Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

II. Öffentlich-rechtliche Abteilung 2P.56/2004
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2P.56/2004/ADD/elo
Arrêt du 4 novembre 2004
IIe Cour de droit public

MM. et Mme les Juges Wurzburger, Président,
Hungerbühler, Müller, Yersin et Merkli.
Greffier: M. Addy.

X. ________, recourant,
représenté par Me Joanna Bürgisser, avocate,

contre

Office du personnel de l'État de Genève,
rue du Stand 26, case postale 3937, 1211 Genève 3,
Conseiller d'Etat, chargé du Département de l'action sociale et de la santé
du canton de Genève, rue de l'Hôtel-de-Ville 14, case postale 3984, 1211
Genève 3.

art. 9 et 29 Cst. (blâme),

recours de droit public contre la décision du Conseiller d'Etat, chargé du
Département de l'action sociale et de la santé du canton de Genève, du 30
janvier 2004.

Faits:

A.
X. ________ occupe une fonction supérieure dans l'administration cantonale
genevoise depuis le 1er janvier 1996. Son service dépend administra- tivement
de la direction générale de la santé publique (cf. son cahier des charges).

Le 4 novembre 2001, Y.________, qui travaillait comme "secrétaire 2" dans le
service de X.________, a déposé contre ce dernier une plainte pour mobbing
auprès de la Direction générale de l'Office du personnel de l'Etat (ci-après:
l'Office du personnel). Conformément aux règles cantonales prévues en la
matière, une enquête interne a été confiée à une personne n'appartenant pas à
la fonction publique (ci-après: l'enquêteur).

Après avoir rappelé la définition du mobbing et confronté la version des
faits de chacun des protagonistes à la lumière des témoignages recueillis
lors de l'instruction, l'enquêteur a conclu que la plainte déposée par
Y.________ pour atteinte à ses droits de la personnalité était fondée et a
proposé qu'un blâme soit infligé à son supérieur. Cette position était
justifiée de la manière suivante (rapport du 29 mai 2002, p. 14):
"S'il a été constaté que Madame Y.________ s'était déjà plainte de ses
supérieurs avant la venue de X.________ et qu'elle avait fait une dépression,
il a également été constaté que X.________ avait des carences en ce qui
concerne l'établissement de liens relationnels avec ses collaborateurs. Le
harcèlement peut être simplement la conséquence d'une maladresse
relationnelle de personnes qui ne savent pas communiquer. Dans ce cas, elles
peuvent reconnaître leurs erreurs, changer de comportement et présenter des
excuses.

Deux propositions ont été faites dans ce sens au mis en cause, en vue d'un
arrangement à l'amiable, la plaignante étant disposée à retirer sa plainte en
cas d'entente. X.________ n'a pas souhaité aller dans ce sens.

X. ________ peut être considéré comme un maladroit relationnel. Il n'est
cependant pas possible de dire s'il était conscient ou non de la perception
qu'avait de son attitude Madame Y.________. Par contre, de par sa formation,
il aurait dû constater et tenir compte de l'état psychique, psychosomatique
et physique de Madame Y.________ (...)".
Le 10 juillet 2002, l'Office du personnel s'est entièrement rallié aux
conclusions du rapport d'enquête et a constaté que la plainte dont il était
saisi était fondée, en proposant qu'un blâme soit prononcé à l'encontre de
X.________. L'intéressé était rendu attentif au fait qu'il pouvait recourir
contre cette "prise de position" auprès du Conseil d'Etat dans un délai de
dix jours dès sa réception. X.________ a fait usage de cette possibilité, en
contestant aussi bien les faits retenus par l'Office du personnel que leur
qualification juridique. Le Conseil d'Etat a rejeté ce recours dans une
décision du 23 juillet 2003.

B.
Par décision du 28 novembre 2003, la Direction générale de la santé a
prononcé un blâme à l'encontre de X.________, en s'appuyant sur les décisions
précitées rendues respectivement par l'Office du personnel et le Conseil
d'Etat.

Suivant l'indication des voies de droit figurant au bas de la décision,
X.________ a porté le cas devant le Conseiller d'Etat en charge du
Département de l'action sociale et de la santé (ci-après: le Conseiller
d'Etat). A titre préalable, il demandait la récusation de cette autorité et
la transmission du recours au Tribunal administratif comme objet de sa
compétence, au motif que le Conseiller d'Etat avait déjà eu à connaître de sa
cause en qualité de membre du collège gouvernemental, soit l'autorité de
recours qui avait confirmé l'existence d'une atteinte aux droits de la
personnalité de la plaignante. Subsidiairement, il concluait à l'annulation
du blâme prononcé à son encontre.

Par décision du 30 janvier 2004, le Conseiller d'Etat a confirmé la décision
attaquée, en estimant que la voie du recours auprès du Tribunal administratif
n'était pas ouverte pour contester le blâme litigieux qui apparaissait fondé
au vu du rapport d'enquête.

C.
Agissant par la voie du recours de droit public, X.________ demande au
Tribunal fédéral d'annuler, sous suite de frais et dépens, la décision
précitée du Conseiller d'Etat. Il soutient que cette autorité a violé son
droit à une procédure équitable (art. 29 al. 1 Cst.) en ne se récusant pas et
qu'elle a appliqué de manière arbitraire (art. 9 Cst.) les règles cantonales
sanctionnant le mobbing.

L'Office du personnel se rallie aux conclusions du Conseiller d'Etat, lequel
conclut à l'irrecevabilité du grief tiré de l'arbitraire et au rejet du
recours pour le surplus.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Déposé en temps utile et dans les formes prescrites contre une décision
finale prise en dernière instance cantonale (cf. infra consid. 3.5) qui ne
peut être attaquée que par la voie du recours de droit public et qui touche
le recourant dans ses intérêts juridiquement protégés, le présent recours est
recevable au regard des art. 84 ss OJ.

2.
En vertu de l'art. 90 al. 1 lettre b OJ, l'acte de recours doit, à peine
d'irrecevabilité, contenir un exposé succinct des droits constitutionnels ou
des principes juridiques violés et préciser en quoi consiste la violation.
Lorsqu'il est saisi d'un recours de droit public, le Tribunal fédéral n'a
donc pas à vérifier de lui-même si l'arrêt entrepris est en tous points
conforme au droit et à l'équité. Il n'examine que les griefs d'ordre
constitutionnel invoqués et suffisamment motivés dans l'acte de recours. Le
recourant ne saurait se contenter de soulever de vagues griefs ou de renvoyer
aux actes cantonaux (ATF 130 I 26 consid. 2.1 p. 31; 129 III 626 consid. 4 p.
629; 129 I 113 consid. 2.1 p. 120). En outre, dans un recours pour arbitraire
fondé sur l'art. 9 Cst. (cf. art. 4 aCst.), l'intéressé ne peut se contenter
de critiquer l'arrêt attaqué comme il le ferait dans une procédure d'appel où
l'autorité de recours peut revoir librement l'application du droit. Il doit
préciser en quoi cet arrêt serait arbitraire, ne reposerait sur aucun motif
sérieux et objectif, apparaîtrait insoutenable ou heurterait gravement le
sens de la justice (ATF 128 I 295 consid. 7a p. 312; 125 I 492 consid. 1b p.
495 et la jurisprudence citée).

C'est à la lumière de ces principes que doivent être appréciés les moyens
soulevés par le recourant.

3.
3.1 Le recourant invoque le droit à une autorité impartiale qu'il déduit de
l'art. 29 al. 1 Cst. Comme en instance cantonale, il soutient que le
Conseiller d'Etat mis en cause aurait dû se récuser et transmettre le dossier
au Tribunal administratif ou "à une autre autorité", car il avait déjà
statué, en sa qualité de membre du Conseil d'Etat, sur le recours formé
contre la décision du 10 juillet 2002 par laquelle l'Office du personnel
constatait une atteinte aux droits de la personnalité de la plaignante et
proposait d'infliger un blâme à son supérieur.

3.2 L'art. 29 al. 1 Cst. dispose que toute personne a droit, dans une
procédure judiciaire ou administrative, à ce que sa cause soit traitée
équitablement. Selon la jurisprudence, ce droit permet notamment d'exiger la
récusation des membres d'une autorité administrative dont la situation ou le
comportement sont de nature à faire naître un doute sur leur indépendance ou
leur impartialité; il tend à éviter que des circonstances extérieures à
l'affaire ne puissent influencer une décision en faveur ou au détriment de la
personne concernée. La récusation peut s'imposer même si une prévention
effective du membre de l'autorité visée n'est pas établie, car une
disposition interne de sa part ne peut guère être prouvée; il suffit que les
circonstances donnent l'apparence de la prévention et fassent redouter une
activité partiale. Cependant, seules des circonstances constatées
objectivement doivent être prises en considération; les impressions purement
individuelles d'une des personnes impliquées ne sont pas décisives (ATF 127 I
196 consid. 2b p. 198; 125 I 119 consid. 3b p. 123, 209 consid. 8a p. 217).

3.3 Autrefois déduite de l'art. 4 aCst., cette garantie constitutionnelle est
d'une portée comparable à ce que prévoit l'art. 30 al. 1 Cst. (art. 58 aCst.)
pour les autorités judiciaires (cf. ATF 127 I 196 consid. 2b p. 198/199; 125
I 119 consid. 3b p. 123, 209 consid. 8a p. 217/218), à ceci près qu'elle
n'impose pas l'indépendance et l'impartialité comme maxime d'organisation des
autorités (administratives) auxquelles elle s'applique. En effet, la
récusation des membres des autorités supérieures du pouvoir exécutif doit
être examinée en tenant compte de la mission et de l'organisation desdites
autorités, qui assument avant tout des tâches de gouvernement, de direction
et de gestion, mais qui ne sont qu'occasionnellement impliquées dans des
procédures juridiques ouvertes à l'égard ou sur requête de particuliers. En
outre, leurs tâches impliquent le cumul de fonctions diverses qui ne peuvent,
le plus souvent, que difficilement être séparées sans atteinte à l'efficacité
de la gestion et à la légitimité démocratique et politique des décisions
correspondantes (pour des exemples, cf. ATF 125 I 119 consid. 3d p. 123/124).

La répartition des fonctions et l'organisation choisies par le législateur
compétent font donc partie des critères dont il importe de tenir compte pour
apprécier si les membres d'une autorité exécutive satisfont, dans un cas
concret, à la garantie d'impartialité déduite de l'art. 29 al. 1 Cst. Les
fonctions légalement attribuées à l'autorité doivent être prises en
considération, en particulier pour apprécier la portée de déclarations ou de
prises de position antérieures dans l'affaire. En règle générale, les prises
de position qui s'inscrivent dans l'exercice normal de fonctions
gouvernementales, administratives ou de gestion, ou dans les attributions
normales de l'autorité partie à la procédure, ne permettent pas de conclure à
l'apparence de la partialité et ne justifient pas la récusation. A cet égard,
une appréciation spécifique est nécessaire dans chaque situation particulière
(cf. ATF 125 I 119 consid. 3f p. 124/125, 209 consid. 8a p. 217/218).

3.4 En l'espèce, il est constant qu'à la suite de la plainte pour mobbing
déposée par Y.________ contre X.________ en novembre 2001, le Conseiller
d'Etat mis en cause est intervenu à l'égard de ce dernier à deux reprises
comme autorité de recours: d'abord, en qualité de membre du Conseil d'Etat
pour statuer, en dernière instance cantonale, sur le bien-fondé de la
plainte, puis seul, comme chef du Département de l'action sociale et de la
santé, pour se prononcer de manière définitive sur la sanction infligée à
l'intéressé par la Direction générale de la santé. Par rapport au recourant,
le Conseiller d'Etat a donc assumé des fonctions qui ne relèvent pas, à
proprement parler, des tâches de gouvernement, de direction et de gestion
habituellement dévolues à un exécutif cantonal, mais qui se rapprochent de
l'activité judiciaire. Ce cumul des fonctions découle de la loi générale
genevoise du 4 décembre 1997 relative au personnel de l'administration canto-
nale et des établissements publics médicaux (ci-après: LPAC ou loi
cantonale).

3.5 Depuis une novelle du 4 octobre 2001, entrée en vigueur le 1er décembre
2001, la loi cantonale ouvre en effet aux membres du personnel s'estimant
victimes de harcèlement psychologique ou sexuel la possibilité de déposer une
plainte auprès de l'Office du personnel et d'obtenir une décision au terme
d'une procédure d'enquête interne confiée à une personne extérieure à la
fonction publique (cf. art. 2B al. 2, 3 et 6 LPAC). Fondée sur le résultat de
l'enquête interne, cette décision a essentiellement pour objet de constater
l'existence ou l'absence d'un harcèlement psychologique ou sexuel (cf. arrêt
du 20 juin 2003, 2P.207/2002, consid. 1.2.2). Elle est susceptible de recours
au Conseil d'Etat (cf. art. 2B al. 7 LPAC) qui "rend une décision définitive
dans les litiges qui ne sont pas relatifs au harcèlement sexuel, sous réserve
des voies de recours ouvertes au Tribunal administratif contre les sanctions
prévues par l'article 16, alinéa 1, lettres b et c, de la loi [suspension de
l'augmentation ou réduction du traitement; retour au statut d'employé en
période probatoire] ou contre une décision de licenciement" (cf. art. 2B al.
8 LPAC).

Parallèlement ou, comme en l'espèce, à l'issue de cette décision
constatatoire sur le bien-fondé de la plainte, la personne mise en cause peut
faire l'objet d'une procédure disciplinaire suivie, le cas échéant, d'une
sanction (cf. art. 27 ss LPAC). En cas d'avertissement ou de blâme, la
sanction est prononcée par le chef de service (cf. art. 16 al. 1 lettre a
LPAC) et l'affaire peut être portée devant le chef du département concerné
(cf. art. 30 al. 1 LPAC); un recours au Tribunal administratif est prévu pour
les "autres cas de sanctions disciplinaires (soit ceux, plus graves, visés
par l'art. 16 al. 1 lettres b et c)" (cf. art. 30 al. 2 LPAC).
En instituant cette double procédure, le législateur cantonal a entendu
renforcer la protection des employés de la fonction publique victimes d'un
harcèlement sexuel ou psychologique, en leur donnant le droit de participer
pleinement - c'est-à-dire avec tous les droits de partie qui y sont attachés
- à la procédure d'enquête destinée à établir les faits reprochés; en
particulier, au terme de l'enquête, ils peuvent ainsi désormais recourir
contre une décision constatatoire qui leur serait défavorable - par exemple
une décision de classement de la plainte -, ce qu'ils ne pouvaient pas faire
auparavant, où seule une procédure disciplinaire contre la personne mise en
cause était ouverte sur le plan administratif (cf. Mémorial des séances du
Grand conseil, 2001, p. 8999 ss, spécial. 9005, 9021, 9022).

3.6 Selon le Conseiller d'Etat mis en cause, sa compétence pour rendre la
décision attaquée n'est pas contestable, car le Tribunal fédéral a déjà jugé
qu'il ressort clairement de l'art. 30 LPAC que le recours au Tribunal
administratif est exclu à l'encontre d'un blâme, sans que cette absence de
voie judiciaire ne soit contraire à l'art. 6 par. 1 CEDH: en effet, un blâme
ne met pas en jeu un droit de caractère civil au sens de la disposition
conventionnelle précitée, tandis qu'il représente une sanction d'un degré de
gravité trop faible pour être assimilé à une sanction de nature pénale (arrêt
du 24 octobre 2001, 2P.53/2001, partiellement reproduit in: SJ 2002 I p. 332,
consid. 2 et 3). Ces points ne sont cependant pas remis en cause par le
recourant, qui se limite à faire valoir que le Conseiller d'Etat aurait dû se
récuser en vertu de l'art. 29 Cst. en raison du cumul de ses fonctions. C'est
à ce seul titre qu'il soutient que sa cause devait être examinée par le
Tribunal administratif ou "par une autre autorité", mais non parce qu'il
revendiquerait, comme tel, l'accès à un tribunal au sens de l'art. 6 par. 1
CEDH (il est au demeurant douteux, vu sa fonction, qu'il pourrait invoquer le
bénéfice de cette disposition conventionnelle; cf. ATF 129 I 207 a
contrario).
A l'appui de sa décision, l'autorité intimée relève également que celle-ci
est de nature purement disciplinaire et qu'elle ne porte que sur la licéité
de la sanction en cause, en particulier sur sa proportionnalité, mais non sur
l'existence, ou non, d'un cas de mobbing, cette question ayant déjà été
tranchée par le Conseil d'Etat de manière définitive six mois plus tôt (le 23
juillet 2003). Vu l'objet distinct de ces deux procédures, l'autorité intimée
estime qu'elle pouvait statuer comme autorité de recours dans chacune d'elles
sans violer le principe "ne bis in idem".

Corollaire de l'autorité de chose jugée, le principe "ne bis in idem"
interdit qu'une même personne soit poursuivie et condamnée deux fois pour des
mêmes faits (cf. ATF 123 II 464 consid. 2b p. 466 et les références citées).
Dans la mesure où le recourant n'a pas subi deux sanctions disciplinaires à
raison des mêmes faits, la référence à ce principe n'est d'aucune pertinence
en l'occurrence. En revanche, à supposer, comme le soutient l'autorité
intimée, que les procédures visées soient effectivement distinctes l'une de
l'autre, ce serait là une donnée qui n'est pas sans importance pour
déterminer si, malgré le cumul de ses fonctions, le Conseiller d'Etat offre
des garanties suffisantes quant à son impartialité (cf. ATF 120 Ia 82; 117 Ia
182; arrêt du 20 mars 2002, 2P.28/2002, consid. 4.4). Cette hypothèse ne
trouve toutefois pas de confirmation - du moins explicite - dans la loi
cantonale, qui ne dit rien à ce sujet. Elle ne semble pas non plus se
vérifier dans la pratique des autorités cantonales concernées: en soutenant
que l'existence d'une atteinte illicite aux droits de la personnalité de la
plaignante est une question qui a déjà été tranchée de manière défini tive
par le Conseil d'Etat et qui ne peut plus être discutée au stade actuel de la
procédure, l'autorité intimée incite plutôt à penser que, s'agissant du moins
de la qualification juridique des faits pertinents, la procédure
disciplinaire dépend dans une très large mesure - si ce n'est entièrement -
des constatations et des conclusions faites lors de la première procédure.
Une fois admis que la plaignante a été victime d'actes de mobbing et que son
supérieur en est l'auteur, il reste en effet peu de place à l'autorité
intimée pour considérer qu'une sanction ne se justifie pas, si ce n'est,
éventuellement, en opportunité (cf. art. 61 de la loi genevoise du 12
septembre 1985 sur la procédure administrative [LPA]). Dans l'hypothèse où
les liens entre les deux procédures sont tels qu'envisagés par l'autorité
intimée, on peut donc sérieusement se demander si les voies de droit prévues
par la loi cantonale ne consacrent pas, en tant que tel, un système contraire
à l'art. 29 Cst. La question mérite cependant de rester ouverte, car le
recours doit de toute façon être admis pour une autre raison.

3.7 Comme le souligne avec pertinence le recourant, le Conseil d'Etat ne
s'est pas limité, lorsqu'il a statué sur son recours, à se prononcer sur le
bien-fondé de la plainte déposée à son encontre; il a également confirmé la
proposition, faite par l'enquêteur puis reprise à son compte par l'Office du
personnel, de lui infliger un blâme, en précisant qu'une telle sanction
était, sur le vu des circonstances du cas, conforme au principe de la
proportionnalité (cf. décision du Conseil d'Etat du 23 juillet 2003, consid.
14 et 16). Or, à teneur de la loi cantonale, il ne lui appartenait nullement
de prendre position sur cette question, pas plus d'ailleurs qu'à l'Office du
personnel ou à l'enquêteur qui, le premier, a dépassé le cadre de sa mission
et de ses compétences: il ne s'est en effet pas contenté d'établir les faits,
mais est allé jusqu'à les qualifier sur le plan juridique (constatation d'un
cas de mobbing) et à en tirer les conséquences qu'il jugeait appropriées au
plan disciplinaire (proposition d'un blâme). Cela étant, il est frappant de
constater à quel point les différentes autorités concernées ont, à tous les
stades de la procédure, les unes et les autres confirmé de manière quasiment
automatique la décision de l'autorité précédente, en s'appuyant comme
machinalement sur les conclusions - pourtant critiquables pour les motifs
précités - du rapport d'enquête. En s'exprimant dans de telles conditions et
sans y être tenu sur la sanction qu'il conviendrait d'infliger à X.________,
le Conseil d'Etat n'a fait qu'ajouter, en la répercutant, à la confusion
initiale créée par le rapport d'enquête au sujet des deux procédures. Il
s'est donc mis dans une situation où, non seulement en apparence, mais encore
dans les faits, son impartialité et par conséquent celle du Conseiller d'Etat
mis en cause, n'étaient plus suffisantes pour prendre part à la procédure
disciplinaire (cf. arrêt du 19 mai 1998, 2P.231/1997, consid. 2b-2d,
reproduit in: ZBl 100 (1999), p. 74ss; Benjamin Schindler, Die Befangenheit
der Verwaltung, thèse Zurich 2002, p. 150).

Aussi bien le recourant était-il en droit d'exiger la récusation de
l'autorité intimée en vertu de l'art. 29 al. 1 Cst.

4.
Il suit de ce qui précède que le recours doit être admis et la décision
attaquée annulée, sans qu'il soit nécessaire d'examiner le grief tiré de
l'application arbitraire (art. 9 Cst.) des règles cantonales sanctionnant le
mobbing. Il appartient aux autorités cantonales de désigner l'autorité
cantonale compétente et de déterminer les voies de droit adéquates et les
règles de procédure applicables, au besoin en procédant à une interprétation
contra legem du droit de procédure cantonal (cf. ATF 127 I 115 consid. 8 p.
126).

5.
Bien qu'elle succombe, l'autorité intimée n'a pas à supporter les frais
judiciaires (art. 156 al. 2 OJ).

Le recourant a droit à des dépens (art. 159 al. 1 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est admis et la décision attaquée est annulée.

2.
Il n'est pas perçu d'émolument judiciaire.

3.
Le canton de Genève versera au recourant une indemnité de dépens de 2'000 fr.

4.
Le présent arrêt est communiqué en copie à la mandataire du recourant, à
l'Office du personnel de l'Etat de Genève et au Conseiller d'Etat, chargé du
Département de l'action sociale et de la santé du canton de Genève.

Lausanne, le 4 novembre 2004

Au nom de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le président:  Le greffier: