Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Zivilabteilung 4C.315/2004
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4C.315/2004 /ech

Arrêt du 13 décembre 2004
Ire Cour civile

MM. les Juges Corboz, président, Nyffeler et Favre.
Greffier: Mme Cornaz.

X. ________ SA,
défenderesse et recourante, représentée par
Me Susannah L. Maas,

A.________,
demanderesse et intimée, représentée par
Me Marguerite Florio.

remboursement des frais du voyageur de commerce,

recours en réforme contre l'arrêt de la Cour d'appel de la juridiction des
prud'hommes du canton de Genève du
3 juin 2004.

Faits:

A.
Le 1er mars 2002, X.________ SA a engagé A.________ pour une durée
indéterminée en qualité de déléguée commerciale. Les parties n'ont pas donné
au contrat de travail la forme écrite.

Courant mai 2002, il a été convenu que A.________ commencerait à voyager dès
le 1er juin 2002, à un taux d'activité de 80% qui a été porté à 100% à
compter du 1er septembre 2002. Dans cette perspective, A.________ a proposé
l'utilisation de sa voiture personnelle, à condition d'être "défrayée".
X.________ SA s'y est opposée et a chargé A.________ de trouver un véhicule
que la société pourrait prendre en leasing. X.________ SA a laissé à
A.________ la liberté du choix de la marque et du modèle, sous réserve
d'approbation, étant précisé que la mensualité de leasing ne devait pas
dépasser 900 fr.

A. ________ s'est alors adressée au Garage Z.________ SA qui, représentant le
bailleur de leasing, a fait à X.________ SA, en qualité de preneur, une offre
portant sur une Audi A4 neuve pour des mensualités de 865 fr. 10, moyennant
une mise de fonds initiale de 21'600 fr. A.________ a proposé à X.________ SA
de régler ce dernier montant de sa propre poche, dans l'idée de baisser les
mensualités du leasing et de pouvoir acheter le véhicule à la fin de la
période de leasing, voire antérieurement en cas de départ volontaire de
l'entreprise. A.________ a également consenti à régler à la société de
leasing la caution de 1'000 fr. X.________ SA a accepté ces conditions.

Le véhicule a été immatriculé au nom de X.________ SA, représentée par
A.________. De même, les contrats d'assurance ont été conclus au nom de
X.________ SA, mais par A.________, qui a payé une partie des frais
d'assurance responsabilité civile.

Il était convenu que A.________ puisse utiliser le véhicule de fonction
également à titre privé, notamment les week-ends.

Du 1er juin au 31 décembre 2002, X.________ SA n'a pas pris en charge les
frais d'essence professionnels de A.________. A compter du 1er janvier 2003,
la société a assumé l'intégralité des frais d'essence privés et
professionnels, moyennant déduction du salaire de A.________ d'un montant
forfaitaire de 280 fr. pour tenir compte des déplacements privés.
Du 1er juin 2002 au 30 juin 2003, A.________ a voyagé durant trente-deux
semaines, déduction faite de ses vacances et arrêts maladie. Elle a effectué
la quasi-totalité de ses visites dans les cantons de Vaud et de Genève, dont
approximativement la moitié à Lausanne. Elle a parcouru 37'000 km, dont
environ le 80% à titre professionnel, consommant 4'440 litres d'essence à 1
fr. 35 le litre en moyenne.

Durant cette même période, A.________ a souvent mangé à midi en dehors de son
domicile, notamment lors de ses déplacements professionnels en dehors de la
ville de Lausanne, où elle était domiciliée. Elle n'a jamais exposé ses
propres frais de repas à X.________ SA et s'est vu rembourser les quelques
repas d'affaires qu'elle a eus avec des clients de l'entreprise.

Le 28 avril 2003, X.________ SA a résilié le contrat de travail de A.________
pour le 30 juin 2003.

Le 2 juillet 2003, X.________ SA a soumis à A.________ une convention qui
prévoyait notamment que celle-ci remettait sa voiture de fonction - dont elle
ne désirait pas reprendre le leasing à titre personnel - à X.________ SA, qui
lui allouait 2'000 fr. en compensation de son apport lors de l'achat du
véhicule. A.________, qui n'avait pas encore reçu sa dernière paie, a signé
la convention sur le champ.

Par courrier électronique du 29 juillet 2003, A.________ a notamment demandé
à X.________ SA de "revoir la convention" du 2 juillet 2003 et le versement
de 6'000 fr. au lieu des 2'000 fr. proposés. Elle a néanmoins ajouté la
phrase suivante: "J'assume complètement la perte des Fr. 23'000.- lors de
l'achat, on est d'accord que c'était mon choix et mon plaisir".

Par courrier du 8 août 2003, A.________ a notamment mis X.________ SA en
demeure de lui rembourser la somme de 29'606 fr. 20, soit 18'400 fr.
représentant le 80% de la mise de fonds initiale, 1'411 fr. de prime
d'assurance contre la responsabilité civile pour le deuxième semestre 2002,
1'000 fr. de caution de leasing, 4'795 fr. 20 correspondant au 80% des frais
d'essence pour la période du 28 mai 2002 au 30 juin 2003 et 4'000 fr. de
frais de repas et de représentation du 1er juin 2002 au 30 juin 2003, à
raison de trente-deux semaines à cinq jours de travail, au taux de 25 fr. par
jour.

B.
Le 5 septembre 2003, A.________ a assigné X.________ SA devant le Tribunal
des prud'hommes du canton de Genève en paiement de la somme de 29'606 fr. 20
avec intérêt à 5% l'an dès le 5 septembre 2003, correspondant aux montants
faisant l'objet de la mise en demeure du 8 août 2003. Par jugement du 15
décembre 2003, cette autorité a condamné X.________ SA à payer à A.________
la somme de 27'324 fr. net avec intérêt à 5% l'an dès le 5 septembre 2003.

Saisie par X.________ SA et statuant par arrêt du 3 juin 2004, la Cour
d'appel de la juridiction des prud'hommes du canton de Genève a annulé ce
jugement et condamné X.________ SA à payer à A.________ la somme de 26'599
fr. 80 avec intérêt à 5% l'an dès le 5 septembre 2003. En substance, elle a
retenu que les frais devaient être intégralement remboursés au voyageur de
commerce, y compris ceux de véhicule comprenant l'amortissement,
respectivement le leasing. L'accord concernant la mise de fonds initiale de
21'600 fr. était nul en application de l'art. 327a al. 3 CO ou annulable pour
erreur in negotio au sens de l'art. 24 al. 1 ch. 4 CO, dans la mesure où
l'employée avait proposé cette mise de fonds parce qu'elle croyait devenir
partie à un contrat de vente par acomptes lui permettant d'être propriétaire
du véhicule à un prix de rachat raisonnable au moment de son départ de
l'entreprise à son initiative. Les mêmes considérations imposaient le
remboursement de la caution de 1'000 fr. versée à la société de leasing. Le
80% de la prime d'assurance pour le deuxième semestre 2002 était aussi à la
charge de l'employeur, soit 1'128 fr. 80. Celui-là devait également supporter
les frais d'essence, par 4'795 fr. 20, et la moitié des frais de repas, soit
2'000 fr., le tout sous déduction d'un montant de 724 fr. 20 crédité le 31
juillet 2003.

C.
Contre cet arrêt, X.________ SA (la défenderesse) interjette un recours en
réforme au Tribunal fédéral. Elle conclut principalement à l'annulation de la
décision entreprise, au déboutement de A.________ et à la condamnation de
celle-ci aux dépens, subsidiairement à l'annulation de l'arrêt attaqué et au
renvoi de l'affaire à l'autorité cantonale pour nouvelle décision dans le
sens des considérants.

A. ________ (la demanderesse) conclut au rejet des conclusions principales et
subsidiaires, avec suite de frais et dépens.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
1.1 Interjeté par la défenderesse qui a succombé dans ses conclusions
libératoires et dirigé contre un jugement final rendu en dernière instance
cantonale par un tribunal supérieur (art. 48 al. 1 OJ) sur une contestation
civile (cf. ATF 130 III 102 consid. 1.1; 129 III 415 consid. 2.1) dont la
valeur litigieuse atteint le seuil de 8'000 fr. (art. 46 OJ), le présent
recours en réforme est en principe recevable, puisqu'il a été déposé en temps
utile compte tenu des féries (art. 34 al. 1 let. b et 54 al. 1 OJ) et dans
les formes requises (art. 55 OJ).

1.2 Le recours en réforme est ouvert pour violation du droit fédéral, mais
non pour violation directe d'un droit de rang constitutionnel (art. 43 al. 1
OJ) ou pour violation du droit cantonal (ATF 127 III 248 consid. 2c p. 252 et
les arrêts cités). Saisi d'un recours en réforme, le Tribunal fédéral conduit
son raisonnement juridique sur la base des faits contenus dans la décision
attaquée, à moins que des dispositions fédérales en matière de preuve n'aient
été violées, qu'il faille rectifier des constatations reposant sur une
inadvertance manifeste (art. 63 al. 2 OJ) ou compléter les constatations de
l'autorité cantonale parce que celle-ci n'a pas tenu compte de faits
pertinents, régulièrement allégués et clairement établis (art. 64 OJ). Dans
la mesure où la partie recourante présente un état de fait qui s'écarte de
celui contenu dans la décision attaquée, sans se prévaloir avec précision de
l'une des exceptions qui viennent d'être rappelées, il n'est pas possible
d'en tenir compte (ATF 130 III 102 consid. 2.2 p. 106, 136 consid. 1.4). Il
ne peut être présenté de moyens de preuve nouveaux (art. 55 al. 1 let. c OJ).
Le recours en réforme n'est donc pas ouvert pour remettre en cause
l'appréciation des preuves et les constatations de fait qui en découlent (ATF
130 III 136 consid. 1.4; 129 III 618 consid. 3).

1.3 Le Tribunal fédéral ne saurait aller au-delà des conclusions des parties
(qui ne peuvent en prendre de nouvelles: art. 55 al. 1 let. b OJ), mais il
n'est pas lié par les motifs qu'elles invoquent (art. 63 al. 1 OJ), ni par
l'argumentation juridique retenue par la cour cantonale (art. 63 al. 3 OJ;
ATF 130 III 136 consid. 1.4; 128 III 22 consid. 2e/cc p. 29). Un recours peut
donc être admis pour d'autres motifs que ceux invoqués par le recourant et il
peut également être rejeté sur la base d'une autre argumentation juridique
que celle retenue par l'autorité cantonale (ATF 130 III 136 consid. 1.4; 127
III 248 consid. 2c p. 252 s.).

2.
2.1 Ainsi que la cour cantonale et les parties l'admettent à juste titre, la
relation entre celles-ci relève du contrat d'engagement des voyageurs de
commerce au sens des art. 347 ss CO. Comme les intéressées n'ont pas conclu
de contrat écrit, la question du remboursement des frais visée à l'art. 347a
al. 1 let. c CO est réglée par les dispositions légales et, au surplus, par
les conditions habituelles de travail (art. 347a al. 2 CO), les règles
générales du contrat individuel de travail s'appliquant à titre supplétif
(art. 355 CO). En conséquence, la présente espèce doit être jugée à l'aune
des art. 327a et 327b CO.

2.2 L'art. 327a al. 1 CO dispose que l'employeur rembourse au travailleur
tous les frais imposés par l'exécution du travail et, lorsque le travailleur
est occupé en dehors de son lieu de travail, les dépenses nécessaires pour
son entretien. Les frais imposés par l'exécution du travail comprennent
toutes les dépenses nécessaires, occasionnées par le travail (sur ce point,
cf. Brunner/Bühler/Waeber/Bruchez, Commentaire du contrat de travail, 3e éd.,
Lausanne 2004, n. 1 ad art. 327a CO; Wyler, Droit du travail, Berne 2002, p.
211). Le travailleur ne peut faire valoir à ce titre des dépenses d'agrément
ou de formation professionnelle générale non expressément prises en charge
par l'employeur (Tercier, Les contrats spéciaux, 3e éd., Zurich 2003, n. 3198
p. 462). Il appartient au travailleur d'apporter la preuve de la nécessité
des dépenses, sans que l'employeur puisse à cet égard poser d'exigences
excessives (ATF 116 II 145 consid. 6b p. 150; 91 II 372 consid. 12 p. 385;
plus récemment Tercier, op. cit., n. 3198 p. 462 s.; Staehelin/Vischer,
Commentaire zurichois, n. 9 ad art. 327a CO).

L'art. 327b al. 1 CO prévoit que si, d'entente avec l'employeur, le
travailleur utilise pour son travail son propre véhicule à moteur ou un
véhicule à moteur mis à sa disposition par l'employeur, il a droit au
remboursement des frais courants d'usage et d'entretien (soit notamment les
dépenses concernant l'essence, l'huile, les services périodiques, les
réparations, etc.; sur ce point cf. Brunner/Bühler/ Waeber/Bruchez, op. cit.,
n. 1 ad art. 327b CO; Portmann, Individualarbeitsrecht, Zurich 2000, n. 745
ss p. 159 s.), dans la mesure où le véhicule sert à l'exécution du travail.
Il en résulte que l'employeur ne répond des frais courants d'usage et
d'entretien qu'en proportion de la part qui correspond à l'utilisation
professionnelle du véhicule (Brunner/Bühler/ Waeber/Bruchez, op. cit., n. 1
ad art. 327b CO; Tercier, op. cit., n. 3199 p. 463; Wyler, op. cit., p. 211),
de sorte que si le travailleur est autorisé à utiliser le véhicule à titre
privé, un partage des frais peut intervenir (Portmann, op. cit., n. 749 p.
160; Duc/Subilia, Commentaire du contrat individuel de travail, Lausanne
1998, n. 7 ad art. 327b CO). Pour le surplus, le caractère relativement
impératif des art. 327a al. 1 et 327b al. 1 CO implique qu'en l'absence de
convention écrite contraire, les autres frais incombent entièrement à
l'employeur, même lorsque le travailleur est autorisé à utiliser le véhicule
à des fins privées (en ce sens, cf. Brühwiler, Kommentar zum
Einzelarbeitsvertrag, Berne 1996, n. 5 ad art. 327b CO; Staehelin/ Vischer,
op. cit., n. 6 ad art. 327b CO; ces auteurs relèvent que le véhicule de
fonction est en effet un instrument de travail qui, sauf accord ou usage
contraire, doit être fourni par l'employeur, conformément à l'art. 327 al. 1
CO). Il en va notamment ainsi de l'amortissement - respectivement du leasing
- du véhicule, de même que de la prime d'assurance contre la responsabilité
civile, dès lors que le risque d'accident dans l'utilisation professionnelle
du véhicule est à la charge de l'employeur, qu'il s'agisse d'un véhicule de
service ou de celui du travailleur (en ce sens, cf. Aubert, Commentaire
romand, n. 2 in fine ad art. 327b CO; Wyler, op. cit., p. 211).

Aux termes de l'art. 327a al. 3 CO, les accords en vertu desquels le
travailleur supporte lui-même tout ou partie de ses frais nécessaires est
nul. Le fait que cette disposition ne soit pas mentionnée dans le catalogue
des art. 361 et 362 CO n'est pas déterminant. Il résulte en effet clairement
de sa teneur qu'il ne s'agit pas de droit dispositif (ATF 124 III 305 consid.
3; plus récemment Brunner/Bühler/Waeber/Bruchez, op. cit., n. 7 ad art. 327a
CO, qui la considèrent comme relativement impérative; Tercier, op. cit., n.
3200 p. 463, qui la qualifie d'impérative). Selon la jurisprudence, l'art.
327a al. 3 CO est violé aussi bien par l'accord selon lequel le travailleur
s'engage à rembourser à l'employeur les dépenses nécessaires à l'exécution du
travail, que celui par lequel le travailleur s'engage à pourvoir directement
au règlement de ce type de dépenses à l'égard de tiers (ATF 124 III 305
consid. 5), principe qui vaut respectivement pour les frais prévus à l'art.
327b al. 1 CO.

3.
La défenderesse soutient que la prise en leasing de l'Audi A4, impliquant la
mise de fonds initiale dont le remboursement lui est réclamé, ne
constituerait pas une dépense nécessaire à l'exécution du travail, parce
qu'elle disposait d'une voiture (Mercedes Classe A) disponible pour les
déplacements professionnels de ses employés. Elle se prévaut par ailleurs du
fait que le versement de la mise de fonds initiale n'aurait pas été effectué
dans son intérêt, mais bien davantage dans celui de la demanderesse, qui
envisageait d'acheter le véhicule à la société de leasing au moment où elle
résilierait son contrat de travail. Ce faisant, elle se fonde toutefois sur
des faits qui ne ressortent pas de la décision attaquée, d'une manière
inadmissible au regard de l'art. 63 al. 2 OJ (cf. consid. 1.2).

Cela étant, l'état de fait de l'arrêt entrepris fait apparaître que la
défenderesse, après avoir refusé que la demanderesse utilise sa voiture
personnelle à des fins professionnelles, a accepté de prendre une Audi A4
neuve en leasing, pour des mensualités de 865 fr. 10, montant tenant compte
d'une mise de fonds initiale de 21'600 fr. réglée par la demanderesse de sa
propre poche. La défenderesse a ainsi mis à disposition de la demanderesse
une voiture de fonction pour son activité de déléguée commerciale. Il ressort
par ailleurs des faits souverainement retenus par la cour cantonale que la
voiture litigieuse était indispensable à la demanderesse pour l'exécution de
ses tournées de représentation et que la défenderesse avait accepté le
"paiement particulier" de 21'600 fr. fait par la demanderesse, alors qu'elle
aurait pu imposer une autre solution, comme elle avait par exemple refusé
l'utilisation du véhicule privé de celle-ci. En acceptant le contrat de
leasing - dans les circonstances de faits établies par la cour cantonale, qui
ne peuvent être revues par la voie du recours en réforme -, la défenderesse
s'est trouvée placée dans une situation où la règle impérative de l'art. 327a
al. 3 CO l'oblige à rembourser à la demanderesse sa participation au contrat
de leasing du véhicule de fonction, à hauteur de la prétention élevée
celle-ci, soit 18'400 fr.

Dans ces conditions, il n'est pas nécessaire d'examiner plus avant le contenu
et la portée de la convention du 2 juillet 2003 prévoyant de réduire jusqu'à
2'000 fr. le montant du remboursement dû, ni de s'interroger sur les mobiles
de la demanderesse au moment de la conclusion du contrat de leasing entre la
défenderesse et la société de leasing, en raison du caractère de dépense
nécessaire de la mise à disposition de la voiture de fonction par le moyen du
leasing en cause.

4.
Les mêmes raisons conduisent à l'admission de la demande pour ce qui est de
la caution de 1'000 fr. versée à la signature du contrat de leasing, ainsi
que pour la prime d'assurance responsabilité civile pour le deuxième semestre
de l'année 2002. S'agissant de ce dernier poste, il convient de relever que
la défenderesse, qui ne conteste pas le principe du remboursement, plaide
vainement, dans une argumentation de type appellatoire fondée sur des faits
qui ne ressortent pas de la décision entreprise, que la prime a été
remboursée au travers de l'indemnité forfaitaire mensuelle de 900 fr. et que,
si ce montant s'était avéré insuffisant pour couvrir la prime, la
demanderesse aurait dû l'en informer.

5.
A l'instar des juges cantonaux, les parties reconnaissent que les frais
d'essence se rapportant aux déplacements professionnels doivent être
remboursés en application de l'art. 327b al. 1 CO. La défenderesse reproche
cependant à la cour cantonale d'avoir calculé les frais d'essence sur la
période du 1er juin 2002 au 30 juin 2003, alors qu'il est établi qu'elle
avait pris en charge l'intégralité des frais d'essence du 1er janvier au 30
juin 2003. De plus, elle aurait également payé lesdits frais entre le 1er
juin et le 31 décembre 2002, en ce qu'ils seraient inclus dans l'indemnité
forfaitaire mensuelle de 900 fr. versée pour l'usage professionnel du
véhicule.

5.1 Le grief est fondé en ce qui concerne l'application de l'art. 327b al. 1
CO pour la période du 1er janvier au 30 juin 2003. En effet, la cour
cantonale a constaté en fait, de façon à lier le Tribunal fédéral (art. 63
al. 2 OJ), que la défenderesse avait intégralement pris en charge les frais
d'essence exposés pendant ce laps de temps. La demanderesse ne peut donc
faire valoir aucune créance à cet égard, la demande devant être rejetée sur
ce point.

5.2 Pour la période du 1er juin au 31 décembre 2002, la défenderesse soutient
vainement que la demanderesse percevait une indemnité forfaitaire de 900 fr.
pour tous les frais en rapport avec l'usage professionnel de la voiture.
Cette allégation n'est en effet pas conforme à l'état de fait déterminant,
dont il découle que le montant de 900 fr. a été fixé par la défenderesse
comme étant la limite supérieure d'une mensualité de leasing. Au demeurant,
la différence entre ce montant et la somme de 865 fr. 10, soit 34 fr. 90,
n'apparaît pas comme consacrée au paiement d'essence et ne représenterait que
26 litres par mois, soit une quantité insignifiante en rapport avec la
réalité de l'emploi de la demanderesse. A cet égard, il apparaît que celle-ci
travaillait à 80% du 1er juin au 31 août 2002, avant d'être employée à plein
temps pour la période du 1er septembre au 31 décembre 2002. Il n'est ainsi
pas possible d'établir une moyenne mensuelle pertinente à partir de la
prétention au remboursement de 4'795 fr. 20 pour les treize mois revendiqués,
alors qu'il faudrait déduire de cette somme les montants payés par la
défenderesse en 2003. L'arrêt entrepris doit en conséquence être annulé sur
ce point et la procédure renvoyée à la Chambre d'appel pour qu'elle statue
sur le remboursement des frais d'essence du 1er juin au 31 décembre 2002,
compte tenu des taux d'occupation différents avant et après le 31 août 2002,
des rapports de visite produits par la défenderesse pour la période du 1er
juin au 15 octobre 2002 et de la preuve de l'importance de la consommation
d'essence à titre professionnel, qui incombe à la demanderesse. En
conséquence, le recours doit être partiellement admis sur ce point.

6.
En dernier lieu, la défenderesse reproche à la cour cantonale de l'avoir
condamnée à payer à la demanderesse la somme de 2'000 fr. à titre de frais de
repas. Elle soutient d'une part que le lieu de travail de la demanderesse
était principalement la région lausannoise, où elle est domiciliée, de sorte
que les juges cantonaux auraient violé l'art. 327a al. 1 CO en considérant
que les repas pris dans son cercle d'activité devaient lui être remboursés.
Elle plaide d'autre part que la réclamation de ce remboursement après la
résiliation des rapports de travail serait abusive au sens de l'art. 2 al. 2
CC et ne viserait qu'à la placer dans une situation désagréable.

6.1 La question de l'abus de droit que soulève la défenderesse doit être
examinée sous l'angle de l'art. 341 al. 1 CO. Selon cette disposition, le
travailleur ne peut pas renoncer, pendant la durée du contrat et durant le
mois qui suit la fin de celui-ci, aux créances résultant de dispositions
impératives de la loi ou d'une convention collective.

Se fondant sur une jurisprudence relativement ancienne, la défenderesse
estime que la demanderesse aurait dû demander le remboursement de ses frais
de repas beaucoup plus rapidement qu'elle ne l'a fait et en tout cas pas
après la résiliation des rapports de travail. En effet, sous l'empire de
l'ancien droit, soit de la loi fédérale sur les conditions d'engagement des
voyageurs de commerce (ci-après: LEVC), en vigueur avant l'introduction de
l'art. 347 CO, en 1971, les indemnités pour frais professionnels devaient
être payées à la fin de chaque mois au plus tard. Les art. 13 al. 4 et 14 al.
1 LEVC avaient été adoptés pour assurer aux voyageurs de commerce un prompt
remboursement de leurs frais de voyage, mais aussi pour provoquer une
liquidation rapide d'éventuelles divergences sur le montant de ces dépenses
et pour empêcher que des prétentions s'accumulent, difficilement justifiables
après coup. Le voyageur qui se tairait assez longtemps avant de demander le
remboursement de ses frais pourrait se voir opposer le caractère tardif de sa
demande, éventuellement constitutive d'un abus manifeste de droit au sens de
l'art. 2 al. 2 CC (ATF 91 II 372 consid. 13 p. 386). A cette occasion, le
Tribunal fédéral a entendu faire une application très stricte du principe de
l'art. 2 al. 1 CC, dont la portée était relativement limitée dans le domaine
de la loi sur les conditions d'engagement des voyageurs de commerce. L'ATF 91
II 372 constituait expressément un revirement de jurisprudence, visant à une
plus grande rigueur dans les relations entre employeurs et employés. A cet
égard, le Tribunal fédéral a relevé qu'il convenait "de modifier" dans ce
sens la jurisprudence de l'époque, qui restreignait étroitement l'application
de cette disposition dans le domaine de la LEVC (ATF 91 II 372 consid. 13 p.
387).

Depuis lors, l'art. 347 CO renvoie, pour la détermination des prétentions
salariales et accessoires des voyageurs de commerce, aux normes générales du
contrat de travail (cf. consid. 2.1). Par ailleurs, depuis 1965, la
jurisprudence relative à l'existence d'un abus de droit dans les relations
individuelles de travail a profondément évolué. Seules des circonstances tout
à fait exceptionnelles permettent à l'employeur de s'en prévaloir. Selon une
jurisprudence fermement établie, il serait contraire à l'esprit de la loi de
priver le travailleur, par le biais de l'art. 2 al. 2 CC, de la protection
que lui accorde l'art. 341 al. 1 CO. En particulier, le fait pour le
travailleur de n'avoir soulevé ses prétentions qu'à l'expiration des rapports
de travail ne peut constituer, à lui seul, un abus de droit manifeste faute
de quoi les art. 341 al. 1 et 342 al. 2 CO seraient lettres mortes pour les
travailleurs qu'ils sont censés protéger (ATF 129 III 618 consid. 5.2 p. 622
et les arrêts cités).

6.2 En l'espèce, les faits retenus dans l'arrêt attaqué n'autorisent pas d'en
inférer l'existence de circonstances exceptionnelles, qui permettraient de
conclure à l'existence d'un abus de droit de la part de la demanderesse.
Comme la jurisprudence le rappelle, le fait de réclamer des indemnités de
repas quelques semaines après la fin du contrat, pour une période remontant
au plus à quinze mois en arrière, ne peut constituer à lui seul l'abus de
droit manifeste invoqué par la défenderesse. Dans ces conditions, faute de
critique quant aux montants retenus successivement par le Tribunal de
prud'hommes et la Cour d'appel, qui ont arbitré les frais de repas aux 50% de
la prétention de la demanderesse, soit à 2'000 fr., la solution adoptée par
la cour cantonale peut être confirmée, puisqu'elle est conforme à l'art. 327a
al. 1 CO, disposition relativement impérative en application de l'art. 362
al. 1 CO.

7.
Dès lors que la valeur litigieuse, établie selon la prétention à l'ouverture
de l'action, ne dépasse pas 30'000 fr., la procédure est gratuite (art. 343
al. 2 et 3 CO; ATF 115 II 30 consid. 5b p. 41). Cela ne dispense pas
d'allouer des dépens (art. 159 al. 1 OJ). La demanderesse obtient gain de
cause sur quasiment l'ensemble de ses prétentions, la défenderesse trouvant
cependant en grande partie satisfaction sur la question des frais d'essence.
Il se justifie donc de compenser les dépens (art. 156 al. 3 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est partiellement admis.

2.
L'arrêt attaqué est annulé en tant qu'il condamne la défenderesse à payer à
la demanderesse la somme de 4'795 fr. 20 à titre d'indemnité de frais
d'essence. Il est confirmé pour le surplus.

3.
La procédure est renvoyée à la cour cantonale pour nouvelle instruction et
nouvelle décision sur le remboursement des frais d'essence, dans le sens des
considérants.

4.
Il n'est pas perçu de frais.

5.
La défenderesse versera à la demanderesse une indemnité de 1'600 fr. à titre
de dépens réduits.

6.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties et à la
Cour d'appel de la juridiction des prud'hommes du canton de Genève.

Lausanne, le 13 décembre 2004

Au nom de la Ire Cour civile
du Tribunal fédéral suisse

Le président:  La greffière: