Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Zivilabteilung 4C.136/2004
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4C.136/2004 /fzc

Arrêt du 13 juillet 2004
Ire Cour civile

MM. et Mmes les Juges Corboz, président, Rottenberg Liatowitsch, Nyffeler,
Favre et Kiss.
Greffier: M. Carruzzo.

Servette de Genève Football SA,
défenderesse et recourante, représentée par
Me Shahram Dini, avocat,

contre

X.________ SA,
demanderesse et intimée, représentée par Me Tal Schibler, avocat,

contrat de courtage,

recours en réforme contre l'arrêt de la Chambre civile de la Cour de justice
genevoise du 13 février 2004.

Faits:

A.
A.a  Le 6 octobre 2000, l'assemblée générale extraordinaire des actionnaires
de Y.________ SA a décidé de transférer le siège de cette société de Zoug à
Fribourg et de modifier sa raison sociale, qui est devenue X.________ SA.
Elle a désigné de nouveaux administrateurs, au nombre desquels figuraient
A.________, président, et B.________. La signature à deux a été attribuée aux
administrateurs. Ces modifications statutaires ont été inscrites au registre
du commerce du canton de Fribourg, le 24 novembre 2000. La raison sociale et
le siège précédents sont indiqués sur le registre. Y.________ SA a été radiée
du registre du commerce du canton de Zoug en janvier 2001. Entre autres
activités, X.________ SA s'occupe de transferts dans tous les domaines
sportifs, notamment le football.

Servette de Genève Football SA (ci-après: Servette) est une société anonyme
dont le siège est à Genève et qui exploite le club de football professionnel
du même nom. En 2000-2001, C.________ était son administrateur-président,
avec signature individuelle, et D.________ son directeur général, avec
signature collective à deux.

B.  ________ a été, par le passé, directeur sportif, puis entraîneur de la
première équipe de Servette.

En 2000, Martin Petrov, joueur de nationalité bulgare, évoluait au Servette.

E. ________ était son agent.

Z.  ________ AG (ci-après: Z.________), dont le siège est à Winterthur, est
active dans le transfert de joueurs de football; ses responsables sont
F.________ et G.________.

A.b  E.________ est entré en contact avec Z.________ en été 2000 en vue d'un
éventuel transfert de Martin Petrov en Allemagne. A la demande de ladite
société, il lui a remis un mandat écrit, daté du 15 juin 2000 et signé par
D.________, qui fixait à 5'000'000 DM le montant réclamé par Servette pour le
transfert de ce joueur. Sur cette base, Z.________ s'est mise à la recherche
de possibilités de transfert et a contacté le WfL Wolfsburg, club de
Bundesliga, qui l'a mandatée pour effectuer ce transfert.

Au printemps 2000, E.________ avait fait la connaissance de  B.________ et
lui avait fait part du souhait de Martin Petrov de quitter Servette pour
rejoindre de préférence un club de Bundesliga. Son interlocuteur lui avait
indiqué, à l'occasion de leur rencontre, qu'il pourrait éventuellement
obtenir de Servette un mandat pour un transfert à un prix inférieur au
montant susmentionné.
Le 24 octobre 2000, C.________ a adressé à B.________, au numéro de
X.________ SA, une télécopie ainsi libellée:

"Cher B.________,

Je fais suite à notre conversation et te confirme que le transfert du joueur
Martin Petrov ne pourra se réaliser que contre une indemnité minimum de 3,5
millions de francs suisses.

Dans le cadre d'un transfert dans ces conditions, le Servette te rémunérera
d'un montant de 250'000 CHF.

Ce joueur ne pourra pas quitter le Club avant janvier 2001.

D'autre part, aucune discussion avec le joueur ou avec le Club ne pourra
avoir lieu avant le 6 novembre 2000 afin de préserver le domaine sportif.

Je te remercie de bien vouloir me tenir informé régulièrement de l'avancement
de tes contacts.

Sincères salutations."
Par courrier du même jour, adressé à C.________ sur papier à en-tête de
X.________ SA et signé par eux sous cette raison sociale, B.________ et
A.________, se référant à la télécopie précitée, ont indiqué au président de
Servette que Martin Petrov intéressait le BSC Hertha, à Berlin, et qu'ils le
tiendraient au courant de l'évolution de cet éventuel transfert.
Le 16 novembre 2000, B.________, agissant au nom de X.________ SA, a envoyé
un fax à C.________ pour l'informer qu'un rendez-vous avait lieu à la fin de
ladite semaine relativement au transfert de Martin Petrov et pour lui
indiquer qu'il prendrait contact avec lui au début de la semaine suivante
afin d'organiser une rencontre.

Par fax du 4 décembre 2000 adressé à B.________, C.________ a précisé
qu'aucune décision sur le transfert de Martin Petrov ne pouvait se faire sans
une discussion préalable et sans son accord. Il ajoutait  que plusieurs clubs
s'intéressaient à ce joueur, si bien que Servette pourrait être amené à
refuser certaines propositions.

X.  ________ SA a répondu à C.________, par fax de B.________ du 5 décembre
2000, qu'à la suite du récent entretien avec E.________ et les clubs
intéressés par Martin Petrov, une décision définitive serait prise à partir
du 15 décembre 2000, dont il espérait une issue favorable.
Par fax du 13 décembre 2000, Z.________ a confirmé à B.________ qu'une
rencontre aurait lieu le 20 décembre 2000 à l'aéroport de Kloten, au sujet
des modalités du transfert de Martin Petrov, entre le président de Servette,
l'agent du joueur et F.________, ce dernier agissant comme mandataire d'un
club de Bundesliga.
Le même jour, B.________, pour X.________ SA, a confirmé ce rendez-vous à
C.________.
Par télécopie du 15 décembre 2000, X.________ SA, via B.________, a fait
savoir à Z.________ que le président de Servette exigeait qu'un dirigeant
officiel du club acheteur soit présent à la réunion du 20 décembre 2000. A la
même date, X.________ SA a envoyé à C.________ un fax signé par B.________
dans lequel elle lui indiquait notamment ce qui suit: "Selon nos
informations, M. F.________ vient donc en qualité de représentant, muni d'un
mandat en bonne et due forme, pour le compte du WfL Wolfsburg".
Le 19 décembre 2000, X.________ SA a adressé à Z.________ une lettre portant
la signature de B.________. Elle y contestait la condition mise par cette
dernière société à sa participation au rendez-vous du lendemain, à savoir la
confirmation, par C.________, du prix du transfert tel qu'indiqué dans la
télécopie précitée du 24 octobre 2000.

G.  ________ est alors entré en contact et en négociations directement avec
C.________. Les pourparlers ont été conduits sans la participation de
B.________. Une première réunion s'est déroulée à Zurich entre le 20 et le 31
décembre 2000. D'autres discussions ont eu lieu par la suite, notamment à
Paris.
Martin Petrov a finalement été transféré au WfL Wolfsburg, au premier
trimestre 2001, pour une somme supérieure à 3'500'000 fr. Le transfert s'est
fait par le truchement de E.________ et de Z.________, celle-ci ayant joué le
rôle d'intermédiaire entre les deux clubs qui ont tous deux rémunéré ses
services.

A.c  Le 25 janvier 2001, A.________, pour X.________ SA, a envoyé à
C.________
un fax l'invitant à verser le montant de 250'000 fr. mentionné dans le
courrier du 24 octobre 2000. Il s'est vu opposer une fin de non-recevoir,
C.________ soutenant que le courrier en question ne constituait en aucune
façon un engagement de Servette en faveur de B.________. Une mise en demeure
ultérieure, en date du 9 mai 2001, est restée sans effet.

B.
Le 14 juin 2001, X.________ SA a assigné Servette en paiement de 250'000 fr.,
avec intérêts à 5% dès le 24 février 2001, à titre de rémunération pour son
activité de courtier.
Servette (ci-après: la défenderesse) a conclu au rejet de la demande.

Par jugement du 8 avril 2003, le Tribunal de première instance du canton de
Genève a débouté la demanderesse de toutes ses conclusions, faute de
légitimation active.
Statuant le 13 février 2004, sur appel de la demanderesse, la Chambre civile
de la Cour de justice du canton de Genève a annulé le jugement de première
instance et condamné la défenderesse à payer à la demanderesse la somme de
250'000 fr. avec intérêts à 5% dès le 24 février 2001.

C.
Parallèlement à un recours de droit public, qui a été rejeté par arrêt séparé
de ce jour, la défenderesse a déposé un recours en réforme. Elle y invite le
Tribunal fédéral à rejeter la demande. A titre subsidiaire, la défenderesse
requiert le renvoi de la cause à la cour cantonale pour nouveau jugement dans
le sens des considérants de l'arrêt fédéral.

La demanderesse conclut au rejet du recours en réforme dans la  mesure de sa
recevabilité.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
1.1
Interjeté par la partie qui a été condamnée à verser une somme d'argent à
l'autre partie et dirigé contre un jugement final rendu en dernière instance
cantonale par un tribunal supérieur (art. 48 a. 1 OJ) dans une contestation
civile dont la valeur litigieuse dépasse largement le seuil de 8'000 fr. fixé
à l'art. 46 OJ, le recours en réforme est en principe recevable, puisqu'il a
été déposé en temps utile (art. 54 al. 1 OJ) et dans les formes requises
(art. 55 OJ).

1.2  Saisi d'un tel recours, le Tribunal fédéral doit conduire son
raisonnement sur la base des faits contenus dans la décision attaquée, à
moins que des dispositions fédérales en matière de preuve n'aient été
violées, qu'il y ait lieu à rectification de constatations reposant sur une
inadvertance manifeste (art. 63 al. 2 OJ) ou qu'il faille compléter les
constatations de l'autorité cantonale parce que celle-ci n'a pas tenu compte
de faits pertinents, régulièrement allégués et clairement établis (art. 64
OJ; ATF 127 III 248 consid. 2c; 126 III 59 consid. 2a).

Au surplus, la juridiction de réforme ne peut aller au-delà des conclusions
des parties, mais elle n'est pas liée par les motifs invoqués dans les
écritures (art. 63 al. 1 OJ), ni par l'argumentation juridique retenue par la
cour cantonale (art. 63 al. 3 OJ; ATF 130 III 136 consid. 1.4 in fine, p.
140).

2.
Le premier point litigieux a trait à la légitimation active de la
demanderesse, question sur laquelle les deux juridictions cantonales ont
rendu des décisions opposées.

2.1
2.1.1Pour exclure la légitimation active de la demanderesse, le Tribunal de
première instance a considéré que celle-ci n'était pas partie au "contrat" du
24 octobre 2000, car elle ne pouvait pas passer d'actes juridiques avant son
inscription au registre du commerce, opérée le 24 novembre 2000. En outre,
comme ledit "contrat" n'avait pas été conclu expressément au nom de la
demanderesse, il était exclu de faire application de l'art. 645 al. 2 CO dans
la présente espèce.

La Cour de justice a motivé comme il suit la solution inverse: la
demanderesse et Y.________ SA ne sont pas deux sociétés anonymes distinctes
mais une même entité disposant de la personnalité. Cependant, les
modifications décidées par l'assemblée générale de Y.________ SA, le 6
octobre 2000, ne sont devenues opposables à la défenderesse qu'à partir de
leur inscription au registre du commerce, opérée le 24 novembre 2000. Ainsi,
le 24 octobre 2000, la demanderesse ne pouvait pas s'engager ou être engagée
à l'égard de tiers sous sa nouvelle raison sociale, car elle n'existait pas
encore à cette date et B.________ ne disposait pas de pouvoirs pour la
représenter. Il ressort toutefois des circonstances de la cause en litige que
le contrat de courtage a été conclu postérieurement à l'inscription de la
demanderesse au registre du commerce. Cette dernière possède donc la
légitimation active pour rechercher la défenderesse. En effet, si les parties
n'ont certes pas conclu expressément un contrat de courtage après le 24
novembre 2000, elles ont confirmé, par leur comportement respectif, la
correspondance échangée le 24 octobre 2000 qui présentait toutes les
caractéristiques d'un tel contrat, B.________ ayant agi au su de C.________,
lequel ne s'est pas opposé à ses démarches. Les parties étaient donc bel et
bien liées par un contrat de courtage en vertu duquel la demanderesse était
chargée d'indiquer à la défenderesse une occasion de conclure une convention
visant au transfert de Martin Petrov.

2.1.2  A l'appui de son recours en réforme, la défenderesse reproche à la
Cour
de justice d'avoir violé les dispositions du droit privé fédéral régissant la
représentation (art. 32 ss CO) et la création d'un rapport contractuel (art.
1er ss CO).

Selon la défenderesse, comme la demanderesse n'existait pas encore au moment
de la conclusion du contrat de courtage, soit le 24 octobre 2000, elle ne
pouvait pas ratifier valablement ce contrat après qu'elle avait été inscrite
au registre du commerce, car les effets de la représentation remontent à la
date de la création du lien contractuel noué par l'intermédiaire du
représentant. Les juges d'appel ne se seraient ainsi pas avisés de ce que la
ratification remédie certes à l'absence de pouvoirs du représentant, mais pas
à l'inexistence de la personne au nom de laquelle celui-ci a agi.

La défenderesse soutient, par ailleurs, que la thèse voulant qu'un contrat de
courtage ait été conclu postérieurement au 24 novembre 2000 ne résiste pas à
l'examen. Elle suppose, en effet, la conclusion de deux contrats: un premier,
le 24 octobre 2000; un second, après le 24 novembre 2000. Or, il n'y aurait
pas, dans l'arrêt attaqué, un début de démonstration de la création d'un
nouveau rapport contractuel, fût-ce par actes concluants, les actes posés
avant le 24 novembre 2000 ne pouvant pas être considérés comme tels en bonne
logique. On ignore tout, au demeurant, de ce prétendu contrat de courtage qui
lierait les parties, à commencer par la date exacte de sa conclusion; son
contenu n'a pas non plus été établi.

Par conséquent, au raisonnement contradictoire de la Cour de justice, il
convient de préférer celui du Tribunal de première instance.

2.1.3  La demanderesse rétorque que, si les juges d'appel ont certes admis
que
les éléments essentiels du contrat de courtage avaient été définis le 24
octobre 2000, ils ont retenu que l'accord entre les parties était venu à chef
après le 24 novembre 2000. A son avis, les pièces versées au dossier
démontrent sans conteste l'existence de démarches effectuées par elle au su
de la défenderesse en vue du transfert du joueur bulgare. Il en ressort
également que c'est par son intermédiaire que cette dernière est entrée en
relation avec le club de Wolfsburg qui lui a versé la somme de 6'000'000 fr.
pour ce transfert. Aussi est-ce à bon droit que la Cour de justice a admis
l'existence d'un contrat de courtage liant les parties au présent litige.
Titulaire de la créance dérivant de ce contrat, la demanderesse possédait
donc la légitimation active qui lui permettait d'agir en justice contre la
défenderesse pour obtenir le paiement de son salaire de courtier.

2.2  La légitimation active (appelée aussi qualité pour agir) appartient aux
conditions matérielles de la prétention litigieuse. Elle se détermine selon
le droit de fond et son défaut conduit au rejet de l'action, qui intervient
indépendamment de la réalisation des éléments objectifs de la prétention
litigieuse. La reconnaissance de la qualité pour agir signifie que le
demandeur peut faire valoir sa prétention contre le défendeur (ATF 126 III 59
consid. 1a p. 63 et les arrêts cités).

En l'espèce, la légitimation active de la demanderesse suppose que celle-ci
ait noué un lien contractuel avec la défenderesse.

2.2.1  Il ressort de la télécopie adressée le 24 octobre 2000 par C.________
à
B.________ qu'un contrat de courtage, au sens des art. 412 ss CO, a été
conclu oralement avant cet envoi entre la défenderesse, représentée par le
premier nommé, et B.________. On indiquera plus loin la raison pour laquelle
il convient d'admettre, malgré tout, que la défenderesse a noué cette
relation contractuelle non pas avec B.________, mais avec la demanderesse,
représentée par cette personne (cf. consid. 2.2.2.2.3 ci-après).

Apparaît, dès lors, comme artificielle l'hypothèse, émise par les juges
d'appel, selon laquelle les parties, une fois la demanderesse inscrite au
registre du commerce sous sa nouvelle raison sociale, auraient confirmé, par
des actes concluants, la teneur de la correspondance échangée le 24 octobre
2000, qui comprenait déjà tous les éléments essentiels du contrat de
courtage. Le raisonnement de la cour cantonale repose, en effet, sur l'idée
sous-jacente de la conclusion successive de deux contrats distincts. En
réalité, la Cour de justice a confondu les actes d'exécution d'un contrat
existant avec la conclusion d'un nouveau contrat.

Aussi convient-il de rechercher si la demanderesse a pu conclure valablement
un contrat de courtage avec la défenderesse avant le 24 novembre 2000, date à
laquelle sa nouvelle raison sociale a été inscrite au registre du commerce.

2.2.2
2.2.2.1Aux termes de l'art. 32 al. 1 CO, les droits et les obligations
dérivant d'un contrat fait au nom d'une autre personne par un représentant
autorisé passent au représenté. Il s'ensuit que le représentant n'est pas lié
par l'acte accompli. Les effets de la représentation ne naissent que si le
représentant dispose du pouvoir de représentation, c'est-à-dire s'il est
habilité à faire naître des droits et des obligations directement en faveur
et à la charge du représenté, et si le représentant a la volonté d'agir comme
tel.

La représentation directe suppose que le représentant agisse expressément ou
tacitement au nom du représenté (cf. art. 32 al. 2 CO). Exceptionnellement,
la loi admet la représentation directe même si le représentant a agi en son
propre nom, lorsqu'il était indifférent au tiers de traiter avec le
représentant ou le représenté.

Lorsque le représentant agit en son propre nom, mais pour le compte d'une
autre personne, la représentation est dite indirecte; le contrat ne lie alors
que les parties et ne déploie aucun effet direct sur le représenté, lequel ne
peut acquérir de droits ou d'obligations qu'en vertu d'une cession de créance
ou d'une reprise de dette postérieure à la conclusion du contrat (cf. art. 32
al. 3 CO), voire par l'effet de la subrogation légale découlant de l'art. 401
CO (arrêt 4C.31/1998 du 21 décembre 1998, consid. 5b/bb et les auteurs
cités). Suivant les circonstances, la distinction entre la représentation
directe et indirecte peut s'avérer délicate (ATF 126 III 59 consid. 1b et les
arrêts cités).

Les règles régissant la représentation s'appliquent aussi aux sociétés.
Demeurent réservées les dispositions spéciales sur les pouvoirs des
représentants et organes de sociétés, ainsi que des fondés de procuration et
autres mandataires commerciaux (art. 40 CO).

2.2.2.2
2.2.2.2.1Pour qu'un acte juridique fait au nom d'autrui par un représentant
puisse sortir ses effets dans la personne du tiers, il faut naturellement que
le représenté existe au moment où cet acte est accompli, sous réserve du cas
très particulier du nasciturus (cf. art. 31 al. 2 CC). Ainsi, les actes faits
au nom de la société anonyme avant que celle-ci n'ait acquis la personnalité
par son inscription au registre du commerce (cf. art. 643 al. 1 CO)
entraînent la responsabilité personnelle et solidaire de leurs auteurs (art.
645 al. 1 CO). Pour qu'ils engagent la future société, à l'exclusion de
ceux-ci, il faut que les obligations aient été expressément contractées au
nom de la société et qu'elles aient été assumées par cette dernière dans les
trois mois à dater de son inscription (art. 645 al. 2 CO; cf. ATF 123 III 24
consid. 2d et les références).

Les circonstances du cas concret n'entrent pas dans les prévisions de la
disposition citée. De fait, le contrat de courtage que B.________ avait
conclu avec la défenderesse, sans indiquer du reste expressément à celle-ci
qu'il agissait au nom de la demanderesse (cf., sur ce point, le consid. 2.2.1
ci-dessus et le consid. 2.2.2.2.3 ci-après), ne l'a pas été pour le compte
d'une société en voie de création, mais bien pour celui d'une société
existante qui était en train de changer de raison sociale. Les deux
hypothèses doivent être soigneusement distinguées en ce sens que, par la
constitution d'une société anonyme, un nouveau sujet de droit est créé,
tandis que, en cas de modification de la raison sociale, seul le nom d'une
société qui existe déjà est changé (cf. ATF 128 III 137 consid. 4a). On ne
saurait donc soutenir, comme l'ont fait apparemment les deux juridictions
cantonales, qu'il n'y avait pas, avant le 24 novembre 2000, une entité
susceptible de contracter avec la défenderesse par l'intermédiaire d'un
représentant. Sans doute cette entité ne portait-elle pas encore le nom qui
est aujourd'hui le sien, puisque la décision prise le 6 octobre 2000 par
l'assemblée générale de Y.________ SA de modifier sa raison sociale n'avait
pas encore été inscrite au registre du commerce (cf. art. 647 al. 3 CO; sur
l'effet constitutif d'une telle inscription, voir Guillaume Vianin,
L'inscription au registre du commerce et ses effets, p. 253 ss, spéc.  p.
263/264). Cela ne l'empêchait toutefois pas d'acquérir des droits et de
contracter des obligations. Au demeurant, on ne voit pas en quoi le fait que
la demanderesse s'était engagée, par anticipation, sous sa nouvelle raison
sociale ait pu avoir une quelconque incidence sur la position juridique de
son partenaire contractuel. Qu'elle ait contracté sous le nom de X.________
SA plutôt que sous celui d'Y.________ SA ne changeait rien pour la
défenderesse, qui avait toujours en face d'elle une seule et unique personne
morale ayant les mêmes capacités financières. En réalité, on est en présence
d'une erreur de dénomination due vraisemblablement au fait que les personnes
ayant agi pour la demanderesse ignoraient à quel moment la nouvelle
dénomination entrait en vigueur. Or, une telle erreur n'empêchait pas la
conclusion du contrat de courtage entre Servette et X.________ SA,
puisqu'aussi bien l'art. 18 al. 1 CO commande de ne point s'y arrêter. D'où
il suit que le changement de raison sociale en cours n'interdisait pas à la
demanderesse de conclure le contrat de courtage litigieux avec la
défenderesse par le truchement d'un représentant.

2.2.2.2.2  La demanderesse a conclu le contrat de courtage par
l'intermédiaire
d'un représentant, à savoir B.________. Pour qu'elle puisse déduire des
droits de ce contrat, il faut que son représentant ait disposé du pouvoir de
la représenter.

Lors de l'assemblée générale de ses actionnaires tenue le 6 octobre 2000,
Y.________ SA, devenue par la suite X.________ SA, a désigné B.________ comme
nouvel administrateur avec signature collective à deux. Sous réserve de cette
limitation, prévue à l'art. 718a al. 2 CO, cette personne avait donc le
pouvoir de représenter la société à l'égard des tiers, en vertu de l'art. 718
al. 1 CO. Vrai est-il que l'inscription du nom de B.________ au registre du
commerce, prescrite par l'art. 720 CO, n'est intervenue qu'après la
conclusion du contrat de courtage. Cette circonstance n'est toutefois pas
décisive. En effet, jurisprudence et doctrine considèrent que l'inscription
au registre du commerce n'est pas une condition de l'existence d'un pouvoir
de représentation, ni sur le plan interne ni sur le plan externe (ATF 96 II
439 consid. 2; 76 I 338 consid. 5 p. 351 i.f./352; Peter Forstmoser/Arthur
Meier-Hayoz/Peter Nobel, Schweizerisches Aktienrecht, n. 106 ad § 30; Rolf
Ditesheim, La représentation de la société anonyme, thèse Lausanne 2000, p.
179).

De même, il n'est pas déterminant que B.________ ait traité avec le
représentant de la défenderesse sans le concours d'un autre administrateur,
bien qu'il ne disposât que de la signature collective à deux. Il est, en
effet, indéniable que la demanderesse a ratifié ultérieurement, de manière
concluante, ne serait-ce qu'en ouvrant action en son nom contre la
défenderesse, les actes accomplis par cet administrateur en violation de la
limitation de son pouvoir de représentation (sur la possibilité d'un telle
ratification, cf. l'ATF 128 III 129 consid. 2b p. 136 et l'auteur cité).

2.2.2.2.3  La représentation directe suppose que le représentant agisse
expressément ou tacitement au nom du représenté.

En l'occurrence, B.________ n'a pas agi expressément au nom de la
demanderesse. On en veut pour preuve le fait que, dans la télécopie qu'il lui
avait envoyée le 24 octobre 2000, C.________ s'était adressé à lui
personnellement, en le tutoyant et en lui indiquant que la défenderesse lui
verserait un montant de 250'000 fr. au cas où le transfert de Martin Petrov
se ferait aux conditions indiquées par elle. De cette télécopie on peut
déduire qu'un contrat de courtage a été conclu oralement entre la
défenderesse, représentée par C.________, et B.________ (cf. consid. 2.2.1
ci-dessus).

Cependant, à la date précitée, la demanderesse a immédiatement adressé à
C.________ une lettre, établie sur papier à en-tête de X.________ SA et
signée par deux administrateurs (A.________ et B.________) sous cette raison
sociale, dans laquelle elle se référait à l'entretien qu'avait eu
l'administrateur-président de la défenderesse avec "[son] collaborateur M.

B. ________", en le remerciant de la confiance qu'il lui témoignait. Cette
réponse confirmait qu'un contrat de courtage avait été conclu oralement. Elle
apportait toutefois une rectification par rapport à la télécopie en laissant
clairement entendre à la défenderesse que le cocontractant de cette dernière
- autrement dit le courtier- n'était pas B.________, mais X.________ SA.

Dans ces conditions, si la défenderesse n'était pas d'accord avec cette
rectification, le principe de la bonne foi (art. 2 al. 1 CC) l'obligeait à
réagir. Or, elle ne l'a pas fait. Il appert en outre des pièces versées au
dossier cantonal que, dans toute la correspondance qu'il a échangée avec la
défenderesse, B.________ a chaque fois apposé sa signature sous la raison
sociale de la demanderesse sans susciter la moindre réaction de la part de la
défenderesse. On peut d'ailleurs raisonnablement se demander s'il n'était pas
indifférent à celle-ci de traiter avec B.________ ou avec la société
représentée par ce dernier, car il n'apparaît pas, prima facie, que le club
sportif genevois ait attaché de l'importance au fait de verser la commission
fixée d'avance pour le transfert de Martin Petrov à B.________ plutôt qu'à la
société dont celui-ci était l'un des administrateurs.

Ainsi, force est d'admettre, sur le vu de la télécopie du 24 octobre 2000 et
de la réponse du même jour, qu'un contrat de courtage a été conclu oralement
entre la défenderesse, représentée par C.________, et la demanderesse,
représentée par B.________.

2.2.3  Cela étant, la Cour de justice n'a pas violé le droit fédéral en
reconnaissant à la demanderesse le droit de faire valoir elle-même la
prétention déduite du contrat de courtage litigieux.

Le premier moyen soulevé par la défenderesse est ainsi dénué de fondement.

3.
Le second point controversé se rapporte aux conditions d'application de
l'art. 413 al. 1 CO relatif au salaire du courtier.

3.1
3.1.1Selon la cour cantonale, le contrat en question avait pour objet un
courtage d'indication. Dans ce type de courtage, le lien de causalité requis
existe si le courtier prouve qu'il a été le premier à désigner le tiers
intéressé et que c'est sur la base de cette indication que les parties sont
entrées en relation et ont conclu le marché. Si la preuve de la conclusion du
contrat et celle de l'activité du courtier sont rapportées, il y a une
présomption de fait que le lien psychologique nécessaire existe. Il en va
ainsi dans le cas présent: la défenderesse a conclu un accord portant sur le
transfert de Martin Petrov au WfL Wolfsburg pour un prix supérieur au prix
minimum prévu dans le contrat de courtage. Au demeurant, il est établi par
pièces que  B.________ a été le premier à signaler à la défenderesse, le 15
décembre 2000, l'intérêt de ce club de Bundesliga pour le joueur bulgare. En
vertu de la susdite présomption, l'existence d'un lien de causalité entre
l'indication de B.________ et la conclusion du contrat de transfert doit être
admise. Comme la défenderesse n'a pas prouvé l'absence d'un tel lien, la
rémunération prévue par le contrat de courtage litigieux est due.

3.1.2  La défenderesse fait grief à la Cour de justice d'avoir violé l'art. 8
CC en tenant pour constant que la demanderesse avait été la première à
indiquer au club genevois l'intérêt porté par le WfL Wolfsburg au joueur
bulgare.

Les juges d'appel se voient également reprocher d'avoir mis en oeuvre une
présomption touchant le lien psychologique qui était inapplicable en matière
de courtage d'indication.

3.2
3.2.1Le courtier indicateur a droit à son salaire dès que l'indication qu'il
a donnée aboutit à la conclusion du contrat (cf. art. 413 al. 1 CO). Pour que
le salaire soit dû, il faut que le contrat que le mandant cherchait à obtenir
ait été conclu et qu'il existe un lien de causalité entre l'activité du
courtier et la conclusion de ce contrat. Il suffit que le courtier ait
communiqué à son mandant une occasion de conclure qui lui était inconnue
jusque-là (arrêt 4C.322/2003 du 5 avril 2004, consid. 2.4.1).
3.2.2  L'art. 8 CC répartit le fardeau de la preuve pour toutes les
prétentions fondées sur le droit fédéral et détermine, sur cette base,
laquelle des parties doit assumer les conséquences de l'échec de la preuve
(ATF 127 III 519 consid. 2a p. 522; 126 III 189 consid. 2b, 315 consid. 4a).
On en déduit également un droit à la preuve et à la contre-preuve (ATF 126
III 315 consid. 4a), à la condition qu'il s'agisse d'établir un fait
pertinent (ATF 126 III 315 consid.  4a; 123 III 35 consid. 2b p. 40), qui
n'est pas déjà prouvé (ATF 127 III 519 consid. 2a p. 522; 126 III 315 consid.
4a), par une mesure probatoire adéquate (cf. ATF 90 II 224 consid. 4b) qui a
été régulièrement offerte selon les règles de la loi de procédure applicable
(ATF 126 III 315 consid. 4a; 122 III 219 consid. 3c p. 223). Le juge cantonal
enfreint l'art. 8 CC s'il tient pour exactes les allégations non prouvées
d'une partie, nonobstant leur contestation par la partie adverse, ou s'il
refuse toute administration de preuve sur des faits pertinents en droit. Il
viole également le droit fédéral s'il se contente de la simple vraisemblance
d'un fait allégué lorsqu'il n'a pas pu acquérir une conviction quant à
l'existence de ce fait (cf. ATF 118 II 235 consid. 3c et les références).

En revanche, l'art. 8 CC ne prescrit pas quelles sont les mesures probatoires
qui doivent être ordonnées ni ne dicte comment le juge doit forger sa
conviction. Il n'exclut ni l'appréciation anticipée des preuves ni la preuve
par indices (ATF 127 III 520 consid. 2a; 114 II 289 consid. 2a). Au
demeurant, lorsque l'appréciation des preuves convainc le juge qu'un fait est
établi à satisfaction de droit ou réfuté, la question de la répartition du
fardeau de la preuve ne se pose plus et le grief tiré de la violation de
l'art. 8 CC devient sans objet. Il s'agit alors d'une question de pure
appréciation des preuves; celle-ci ne peut être soumise au Tribunal fédéral
que par la voie du recours de droit public pour arbitraire (ATF 127 III 519
consid. 2a; 122 III 219 consid. 3c).

3.3  En l'espèce, la cour cantonale n'a nullement méconnu les principes
rappelés ci-dessus.

3.3.1  Ayant apprécié les preuves dont ils disposaient, les juges d'appel ont
acquis la conviction que la demanderesse - plus précisément B.________,
agissant pour elle - avait été la première à indiquer à la défenderesse
l'intérêt manifesté par le club de Wolfsburg pour le transfert de Martin
Petrov. Il s'agit là d'une constatation de fait qui lie la juridiction
fédérale de réforme (art. 63 al. 2 OJ) et que la défenderesse tente en pure
perte de remettre en cause dans la présente procédure, en invoquant une
violation de l'art. 8 CC, après l'avoir entreprise sans succès dans son
recours de droit public connexe. C'est également en vain que la défenderesse,
dans une argumentation manifestement appellatoire, tente de faire accroire
que la demanderesse "n'a jamais eu la moindre utilité ou incidence, directe
ou indirecte, dans le transfert du joueur Petrov au club de Wolfsburg".

Qu'elles aient trait au fardeau de la preuve ou au droit à la preuve, les
critiques formulées par la défenderesse tombent, dès lors, à faux.

3.3.2  Quoi qu'en dise la défenderesse, la Cour de justice a retenu à bon
droit que les conditions auxquelles l'art. 413 al. 1 CO et la jurisprudence y
relative subordonnent l'octroi d'un salaire au courtier étaient remplies dans
la présente espèce.

Il incombe au courtier indicateur de prouver qu'il a été le premier à
désigner, comme s'intéressant à l'affaire, la personne qui a par la suite
acheté et que c'est précisément sur la base de cette indication que les
parties sont entrées en relation et ont conclu le marché (arrêt 4C.333/2000
du 28 mars 2001, consid. 2d/bb; ATF 75 II 53 consid. 1a; 72 II 84 consid. 2).
A cet égard, comme le souligne non sans pertinence Christian Marquis (Le
contrat de courtage immobilier et le salaire du courtier, thèse Lausanne
1992, p. 437 s.), on peut se demander si le recours à la théorie du lien
psychologique est bien adapté en matière de courtage d'indication, du moment
que, dans ce type de courtage, l'activité du courtier se limite à une
communication au mandant.
En l'occurrence, C.________ a déclaré, lors de son audition du 10 décembre
2002, qu'il avait accepté de participer à la réunion organisée à l'aéroport
de Kloten en vue du transfert de Martin Petrov dès qu'il avait eu la
certitude de l'identité du club intéressé et de la procuration valable de
Z.________. Or, la cour cantonale a constaté souverainement que c'est la
demanderesse, via B.________, qui a été la première à signaler le nom de ce
club à l'administrateur-président de la défenderesse. Il est en outre acquis
que transfert du joueur bulgare a bien été convenu avec ce club-là.

Dans ces conditions, on ne saurait raisonnablement nier l'existence d'un
rapport de causalité entre l'activité déployée par la demanderesse, dans le
cadre du contrat de courtage d'indication la liant à la défenderesse, et la
conclusion subséquente du contrat de transfert.

Par conséquent, la demanderesse a droit à la rémunération convenue pour une
telle activité. En lui reconnaissant un tel droit, la cour cantonale n'a pas
méconnu les principes susmentionnés. Le recours en réforme de la défenderesse
ne peut dès lors qu'être rejeté.

4.
La défenderesse, qui succombe, devra payer l'émolument judiciaire (art. 156
al. 1 OJ) et verser des dépens à la demanderesse (art. 159 al. 1 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Un émolument judiciaire de 6'000 fr. est mis à la charge de la recourante.

3.
La recourante versera à l'intimée une indemnité de 7'000 fr. à titre de
dépens.

4.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties et à la
Chambre civile de la Cour de justice genevoise.

Lausanne, le 13 juillet 2004

Au nom de la Ire Cour civile
du Tribunal fédéral suisse

Le président:  Le greffier: