Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Zivilabteilung 4C.298/2004
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4C.298/2004 /ech

Arrêt du 26 janvier 2005
Ire Cour civile

MM. et Mmes les Juges Corboz, Président, Klett, Nyffeler, Favre et Kiss.
Greffière: Mme Godat Zimmermann.

A. ________,
demanderesse et recourante, représentée par
Me Raphaël Treuillaud,

contre

B.________ SA (anciennement V.________ SA),
défenderesse et intimée, représentée par Me Guy Stanislas.

opérations spéculatives; responsabilité de la banque en l'absence d'un mandat
de gestion,

recours en réforme contre l'arrêt de la Chambre civile de la Cour de justice
du canton de Genève du 11 juin 2004.

Faits:

A.
Né en 1922, X.________, citoyen américain domicilié en Belgique, est l'unique
ayant droit économique de A.________, entreprise fiduciaire de droit
liechtensteinois, spécialisée dans la gestion de patrimoine.

A. ________ a d'abord été cliente de la banque T.________, à Genève. Dès
1995, X.________ a convenu avec cette banque d'une stratégie d'investissement
fondée sur la spéculation sur les taux de change entre le yen japonais (JPY)
et d'autres monnaies. En substance, il s'agissait de s'endetter dans une
monnaie à faible taux d'emprunt - le yen -, avant d'investir le produit du
prêt dans un portefeuille d'obligations en monnaies à plus haut rendement,
par exemple le dollar américain (USD). Cette stratégie est fondée sur la
stabilité du taux de change JPY/USD; en cas d'appréciation du yen par rapport
au dollar, la perte de change risque en effet d'annuler le bénéfice lié à la
différence de taux d'intérêts, une forte hausse du yen pouvant même entraîner
des pertes. Pour assurer une couverture adéquate des prêts et avances à terme
fixe consentis par la banque, ce genre d'opération spéculative implique la
fixation d'une marge de sécurité exprimée en pour-cent de la valeur totale du
portefeuille; à titre d'exemple, une marge de 30% permet un emprunt à
concurrence de 70% de la valeur du portefeuille. Lorsque l'endettement
dépasse ce dernier taux, la banque demande au client de reconstituer la marge
(appel de marge), par la réalisation de titres du portefeuille ou par
l'apport d'actifs. Elle peut aussi, dans certaines conditions, liquider les
positions.

Même s'il ne disposait pas de connaissances bancaires approfondies,
X.________ avait une compréhension partielle des marchés financiers. Il était
en tout cas conscient du risque lié aux opérations spéculatives décrites
ci-dessus; il savait ce que signifiait un appel de marge. En bref, il
maîtrisait sa stratégie d'investissement.

Auprès de la banque T.________, l'endettement de A.________ ne pouvait
dépasser le 70% de la valeur du portefeuille. En 1997, X.________ a cherché à
obtenir une marge permettant un endettement plus important. La banque était
d'accord à condition que le client l'autorise d'emblée à réaliser certains
biens en cas d'appréciation du yen et de non-respect de la marge.

Comme il refusait cette exigence, X.________ s'est adressé à la banque
W.________ SA, devenue par la suite V.________ SA.

Le 2 mai 1997, X.________ et Y.________, gestionnaire et membre de la
direction de V.________, ont convenu de poursuivre dans cet établissement la
stratégie d'investissement initiée auprès de la banque T.________. Le
courrier de confirmation indiquait une marge de 30%, sans faire mention de la
possibilité donnée à la banque de réaliser les actifs du compte en cas de
dépassement de la limite.

Le 12 juin 1997, A.________ a ouvert un compte auprès de V.________. Elle a
conféré à X.________ un pouvoir de signature individuelle. Aucun mandat de
gestion n'a été confié à V.________, qui devait se contenter d'exécuter les
instructions de X.________. Parmi les documents signés, figurent notamment
une décharge pour ordres téléphoniques ainsi que les «conditions spéciales
pour opération et contrat à terme, options et autres dérivés», qui
comprennent le passage suivant:

«Les marges de garantie relatives à ce genre d'opérations et, de manière
générale, aux nantissements seront déterminées par la Banque de cas en cas.
Le Client s'engage à veiller au maintien et à la reconstitution desdites
marges dont le montant doit correspondre en tout temps à la marge indiquée
lors de la confirmation de la ligne, sans que la Banque soit obligée de
l'aviser, de manière formelle ou autre en cas d'insuffisance de marge. La
Banque se réserve le droit de modifier les marges requises en tout temps et
sans préavis. Les pertes, qu'elles soient réalisées ou non, doivent toujours
être couvertes à 100%.
(...)
Lorsque le Client ne fournit pas de sûretés complémentaires, la Banque a le
droit, mais non l'obligation de prendre immédiatement, ou à tout autre moment
qui lui conviendra ultérieurement, les mesures nécessaires pour reconstituer
la couverture intégrale. La Banque peut, à son choix, liquider en tout ou en
partie les transactions ou contrats conclus ou réaliser les sûretés
fournies.»
Jusqu'en août 1999, X.________, qualifié de «client privilégié», se trouvait
en contact téléphonique presque quotidien avec Y.________ ou son assistante.
Les appels ont également été très fréquents entre le 1er et le 15 septembre
1999. Vu l'intensité de ces échanges, la banque avait cessé de consigner leur
contenu par écrit. Les relevés bancaires étaient envoyés mensuellement au
domicile privé de X.________, qui était aussi informé de la position des
comptes sur demande téléphonique.
D'accord entre les parties, la marge initiale de 30% a été réduite à 20%,
autorisant ainsi un emprunt à concurrence de 80% de la valeur du
portefeuille. En octobre 1998, cette dernière limite a été dépassée. A cette
occasion, le comité de crédit de V.________ a approuvé une marge
«exceptionnelle» fixée à 10%. A.________ affirme qu'elle n'en a pas été
informée, alors que V.________ soutient que le comité de crédit ne serait pas
intervenu sans la volonté de la cliente de disposer d'une marge plus
favorable à ses investissements.

Dès le début 1999, le yen s'est régulièrement renforcé par rapport au dollar,
de sorte que le taux d'utilisation du crédit a passé à 81,16% du portefeuille
le 2 juillet 1999, puis à 85,5% le 31 juillet 1999. X.________ a alors
demandé à Y.________ s'il était indiqué de mettre en place une option
permettant de limiter le risque. Selon le gestionnaire, le bénéficiaire de
A.________ a renoncé à ce projet à cause du prix d'une telle option,
oscillant entre 200 000 et 300 000 USD. Pour sa part, X.________ prétend
avoir donné l'instruction d'acheter l'option, mais que la banque n'y a pas
donné suite.

Parmi les emprunts contractés en yens, trois venaient à échéance en août
1999. Ils ont été reconduits respectivement les 3 et 29 août 1999 à
concurrence de 625 000 000 JPY, représentant le tiers des emprunts.
X.________ soutient que ces renouvellements ont été exécutés par la banque à
son insu, tandis que V.________ affirme le contraire.

En septembre 1999, la différence de change entre le yen et le dollar
américain a encore évolué en défaveur des investissements de A.________. La
banque a alors demandé à sa cliente de vendre des actions du portefeuille
pour reconstituer la marge; ces transactions, exécutées les 8 et 13 septembre
1999, ont produit 1 350 000 USD, montant insuffisant pour respecter la marge
fixée. Toujours en septembre 1999, le département des crédits de V.________ a
indiqué au gestionnaire que la pose d'un «stop loss» à 107 était nécessaire;
ce chiffre représente un taux de change JPY/USD qui, s'il est atteint,
entraîne la liquidation de toutes les positions du client. Y.________ affirme
avoir avisé X.________ de cette mesure; celui-ci aurait alors refusé un «stop
loss» à 107 et demandé au gestionnaire de solliciter la pose d'un tel
mécanisme à un niveau plus bas, car il était persuadé que la progression du
yen par rapport au dollar n'était qu'un accident de parcours. A la suite de
plusieurs requêtes de Y.________, le comité des crédits a accepté la fixation
d'un «stop loss» à 104 sur l'ensemble des investissements. Selon le
gestionnaire, il a communiqué cette décision à X.________ le 10 septembre
1999 et ce dernier l'a acceptée.

Le 15 septembre 1999, le seuil de 104 a été atteint et les positions de
A.________ ont été liquidées. Le gestionnaire de V.________ affirme avoir
téléphoné ce jour-là à X.________ pour lui annoncer cette liquidation et
avoir obtenu son accord afin que le montant à rembourser soit réparti sur les
diverses échéances des prêts en yens, sous forme d'opérations «swap».

Le 16 septembre 1999, X.________ a rencontré Y.________ et deux autres
membres de la direction de V.________. Il affirme avoir appris à cette
occasion la reconduction des emprunts en août 1999. Il soutient également
avoir ignoré qu'un «stop loss» avait été fixé à 104 et qu'il avait été
exécuté la veille. Lors de cette réunion, X.________ a signé un ordre pour
vendre toutes les obligations en dollars australiens et canadiens ainsi qu'en
livres sterling. Comme les parties étaient liées par une forte relation de
confiance, la banque n'a pas demandé au client de signer un bien-trouvé.

Dans un courrier du 20 septembre 1999, X.________ a reproché à la banque la
fixation d'un «stop loss» à 104 et la liquidation de la totalité de ses
positions. V.________ a nié que sa responsabilité soit engagée pour les
pertes subies par A.________.

B.
Par demande déposée le 17 octobre 2001, A.________ a assigné V.________ en
paiement de 5 916 497 USD avec intérêts à 7,5% dès le 3 août 2001. Fondant
son action sur la violation fautive des obligations contractuelles de la
banque, A.________ réclamait réparation d'un dommage qu'elle décomposait
ainsi (sic):

- 4 584 895 USD représentant la différence en dollars américains des yens mis
à disposition de A.________ le 17 septembre 1999 et leur valeur au 3 août
2001, date d'échéance des opérations à terme;

- 1 585 099 USD correspondant au manque à gagner jusqu'au 3 août 2001
résultant du défaut de revenu des obligations vendues le 17 septembre 1999.
Par jugement du 22 septembre 2003, le Tribunal de première instance du canton
de Genève a rejeté toutes les conclusions de A.________.

Statuant le 11 juin 2004 sur appel de la demanderesse, la Chambre civile de
la Cour de justice a confirmé le jugement entrepris.

C.
A.________ interjette un recours en réforme, dans lequel elle reprend ses
conclusions en paiement de première instance. A titre subsidiaire, elle
demande le renvoi de la cause à la cour cantonale aux fins de procéder à la
détermination et au calcul du dommage.

La banque propose le rejet du recours.

Après le prononcé de l'arrêt cantonal, la raison sociale de la défenderesse a
été modifiée en B.________ SA.

Par arrêt de ce jour, la cour de céans a rejeté dans la mesure de sa
recevabilité le recours de droit public déposé parallèlement par A.________.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
1.1 Interjeté par la partie qui a succombé dans ses conclusions
condamnatoires, et dirigé contre un jugement final rendu en dernière instance
cantonale par un tribunal supérieur (art. 48 al. 1 OJ) sur une contestation
civile dont la valeur litigieuse atteint le seuil de 8000 fr. (art. 46 OJ),
le recours en réforme est en principe recevable, puisqu'il a été déposé en
temps utile (art. 54 al. 1 OJ) et dans les formes requises (art. 55 OJ).

1.2 Saisi d'un tel recours, le Tribunal fédéral conduit son raisonnement
juridique sur la base des faits contenus dans la décision attaquée, à moins
que des dispositions fédérales en matière de preuve n'aient été violées,
qu'il faille rectifier des constatations reposant sur une inadvertance
manifeste (art. 63 al. 2 OJ) ou compléter les constatations de l'autorité
cantonale parce que celle-ci n'a pas tenu comptes de faits pertinents,
régulièrement allégués et clairement établis (art. 64 OJ; ATF 130 III 102
consid. 2.2 p. 106, 136 consid. 1.4 p. 140; 127 III 248 consid. 2c).
Dans la mesure où la partie recourante présente un état de fait qui s'écarte
de celui contenu dans la décision attaquée, sans se prévaloir avec précision
de l'une des exceptions qui viennent d'être rappelées, il n'est pas possible
d'en tenir compte (ATF 127 III 248 consid. 2c). Il ne peut être présenté de
griefs contre les constatations de fait, ni de faits ou de moyens de preuve
nouveaux (art. 55 al. 1 let. c OJ). Le recours en réforme n'est donc pas
ouvert pour remettre en cause l'appréciation des preuves et les constatations
de fait qui en découlent (ATF 130 III 136 consid. 1.4, p. 140; 128 III 271
consid. 2b/aa p. 277).

2.
La compétence des tribunaux suisses est donnée en raison du siège à Genève de
la défenderesse (art. 112 al. 1 LDIP).
L'arrêt attaqué ne contient aucune constatation à propos d'une éventuelle
élection en faveur du droit suisse. Toujours est-il qu'aucune des parties n'a
contesté l'application de ce droit, correspondant à celui de l'Etat dans
lequel la banque, qui fournit la prestation caractéristique, a son
établissement (art. 117 al. 1, 2, 3 let. c et d LDIP).

3.
La cour cantonale a retenu en fait que, sur tous les points contestés par la
demanderesse, la défenderesse avait agi avec l'accord de sa cliente. Selon
l'arrêt attaqué, aucune violation fautive de ses obligations contractuelles
ne peut être reprochée à la défenderesse, dès lors qu'il est établi que la
banque a correctement exécuté les instructions de la demanderesse.
Dans son recours, la demanderesse fait valoir que, même en se fondant sur
l'état de fait cantonal qu'elle a contesté en vain dans le recours de droit
public, la défenderesse a engagé sa responsabilité contractuelle en violant
ses obligations lors de la fixation de la marge, de la mise en place du «stop
loss» et de la liquidation des positions de la cliente.

3.1 De manière générale, la banque qui, sans être au bénéfice d'un mandat de
gestion, s'engage à exécuter des instructions, n'est pas tenue à une
sauvegarde des intérêts du mandant. Un devoir général d'information n'existe
pas en pareille hypothèse. En principe, la banque ne doit renseigner le
client que s'il le demande; s'il apparaît que celui-ci n'a aucune idée des
risques qu'il court, la banque doit toutefois l'y rendre attentif. Le devoir
de fidélité n'impose pas non plus à la banque chargée d'exécuter des ordres
déterminés de conseiller spontanément le client sur les développements
probables des investissements choisis et sur les mesures à prendre pour
limiter les risques (ATF 119 II 333 consid. 5 et 7 et les références; arrêt
4C.108/2002 du 23 juillet 2002, consid. 2b; cf. également arrêt 4C.410/1997
du 23 juin 1998, consid. 3b, reproduit in SJ 1999 I, p. 205).

3.2 En ce qui concerne la fixation conventionnelle de la marge à 10%, la
demanderesse expose qu'un taux aussi faible avait pour pendant un
accroissement exceptionnel du risque présenté par les investissements de la
cliente. Or, à son avis, il n'était pas conforme aux obligations
contractuelles de la banque de faire courir un tel risque à une société
animée par une personne de près de 80 ans, qui n'était pas un professionnel
averti.
La marge exigée pour certaines transactions tend à limiter les risques de la
banque en cas d'insolvabilité du client. A priori, ce dernier ne peut donc se
retourner contre la banque lorsque celle-ci se contente d'une marge
insuffisante (cf. Carlo Lombardini, Droit bancaire suisse, 2002, n. 87, p.
483; cf. également arrêt 4C.166/2000 du 8 décembre 2000, consid. 5b/cc). Au
demeurant, selon les constatations de la Cour de justice, la marge a été
fixée en l'espèce à 10% d'entente entre les parties. Aucun élément de l'arrêt
attaqué ne permet de supposer que le bénéficiaire de la demanderesse n'était
pas à même d'apprécier, en raison de son âge, les risques encourus. Au
contraire, il ressort de l'état de fait cantonal que X.________ était
conscient des risques liés aux investissements spéculatifs auxquels il se
livrait depuis plusieurs années et qu'il maîtrisait sa stratégie à cet égard.
Dans ces conditions, la responsabilité contractuelle de la banque ne saurait,
en tout état de cause, être engagée pour avoir accepté de réduire la marge.

3.3 Selon la demanderesse, la défenderesse a également violé ses obligations
contractuelles en proposant et en faisant accepter par sa cliente la pose
d'un «stop loss», sans lui offrir d'alternative, par exemple en lançant un
troisième appel de marge. Sans nécessité pour elle-même, la banque aurait
ainsi placé l'investisseur dans une situation très défavorable.
Cette argumentation repose en partie sur des faits qui ne correspondent pas
aux constatations cantonales et se révèle irrecevable dans cette mesure.
Ainsi, contrairement à ce que la demanderesse prétend, les deux premiers
appels de marge n'avaient pas permis de reconstituer celle-ci. En outre, la
mise en place d'un «stop loss» était nécessaire pour protéger les avoirs de
la cliente et ceux de la banque.
Cela étant, on ne voit pas en quoi la conclusion d'un accord de «stop loss»,
au niveau souhaité par le bénéficiaire de la demanderesse, pourrait
constituer une violation de l'obligation de diligence de la banque, dès lors
qu'il s'agissait d'une mesure destinée à limiter le risque de perte des deux
parties lors d'une période de hausse du yen par rapport au dollar américain.
Le moyen est manifestement mal fondé.

3.4 En dernier lieu, la demanderesse reproche à la banque une «liquidation
aberrante des positions» par la mise en place d'opérations «swap». La
défenderesse aurait pris l'initiative d'installer un mécanisme dont elle
savait nécessairement qu'il concrétisait une perte de change pour la cliente,
alors que cette perte ne pouvait plus être compensée par la suite. La banque
ne saurait au surplus invoquer le consentement du bénéficiaire de la
demanderesse, dont elle devait savoir qu'il ne comprenait pas le sens et la
portée des opérations en cause.
Là encore, la demanderesse se fonde sur des faits qui ne ressortent pas de
l'arrêt attaqué, ce qui n'est pas admissible dans un recours en réforme.
Ainsi, la cour cantonale a retenu, d'une manière résistant au grief
d'arbitraire selon l'arrêt sur recours de droit public, que le mode de
liquidation adopté par les parties était propre à garantir les intérêts de la
cliente. Par ailleurs, aucun élément de l'arrêt attaqué ne permet de conclure
que X.________ ne comprenait pas le sens et la portée des opérations «swap»
lorsqu'il a donné son accord à cette manière de procéder. Il ne résulte pas
des constatations cantonales que le bénéficiaire de la demanderesse n'a pas
compris comment la position serait liquidée, qu'il ignorait ce qu'étaient des
opérations «swap», qu'il a posé des questions à ce sujet ou encore qu'il a
reçu des informations erronées. Dans ces conditions, la cour cantonale n'a
pas méconnu le droit fédéral en refusant de voir une violation d'une
obligation contractuelle de la banque dans la mise en place d'opérations
«swap», approuvées par le bénéficiaire de la demanderesse.

3.5 En conclusion, l'arrêt attaqué ne consacre aucune violation du droit
fédéral, de sorte que le recours sera rejeté.

4.
Vu le sort réservé au recours, il convient de mettre les frais judiciaires à
la charge de la demanderesse (art. 156 al. 1 OJ). Celle-ci versera en outre
des dépens à la défenderesse (art. 159 al. 1 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Un émolument judiciaire de 25 000 fr. est mis à la charge de la demanderesse.

3.
La demanderesse versera à la défenderesse une indemnité de 27 000 fr. à titre
de dépens.

4.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties et à la
Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève.

Lausanne, le 26 janvier 2005

Au nom de la Ire Cour civile
du Tribunal fédéral suisse

Le Président:  La Greffière: