Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

II. Zivilabteilung 5P.382/2004
Zurück zum Index II. Zivilabteilung 2004
Retour à l'indice II. Zivilabteilung 2004


5P.382/2004/frs

Arrêt du 15 décembre 2004
IIe Cour civile

M. et Mmes les Juges Raselli, Président, Escher et Hohl.
Greffière: Mme Michellod Bonard.

X. ________ Assurances,
recourante, représentée par Me Bernard Ziegler, avocat,

contre

Y.________,
intimée,
Tribunal cantonal des assurances sociales, 1ère Chambre, case postale 1955,
1211 Genève 1.

Art. 9 Cst. (compétence à raison de la matière, contrat d'assurance perte de
gain en cas de maladie),

recours de droit public contre l'arrêt du Tribunal cantonal des assurances
sociales du canton de Genève du 24 août 2004.

Faits:

A.
Y. ________ a travaillé comme employée de cafétéria auprès de la société
Z.________ à Genève. A ce titre, elle était assurée par son employeur en
matière d'indemnités journalières en cas de maladie auprès de X.________
Assurances, dans le cadre d'une assurance-maladie collective conclue selon le
droit privé.

Y. ________ a été incapable de travailler dès le 14 décembre 2001. Après
avoir versé durant un certain temps des indemnité journalières, X.________ a
interrompu ses versements dès le 1er janvier 2003.

Le 27 août 2003, Y.________ a déposé une demande en paiement contre
X.________ devant le Tribunal cantonal des assurances sociales du canton de
Genève. Arguant de l'incompétence de ce tribunal à raison de la matière, la
défenderesse a conclu à l'irrecevabilité de la demande.

Par arrêt du 24 août 2004, le Tribunal cantonal des assurances sociales s'est
déclaré compétent, a jugé la demande recevable et a réservé le fond de la
cause.

B.
X.________ interjette un recours de droit public. Invoquant un déni de
justice formel ainsi que la violation des art. 9 et 30 Cst. en relation avec
le droit cantonal d'organisation judiciaire, elle conclut à l'annulation de
la décision entreprise.

L'intimée n'a pas été invitée à déposer d'observations.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Le recours de droit public au Tribunal fédéral est ouvert contre une décision
cantonale pour violation des droits constitutionnels des citoyens (art. 84
al. 1 let. a OJ). Toutefois, il n'est recevable que si la prétendue violation
ne peut pas être soumise par un autre moyen de droit quelconque au Tribunal
fédéral ou à une autre autorité fédérale (art. 84 al. 2 OJ).
En l'espèce, le Tribunal cantonal a admis sa compétence à raison de la
matière sur la base du droit cantonal d'organisation judiciaire. En effet,
dans le domaine de l'assurance-maladie, le droit fédéral n'impose pas aux
cantons d'attribuer les contentieux relevant respectivement du droit public
et du droit privé à des juridictions distinctes; les cantons restent libres
dans la désignation de cette autorité (ATF 125 III 461 consid. 2 p. 463). Le
recours en réforme n'est donc pas ouvert contre la décision entreprise et le
recours de droit public est sous cet angle recevable.

2.
Selon l'art. 86 al. 1 OJ, le recours de droit public n'est recevable qu'à
l'encontre des décisions prises en dernière instance cantonale. Cela signifie
que les griefs soulevés devant le Tribunal fédéral ne doivent plus pouvoir
faire l'objet d'un recours ordinaire ou extraordinaire de droit cantonal (ATF
126 I 257 consid. 1a p. 258; 119 Ia 421 consid. 2b p. 422).

La constitution genevoise a institué un Tribunal des conflits (art. 131 Cst.
gen.), chargé de trancher les questions de compétence entre une juridiction
administrative d'une part, et une juridiction civile ou pénale d'autre part
(art. 56J de la loi sur l'organisation judiciaire genevoise, RSG E 2 05,
ci-après: LOJ).

A teneur de l'art. 56L al. 1 let. a LOJ , toute partie peut recourir auprès
du Tribunal des conflits contre une décision rendue en dernière instance
cantonale par l'une des juridictions mentionnées à l'art. 56H al. 1 LOJ,
lorsque la juridiction a admis sa compétence et que le recourant allègue que
le litige ressortit à l'autre ordre de juridiction.

Les dispositions relatives au Tribunal administratif et au Tribunal des
conflits ont fait l'objet d'une renumérotation entrée en vigueur le 1er mars
2002. L'art. 56H LOJ, qui concernait le but et la composition du Tribunal des
conflits, est devenu l'art. 56J. Le législateur a toutefois omis d'adapter le
renvoi contenu au nouvel article 56L LOJ, laissant subsister une référence à
l'art. 56H al. 1 LOJ, alors que cette disposition concerne actuellement la
conciliation devant le Tribunal administratif. Le renvoi à l'art. 56H al. 1
LOJ doit par conséquent être compris comme un renvoi à l'art. 56J al. 1 LOJ.

En l'espèce, la recourante conteste la compétence ratione materiae du
Tribunal cantonal des assurances sociales. Elle estime que le litige
l'opposant à l'intimée relève de la compétence du Tribunal de première
instance. En application des art. 56J à 56L LOJ, ce grief peut être soumis au
Tribunal des conflits du canton de Genève.

En saisissant directement le Tribunal fédéral d'un recours de droit public,
la recourante n'a pas respecté la règle de l'épuisement préalable des
instances cantonales, ancrée à l'art. 86 al. 1 OJ. Son recours est par
conséquent irrecevable, nonobstant le fait que l'arrêt cantonal indique une
voie de recours erronée (cf. ATF 129 IV 197 consid. 1.5 i.f. et les arrêts
cités).

3.
Compte tenu de l'indication erronée des voies de recours figurant dans
l'arrêt attaqué, il y a lieu de statuer sans frais. En outre, il ne sera pas
alloué de dépens à l'intimée, dès lors qu'elle n'a pas été invitée à répondre
au recours et n'a donc pas eu à assumer de frais en relation avec la
procédure devant le Tribunal fédéral (cf. art. 159 al. 1 et 2 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est irrecevable.

2.
Il n'est pas perçu d'émolument judiciaire.

3.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties et au
Tribunal cantonal des assurances sociales du canton de Genève.

Lausanne, le 15 décembre 2004

Au nom de la IIe Cour civile
du Tribunal fédéral suisse

Le président:  La greffière: