Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Zivilabteilung 4C.287/2004
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4C.287/2004 /ech

Arrêt du 27 octobre 2004
Ire Cour civile

MM. et Mmes les Juges Corboz, président, Klett, Nyffeler, Favre et Kiss.
Greffier: M. Carruzzo.

Boas-EMS Clos Nestlé SA,
défenderesse et recourante, représentée par Me Nathalie Tissot,

contre

Nestlé SA,
Nestlé Suisse SA,
Société des Produits Nestlé SA,
demanderesses et intimées,
toutes trois représentées par Me Christian Fischer.

droit des marques,

recours en réforme contre le jugement de la Cour civile du Tribunal cantonal
du canton de Vaud du 14 juillet 2003.

Faits:

A.
A.a Nestlé SA, Nestlé Suisse SA et Société des Produits Nestlé SA
(demanderesses) ont toutes trois leur siège à Vevey. La première est inscrite
au registre du commerce depuis le 19 juillet 1905, la deuxième depuis le 18
décembre 1996 et la troisième depuis le 15 décembre 1936. Le but de Nestlé SA
est la participation à toutes entreprises, notamment dans le domaine de
l'alimentation. Les deux autres sociétés ont pour but la fabrication, la
vente et la distribution de tous produits, essentiellement alimentaires,
diététiques, pharmaceutiques, médicaux, cosmétiques et hygiéniques et elles
peuvent fournir, principalement sur le marché suisse, tous services et
déployer toute activité, en particulier dans le domaine de l'alimentation
humaine et animale, de la diététique, des soins aux nourrissons, de
l'éducation, de la publicité, de la restauration, des produits
pharmaceutiques, médicaux, cosmétiques et hygiéniques. Les trois sociétés
font partie du groupe Nestlé qui réalise un chiffre d'affaires annuel de 60
milliards de francs. Aucune d'entre elles n'exploite un établissement
médico-social (ci-après abrégé: EMS) et leurs statuts ne mentionnent pas les
soins et l'alimentation pour personnes âgées.
Boas-EMS Clos Nestlé SA (défenderesse), dont le siège est à Bercher, est
inscrite au registre du commerce depuis le 15 avril 1997. Elle a été fondée
par Boas SA, avec siège à St-Sulpice, ainsi que par Bernard et Anna Russi.
Son but social consiste dans l'exploitation de maisons pour personnes âgées,
d'EMS, de restaurants, d'hôtels et d'instituts de revitalisation.
Il n'existe pas de lien juridique ou économique entre la défenderesse et
l'une ou l'autre des demanderesses, sous réserve de l'achat occasionnel de
produits du groupe Nestlé par la défenderesse.
Les origines des demanderesses remontent à l'année 1878 qui a vu la société
"Farines lactées Henri Nestlé SA" commencer à fabriquer de telles farines
ainsi que du lait condensé. Devenue "Société Anonyme Henri Nestlé", cette
entreprise a fait construire une nouvelle usine à Bercher au printemps 1880.
Elle y a fabriqué du lait condensé jusqu'à la fermeture de l'usine en
décembre 1921. L'usine a été démolie entre 1938 et 1940.
La première usine Nestlé avait été construite sur une parcelle du cadastre de
la commune de Bercher, d'une surface de 19'743 m2, qui portait alors le n°
143. Après sa vente, en 1947, ladite parcelle a changé plusieurs fois de
mains. Le 28 novembre 1967, elle a été acquise par Alexandre Luthier, lequel
y a créé, en 1968, une pension pour personnes âgées qu'il a appelée "Clos
Nestlé". En 1985, Alexandre Luthier a vendu cette parcelle à Aldo et
Anna-Maria Valentinelli qui l'ont divisée en trois nouvelles parcelles:
l'une, d'une surface de 10'014 m2, a reçu le n° 410; une autre, d'une surface
de 8'729 m2, est devenue l'actuelle parcelle n° 143; quant aux 1'000 m2
restants, ils ont été attribués au domaine public. Le bâtiment désigné par la
suite comme "centre médico-social" se trouve sur l'actuelle parcelle n° 143
qui est séparée de la parcelle n° 410 par un chemin public. Bien que ces deux
parcelles aient été situées, pour le registre foncier, au lieu-dit "Clos
Nestlé", qui figurait déjà sur une carte de mensurations cadastrales datant
de 1933, le nom local "Clos Nestlé" n'est plus utilisé, depuis mars 1996, que
pour désigner la parcelle n° 410, sur laquelle avait été construite l'usine,
et il ne s'applique donc plus à la parcelle n° 143 où se trouve l'EMS.
Le 1er février 1997, Aldo et Anna-Maria Valentinelli ont remis à bail à la
société Boas SA, à St-Sulpice, pour une durée de cinq ans, l'"EMS Clos
Nestlé" sis au "Chemin de Boulens 14, 1038 Bercher". La défenderesse a alors
été constituée. Selon l'art. 6 de ses statuts, elle devait reprendre tous les
actifs et passifs de Boas SA relatifs à l'exploitation de l'EMS Clos Nestlé
depuis le 13 février 1997, ainsi que divers biens immobiliers mentionnés dans
le rapport de fondation, pour le prix maximum de 35'000 fr.
Enregistrée en Suisse et dans de très nombreux pays, la marque Nestlé est
utilisée depuis des décennies pour toute une série de produits et de
services. Elle couvre notamment des produits alimentaires, pharmaceutiques et
hygiéniques, etc., ainsi que des services dans les domaines de la publicité,
de la gestion d'affaires commerciales, de l'éducation, des divertissements,
des activités sportives et culturelles, de la restauration (alimentation),
etc.

A.b La défenderesse a fait paraître, sous le nom "Clos Nestlé", de la
publicité pour l'EMS qu'elle exploite à Bercher. Ce faisant, elle a mis en
évidence le nom NESTLE, en particulier dans les annonces publicitaires, et a
fait état, dans la presse, d'un "Parc Animalier EMS Clos Nestlé" à Bercher.
Ce parc a été créé pour l'agrément des pensionnaires de l'établissement et
des gens de la région.
Au début de l'année 1998, un ancien collaborateur de l'une des sociétés du
groupe Nestlé a signalé à celle-ci l'existence de cette publicité. Par lettre
du 23 avril 1998, la défenderesse a alors été invitée à cesser toute
utilisation du nom Nestlé et à modifier sa raison sociale. Elle s'y est
refusée, par lettre de son conseil du 30 avril 1998, en faisant valoir, entre
autres motifs, que Nestlé avait ouvert sa première usine dans le monde à
Bercher pour fabriquer du lait condensé; que, si l'usine avait été démolie,
la maison de la direction avait, en revanche, été conservée avant de devenir
un EMS; enfin, que le mot Nestlé, repris dans sa raison sociale, ne faisait
que perpétuer le nom de l'entreprise exploitée par les demanderesses.

B.
Après s'être fait délivrer un acte de non-conciliation, les demanderesses ont
ouvert action contre la défenderesse en concluant (1) à ce qu'il soit
constaté que l'usage du nom "Nestlé" dans sa raison sociale est illicite, (2)
à ce que soit ordonnée la radiation de la raison de commerce "Boas-EMS Clos
Nestlé SA", (3) à ce qu'interdiction soit faite à la défenderesse de faire
usage à l'avenir d'une raison sociale comportant le nom "Nestlé", sous la
menace pour ses organes des peines prévues à l'art. 292 CP, et (4) à ce
qu'ordre lui soit donné, sous la même commination, de modifier sa raison
sociale, ses papiers d'affaires ainsi que sa publicité, dans le délai imparti
par la justice, afin qu'ils ne comportent plus le nom "Nestlé". La
défenderesse a conclu au rejet de la demande.
Par jugement du 14 juillet 2003, la Cour civile du Tribunal cantonal du
canton de Vaud, admettant la demande pour l'essentiel, a fait interdiction à
la défenderesse d'utiliser le nom "Nestlé" dans sa raison sociale (ch. I du
dispositif), l'a sommée de requérir du registre du commerce du canton de
Vaud, dans les 30 jours dès l'entrée en force du jugement, la modification de
sa raison sociale de sorte que le nom "Nestlé" n'y apparaisse plus (ch. II du
dispositif) et lui a ordonné de modifier, dans les trois mois dès l'entrée en
force du jugement, ses papiers d'affaires et sa publicité afin que le nom
"Nestlé" n'y figure plus (ch. III du dispositif), le tout sous la menace,
pour ses organes, des peines prévues à l'art. 292 CP (ch. IV du dispositif).
Pour justifier cette interdiction et ces injonctions, la cour cantonale a
retenu que l'utilisation du nom "Nestlé" par la défenderesse violait le droit
à la marque ainsi que la raison sociale des demanderesses.

C.
La défenderesse interjette un recours en réforme au Tribunal fédéral. Elle
conclut au rejet intégral de la demande. A son avis, la cour cantonale a
admis sans raison valable l'existence d'un risque de confusion au regard du
droit des marques dès lors que l'on n'a pas affaire à une marque de haute
renommée et que ladite marque est utilisée pour d'autres services que ceux
qui sont offerts par la défenderesse. La raison sociale de cette dernière ne
créerait du reste aucun risque de confusion avec celle des demanderesses,
lesquelles ne pourraient de surcroît pas faire valoir le moindre intérêt
juridique à l'admission de leur demande.
Les demanderesses proposent le rejet du recours.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Aux termes de l'art. 15 al. 1 LPM, le titulaire d'une marque de haute
renommée peut interdire à des tiers l'usage de cette marque pour tous les
produits ou les services pour autant qu'un tel usage menace le caractère
distinctif de la marque, exploite sa réputation ou lui porte atteinte. Dans
leur réponse au recours, les demanderesses maintiennent que la marque
"Nestlé" est une marque de haute renommée.

1.1 La loi ne définit pas la haute renommée. Les critères déterminants pour
décider si une telle qualification s'applique à une marque donnée peuvent
cependant être déduits du but de l'art. 15 LPM, qui est de protéger les
marques de haute renommée contre l'exploitation de leur réputation,
l'atteinte portée à celle-ci et la mise en danger du caractère distinctif de
la marque. Semblable protection se justifie lorsque le titulaire de la marque
a réussi à susciter une renommée telle que cette marque possède une force de
pénétration publicitaire utilisable non seulement pour commercialiser les
produits et fournir les services auxquels elle était destinée à l'origine,
mais encore pour faciliter sensiblement la vente d'autres produits ou la
fourniture d'autres services. Cela suppose que la marque jouisse d'une
considération générale auprès d'un large public. En effet, aussi longtemps
que seuls des cercles d'acheteurs limités à un produit spécifique connaissent
la marque et l'apprécient, il n'existe pas d'intérêt légitime à lui assurer
une protection plus étendue (ATF 124 III 277 consid. 1a p. 279). Toutefois,
pour admettre que l'on a affaire à une marque de haute renommée, il ne suffit
pas que l'existence de la marque soit connue par un pourcentage élevé de
personnes, car cela ne permettrait plus de distinguer la haute renommée d'une
marque de sa notoriété (arrêt 4C.247/1996 du 13 novembre 1998, publié in sic!
2/1999 p. 132, consid. 8d). L'image positive que représente la marque auprès
du public est donc un critère qui ne doit pas être négligé (arrêt 4C.199/2001
du 6 novembre 2001, publié in sic! 3/2002 p. 162, consid. 4b). Il n'est
cependant pas nécessaire que cette image positive fasse l'unanimité en ce
sens que les produits ou les services désignés par la marque de haute
renommée remporteraient tous les suffrages sans exception. Ainsi, des marques
de cigarettes peuvent acquérir une haute renommée, quand bien même le fait de
fumer et, partant, les substances utilisées à cette fin sont, comme tels,
l'objet de controverses au sein du public (Eugen Marbach, Markenrecht, in
Roland von Büren/Lucas David, Schweizerisches Immaterialgüter- und
Wettbewerbsrecht, vol. III Kennzeichenrecht, p. 215).

1.2 Savoir si une marque est connue d'un large public et si elle bénéficie
d'une image positive auprès des personnes qui la connaissent sont des points
de fait qui doivent être allégués et prouvés par tous moyens adéquats, tel un
sondage d'opinion (arrêt 4C.199/2001, précité, consid. 3 et 4). Cependant, il
n'est pas nécessaire d'alléguer ni de prouver les faits notoires (ATF 130 III
113 consid. 3.4 p. 121; 117 II 321 consid. 2 p. 323; 109 II 231 consid. 3c/bb
p. 234; Fabienne Hohl, Procédure civile, tome I, n. 797 et 945). En l'espèce,
contrairement à l'avis de la cour cantonale, on peut considérer comme
notoire, même en l'absence d'éléments de preuve concrets, que "Nestlé", l'un
des tout premiers groupes alimentaires à l'échelle mondiale, est assurément
connu de la majorité du public suisse - Etat dans lequel l'entreprise a son
siège -, que les produits et les services commercialisés sous la marque
éponyme sont généralement considérés comme étant de qualité supérieure et
qu'ils jouissent en conséquence d'un grand prestige auprès du public. Les
demanderesses observent d'ailleurs, à juste titre, que, dans un arrêt
antérieur à l'adoption de l'art. 15 LPM, le Tribunal fédéral citait déjà la
marque "Nestlé" comme exemple d'une marque comportant un patronyme que le
public assimile immédiatement aux produits et aux services offerts par
l'entreprise qui utilise ladite marque (arrêt du 4 novembre 1975, publié in
GRUR Int. 1977 p. 79 ss, consid. 5c p. 82). Que la politique commerciale du
groupe Nestlé fasse l'objet de critiques dans certains milieux (par ex. la
vente d'aliments pour nourrissons dans les pays en voie de développement, qui
est critiquée par certaines organisations non gouvernementales) ne remet pas
en cause l'appréciation globalement positive qui s'attache à la qualité des
produits de cette entreprise et n'empêche pas que la marque "Nestlé" soit
considérée comme une marque de haute renommée au sens de l'art. 15 LPM. Par
conséquent, les demanderesses peuvent se prévaloir de cette disposition.

1.3 Pour les titulaires de marques de haute renommée, l'art. 15 LPM élargit
le champ de protection des droits conférés par la marque; dans cette mesure,
le principe de subsidiarité, qui régit le droit suisse des biens immatériels,
ne s'applique plus (Lucas David, Commentaire bâlois, 2e éd., n. 8 ad art. 15
LPM; Marbach, op. cit., p. 217). Le titulaire d'une marque de haute renommée
peut donc interdire à des tiers l'usage de cette marque pour les produits et
services de toute nature; il peut, en particulier, leur interdire de
l'utiliser pour offrir des produits ou des services, de s'en servir à des
fins publicitaires ou encore d'en faire usage de quelqu'autre manière dans
les affaires (art. 13 al. 2 LPM). L'interdiction d'employer la marque
d'autrui dans la publicité et les affaires doit être interprétée largement.
Elle vise également un usage qui est sans rapport avec les produits ou les
services offerts (ATF 126 III 322 consid. 3a p. 324 et l'auteur cité).
Au regard de ces principes, les demanderesses peuvent interdire à la
défenderesse d'utiliser leur marque de haute renommée "Nestlé" pour les
services d'un EMS. Elles peuvent également s'opposer à ce que la défenderesse
utilise cette marque comme élément de sa raison sociale, qu'elle s'en serve à
des fins publicitaires ou qu'elle en fasse un quelconque usage dans les
affaires. Titulaires d'une marque de haute renommée, les demanderesses ne
sont pas tenues de tolérer que la défenderesse exploite pour ses propres
besoins la réputation dont jouit leur marque (ATF 124 III 277 consid. 3a p.
285). A cet égard, il est manifeste que la défenderesse entend profiter d'une
telle renommée. L'intéressée a ouvert son EMS de Bercher à une époque où la
parcelle sur laquelle avait été construit cet établissement était déjà
séparée de celle désignée par le nom local "Clos Nestlé". Elle a non
seulement continué à utiliser le nom donné précédemment à la pension pour
personnes âgées, mais a encore utilisé ce nom à des fins publicitaires en
mettant en évidence le mot "Nestlé". Qui plus est, la défenderesse a intégré
ce patronyme dans sa raison sociale. En réponse à la sommation des
demanderesses de cesser toute utilisation du nom "Nestlé", elle a de surcroît
manifesté expressément sa volonté d'assurer la pérennité de ce nom. Les
demanderesses ne sont pas tenues de souffrir que la défenderesse exploite la
réputation de leur marque de haute renommée et profite ainsi à moindres frais
des prestations de tiers. On ne saurait non plus les obliger à accepter de
voir le caractère distinctif de leur marque s'estomper du fait de
l'utilisation indue de celle-ci par un tiers non autorisé.

1.4 La cour cantonale a certes refusé à tort de reconnaître la haute renommée
dont jouit la marque des demanderesses. Cependant, elle a fait droit, par un
autre raisonnement, aux prétentions élevées par ces dernières au titre de la
violation du droit à la marque. C'est ainsi qu'elle a interdit à la
défenderesse d'utiliser le nom "Nestlé" dans sa raison sociale et l'a
enjointe de modifier cette raison de même que ses papiers d'affaires et sa
publicité. Ce faisant, elle a rendu une décision qui est conforme au droit
fédéral, sinon dans tous ses motifs, du moins dans son résultat. Le recours
de la défenderesse doit dès lors être rejeté. Point n'est besoin, par
conséquent, d'examiner si les prétentions litigieuses auraient également dû
être admises sous l'angle du droit des raisons sociales.

2.
La défenderesse ne conteste pas, à juste titre, le rejet, par la cour
cantonale, du moyen pris de la péremption des droits des demanderesses. A
supposer qu'elle entende mettre en doute l'intérêt à agir de celles-ci, force
serait de constater qu'elle le fait en contestant l'existence d'un risque de
confusion entre les dénominations utilisées par les parties, et ce au regard
du droit des raisons sociales, du droit de la concurrence et du droit au nom.
L'argumentation qu'elle développe à ce propos est toutefois sans objet, dans
la mesure où les prétentions des demanderesses doivent être admises du point
de vue du droit des marques.

3.
La défenderesse, qui succombe, payera les frais judiciaires afférents à la
procédure fédérale (art. 156 al. 1 OJ). Elle versera, en outre, des dépens
aux demanderesses (art. 159 al. 1 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Un émolument judiciaire de 3'000 fr. est mis à la charge de la recourante.

3.
La recourante versera aux intimées, créancières solidaires, une indemnité de
4'000 fr. à titre de dépens.

4.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties et à la
Cour civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud.

Lausanne, le 27 octobre 2004

Au nom de la Ire Cour civile
du Tribunal fédéral suisse

Le président:  Le greffier: