tiers de sa peine, mais au moins
trois mois en cas de condamnation à l'emprisonnement, l'autorité compétente
pourra le libérer conditionnellement si son comportement pendant l'exécution
de la peine ne s'oppose pas à son élargissement et s'il est à prévoir qu'il
se conduira bien en liberté.

Il n'est pas contesté que le recourant a subi les deux tiers de sa peine
privative de liberté depuis le 1er juillet 2004. Il convient donc de décider
s'il a eu, pendant l'exécution de la peine, un comportement qui ne s'oppose
pas à son élargissement et s'il peut faire l'objet d'un pronostic favorable
pour sa vie future en liberté.

2.2 La libération conditionnelle n'est ni un droit ni une faveur, mais la
quatrième phase de l'exécution de la peine. Comme telle, elle constitue la
règle dont l'autorité ne peut s'écarter que si de bonnes raisons font penser
qu'elle sera inefficace; elle ne peut en conséquence être refusée que par une
décision motivée, les exigences en matière de fixation de la peine
s'appliquant par analogie (ATF 125 IV 113 consid. 2a p. 115).

Le pronostic sur le comportement futur du condamné procède d'une appréciation
globale prenant en considération les antécédents de l'auteur, sa personnalité
ainsi que son comportement en général, d'une part, et dans le cadre de la
commission des délits qui sont à l'origine de sa condamnation, d'autre part
(ATF 125 IV 113 consid. 2a p. 115). Il suffit que le comportement du détenu
pendant sa détention ne s'oppose pas à son élargissement. On peut même se
demander si le comportement pendant l'exécution constitue vraiment un critère
de décision indépendant ou s'il n'est pas, selon les circonstances, un simple
élément supplémentaire d'appréciation pour établir le pronostic (ATF 119 IV 5
consid. 1a p. 7). Outre les antécédents, il faut également tenir compte de
l'amendement de l'auteur ainsi que des conditions dans lesquelles il est à
prévoir qu'il vivra (ATF 119 IV 5 consid. 1b p. 8; 104 IV 281 consid. 2 p.
282). C'est ainsi que l'absence de tout projet professionnel constituera un
élément défavorable, car le risque de récidive est alors augmenté.

Par sa nature même, le pronostic ne saurait être tout à fait sûr; force est
de se contenter d'une certaine probabilité; un risque de récidive est
inhérent à toute libération, conditionnelle ou définitive (ATF 119 IV 5
consid. 1b p. 7). Pour déterminer si l'on peut courir le risque de récidive,
il faut non seulement prendre en considération le degré de probabilité qu'une
nouvelle infraction soit commise mais également l'importance du bien qui
serait alors menacé. Ainsi, le risque de récidive que l'on peut admettre est
moindre si l'auteur s'en est pris à la vie ou à l'intégrité corporelle de ses
victimes que s'il a commis par exemple des infractions contre le patrimoine
(ATF 125 IV 113 consid. 2a p. 116; ATF 124 IV 193 consid. 3 p. 195).

2.3 Prévoir si le condamné se conduira bien en liberté est une question
d'appréciation. Aussi le Tribunal fédéral ne peut intervenir qu'en cas
d'excès ou d'abus du pouvoir appréciateur (art. 104 let. a OJ), par exemple
si la décision entreprise repose sur des considérations étrangères au but de
l'institution. L'autorité qui n'accepte de libérer un détenu que si elle est
convaincue qu'il se conduira bien en liberté exige trop et outrepasse son
pouvoir d'appréciation. Il suffit de pouvoir raisonnablement conjecturer que,
compte tenu des circonstances et des règles de conduite qui lui seront
imposées, le libéré se conduira bien (ATF 98 Ib 106 consid 1 p. 107).

3.
En l'espèce, le recourant fait valoir qu'il a désormais fait venir son
passeport en Suisse et qu'il désire retourner au Sénégal pour retrouver sa
femme et ses trois enfants ainsi que toute sa famille. Désirant réellement
sortir de la toxicomanie et ne consommant du reste plus de produits
stupéfiants depuis son incarcération, il souhaite trouver du travail, sa
famille habitant dans la banlieue de Dakar.

3.1 Pour l'autorité cantonale, le recourant n'a opéré aucune véritable prise
de conscience. Elle se fonde à cet égard sur les déclarations contradictoires
du recourant et sur les observations du membre visiteur de la Commission de
libération, selon lequel le recourant s'exprime peu au sujet de ses délits et
a beaucoup de peine à exprimer des regrets. Il s'agit de constatations de
fait, qui lient la cour de céans. Dans la mesure où le recourant soutient
qu'il était intimidé lors de l'entretien du fait que sa liberté était en jeu
et sous-entend donc que les observations du membre visiteur sont erronées, il
s'en prend à l'établissement des faits, ce qu'il n'est pas habilité à faire
dans le cadre du présent recours; son grief est en conséquence irrecevable.
D'après l'autorité cantonale, les projets de vie du recourant ne sont en
outre pas crédibles dans la mesure où celui-ci affirme tout à la fois
envisager retourner auprès de sa famille au Sénégal et ne pas vouloir
retourner dans son pays d'origine s'il devait aller jusqu'au bout de sa
peine. Certes, le recourant a actuellement fait les démarches nécessaires
pour obtenir un nouveau passeport et son refoulement au Sénégal ne devrait
plus poser de problème. Le seul retour dans son pays d'origine ne constitue
cependant pas encore en soi un projet de vie suffisant. Le recourant ne donne
en effet aucune indication sur ses projets professionnels. S'il est vrai que
l'on peut difficilement exiger d'une personne que la détention a coupé du
monde professionnel qu'elle donne des assurances quant à son activité à sa
sortie de prison, surtout encore dans un pays étranger, on peut néanmoins
attendre d'elle qu'elle fournisse quelques indications sur la manière dont
elle envisage sa réinsertion sur ce plan (cf. arrêt du 21 mars 2003 du
Tribunal fédéral, 6A.95/2002, consid. 2.2). Le recourant affirme en outre
qu'il retrouvera au Sénégal sa femme, ses trois enfants ainsi que toute sa
famille. Il est toutefois difficile de croire le recourant, dès lors qu'il a
indiqué dans un premier temps à l'autorité de jugement qu'il était marié sans
enfant. Au vu de l'ensemble de ces considérations, force est d'admettre avec
l'autorité cantonale que les projets de vie du recourant au Sénégal sont
totalement insuffisants.

L'autorité cantonale a pris également en compte le comportement du recourant
en détention, relevant que celui-ci avait effectué ses tâches en détention
sans trop de motivation et qu'il avait fait en outre l'objet d'une sanction
disciplinaire pour insultes, menaces et mauvais comportement envers le
personnel. Bien que ce comportement ne s'oppose pas à l'élargissement
anticipée du recourant, il constitue un élément négatif dans l'établissement
du pronostic. Le recourant soutient enfin qu'il ne consomme pas de produits
stupéfiants depuis qu'il est incarcéré. Ce faisant, il s'écarte de l'état de
fait cantonal, de sorte que cet élément - qui ne semble pas au demeurant
déterminant - ne saurait être pris en considération dans l'établissement du
pronostic; l'argumentation du recourant est, sur ce point, irrecevable.

3.2 Au vu de l'ensemble de ces circonstances et eu égard à la gravité des
actes commis par le recourant, qui a été condamné notamment pour infraction
grave à la loi fédérale sur les stupéfiants, il y a lieu d'admettre que
l'autorité cantonale n'a pas abusé de son pouvoir d'appréciation en
considérant qu'il subsistait un risque de récidive important et concret et
qu'une libération conditionnelle n'était en conséquence pas envisageable. Le
recours doit dès lors être rejeté.

4.
Vu l'issue de la procédure, les frais de la cause doivent être mis à la
charge du recourant qui succombe (art. 156 al. 1 OJ). Comme le recours était
d'emblée dépourvu de chance de succès, l'assistance judiciaire doit être
refusée (art. 152 al. 1 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
La requête d'assistance judiciaire est rejetée.

3.
Un émolument judiciaire de 800 francs est mis à la charge du recourant.

4.
Le présent arrêt est communiqué en copie au recourant, à la Commission de
libération du canton de Vaud et au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour
de cassation pénale, ainsi qu'au Département fédéral de justice et police.

Lausanne, le 29 novembre 2004

Au nom de la Cour de cassation pénale
du Tribunal fédéral suisse

Le président:  La greffière: