Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

II. Öffentlich-rechtliche Abteilung 2P.22/2004
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2P.22/2004/RED/elo
Arrêt du 25 octobre 2004
IIe Cour de droit public

MM. et Mme les Juges Wurzburger, Président, Hungerbühler, Müller, Yersin et
Berthoud, Juge suppléant.
Greffière: Mme Revey.

X. ________, recourante,
représentée par Me Eric Maugué, avocat,

contre

Département de l'instruction publique du canton de Genève, rue de
l'Hôtel-de-Ville 6, case postale 3925, 1211 Genève 3,
Tribunal administratif du canton de Genève, rue du Mont-Blanc 18, case
postale 1956, 1211 Genève 1.

art. 9 Cst. et 29 al. 1 Cst. (formation professionnelle),

recours de droit public contre l'arrêt du Tribunal administratif du canton de
Genève du 2 décembre 2003.

Faits:

A.
X. ________ a été engagée en 1993 en qualité d'enseignante-suppléante auprès
de l'Ecole Y.________, à Genève.

Le 28 juin 2000, X.________ s'est entretenue avec A.________, doyen auprès de
l'Institut de formation des maîtres et maîtresses de l'enseignement
secondaire du canton de Genève (ci-après: l'Institut de formation), entrevue
dont la teneur lui a été confirmée par courrier du 4 juillet 2000.
L'intéressée était admise à suivre la formation conduisant au certificat
d'aptitude à l'enseignement secondaire. La durée en serait d'une année compte
tenu de son expérience professionnelle, le maître formateur responsable
serait A.________ lui-même et le maître mentor B.________. C.________,
responsable de la formation professionnelle à la direction de l'Ecole
Y.________, a ultérieurement été associée à sa formation.

Par courrier du 17 juillet 2000, D.________, directeur de l'Ecole Y.________,
a confirmé l'engagement de X.________ au titre d'enseignante-suppléante
pendant son année de formation.

B.
En cours d'année, l'activité de X.________ a fait l'objet de divers
comptes-rendus, notamment des rapports de visites, deux rapports d'évaluation
intermédiaires et deux rapports finaux.

Entre-temps, soit le 10 mai 2001, D.________ a informé l'intéressée qu'il ne
renouvellerait pas son engagement en qualité d'enseignante-suppléante, compte
tenu notamment de l'appréciation négative des deux rapports d'évaluation
intermédiaires, qui rendaient vraisemblable un échec de sa formation. Ce
non-réengagement pourrait être remis en question par la réussite ou une
éventuelle prolongation de la formation.

Par lettre du 29 juin 2001, E.________, directeur de l'Institut de formation,
a informé X.________ qu'à la suite de la séance du 21 juin 2001 de la
Commission de délibération de l'Institut de formation (ci-après: la
Commission de délibération), il avait été décidé de mettre un terme à sa
formation. Ce prononcé se fondait sur les problèmes importants observés
pendant l'année dans l'enseignement de l'intéressée, en particulier aux plans
relationnel et pédagogique, ainsi que sur son incapacité à se remettre en
cause.

C.
Le recours formé par X.________ à l'encontre des décisions du 10 mai et du 29
juin 2001 précitées a été rejeté le 9 novembre 2001 par la Présidente du
Département cantonal de l'instruction publique (ci-après: le Département
cantonal).

Le 13 décembre 2001, X.________ a déféré ce prononcé devant le Tribunal
administratif, concluant à ce qu'il soit constaté qu'elle remplit les
conditions d'obtention du certificat d'aptitude à l'enseignement secondaire.
Elle requérait également que soient réservés ses droits à des dommages et
intérêts.

Statuant le 2 décembre 2003, le Tribunal administratif a d'une part déclaré
le recours irrecevable en tant qu'il visait la décision de non renouvellement
d'engagement du 10 mai 2001, la cause étant transmise à la Commission
cantonale de recours compétente. Il a d'autre part rejeté le recours en tant
qu'il contestait la décision d'interruption de formation du 29 juin 2001.

D.
Agissant le 26 janvier 2004 par la voie du recours de droit public,
X.________ demande au Tribunal fédéral, sous suite de frais et dépens,
d'annuler l'arrêt du Tribunal administratif du 2 décembre 2003. Elle dénonce
une violation arbitraire du droit cantonal (art. 15 al. 3, 15A et 17 du
règlement cantonal du 30 août 2000 concernant la formation professionnelle
initiale en emploi des maîtresses et maîtres de l'enseignement secondaire
[RFPEMES/GE]; Memento 2000-2001 de l'Institut de formation), une violation de
la garantie d'impartialité découlant du droit constitutionnel (art. 30 al. 1
Cst. et 6 par. 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de
l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 [CEDH; RS 0.101]),
une évaluation arbitraire de ses prestations (art. 9 Cst.), ainsi que le
caractère arbitrairement disproportionné de l'interruption de sa formation
(art. 5 al. 2 et 9 Cst.).

Le Tribunal administratif s'en rapporte à justice quant à la recevabilité du
recours et persiste dans les termes et conclusions de l'arrêt attaqué. Le
Département cantonal n'a pas répondu à l'invitation à déposer une réponse.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Formé en temps utile contre une décision finale prise en dernière instance
cantonale, qui repose uniquement sur le droit cantonal et touche la
recourante dans ses intérêts juridiquement protégés au sens de l'art. 88 OJ,
le recours est en principe recevable au regard des art. 84 ss OJ.

2.
Selon la loi genevoise du 6 novembre 1940 sur l'instruction publique
(LIP/GE), les candidats à un poste de maître secondaire d'enseignement
général ou technique doivent disposer, outre d'un grade universitaire, d'un
certificat d'aptitude à l'enseignement secondaire attestant de leurs
compétences professionnelles. Ce diplôme est acquis au terme d'une formation
professionnelle initiale en emploi (art. 153 et 154 LIP/GE).

2.1 Ladite formation est régie par le règlement cantonal précité (partie
"Faits" lettre D supra) concernant la formation professionnelle initiale en
emploi des maîtres de l'enseignement secondaire. Elle comporte en principe
deux phases, d'une année scolaire chacune, mais peut être écourtée ou allégée
selon les compétences attestées (art. 5 RFPEMES/GE). La procédure
d'évaluation des candidats est codifiée par les art. 15, 15A et 17
RFPEMES/GE. Dans leur version en vigueur jusqu'au 28 avril 2004, ces
dispositions ont la teneur suivante:
"Art. 15  Evaluation des compétences professionnelles
Evaluation formative
1.L'évaluation formative donne lieu à la rédaction de rapports d'activités et
de rapports d'observation de l'enseignement.

2. Elle est du ressort des formatrices et formateurs engagés dans le cadre
des différents modules de formation, et du maître ou de la maîtresse en
formation.
Evaluation sommative
3.L'évaluation sommative est de la responsabilité conjointe de la direction
de l'établissement scolaire et de la direction de l'institut qui en délèguent
l'exercice respectivement aux responsables de la formation au sein de la
direction d'établissement et aux maîtresses et maîtres formateurs
responsables.

4. Elle débouche sur la rédaction, par chacune des deux instances
responsables, de rapports d'évaluation intermédiaires et de fins de phase de
formation.

5. L'évaluation sommative permet de déterminer la réussite ou l'échec de
chaque phase de la formation."
"Art. 15A  Commission de délibération
La composition ainsi que le fonctionnement de la «commission de délibération»
sont précisés dans les dispositions internes de l'institut. Dans  tous les
cas, cette commission comprend un membre de la direction de l'institut, qui
la préside, les formatrices et formateurs concernés et la maîtresse ou le
maître en formation. Ce dernier peut être assisté par une représentante ou un
représentant d'une association professionnelle."
"Art. 17  Echec et remédiations éventuelles au terme de chaque phase
de la formation
1.La «commission de délibération» peut proposer à la direction de l'institut
un dispositif destiné à remédier aux compétences jugées insuffisantes au
terme de la phase I ou II.

2. La «commission de délibération» peut proposer à la direction de
l'institut, au terme de la phase I ou II, de mettre fin à la formation.

3. L'échec au terme de la phase I ou II entraîne l'interruption définitive de
la formation. Dans ce cas, la direction d'établissement concernée communique
sans délai à l'intéressée ou à l'intéressé la fin des rapports de service."

2.2 Les "dispositions internes de l'institut" auxquelles renvoie l'art. 15A
RFPEMES/GE sont constituées par le "Memento 2000-2001 de l'Institut de
formation". Selon cette réglementation (p. 52 s.), la Commission de
délibération se compose des personnes suivantes (d'après l'ordre figurant à
l'art. 15A RFPEMES/GE):
la directrice ou le directeur de l'Institut de formation;
la doyenne ou le doyen de l'Institut de formation responsable du suivi de la
formation de la maîtresse ou du maître en formation concerné;
toutes les formatrices et formateurs de la maîtresse ou du maître en
formation concerné;

la maîtresse ou le maître en formation dont une ou des compétences
professionnelles est ou sont évaluée(s) comme insuffisantes;
en outre, la maîtresse ou le maître en formation peut être accompagné d'une
ou d'un collègue certifié ou d'une représentante ou d'un représentant
certifié de l'association professionnelle à laquelle elle ou il est affilié.

3.
La recourante se plaint d'une violation arbitraire des art. 15 al. 3, 15A et
17 RFPEMES/GE, ainsi que du Memento 2000-2001 de l'Institut de formation, de
même que de l'inobservation de la garantie d'impartialité découlant des art.
30 al. 1 Cst. et 6 par. 1 CEDH. A cet égard, elle reproche d'abord au
Tribunal administratif d'avoir reconnu à tort la licéité de la présence de
D.________ au sein de la Commission de délibération, puis dénonce
l'inexistence d'une quelconque recommandation de la Commission de
délibération.

3.1 Selon l'autorité intimée, sa qualité de directeur de l'Ecole Y.________
autorisait D.________ à participer à l'évaluation formative de l'intéressée,
ce qui le légitimait à siéger le 21 juin 2001 dans la Commission de
délibération. Ne s'opposait pas à sa présence le fait qu'il ait
antérieurement annoncé le 10 mai 2001 le non-renouvellement de l'engagement
de la recourante, puisque cette décision réservait expressément une réussite
ou une éventuelle prolongation de la formation.

3.2 En substance, l'argumentation de la recourante s'articule en trois
volets:

D'une part, la participation de D.________ dans la Commission de délibération
contrevient à la réglementation cantonale en vigueur. Le Memento de
l'Institut de formation y inclut certes le directeur de cet institut, mais
pas le directeur de l'établissement scolaire dans lequel exerce le candidat.
D.________ ne pouvait davantage y siéger au titre de formateur, puisque
l'Ecole Y.________ avait déjà délégué ce rôle à C.________.

D'autre part, toujours selon la recourante, la présence de D.________ au sein
de la Commission de délibération est d'autant sujette à critique qu'il avait
déjà, le 10 mai 2001, préjugé de l'issue de sa formation. Cette décision
était non seulement partiale mais prématurée, dès lors que l'art. 17 al. 3
RFPEMES/GE impose de ne communiquer la fin des rapports de service qu'après
le constat d'échec. D.________ avait certes réservé une réussite ou une
éventuelle prolongation de la formation, mais l'existence d'une telle
possibilité aurait précisément dû le conduire à s'abstenir de se prononcer.

Enfin, la recourante relève que la décision d'interruption de la formation
conjointement prise le 29 juin 2001 par D.________ et  E.________ n'évoque
aucune recommandation formulée par la Com- mission de délibération. De son
avis, une telle recommandation n'a manifestement jamais été formulée, ainsi
qu'en atteste, notamment, le témoignage de C.________ du 20 janvier 2003,
selon lequel celle-ci ignorait les motifs pour lesquels un complément de
formation n'avait pas été autorisé.

3.3 Il sied d'examiner séparément les trois griefs sus-décrits (consid. 4, 5
et 6 infra).

4.
En premier lieu, il s'agit de déterminer si et dans quelle mesure le droit
cantonal autorise D.________ à débattre dans la Commission de délibération.

4.1 Le destinataire d'une décision peut se prévaloir d'un droit à ce que
celle-ci soit prise par une autorité statuant dans une composition conforme à
la législation en vigueur. Ce principe garde ici toute sa portée: même si la
compétence de la Commission de délibération se limite à des recommandations
relevant d'une procédure interne, à l'exclusion de décisions formelles
affectant directement la situation juridique des administrés, sa composition
est expressément codifiée par une disposition réglementaire que les
administrés peuvent invoquer. Du reste, ses recommandations ne sont pas sans
déployer d'effet sur les administrés, puisqu'elles exercent, par définition,
une influence déterminante sur les décisions à prendre par l'autorité
formellement compétente.

Le grief visant à contester la composition d'une autorité au regard du droit
cantonal de procédure, soit ici les art. 15 ss RFPEMES/GE, se confond avec
celui de violation du principe de l'interdiction de l'arbitraire (cf.,
s'agissant de la composition des tribunaux, ATF 110 Ia 106 consid. 1; 105 Ia
172 consid. 3a; 98 Ia 356 consid. 2; sur la notion d'arbitraire, voir ATF 129
I 8 consid. 2.1; 128 I 273 consid. 2.1; 127 I 60 consid. 5a p. 70 et la
jurisprudence citée).

4.2 L'art. 15A RFPEMES/GE attribue à l'Institut de formation la compétence de
déterminer la composition de la Commission de délibération. Cette clause de
délégation est cependant doublement limitative. Matériellement, elle prévoit
impérativement une composition minimale déterminée - sans pour autant
interdire à l'Institut de formation d'y adjoindre d'autres personnes.
Formellement, elle oblige l'Institut de formation à énoncer la composition
choisie dans ses "dispositions internes", peu importe qu'il s'agisse des
personnes impérativement requises ou d'éventuels participants
supplémentaires.

Le directeur de l'établissement scolaire où exerce le candidat ne figure pas
dans la composition minimale exigée par l'art. 15A RFPEMES/GE. Sa
participation n'est pas davantage prévue par les "dispositions internes" de
l'Institut de formation, à savoir le Memento (cf. consid. 2.2 supra). En soi,
le statut de directeur de l'Ecole Y.________ n'habilitait donc pas D.________
à siéger dans la Commission de délibération.

4.3 Par ailleurs, contrairement à ce que semble soutenir implicitement le
Tribunal administratif, D.________ n'était pas davantage autorisé à débattre
dans la Commission de délibération au titre de l'un des "formateurs"
expressément énoncés à l'art. 15A RFPEMES/GE.

La notion de "formateur" est définie de manière exhaustive aux art. 23 ss
RFPEMES/GE, qui subordonnent de surcroît ce statut à une procédure de
désignation déterminée. Or, D.________ ne remplit pas les conditions prévues
par ces dispositions. En particulier, il n'a pas été désigné comme
"responsable de la formation à la direction d'un établissement scolaire"
(art. 23 lettre a ch. 1), ni comme "maître-mentor" (art. 23 lettre a ch. 2),
ces fonctions étant du reste déjà occupées par C.________ et B.________
respectivement. Le seul fait qu'il ait personnellement observé et conseillé
la recourante ne suffit donc pas à le qualifier de "formateur" au sens de
l'art. 15A RFPEMES/GE.

L'art. 15 al. 3 RFPEMES/GE ne conduit pas à une autre conclusion. Certes,
cette disposition confie la responsabilité de l'évaluation sommative à la
direction de l'établissement scolaire et à la direction de l'institut, mais
elle leur impose précisément de déléguer l'exercice de cette tâche aux
responsables de la formation au sein de la direction de l'établissement
scolaire et aux maîtres formateurs responsables. Autrement dit, si la
responsabilité de cette évaluation incombe aux deux directions, son exercice
appartient aux personnes spécifiquement désignées à cet effet, ici C.________
et A.________ respectivement.

4.4 Dans ces conditions, en tenant pour admissible la participation de
D.________ à la Commission de délibération, le Tribunal administratif a
procédé à une application arbitraire de l'art. 15A RFPEMES/GE.

En matière d'examens, les prescriptions de procédure doivent être respectées
d'autant plus strictement que l'évaluation des résultats ne peut être revue
qu'avec une retenue particulière (sur cette retenue, ATF 121 I 225 consid. 4b
p. 230 et 118 Ia 488 consid. 4c p. 495 pour le Tribunal fédéral; consid. 5 de
l'arrêt attaqué pour le Tribunal administratif; aussi art. 21 al. 2
RFPEMES/GE).

5.
En second lieu, il n'est pas inutile d'examiner si, au vu de sa décision du
10 mai 2001, D.________ présentait une apparence de prévention l'empêchant de
siéger dans la Commission de délibération du 21 juin 2001.

5.1 A juste titre, la recourante souligne que les commissions administratives
ne sont pas des tribunaux au sens des art. 30 al. 1 Cst. ou 6 par. 1 CEDH, ce
qui ne les dispense pas d'offrir, à l'instar de ceux-ci, une procédure
respectant le principe d'impartialité. Néanmoins, la recourante ne cite pas
expressément l'art. 29 al. 1 Cst., disposition imposant précisément un tel
principe aux autorités administratives (cf. consid. 5.3 infra). Compte tenu
toutefois de l'argumentation développée, il serait formaliste à l'excès de
déclarer pour cet unique motif le grief irrecevable au regard des exigences
de motivation posées par l'art. 90 al. 1 lettre b OJ. Il y a donc lieu
d'entrer en matière.

5.2 La recourante n'invoquant aucune disposition cantonale relative à
l'impartialité de l'autorité, le grief soulevé doit être examiné
exclusivement à la lumière des garanties minimales de l'art. 29 al. 1 Cst.,
dont le Tribunal fédéral revoit librement le respect.

5.3 Les garanties d'indépendance et d'impartialité découlant des art. 30 Cst.
et 6 CEDH ne s'appliquent pas à une autorité administrative. Néanmoins,
l'art. 29 al. 1 Cst. a, pour les procédures judiciaires et administratives,
une portée en principe équivalente. Il permet - indépendamment du droit
cantonal - d'exiger la récusation des membres d'une autorité administrative
dont la situation ou le comportement est de nature à faire naître un doute
sur leur impartialité; cette protection tend notamment à éviter que des
circonstances extérieures à l'affaire ne puissent influencer une décision en
faveur ou au détriment de la personne concernée. Elle n'impose pas la
récusation seulement lorsqu'une prévention effective du membre de l'autorité
est établie; il suffit que les circonstances donnent l'apparence de la
prévention et fassent redouter une activité partiale. Cependant, seules des
circonstances constatées objectivement doivent être prises en considération;
les impressions purement individuelles d'une des personnes impliquées ne sont
pas décisives (ATF 127 I 196 consid. 2b; 125 I 119 consid. 3b, 209 consid. 8a
p. 217; cf. également la jurisprudence concernant l'impartialité des juges:
ATF 128 V 82 consid. 2; 126 I 68 consid. 3; 125 I 119 consid. 3a; 116 Ia 135
consid. 2 et 3b).

Conformément aux motifs exposés ci-dessus (consid. 4.1 supra), ces exigences
valent sans restriction pour la Commission de délibération.

5.4 La décision de D.________ adressée à la recourante le 10 mai 2001 a la
teneur suivante:
"[...] les rapports d'évaluation intermédiaires rédigés tant par [....]
A.________ que par [...] C.________ sont concordants dans leur appréciation
négative de la qualité de votre travail. Ces rapports rendent vraisemblable
un échec de votre formation.
Pour ma part, j'ai pu constater votre grande difficulté à maîtriser tant les
questions administratives et réglementaires, que la préparation des cours,
ainsi que l'établissement de relations pédagogiques constructives avec les
élèves [...]. Toutes ces raisons me font partager l'appréciation négative de
vos formateurs.
En conséquence, et conformément au chap. VIII, art. 87 du règlement fixant le
statut des membres du corps enseignant, je suis au regret de vous confirmer
que je ne renouvellerai pas votre engagement pour l'année scolaire 2001-2002.
Ce non-réengagement pourrait être remis en question par la réussite de votre
année de formation, ou par une éventuelle décision de poursuite de votre
formation."
5.5 Selon la formulation de ce courrier, son auteur donne toute apparence
d'être convaincu de l'échec de la recourante et d'être inébranlable dans son
opinion, que ce soit en présence d'éventuels faits nouveaux ou d'une
discussion lors de la séance plénière à venir. Le fait que D.________ réserve
formellement une réussite ou une éventuelle prolongation de la formation ne
relativise nullement la nature visiblement irrévocable de son propre constat
d'échec. L'art. 87 de l'ancien règlement du 25 juillet 1979 fixant le statut
des membres du corps enseignant, en vigueur jusqu'au 31 août 2002, ne permet
pas davantage de tempérer ses propos. En effet, s'il est vrai que cette
disposition fixe déjà au 15 mai - non sans contredire l'art. 17 RFPEMES/GE -
le délai de notification du non-renouvellement de l'engagement d'un
suppléant, il était loisible à D.________ d'adopter une rédaction
sauvegardant ce délai, sans pour autant se prononcer d'une manière aussi
tranchée sur les prestations de la recourante.

Ayant objectivement donné l'apparence de s'être forgé une opinion définitive
sur l'issue à donner aux prestations de la recourante (cf. ATF 125 I 119
consid. 3a; 115 Ia 180 consid. 3), D.________ doit être considéré comme
prévenu au point que sa présence au sein de la Commission de délibération ne
satisfaisait pas davantage aux exigences d'impartialité découlant de l'art.
29 al. 1 Cst.

6.
Au demeurant, la décision formelle prise le 29 juin 2001 n'est elle-même pas
exempte de critique au regard du droit cantonal.

Comme le relève la recourante, elle ne contient aucune mention de la
recommandation que la Commission de délibération était tenue de formuler
selon l'art. 17 RFPEMES/GE. Or, l'enseignant est en droit de connaître la
teneur de la recommandation, sinon ses motifs, du moment que celle-ci exerce
une influence déterminante sur la décision. De surcroît, la décision du 29
juin 2001 indique avoir été prise "conjointement" par le directeur de
l'Institut de formation et le directeur de l'Ecole Y.________, alors qu'en
vertu des art. 17 al. 3 et 19 RFPEMES/GE dans leur version en vigueur
jusqu'au 28 avril 2004, la décision d'interruption de formation est du seul
ressort de la direction de l'Institut de formation. Vu l'issue du recours, il
est cependant superflu de déterminer si ces irrégularités touchent à
l'arbitraire.

7.
En résumé, la procédure ayant mené à la décision du 29 juin 2001 interrompant
définitivement la formation de la recourante est entachée non seulement d'une
violation de l'art. 15A RFPEMES/GE constitutive d'arbitraire, mais
contrevient encore à l'art. 29 al. 1 Cst. garantissant une autorité
impartiale.

Par conséquent, le recours doit être admis et le jugement attaqué annulé en
tant qu'il confirme la décision du 29 juin 2001 mettant un terme à la
formation de la recourante.

Etant donné l'issue du recours, il n'y a pas lieu d'examiner les autres
griefs de la recourante, dénonçant une évaluation arbitraire de ses
prestations ainsi qu'une disproportion arbitraire de la décision
d'interrompre sa formation.

Il appartiendra aux autorités cantonales de déterminer les conséquences à
tirer du présent arrêt.

8.
Vu ce qui précède, le recours doit être admis et l'arrêt attaqué annulé. Le
canton de Genève, dont l'intérêt pécuniaire n'est pas en cause, n'a pas à
supporter les frais judiciaires (art. 156 al. 2 OJ). En revanche, il doit
verser à la recourante une indemnité à titre de dépens (art. 159 al. 1 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est admis et le jugement attaqué annulé.

2.
Il n'est pas perçu de frais judiciaires.

3.
Le canton de Genève versera à la recourante une indemnité de 3'000 fr. à
titre de dépens.

4.
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire de la recourante,
ainsi qu'au Département de l'instruction publique et au Tribunal
administratif du canton de Genève.

Lausanne, le 25 octobre 2004

Au nom de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le président:  La greffière: