Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Zivilabteilung 4C.473/2004
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4C.473/2004 /grl

Arrêt du 6 avril 2005
Ire Cour civile

MM. et Mme les Juges Corboz, président, Favre et Kiss.
Greffière: Mme Aubry Girardin.

X. ________,
demanderesse et recourante, représentée par
Me Joanna Bürgisser, avocate,

contre

A.________ S.A.,
défenderesse et intimée, représentée par Me Horace Gautier, avocat.

contrat de travail; licenciement; discrimination

(recours en réforme contre l'arrêt de la Cour d'appel de la juridiction des
prud'hommes du canton de Genève
du 8 novembre 2004).

Faits:

A.
Par contrat du 4 mai 1983, X.________ a été engagée par la société
A.________ S.A. pour un salaire de 5'200 fr. brut par mois, plus un treizième
salaire, soit 67'600 fr. par an. En ce qui concerne la fonction, le contrat
mentionnait la coordination des données et la planification de la société.

A. ________ S.A. a pour but de rendre tout service en relation avec la
conception et la conduite de transactions financières et commerciales en
conformité avec les principes, lois et traditions islamiques.
Après six ou huit mois d'activité auprès de A.________ S.A. , X.________ a
été licenciée en raison de restrictions budgétaires et parce qu'elle était la
moins expérimentée. Elle a été engagée, selon un contrat du 10 novembre 1983
et pour un salaire identique, par B.________ S.A., une société possédant le
même ayant droit que A.________ S.A., en tant qu'assistante de direction.
En été 1988, A.________ S.A. a décidé de créer une bibliothèque, appelée
F.________, qui devait être un centre dédié à la culture islamique.
X.________, qui avait une bonne connaissance de la culture islamique,
maîtrisait quatre langues et était titulaire de diplômes universitaires, a
été engagée en tant que bibliothécaire, mais sans être gratifiée d'un titre
particulier. Elle a tout d'abord exercé cette fonction parallèlement à son
emploi en faveur de B.________ S.A., puis à plein temps pour A.________ S.A.
dès le 1er septembre 1990. Son salaire mensuel a été porté, dès cette année,
à 7'000 fr.
Le travail de X.________ a consisté à participer à la mise en place de la
bibliothèque, qui était ouverte au public, puis à son organisation, ce qui
l'a amenée à faire différents voyages. X.________ accomplissait également les
formalités de prêt de livres, sauf lorsqu'elle a disposé d'un assistant.
A partir du 15 mai 1989, un assistant bibliothécaire à mi-temps a été engagé
à la demande de X.________, pour un salaire mensuel de 2'500 fr. versé 13
fois par an. Dès août 1989, il a travaillé à plein temps et son salaire a été
porté à 4'700 fr. Au début 1992, les relations entre cet assistant et
X.________ se sont détériorées; cette dernière a indiqué à son supérieur
hiérarchique que le comportement de l'assistant aurait été différent si elle
avait été un homme. Cet employé a été transféré dans un autre département,
sans être remplacé.
Au début de l'année 1995, le chef direct de X.________ a pris sa retraite et
a été remplacé par L.________, qui exerçait la fonction d' "Executive Vice
President". Celui-ci a procédé à des contrôles plus fréquents sur le
département qu'il dirigeait.
En juin 1998, B.________ S.A. est entrée en phase de liquidation.
En 1999, un nouveau directeur général a été nommé. Le centre F.________ a été
peu à peu abandonné et la bibliothèque, fermée au public, a été reconvertie
en bureaux. Cette décision a été prise sans que X.________ n'ait été
consultée.
Alors qu'elle avait déjà été absente pour cause de maladie, X.________ s'est
trouvée en incapacité totale de travailler du 13 avril au 2 mai 2000. A son
retour, elle a été avertie que le bureau qu'elle occupait seule, à côté de la
bibliothèque, avait été transformé en mosquée ou en salle de prières. Son
nouveau bureau, qui était plus petit, se trouvait près de celui de son
supérieur hiérarchique. Une année auparavant, de nombreux changements de
bureaux avaient eu lieu et des "open space" avaient été créés. En outre, les
effectifs de A.________ S.A. avaient fortement diminué et de nombreux
licenciements étaient intervenus.

X. ________ a été transférée dans un autre département, dirigé par
M.________, qui lui a proposé une fonction évolutive. Ce poste a été créé
pour X.________ et n'a pas été repourvu à son départ. Selon une note interne
du 8 mai 2000, il s'agissait d'assurer les contacts avec les agents de
publicité, de faire le suivi de la publicité et de procéder à un certain
nombre de tâches de coordination et de contrôles. X.________ n'a pas trouvé
ce poste convenable.
Du 15 mai au 12 septembre 2000, X.________ s'est de nouveau trouvée en arrêt
maladie.
Le 13 septembre 2000 au matin, soit dès son retour, A.________ S.A.  a
signifié à X.________ son licenciement pour le 31 décembre 2000, avec
dispense immédiate de l'obligation de travailler. Celle-ci a refusé de signer
l'accusé de réception de la lettre de congé remise par la cheffe du
personnel. A.________ S.A. a fait en sorte de vérifier que X.________
n'emporte pas des documents appartenant à la société en quittant
l'entreprise.
Au moment de son licenciement, soit en septembre 2000, le salaire mensuel
brut de X.________ se montait à 9'558 fr., versés 13 fois, soit 124'254 fr.
par an.
Par lettre du 21 décembre 2000, X.________ s'est opposée à son congé.
Depuis son licenciement, X.________ est en incapacité totale de travailler
pour dépression aiguë. Elle est au bénéfice d'une rente d'invalidité
complète.

B.
Le 1er mars 2002, X.________ a déposé une demande auprès de la Juridiction
des prud'hommes du canton de Genève à l'encontre de A.________ S.A. en
paiement de 263'380 fr. plus intérêt à 5 % l'an dès le 1er septembre 2001, se
composant de 60'000 fr. pour tort moral, de 31'320 fr. à titre d'indemnité
pour discrimination à raison du sexe et de 172'620 fr. à titre d'indemnité de
départ. Elle a également requis la condamnation de A.________ S.A. à lui
verser un complément de salaire du 1er mars 1997 au 31 août 2001 dont le
montant serait précisé en cours de procédure, demandant au tribunal
d'ordonner l'apport de toutes pièces utiles à la détermination d'une
différence de salaire avec ses collègues masculins. Enfin, elle a conclu à la
délivrance d'un certificat de travail.
Par jugement du 27 février 2003, le Tribunal des prud'hommes a condamné
A.________ S.A. à délivrer à X.________ un certificat de travail conforme aux
exigences légales, déboutant les parties de toutes autres conclusions.
Statuant sur appel de X.________, la Cour d'appel de la juridiction des
prud'hommes, par arrêt du 8 novembre 2004, a confirmé le jugement attaqué. A
l'instar des premiers juges, la cour cantonale a retenu en substance que
l'appelante n'avait pas démontré que des propos sexistes aient été tenus à
son encontre, ni qu'elle ait été victime de harcèlement psychologique ou
sexuel. En outre, les faits ne permettaient pas de retenir que X.________
aurait fait l'objet de discrimination salariale ou à la promotion. Enfin,
celle-ci ne pouvait prétendre au versement d'une prime de licenciement, dès
lors que l'employeur avait renoncé à cette pratique. Quant à la conclusion
tendant à la délivrance d'un certificat de travail, elle était irrecevable.

C.
Contre cet arrêt, X.________ interjette un recours en réforme au Tribunal
fédéral. Tout en demandant, à titre préalable, le bénéfice de l'assistance
judiciaire ou, subsidiairement, la dispense de fournir des sûretés pour les
dépens, elle conclut au fond à l'annulation de l'arrêt du 8 novembre 2004 et
à la condamnation de A.________ S.A. à lui payer une indemnité de départ de
172'600 fr., ainsi que 60'000 fr. à titre de tort moral et 31'320 fr.
d'indemnité pour discrimination, les trois montants portant intérêt à 5 %
l'an dès le 31 août 2001. Elle requiert également le renvoi de la cause à
l'autorité cantonale, afin de définir le montant du salaire qui lui est dû en
vertu de la loi sur l'égalité et réserve ses droits aux dommages-intérêts
pour atteinte à l'avenir économique.

A. ________ S.A. propose, pour sa part, de déclarer le recours irrecevable à
la forme et, au fond, de le rejeter et de confirmer l'arrêt du 8 novembre
2004.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Interjeté par la demanderesse, qui a succombé dans ses conclusions, et dirigé
contre un jugement final rendu en dernière instance cantonale par un tribunal
supérieur (art. 48 al. 1 OJ), le recours porte sur une contestation civile
dont la valeur litigieuse dépasse largement le seuil de 8'000 fr. (art. 46
OJ). Il a en outre été déposé en temps utile (art. 32 al. 2 et 54 al. 1 OJ;
art. 1 de la loi fédérale du 21 juin 1963 sur la supputation des délais
comprenant un samedi) et, sous certaines réserves, dans les formes requises
(art. 55 OJ), de sorte qu'il peut, en principe, être examiné.

En ce qui concerne les conclusions, il convient de préciser que celles-ci
doivent être déterminées et indiquer précisément quelles sont les
modifications demandées (art. 55 al. 1 let. c et d OJ; Poudret, COJ II, Berne
1990, N 1.4.1.2 ad art. 55 OJ). Dans la mesure où la demanderesse conclut à
ce que ses droits à des dommages-intérêts pour atteinte à l'avenir économique
soient réservés, ses conclusions ne remplissent pas cette exigence et sont
donc irrecevables.

2.
Saisi d'un recours en réforme, le Tribunal fédéral doit conduire son
raisonnement juridique sur la base des faits contenus dans la décision
attaquée, à moins que des dispositions fédérales en matière de preuve n'aient
été violées, qu'il y ait lieu de rectifier des constatations reposant sur une
inadvertance manifeste (art. 63 al. 2 OJ) ou qu'il faille compléter les
constatations de l'autorité cantonale, parce que celle-ci n'a pas tenu compte
de faits pertinents, régulièrement allégués et clairement établis (art. 64
OJ; ATF 130 III 102 consid. 2.2; 127 III 248 consid. 2c et les arrêts cités).
Hormis ces exceptions que le recourant doit invoquer expressément, il ne peut
être présenté de griefs contre les constatations de fait, ni de faits ou de
moyens de preuve nouveaux (art. 55 al. 1 let. c OJ).
La demanderesse adopte à ce propos une position peu cohérente. Après avoir
rappelé les exigences précitées, elle estime que, comme la violation du droit
fédéral invoquée concerne une question de preuve, les constatations de fait
de la cour cantonale peuvent être complétées, voire rectifiées lorsqu'elles
reposent sur une inadvertance manifeste. Un tel raisonnement ne saurait être
suivi. D'une part, une éventuelle violation des règles sur la preuve ne
permet pas de revoir les faits constatés (cf. ATF 130 III 321 consid. 5).
D'autre part, l'inadvertance manifeste, susceptible d'être rectifiée d'office
par le Tribunal fédéral en application de l'art. 63 al. 2 OJ, suppose que
l'autorité, par simple inattention, ait omis de prendre en considération tout
ou partie d'une pièce déterminée, versée au dossier, l'ait mal lue ou mal
comprise (cf.  ATF 121 IV 104 consid 2b p. 106; 115 II 399 consid. 2a). Elle
n'autorise en aucun cas la partie recourante à modifier à sa guise les faits
retenus par l'autorité cantonale. Dès l'instant où une constatation de fait
repose sur l'appréciation, même insoutenable, d'une preuve, d'un ensemble de
preuves ou d'indices, une inadvertance est exclue (arrêt du Tribunal fédéral
4C.149/1995 du 5 décembre 1995, in SJ 1996 p. 353, consid. 3a). Seule la voie
du recours de droit public est ouverte pour se plaindre de la façon dont les
juges ont apprécié les preuves (ATF 130 III 145 consid. 3.2 p. 160).
Dans la mesure où la demanderesse présente un état de fait s'écartant des
constatations cantonales ou que, sous le couvert de multiples inadvertances
manifestes, elle remet en question l'appréciation des preuves et présente une
autre version des événements, plus favorable à sa thèse, son recours n'est
pas recevable. Quant aux inadvertances se rapportant à des faits sans aucune
pertinence, elles ne méritent pas d'être relevées. La Cour de céans examinera
donc les violations du droit fédéral invoquées uniquement à la lumière des
faits pertinents ressortant de l'arrêt attaqué. La motivation qui suit
démontre du reste que les multiples griefs soulevés par la demanderesse sont
manifestement dépourvus de tout fondement, lorsque l'on se limite aux
circonstances retenues par la cour cantonale.

3.
La demanderesse se plaint tout d'abord d'une violation des art. 322d et 328
CO, reprochant à la cour cantonale d'avoir rejeté ses prétentions portant sur
le versement d'une indemnité de départ.

3.1 En l'espèce, rien n'indique que le licenciement de la demanderesse ait
pour origine des mesures de restructuration, de sorte qu'il n'entre pas dans
le cadre du plan social qui, selon les constatations cantonales, avait été
mis en oeuvre par la défenderesse en 1985, année où elle avait été amenée à
licencier plus de trente collaborateurs. Du reste, la demanderesse ne se
prévaut pas de l'application d'un tel plan. En outre, selon l'arrêt attaqué,
l'employeur ne s'est pas engagé contractuellement au versement d'une
indemnité de licenciement à son employée et aucun règlement d'entreprise ne
prévoyait une telle indemnisation. Il convient donc uniquement de se demander
si la défenderesse peut être tenue d'allouer une telle indemnité en vertu de
l'art. 322d CO, comme le prétend la demanderesse.

3.2 L'art. 322d CO concerne les gratifications, à savoir les rétributions
spéciales qui s'ajoutent au salaire, accordées à certaines occasions et
dépendant toujours, dans une certaine mesure, de l'employeur (ATF 129 III 276
consid. 2). On peut se demander si l'indemnité de licenciement peut être
assimilée à une gratification au sens de l'art. 322d CO. Il n'y a toutefois
pas lieu d'entrer plus avant sur cette question, car, même si tel était le
cas, la demanderesse ne pourrait rien exiger à ce titre. En effet, la
gratification est par essence facultative (Streiff/Von Kaenel,
Arbeitsvertrag, 5e éd. Zurich 1992, N 3 ss ad art. 322d CO), sous réserve du
respect de l'égalité de traitement (cf. ATF 129 III 276 consid. 3.1;
Brunner/Bühler/Waeber/Bruchez, Commentaire du contrat de travail, 3e éd.
Lausanne 2004, N 8 p. 145 ad art. 328 CO) et des prétentions que peut tirer
le salarié de son versement régulier durant plusieurs années (cf. ATF 129 III
276 consid. 2 et 2.3). S'agissant d'une indemnité de résiliation, cette
dernière hypothèse est difficilement concevable. Quant à l'égalité de
traitement, il ressort de l'arrêt attaqué non seulement que le versement de
primes de départ n'était pas systématique dans la société défenderesse entre
1999 et 1997, mais surtout qu'à partir de 2000, la direction a supprimé cette
pratique et que la demanderesse n'a pas été moins bien traitée que les autres
personnes ayant quitté la société en 2000 et en 2001.
En refusant de lui allouer une indemnité de licenciement, la cour cantonale
n'a donc pas méconnu l'art. 322d CO, pas plus qu'elle n'a approuvé
l'existence de différences entre les employés contraires à l'art. 328 CO.
Pour tenter de démontrer l'inverse, la demanderesse présente d'ailleurs un
complexe de faits étrangers à l'arrêt attaqué, en méconnaissance des règles
élémentaires propres à un recours en réforme (cf. supra consid. 2).

4.
Dans un deuxième moyen, la demanderesse reproche à la cour cantonale de
n'avoir pas tenu compte de l'allégement du fardeau de la preuve prévu à
l'art. 6 de la loi sur l'égalité, dès lors qu'elle aurait rendu vraisemblable
l'existence de discriminations à son encontre, tant sur le plan salarial, que
dans l'attribution des tâches, dans les conditions de travail et dans la
promotion.

4.1 En matière d'égalité entre femmes et hommes, le Tribunal fédéral peut
contrôler si l'autorité cantonale a respecté les exigences spécifiques
découlant du droit fédéral concernant la constatation des faits, ainsi que
les dispositions fédérales en matière de preuve, en particulier celles
prévues à l'art. 6 de la loi fédérale du 24 mars 1995 sur l'égalité entre
femmes et hommes - RS 151.1; ci-après: LEg. - (ATF 130 III 145 consid. 3.1.2
p. 159 et les arrêts cités).
L'art. 6 LEg. introduit un assouplissement du fardeau de la preuve par
rapport au principe général de l'art. 8 CC, dans la mesure où il suffit à la
partie demanderesse de rendre vraisemblable l'existence de la discrimination
dont elle se prévaut (ATF 130 III 145 consid. 4.2; 127 III 207 consid. 3b).
Lorsqu'une discrimination liée au sexe a été rendue vraisemblable, il incombe
alors à l'employeur d'apporter la preuve complète que la différence de
traitement repose sur des facteurs objectifs (ATF 130 III 145 consid. 5.2;
127 III 207 consid. 3b p. 213).
Ce mécanisme tend à éviter que des actions ne soient introduites à la légère.
Ainsi, avant que le fardeau de la preuve soit mis à la charge de l'employeur,
il faut que la personne qui invoque la LEg. apporte des indices qui rendent
vraisemblable l'existence d'une discrimination. Pour que cette condition soit
réalisée, le juge n'a pas à être convaincu du bien-fondé des arguments de la
partie demanderesse; il doit simplement disposer d'indices objectifs
suffisants pour admettre que les faits allégués présentent une certaine
vraisemblance, sans devoir exclure qu'il puisse en aller différemment (cf.
ATF 130 III 145 consid. 4.2 p. 162 et les références citées). Saisi d'un
recours en réforme, le Tribunal fédéral peut donc vérifier si l'autorité
inférieure devait ou non admettre la vraisemblance d'une discrimination, mais
toujours en fonction de l'état de fait constaté dans l'arrêt attaqué. En
effet, à l'instar de l'art. 12 LEg. (cf. ATF 130 III 145 consid. 3.1.2 p.
159), l'art. 6 LEg. ne saurait servir à remettre en cause, en instance
fédérale de réforme, les constatations de fait de l'autorité cantonale.

4.2 En l'espèce, l'arrêt attaqué ne contient aucun élément de nature à
établir la vraisemblance de l'une ou l'autre des nombreuses discriminations
invoquées par la demanderesse. La cour cantonale a comparé les tâches
exécutées par la demanderesse et son salaire avec ceux d'autres
collaborateurs, sans parvenir à mettre en évidence le moindre indice objectif
de discrimination. Elle a ainsi constaté que le salaire de la demanderesse
était supérieur à celui d'un comptable superviseur et environ semblable à
celui de la cheffe du personnel, mais inférieur à celui d'un directeur, qui
avait de nombreuses personnes sous ses ordres. On ne voit pas davantage que
la demanderesse ait rendu vraisemblable qu'elle ait été discriminée lors de
l'attribution des tâches. Certes, en mai 2000, la demanderesse s'est vu
proposer une activité moins intéressante que celle exercée par le passé, mais
il faut tenir compte du contexte dans lequel se trouvait alors l'employeur. A
cette époque, la bibliothèque était fermée et la société B.________ S.A.
liquidée, de sorte que, comme l'a relevé la cour cantonale, la défenderesse
aurait pu être amenée à licencier son employée, comme elle l'avait fait avec
d'autres. En la gardant, au même salaire, mais en lui offrant un poste moins
intéressant au départ, mais présenté comme évolutif, l'employeur n'a
objectivement pas adopté une attitude discriminatoire. Quant aux conditions
de travail, on ne peut déduire du fait que la défenderesse n'ait pas remplacé
le poste d'assistant-bibliothécaire dont la demanderesse avait bénéficié
pendant quelque temps que celle-ci aurait été discriminée. Du reste, c'est la
demanderesse elle-même qui a suggéré le déplacement de son assistant, à qui
elle reprochait précisément un comportement sexiste. Le déménagement de la
demanderesse dans un petit bureau ne saurait davantage constituer un indice
objectif de discrimination, puisqu'il s'inscrivait dans des mesures de
réorganisation de l'entreprise et que bien des bureaux étaient supprimés,
pour créer des espaces ouverts. Quant à la discrimination dans la promotion,
on ne voit pas de quoi se plaint la demanderesse, puisqu'elle relève
elle-même qu'elle n'a postulé à aucune fonction différente dans l'entreprise.
Compte tenu de ces éléments, la cour cantonale n'a pas méconnu les exigences
en matière de preuve découlant de l'art. 6 LEg., puisque les faits retenus ne
laissent pas apparaître la vraisemblance que la demanderesse aurait été
discriminée. Dans son écriture, celle-ci tend à démontrer l'inverse en
présentant sa propre interprétation des événements, en s'écartant des faits
constatés et en critiquant l'appréciation des preuves de la cour cantonale,
ce qui n'est pas admissible dans un recours en réforme. Il n'y a donc pas
lieu de discuter les arguments soulevés, le Tribunal fédéral n'étant pas une
instance d'appel.

5.
Comme on vient de le voir, la preuve de l'existence de facteurs objectifs à
la charge de l'employeur, de nature à justifier la différence de traitement
dans son entreprise, n'intervient qu'à la condition que la partie
demanderesse ait rendu vraisemblable l'existence d'une discrimination (cf.
supra consid. 4.1). En l'espèce, les éléments de fait retenus par la cour
cantonale ne font pas ressortir d'indices objectifs permettant d'admettre
qu'une telle vraisemblance aurait été établie (cf. supra consid. 4.2), de
sorte que la cour cantonale pouvait rejeter les prétentions de la
demanderesse sur ce point, sans avoir à se demander si la défenderesse avait
démontré que la discrimination alléguée reposait sur des facteurs objectifs.
Faute d'intérêt pratique, il n'y a donc pas lieu d'examiner le grief portant
sur une violation de l'art. 8 CC s'agissant de la preuve à la charge de
l'employeur. Il en va de même du grief dans lequel la demanderesse reproche à
la cour cantonale de ne pas lui avoir alloué le salaire dû en application de
l'art. 5 al. 1 let. d LEg., au motif que la défenderesse n'aurait pas apporté
la preuve qui lui incombait.

6.
Lorsque la demanderesse invoque une violation de l'art. 3 LEg., reprochant à
la cour cantonale de n'avoir pas admis qu'elle aurait été discriminée lors de
l'attribution des tâches, l'aménagement des conditions de travail, la
rémunération et la promotion, son grief se confond avec les critiques
formulées sous l'angle de l'art. 6 LEg. Il suffit donc  de renvoyer à la
motivation présentée à ce propos (cf. supra consid. 4.2), non sans rappeler
une nouvelle fois que l'argumentation de la demanderesse n'a pas à être
examinée, car elle repose sur un autre état de fait que celui ressortant de
l'arrêt attaqué.

7.
La demanderesse soutient encore que la cour cantonale a violé les art. 4 et 5
al. 3 LEg. en retenant qu'elle n'avait pas prouvé avoir été victime de
harcèlement sexuel. Son grief n'est toutefois pas recevable, car elle
reproche aux juges cantonaux de ne pas avoir pris en compte deux moyens de
preuve. Or, les règles sur le fardeau de la preuve ne sauraient être
invoquées pour faire corriger l'appréciation des preuves qui ressortit au
juge du fait (ATF 130 III 321 consid. 5; 129 III 618 consid. 3).

8.
Selon la demanderesse, les juges cantonaux ont méconnu les art. 49 et 328 CO,
en ne lui allouant aucun montant à titre de réparation morale.
Il est admis que le salarié, victime d'une atteinte à sa personnalité
contraire à l'art. 328 CO du fait de son employeur ou des auxiliaires de
celui-ci, peut prétendre à une indemnité pour tort moral aux conditions
fixées par l'art. 49 al. 1 CO (cf. ATF 125 III 70 consid. 3a). Cette
indemnisation suppose évidemment qu'une atteinte à la personnalité soit
établie. Or, l'arrêt attaqué ne contient aucun élément de fait permettant
d'en déduire que la demanderesse aurait subi des atteintes à sa personnalité
dans le cadre de son travail. Les juges ont examiné les différents reproches
formulés par l'employée; ils ont apprécié les éléments de preuve à leur
disposition et sont finalement parvenus à la conclusion qu'aucun fait propre
à démontrer l'existence d'une atteinte à la personnalité de la demanderesse,
que ce soit sous la forme de propos sexistes, de mobbing ou d'une autre forme
de discrimination, ne pouvait être retenu. Le Tribunal fédéral étant lié par
les faits constatés (art. 63 al. 2 OJ), on ne voit pas que le refus d'allouer
à la demanderesse une indemnité pour tort moral puisse s'avérer contraire aux
art. 49 et 328 CO.
D'ailleurs, pour démontrer qu'elle aurait subi un harcèlement psychologique
durant plusieurs années, la demanderesse développe une argumentation purement
appellatoire, présentant sa propre version des événements, ce qui n'est pas
admissible dans un recours en réforme (cf. supra consid. 2).

9.
Le grief lié à une violation de l'art. 330a CO n'est pas recevable. En effet,
la demanderesse reproche à la cour cantonale d'avoir refusé de condamner son
employeur à lui fournir un certificat de travail conforme à son propre
projet, mais elle ne prend aucune conclusion tendant à la délivrance d'un tel
certificat dans son recours en réforme, comme le lui imposait l'art. 55 al. 1
let. b OJ. Au demeurant, la cour cantonale avait considéré, au stade de
l'appel, que les conclusions de la demanderesse en délivrance d'un certificat
de travail conforme à son projet n'étaient pas recevables en vertu de la
procédure civile cantonale, de sorte que la voie du recours en réforme
n'aurait de toute manière pas permis de revoir cette question (art. 55 al. 1
let. c OJ; ATF 130 III 248 consid. 2; 126 III 189 consid. 2a).

10.
Enfin, dans une dernière critique, la demanderesse invoque les art. 12 LEg.
et 343 CO, soutenant que la cour d'appel a omis de mentionner plusieurs faits
pertinents, allégués et établis lors des débats.
La jurisprudence a récemment rappelé que, si le principe inquisitoire ancré à
l'art. 12 al. 2 LEg., par renvoi à l'art. 343 al. 4 CO, prévoit notamment que
le tribunal apprécie librement les preuves - ce qui interdit au juge cantonal
de retenir des faits contre sa conviction ou de se considérer lié par des
règles de procédure cantonale qui attribuent une force probante spéciale à
certains moyens de preuve (système des preuves légales) -, cette disposition
n'autorise pas la remise en cause en instance fédérale de réforme des
constatations de fait de l'autorité cantonale (ATF 130 III 145 consid. 3.1.2
p. 159; 125 III 368 consid. 3). Une nouvelle fois, la demanderesse méconnaît
ce principe et formule une motivation ne répondant pas aux exigences du
recours en réforme.
Dans ces circonstances, le recours ne peut qu'être rejeté, dans la faible
mesure de sa recevabilité. Il en découle que la cause était manifestement
dépourvue de chances de succès, de sorte que la requête d'assistance
judiciaire présentée par la demanderesse doit aussi être rejetée (cf. art.
152 al. 1 OJ).

11.
Les prétentions invoquées reposant essentiellement sur la LEg., la procédure
est gratuite (cf. art. 12 al. 2 LEg. qui renvoie à l'art. 343 al. 3 CO). Cela
ne dispense pas la demanderesse, qui succombe, de verser des dépens à la
défenderesse (art. 159 al. 1 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
La requête d'assistance judiciaire formée par la demanderesse est rejetée.

3.
Il n'est pas perçu de frais.

4.
La demanderesse versera à la défenderesse une indemnité de 4'000 fr. à titre
de dépens.

5.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties et à la
Cour d'appel de la juridiction des prud'hommes du canton de Genève.

Lausanne, le 6 avril 2005

Au nom de la Ire Cour civile
du Tribunal fédéral suisse

Le président:  La greffière: