Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

II. Öffentlich-rechtliche Abteilung 2P.239/2004
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2P.239/2004 ROC

Arrêt du 20 avril 2005
IIe Cour de droit public

MM. les Juges Merkli, Président,
Wurzburger et Zappelli, Juge suppléant.
Greffière: Mme Rochat.

X. ________,
recourant, représenté par Me Serge Fasel, avocat,

contre

Hospice général, service juridique, 1211 Genève 3,
intimé, représenté par Me Gabriel Aubert, avocat,
Tribunal administratif du canton de Genève,
rue du Mont-Blanc 18, case postale 1956, 1211 Genève 1.

art. 29 al. 1 et 2 Cst.: absence de motivation et déni de justice;
prétentions à la fin des rapports de service.

recours de droit public contre l'arrêt du Tribunal administratif du canton de
Genève du 5 août 2004.

Faits:

A.
X. ________ a été engagé par l'Hospice général (ci-après: l'hospice) en mai
1994, en qualité de directeur des ressources humaines.

Le 11 novembre 2002, pour des motifs ne concernant pas le présent litige, le
Conseil d'administration de l'hospice a décidé la suspension immédiate de
X.________ et l'ouverture d'une enquête administrative. Par décision du 23
juin 2003, il a résilié les rapports de service de l'intéressé, avec effet au
30 novembre 2003. En raison d'une incapacité de travail de X.________, dite
décision ne lui a été notifiée que le 14 août 2003. Par la suite, l'intéressé
s'est à nouveau trouvé en incapacité de travail à 100%, du 10 novembre au 15
décembre 2003.

En 2002, X.________ avait perçu, pour sa fonction de directeur des ressources
humaines, un traitement mensuel brut de 14'497.10 fr. A cette somme s'étaient
ajoutées deux indemnités mensuelles, l'une de 150 fr. pour ses frais de
téléphone et de déplacement, l'autre de 50 fr. représentant une participation
à la prime d'assurance-maladie. X.________ a perçu son dernier salaire à la
fin novembre 2003. Pendant les douze mois qu'a duré sa suspension, il a
touché les indemnités précitées.

B.
Le 16 janvier 2004, X.________ a formé une demande en paiement devant le
Tribunal administratif du canton de Genève; il concluait à titre principal au
paiement par l'Etat de Genève de la somme de 47'504.35 fr. Cette prétention
se composait de 14'847.10 fr. correspondant au salaire et aux indemnités dus
pour le mois de décembre 2003, de 24'002.25 fr. équivalant à 5 jours de
vacances non prises en 2002 et à 6 semaines pour 2003, et de 8'655 fr.
représentant le gain manqué du fait que l'hospice ne lui avait pas rempli à
temps l'attestation lui permettant d'obtenir une indemnité de chômage en
janvier 2004.
L'hospice a admis devoir le salaire du mois de décembre 2003, à l'exclusion
des indemnités de téléphone et d'assurance-maladie. Le défendeur a conclu au
rejet de toutes les autres prétentions.
Dans sa détermination sur la réponse de l'hospice, le demandeur a porté ses
conclusions relatives aux vacances non prises à 30'174.25 fr., et ses
conclusions concernant la perte d'indemnités de chômage à 29'149.04 fr.
Dans sa duplique, l'hospice a maintenu ses conclusions. Le 26 mars 2004, il a
versé à X.________ son traitement du mois de décembre 2003.
Par arrêt du 5 août 2004, le Tribunal administratif a rejeté la demande dans
la mesure où elle était recevable. Il a en effet jugé irrecevables les
conclusions relatives à la compensation des vacances non prises dès lors
qu'elles visaient, en réalité, à contester le moment où le recourant aurait
dû prendre ses vacances, soit pendant les cinq mois et demi pendant lesquels
il était suspendu et en pleine capacité de travailler. Quant au chef de
conclusions tendant au paiement du salaire pour décembre 2003, il a été
déclaré sans objet, vu que ce paiement était intervenu en cours de procédure,
les prétentions relatives au paiement des indemnités de téléphone et
d'assurance-maladie durant ce mois devant toutefois être rejetées. Enfin, la
Cour cantonale a déclaré irrecevable le chef de conclusions tendant au
paiement de dommages-intérêts relatifs au prétendu retard dans la délivrance
d'une attestation de chômage.

C.
Agissant par la voie du recours de droit public, X.________ demande au
Tribunal fédéral, sous suite de dépens, d'annuler l'arrêt du Tribunal
administratif du 5 août 2004. Invoquant les alinéas 1 et 2 de l'art. 29 Cst.,
il se plaint de la violation de son droit d'être entendu, ainsi que de déni
de justice. A titre subsidiaire, le recourant se plaint d'une appréciation
arbitraire des faits.

Le Tribunal administratif a renoncé à se déterminer et persiste dans les
termes et conclusions de son arrêt. De son côté, l'hospice conclut, sous
suite de frais, au rejet du recours dans la mesure où il est recevable.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recours
qui lui sont soumis (ATF 130 I 312 consid. 1 p. 317).

1.1 Le recours de droit public au Tribunal fédéral est ouvert contre une
décision cantonale pour violation des droits constitutionnels des citoyens
(art. 84 al. 1 lettre a OJ). L'arrêt attaqué n'étant susceptible d'aucun
autre moyen de droit sur le plan cantonal, la règle de la subsidiarité du
recours de droit public est respectée (art. 84 al. 2 et 86 al. 1 OJ).

1.2 Le recourant est personnellement touché par la décision attaquée qui
porte sur une prétention pécuniaire, de sorte qu'il a un intérêt personnel,
actuel et juridiquement protégé à ce que cette décision n'ait pas été prise
en violation de ses droits constitutionnels. En conséquence, il a qualité
pour recourir (art. 88 OJ).

Déposé en temps utile (art. 89 al. 1 OJ), dans la forme prévue par la loi
(art. 90 al. 1 OJ), le recours est donc en principe recevable.

2.
Le recourant ne remet pas en cause l'arrêt attaqué dans la mesure où celui-ci
rejette ses prétentions aux indemnités de téléphone et de déplacement pour le
mois de décembre 2003. Il renonce également à recourir contre le rejet de ses
prétentions à des dommages-intérêts consécutifs à la perte d'indemnités de
chômage.

2.1 Il se plaint en revanche de ce que la Cour cantonale n'ait pas motivé le
rejet de ses conclusions tendant au paiement d'intérêts moratoires sur le
montant de son salaire du mois de décembre 2003 payé avec retard en mars
2004. Sur ce point, il soulève le grief de violation de son droit d'être
entendu protégé par l'art. 29 al. 2 Cst.

2.1.1 Comme le droit d'être entendu a un caractère formel et que sa violation
entraîne en principe l'admission du recours, ainsi que l'annulation de la
décision attaquée indépendamment des chances de succès du recours sur le fond
(ATF 126 V 130 consid. 2b p. 132; 125 I 113 consid. 3 p. 118), il convient
d'examiner ce grief en premier lieu.

2.1.2 Le recourant ne se plaint pas de la violation de règles du droit
cantonal de procédure régissant le droit d'être entendu, de sorte que son
grief doit être examiné exclusivement à la lumière de l'art. 29 al. 2 Cst. et
avec un plein pouvoir d'examen (ATF 126 I 15 consid. 2a p. 16 et les arrêts
cités). La jurisprudence, rendue sous l'empire de l'art. 4 aCst. et qui
s'applique également à l'art. 29 al. 2 Cst., a déduit du droit d'être entendu
le devoir pour l'autorité de motiver sa décision, afin que le destinataire
puisse la comprendre, l'attaquer utilement s'il y a lieu et que l'autorité de
recours puisse exercer son contrôle. Pour répondre à ces exigences, il suffit
que le juge mentionne, au moins brièvement, les motifs qui l'ont guidé et sur
lesquels il a fondé sa décision, de manière à ce que l'intéressé puisse se
rendre compte de la portée de celle-ci et l'attaquer en connaissance de cause
(ATF 126 I 97 consid. 2b p. 102). L'autorité n'a ainsi pas l'obligation
d'exposer et de discuter tous les faits, moyens de preuves et griefs invoqués
par les parties; elle peut au contraire se limiter aux points essentiels pour
la décision à rendre (ATF 130 II 530 consid. 4.3 p. 540, 473 consid. 4.1 p.
477).

L'étendue de la motivation dépend au demeurant de la liberté d'appréciation
dont jouit le juge et de la gravité des conséquences de sa décision (ATF 112
Ia 107 consid. 2b p. 110).

2.1.3 En l'occurrence, le demandeur avait accompagné l'ensemble de ses
conclusions de la réclamation d'intérêts moratoires à 5% dès le 16 janvier
2004. A la suite du paiement par l'hospice, le 26 mars 2004, du salaire du
mois de décembre 2003, il avait expressément maintenu ses conclusions tendant
au paiement des intérêts moratoires sur le montant de ce salaire, intérêts
qu'il faisait désormais partir du 26 décembre 2003 (voir lettre du 2 avril
2004).

La Cour cantonale a considéré que le paiement du salaire réclamé en cours de
procédure rendait les conclusions du demandeur sur ce point sans objet. Elle
ne s'est pas prononcée spécifiquement sur les intérêts moratoires réclamés
sur cette somme, mais elle a rejeté toutes les autres conclusions du
demandeur dans la mesure où elle les jugeait recevables. Il faut donc
admettre que les conclusions tendant au paiement d'intérêts moratoires sur le
montant du salaire ont été rejetées.

Si la Cour cantonale pouvait certes constater que le paiement du salaire de
décembre 2003 mettait fin au litige sur ce point, il n'en demeure pas moins
que le demandeur avait insisté pour que des intérêts moratoires lui soient
alloués. Il aurait donc été préférable que le Tribunal administratif motive
expressément son refus d'accorder des intérêts moratoires. Toutefois, dans le
contexte d'une action concluant au paiement d'une somme globale de 47'504.35
fr. et compte tenu du temps relativement court qui s'est écoulé entre la
demande et le paiement du salaire de décembre 2003 par l'intimé, il pouvait
considérer qu'il n'était pas nécessaire d'expliquer pourquoi le recourant
n'avait pas droit à l'intérêt moratoire de 5 % pendant les deux à trois mois,
délai normal durant lequel l'hospice a examiné ses prétentions qui se sont
révélées, au demeurant, largement infondées. Ces intérêts représentaient en
effet une somme d'environ 121 fr. à 181 fr. (5% de 14'497 fr. pendant 2 à 3
mois), soit un montant très modeste par rapport à la valeur litigieuse
globale.

Cela entraîne le rejet du recours en tant qu'il se fonde sur l'art. 29 al. 2
Cst.

2.2 Dans un second moyen, le recourant se plaint de ce que le Tribunal
administratif a déclaré irrecevables les conclusions tendant au paiement
d'une indemnité destinée à remplacer des vacances. Selon le recourant, en
refusant d'entrer en matière sur ces prétentions, les juges cantonaux
auraient commis un déni de justice. A titre subsidiaire, il fait grief à la
Cour cantonale d'avoir prononcé une décision arbitraire, dans la mesure où
elle aurait à tort constaté que l'hospice avait pris une décision concernant
le moment où X.________  devait prendre ses vacances, une telle décision
n'ayant selon lui jamais existé.

2.2.1 Le juge commet un déni de justice lorsqu'il refuse de statuer, garde le
silence sur une demande qui exige une décision. Ce reproche ne peut pas être
adressé en l'espèce à la Cour cantonale.

Le déni de justice peut aussi résulter du formalisme excessif d'une autorité
judiciaire qui applique des prescriptions formelles avec une rigueur exagérée
ou pose des exigences excessives en ce qui concerne la forme d'actes
juridiques et empêche ainsi de façon inadmissible un citoyen d'utiliser des
voies de droit (ATF 120 V 413 consid. 4b p. 417; 115 Ia 12 consid. 3b p. 17).

Ce reproche ne peut pas non plus être formulé à l'égard de l'arrêt attaqué
concernant sa décision d'irrecevabilité des conclusions relatives aux
vacances. La Cour cantonale a interprété l'art. 56 G de la loi genevoise
d'organisation judiciaire qui donne au Tribunal administratif la compétence
de statuer sur des prétentions de nature pécuniaires. Elle a retenu, en se
fondant sur sa jurisprudence, que les conclusions du demandeur relatives à
ses vacances, bien que tendant à l'allocation d'une indemnité, visaient en
réalité à contester le moment où il avait été contraint de prendre les dites
vacances. Or, ce moment relevant du pouvoir de décision de l'employeur, et
donc de la pure opportunité, il échappait au contrôle de l'autorité
judiciaire. Partant, il n'y a rien dans cette motivation qui puisse fonder le
reproche de déni de justice.

2.2.2 Le recourant soulève encore le reproche d'arbitraire concernant ladite
décision. Il relève que la Cour cantonale a retenu à tort que l'employeur
avait pris une décision relative au moment où le recourant devait prendre ses
vacances.

Une décision est arbitraire lorsqu'elle contredit clairement la situation de
fait, lorsqu'elle viole gravement une norme ou un principe juridique clair et
indiscuté, ou lorsqu'elle heurte d'une manière choquante le sentiment de la
justice et de l'équité. A cet égard, le Tribunal fédéral ne s'écarte de la
solution retenue par l'autorité cantonale de dernière instance que si elle
apparaît insoutenable, en contradiction manifeste avec la situation
effective, adoptée sans motifs objectifs ou en violation d'un droit certain.
De plus, il ne suffit pas que les motifs de l'arrêt soient insoutenables,
encore faut-il que ce dernier soit arbitraire dans son résultat. Il n'y a en
outre pas arbitraire du seul fait qu'une autre solution que celle de
l'autorité intimée paraît concevable, voire préférable (ATF 129 I 8 consid.
2.1 p. 9, 173 consid. 3.1 p. 178; 128 I 273 consid. 2 p. 275).

Même si la formulation de l'arrêt entrepris demeure un peu ambiguë, la Cour
cantonale n'a pas retenu que l'employeur aurait pris une décision formelle
concernant les vacances du recourant. Elle a relevé que ce dernier avait été
suspendu, et qu'il avait été pleinement capable de travailler durant cinq
mois et demi, de sorte qu'il aurait dû prendre ses vacances durant cette
période, ainsi que l'alléguait l'intimé. Il en résultait indirectement que,
par l'effet de la décision de suspension prise, le recourant avait été
contraint d'exercer son droit aux vacances pendant la période où, capable de
travailler, il en était toutefois empêché.

L'arbitraire dénoncé par le recourant n'est ainsi pas démontré.

3.
Au vu de ce qui précède, le recours doit être rejeté. Le recourant qui
succombe devra supporter les frais de la procédure (art. 156 al. 1 OJ).
L'intimé n'a pas droit à des dépens (art. 159 al. 2 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Un émolument judiciaire de 2'000 fr. est mis à la charge du recourant.

3.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties et au
Tribunal administratif du canton de Genève.

Lausanne, le 20 avril 2005

Au nom de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le président:  La greffière: