Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Zivilabteilung 4C.216/2004
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4C.216/2004 /fzc

Arrêt du 28 octobre 2004
Ire Cour civile

MM. les Juges Corboz, président, Nyffeler et Favre.
Greffière: Mme Cornaz.

A. ________,
défendeur et recourant, représenté par Me Alain Veuillet, avocat,

contre

I.________ SA,
P.________,
demandeurs et intimés, tous les deux représentés par
Me Philippe Pasquier, avocat,

convention; légitimation active,

recours en réforme contre l'arrêt de la Chambre civile
de la Cour de justice du canton de Genève
du 23 avril 2004.

Faits:

A.
Le 20 février 1995, I.________ SA, dont le siège social est en France, et
P.________, également domicilié en France, agissant pour son compte, ont
saisi le Tribunal de première instance du canton de Genève d'une demande en
paiement dirigée contre A.________, domicilié dans le canton de Genève.
Le 7 décembre 2000, le Tribunal de commerce de N.________, en France, a
ouvert une procédure simplifiée de redressement judiciaire de I.________ SA
et désigné un administrateur. Cette situation nouvelle n'a été signalée par
aucun des plaideurs.
Par jugement du 14 juin 2001, le Tribunal de première instance du canton de
Genève, se référant aux qualités des parties portées sur l'assignation, a
condamné A.________ à payer à I.________ SA et à P.________ l'équivalent en
francs suisses, au jour du prononcé du jugement, des montants de 699'187 et
50'000 francs français avec intérêt dès le 17 février 1995.
Le 27 août 2001, A.________ a appelé de ce jugement, contre lequel I.________
SA et P.________ ont formé un appel incident. Dans son acte d'appel,
A.________, conformément au jugement de première instance, a mentionné
I.________ SA, avec le siège social indiqué dans l'acte introductif
d'instance, et P.________, comme parties intimées. Aucun des plaideurs n'a
fait état de ce que le Tribunal de commerce de N.________ avait, par jugement
du 16 février 2001, arrêté le plan de redressement judiciaire par cession
totale de l'entreprise et désigné un commissaire à l'exécution du plan.
Dans son arrêt du 13 septembre 2002, la Cour de justice du canton de Genève a
repris sans changement les qualités des parties. Elle a annulé le chiffre 1
du dispositif du jugement attaqué et, statuant à nouveau sur ce point,
condamné A.________ à payer à I.________ SA l'équivalent en francs suisses,
au cours du 31 décembre 2001, des montants de 699'187 et 50'000 francs
français avec intérêt à 5% l'an dès le 17 février 1995, confirmant le
jugement dans ses autres dispositions et déboutant les parties de toutes
autres conclusions. Cet arrêt est définitif pour n'avoir pas été l'objet d'un
recours au Tribunal fédéral.
A la date du 17 octobre 2003, I.________ SA était toujours inscrite dans le
registre du commerce et des sociétés.

B.
Le 8 décembre 2003, A.________ a saisi la Cour de justice du canton de Genève
d'une demande en révision de l'arrêt du 13 septembre 2002. Il a prétendu à sa
rétractation avant de conclure à ce que cette autorité constate que
I.________ SA a perdu le 7 décembre 2000 la légitimation active et la
capacité d'être partie à la procédure, constate la nullité de plein droit des
actes de procédure accomplis depuis cette date par I.________ SA, déboute
I.________ SA et P.________ de toutes leurs conclusions, les condamne en tous
les dépens et confirme l'arrêt du 13 septembre 2002 en tant qu'il déboute
I.________ SA et P.________ de toutes autres conclusions, sur appel principal
et sur appel incident. Il a expliqué avoir eu connaissance le 8 octobre 2003
de la mise en liquidation judiciaire de I.________ SA, à l'occasion d'une
procédure de mainlevée de l'opposition au commandement de payer que celle-ci
lui avait fait notifier en date du 21 août 2003. Du point de vue du droit, il
a soutenu que des pièces décisives avaient été retenues par I.________ SA et
P.________ et qu'ainsi l'arrêt de la Cour avait été obtenu par surprise ou
machination frauduleuse, toutes circonstances qui impliquaient sa
rétractation. Par rapport au fond, il a plaidé que I.________ SA, dépourvue
depuis le 7 décembre 2000 de la légitimation active et de la capacité d'être
partie à la procédure, devait être déboutée des fins de sa demande en
paiement.
Par arrêt du 23 avril 2004, la Cour de justice du canton de Genève a déclaré
irrecevable la demande en révision formée par A.________. Elle a rappelé que
le recours en révision était soumis à l'exigence de l'intérêt juridique en ce
sens que la décision sur recours doit être de nature à procurer au recourant
l'avantage de droit matériel qu'il recherche. Elle a relevé que A.________
invoquait la mise en redressement judiciaire de I.________ SA, ce qui
revenait à se prévaloir d'une modification des qualités de cette partie. Elle
a considéré que cette circonstance était étrangère à l'objet du litige, en ce
sens que la société conservait son existence et qu'en d'autres termes, la
situation nouvelle résultant des jugements du Tribunal de commerce de
N.________ n'emportait de conséquence que sur le libellé de la raison sociale
de celle-ci, qui devait être rectifiée pour indiquer que la société avait été
mise en liquidation (sic), et restait sans incidence sur sa légitimation
active. Elle a conclu que la procédure de redressement judiciaire n'était
ainsi pas susceptible de modifier la situation juridique de A.________, que
par ailleurs celui-ci ne prétendait pas avoir été empêché de défendre
efficacement ses intérêts en raison de cet événement et que, dès lors, le
recours était irrecevable en l'absence d'un intérêt juridique.

C.
A.________ (le défendeur) interjette un recours en réforme au Tribunal
fédéral. Il conclut à ce qu'il lui plaise: A. réformer l'arrêt attaqué, cela
fait premièrement rétracter l'arrêt de la Cour de justice du 13 septembre
2002 en tant qu'il le condamne à payer plusieurs sommes à I.________ SA et
compense les dépens et, statuant à nouveau, constater que I.________ SA a
perdu le 7 décembre 2000 la légitimation active et la capacité d'être partie
à la procédure, constater la nullité de plein droit des actes de procédure
accomplis depuis cette date par celle-ci, débouter celle-ci et P.________ de
toutes leurs conclusions et les condamner aux dépens, deuxièmement confirmer
l'arrêt du 13 septembre 2002 en tant qu'il déboute I.________ SA et
P.________ de toutes autres conclusions sur appel principal et sur appel
incident; B. débouter I.________ SA et P.________ de toutes autres
conclusions et les condamner aux dépens.

I. ________ SA (la demanderesse) et P.________ (le demandeur) concluent
préalablement à ce que le Tribunal fédéral ordonne la rectification de la
désignation des parties en ce sens que la société I.________ SA doit être
désignée sous ce seul nom, sans adjonction de la mention - erronée - "en
liquidation judiciaire par cession totale de l'entreprise", principalement au
rejet et subsidiairement à l'irrecevabilité du recours, avec suite de frais
et dépens.
Par arrêt de ce jour, le Tribunal fédéral a rejeté, dans la mesure de sa
recevabilité, le recours de droit public déposé parallèlement par A.________.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recours
qui lui sont soumis (ATF 130 II 65 consid. 1, 321 consid. 1).

2.
Statuant en premier lieu, conformément à l'art. 57 al. 5 OJ, sur le recours
de droit public interjeté parallèlement au présent recours en réforme et
examinant la recevabilité des moyens du défendeur sous l'angle de l'art. 84
al. 2 OJ, la Cour de céans est arrivée à la conclusion que ceux-ci ne
pouvaient être soumis au Tribunal fédéral ni par la voie du recours en
réforme, ni par celle du recours en nullité (cf. consid. 2.1). Dans ces
circonstances, elle se limitera à constater formellement cette irrecevabilité
dans l'arrêt sur le recours en réforme, en renvoyant les parties à la lecture
de l'arrêt sur le recours de droit public pour la motivation de ce refus
d'entrer en matière.

3.
Compte tenu de l'issue du litige, les frais et dépens seront supportés par le
défendeur (art. 156 al. 1 et 159 al. 1 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est irrecevable.

2.
Un émolument judiciaire de 6'000 fr. est mis à la charge du défendeur.

3.
Le défendeur versera aux demandeurs, créanciers solidaires, une indemnité de
7'000 fr. à titre de dépens.

4.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties et à la
Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève.

Lausanne, le 28 octobre 2004

Au nom de la Ire Cour civile
du Tribunal fédéral suisse

Le président:  La greffière: