Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
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II. Öffentlich-rechtliche Abteilung 2P.299/2004
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2P.299/2004 /dxc

Arrêt du 22 décembre 2004
IIe Cour de droit public

MM. les Juges Wurzburger, Président,
Hungerbühler et Müller.
Greffier: M. Langone.

Commune de Champagne, représentée par sa Municipalité, au nom de qui agissent
son syndic et sa secrétaire municipale,1424 Champagne,
recourante, assistée de Me Robert Liron, avocat, rue des Remparts 9, 1400
Yverdon-les-Bains,

contre

Conseil d'Etat du canton de Vaud, Château cantonal, 1014 Lausanne.

subvention,

recours de droit public contre la décision du Conseil d'Etat du canton de
Vaud du 20 octobre 2004.

Faits:

A.
La Municipalité de la commune de Champagne a décidé de procéder à la
réfection de la traversée du village. Le 24 juin 1998, le Conseil communal
lui a accordé un crédit d'investissement de 2'900'000 fr. pour la réalisation
de la première étape des travaux divisés en plusieurs lots. La Municipalité
s'est vu accorder une subvention cantonale pour cette première étape (lots 8,
9 et 10).

B.
Par acte du 12 mars 2003, le Conseil d'Etat du canton de Vaud a suspendu
l'octroi de nouvelles subventions pour les travaux routiers engagés par les
communes dans les traversées locales.

Le 13 juin 2003, la Municipalité de la commune de Champagne a sollicité une
subvention pour le solde des travaux (lots 3 et 4). Le Service des routes,
puis le Chef du Département des infrastructures du canton de Vaud lui ont
répondu que ladite requête ne pouvait pas être prise en considération du fait
qu'elle avait été déposée après l'introduction du moratoire adopté le 12 mars
2003.

Par décision du 20 octobre 2004, le Conseil d'Etat a confirmé le refus
d'entrer en matière sur la demande de subvention présentée le 13 juin 2003.

C.
Agissant par la voie du recours de droit public, la commune de Champagne
demande au Tribunal fédéral d'annuler la décision du 20 octobre 2004.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Selon l'art. 88 OJ, le recours de droit public est ouvert aux particuliers et
aux collectivités lésés par des arrêtés ou des décisions qui les concernent
personnellement ou qui sont d'une portée générale.
Le recours de droit public est conçu pour la protection des droits
constitutionnels des citoyens (art. 84 al. 1 lettre a OJ). Il doit permettre
à ceux qui en sont titulaires de se défendre contre toute atteinte à leurs
droits de la part de la puissance publique. De tels droits ne sont reconnus
en principe qu'aux citoyens, à l'exclusion des collectivités publiques qui,
en tant que détentrices de la puissance publique, n'en sont pas titulaires et
ne peuvent donc pas attaquer, par la voie du recours de droit public, une
décision qui les traite comme autorités. Cette règle s'applique aux cantons,
aux communes et à leurs autorités, qui agissent en tant que détentrices de la
puissance publique. La jurisprudence admet toutefois qu'il y a lieu de faire
une exception pour les communes et autres corporations de droit public,
lorsque la collectivité n'intervient pas en tant que détentrice de la
puissance publique, mais qu'elle agit sur le plan du droit privé ou qu'elle
est atteinte dans sa sphère privée de façon identique ou analogue à un
particulier, notamment en sa qualité de propriétaire de biens frappés
d'impôts ou de taxes ou d'un patrimoine financier ou administratif. Une
seconde exception est admise en faveur des communes et autres corporations
publiques lorsque, par la voie du recours de droit public, elles se plaignent
d'une violation de leur autonomie (art. 50 Cst., cf. ATF 129 I 313 consid.
4.1 p. 318 s.; 128 I 3 consid. 1c p. 7), d'une atteinte à leur existence ou à
l'intégrité de leur territoire garanties par le droit cantonal. Les
collectivités concernées peuvent aussi se prévaloir, à titre accessoire, de
la violation de droits constitutionnels, tels que des garanties générales de
procédure (art. 29 Cst.), dans la mesure où ces moyens sont en relation
étroite avec celui de violation de leur autonomie (cf. ATF 125 I 173 consid.
1b p. 175; 123 III 454 consid. 2 p. 456; 121 I 218 consid. 2a p. 219-220; 116
Ia 252 consid. 3b p. 255 et les arrêts cités).

2.
2.1 En l'occurrence, la commune recourante - qui est traitée par la décision
attaquée comme une autorité - se plaint d'une violation de son autonomie
communale, ainsi que d'un déni de justice formel (refus de statuer). La
qualité pour recourir doit dès lors lui être reconnue. La question de savoir
si, dans le domaine juridique particulier, elle est effectivement autonome
n'est pas une question de recevabilité mais de fond (ATF 128 I 136 consid.
1.2 p. 139; 124 I 223 consid. 1b p. 226; 120 Ia 203 consid. 2a p. 204 et la
jurisprudence citée).

2.2 La loi vaudoise du 10 décembre 1991 sur les routes (LRou) prévoit à son
article 57 al. 1 que "l'Etat peut accorder des subventions aux communes pour
la construction ou la correction de routes communales dont l'intérêt dépasse
le cadre local". Certes, les communes peuvent jouir d'une autonomie protégée
dans l'application du droit cantonal, si celui-ci leur laisse une liberté de
décision relativement importante. Il faut toutefois que l'exécution, en
première instance, des dispositions cantonales leur soit confiée et que la
nature du domaine à régler se prête à une réglementation propre de la part
des différentes communes (ATF 119 Ia 214 consid. 3b p. 219). Mais aucune de
ces conditions n'est réalisée en l'espèce. En effet, les communes ne
disposent d'aucune compétence pour décider si et dans quelle mesure il y a
lieu d'accorder ou non les subventions cantonales pour les routes communales.
Seules les autorités cantonales (Grand Conseil ou Conseil d'Etat, dont la
compétence varie selon le montant des subventions) sont habilitées à le faire
(art. 58 LRou). D'ailleurs, il serait inconcevable que les communes
requérantes puissent décider elles-mêmes de s'attribuer des subventions
financées par le canton sur la base de leur propre réglementation; une telle
décision doit incomber, vu la nature du domaine en question, à une autorité
cantonale supérieure (arrêt 2P.450/1996 du 3 octobre 1997, publié in ZBl
100/1999 p. 273, consid. 2b et les arrêts cités).

2.3 La décision attaquée peut certes avoir des incidences sur les finances de
la commune recourante. Mais de telles conséquences ne constituent pas pour
autant une atteinte à son l'autonomie, étant précisé que la recourante ne
peut de toute façon déduire de l'art. 57 LRou ("Kann-Vorschrift") aucun droit
à l'octroi d'une subvention. Comme la recourante ne bénéficie d'aucune
autonomie dans ce domaine, il n'y a pas lieu d'entrer en matière sur le grief
accessoire de déni de justice formel.

3.
Vu ce qui précède, le recours doit être rejeté dans la mesure où il est
recevable selon la procédure simplifiée de l'art. 36a OJ, sans qu'il soit
nécessaire d'ouvrir un échange d'écritures. Succombant, la commune
recourante, dont les intérêts pécuniaires sont en cause, doit supporter un
émolument judiciaire (156 al. 2 OJ).

Par ces motifs, vu l'art. 36a OJ, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
Un émolument judiciaire de 2'000 fr. est mis à la charge de la recourante.

3.
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire de la recourante et au
Conseil d'Etat du canton de Vaud.

Lausanne, le 22 décembre 2004

Au nom de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le président:  Le greffier: