Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

II. Öffentlich-rechtliche Abteilung 2P.201/2004
Zurück zum Index II. Öffentlich-rechtliche Abteilung 2004
Retour à l'indice II. Öffentlich-rechtliche Abteilung 2004


2P.201/2004
2A.465/2004/LGE/elo
Arrêt du 8 février 2006
IIe Cour de droit public

MM. et Mme les Juges Merkli, Président,
Yersin et Meylan, Juge suppléant.
Greffier: M. Langone.

X. ________, recourant,
représenté par Me Nicolas Urech, avocat,

contre

Administration cantonale des impôts du canton de Vaud, route de Berne 46,
1014 Lausanne,
Tribunal administratif du canton de Vaud,
avenue Eugène-Rambert 15, 1014 Lausanne.

2P.201/2004
art. 9 et 127 Cst.; impôt cantonal et communal 1987-1988, 1991-1992 à
1995-1996,
2A.465/2004
impôt fédéral direct 1989-1990 et 1991-1992

recours de droit public (2P.201/2004) contre les arrêts
du 23 décembre 1999 et du 18 juin 2004 du Tribunal administratif  du canton
de Vaud et recours de droit administratif (2A.465/2004) contre l'arrêt du
Tribunal administratif du canton de Vaud du 18 juin 2004.

Faits:

A.
Ancien ferblantier-couvreur, X.________, domicilié à Y.________, possède de
nombreux immeubles et exerce une activité de promoteur immobilier.
Par décision sur réclamation du 18 décembre 1997, l'Administration cantonale
des impôts du canton de Vaud a fixé à 179'200 fr. le revenu imposable de
X.________ pour la période fiscale 1987-1988 en matière d'impôt cantonal et
communal.

Toujours en matière d'impôt cantonal et communal, l'Administration cantonale
des impôts a, par décisions séparées sur réclamation du 26 mars 1998, fixé à
281'900 fr. le revenu imposable du prénommé et prononcé à l'encontre de
celui-ci une amende de 600 fr. pour la période 1991-1992; elle a arrêté à
zéro franc le revenu imposable et à 2'257'233 fr. le total de la perte
réalisée par le contribuable durant la période 1993-1994; enfin, pour la
période 1995-1996, elle a fixé à 1'219'700 fr. le revenu imposable de
l'intéressé. La taxation pour la période fiscale 1989-1990 n'a pas été
contestée.

Par actes séparés, X.________ a recouru contre toutes ces décisions auprès du
Tribunal administratif du canton de Vaud.

Par arrêt du 23 décembre 1999 (qui ne portait pas sur l'impôt fédéral
direct), ledit tribunal a partiellement admis les recours en ce sens qu'il a
confirmé la décision sur réclamation du 18 décembre 1997 (période 1987-1988),
tandis qu'il a annulé les décisions sur réclamation du 26 mars 1998 (périodes
1991-1992, 1993-1994 et 1995-1996), les dossiers étant retournés à
l'Administration cantonale des impôts pour qu'elle procède à de nouvelles
taxations dans le sens des considérants. En bref, la taxation pour la période
1991-1992 devait être modifiée au détriment du contribuable (reprise de
1'700'000 fr.), portant à 1'061'412 fr. le revenu imposable de X.________.
Pour le surplus, l'intéressé a obtenu partiellement gain de cause, puisque la
perte moyenne à reporter a été arrêtée à 3'273'290 fr. pour la période
1993-1994 et à 891'205 fr. pour la période 1995-1996.

B.
A la suite de l'arrêt du Tribunal administratif du 23 décembre 1999 (qui ne
portait que sur l'impôt cantonal et communal), l'Administration cantonale des
impôts s'est prononcée sur réclamation, dans une seule et même décision du 6
février 2004, tant en matière d'impôt cantonal et communal qu'en matière
d'impôt fédéral direct.
S'agissant de l'impôt cantonal et communal, l'Administration cantonale des
impôts a déclaré irrecevable la réclamation formée par X.________ en tant
qu'il faisait valoir des griefs nouveaux à l'encontre des décisions de
taxations rectificatives émises le 6 mars 2000 par l'Office d'impôt de
Z.________ pour les périodes 1987-1988 et 1991-1992 à 1995-1996; elle a
rejeté la réclamation en tant que celle-ci demandait de constater la
prescription de la créance d'impôt de la période 1987-1998 et contre le refus
de réviser les taxations des périodes 1987-1988 à 1995-1996.
En matière d'impôt fédéral direct, l'Administration cantonale des impôts a
admis la réclamation portant sur la période 1987-1988 en ce sens qu'elle a
déclaré prescrite la créance fiscale y relative; elle a rejeté la réclamation
formée contre le refus de révision de la période 1989-1990; elle a admis
partiellement la réclamation dirigée contre la décision de taxation du 31
octobre 1996 en fixant à 302'700 fr. le revenu imposable de la période
1991-1992; elle a déclaré irrecevable la réclamation interjetée contre la
décision concernant la période 1993-1994 et, enfin, l'Administration
cantonale des impôts a admis la réclamation en ce sens qu'elle a fixé à 0 fr.
le revenu imposable pour  la période 1995-1996.

X. ________ a interjeté recours contre la décision sur réclamation du 6
février 2004 auprès du Tribunal administratif qui, par arrêt du 18 juin 2004,
a confirmé cette décision tant en matière d'impôt cantonal et communal qu'en
matière d'impôt fédéral direct.

C.
Agissant par la voie du recours de droit administratif (2A.465/2004),
X.________ demande au Tribunal fédéral principalement de réformer l'arrêt du
Tribunal administratif du 18 juin 2004 en ce sens que, pour la période
fiscale 1991-1992 en matière d'impôt fédéral direct, il n'est pas tenu compte
dans le revenu imposable du montant de 1'700'000 fr. qui ne doit pas être
considéré comme définitivement acquis et, s'agissant de la période fiscale
1989-1990 en matière d'impôt fédéral direct, il est pris en considération le
résultat définitif de la promotion immobilière "A.________" par la voie de la
révision. Subsidiairement, il conclut à l'annulation de l'arrêt entrepris et
au renvoi de la cause à l'autorité intimée pour nouvelles décisions dans le
sens des considérants.
Agissant par la voie du recours de droit public (2P.201/2004), X.________
demande au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt de renvoi du 23 décembre 1999
et l'arrêt du 18 juin 2004 rendus tous les deux par le Tribunal
administratif.
L'Administration cantonale des impôts conclut au rejet des deux recours dans
la mesure où ils sont recevables. L'Administration fédérale des contributions
conclut au rejet du recours de droit administratif.

D.
La requête d'effet suspensif relative au recours de droit public présentée
par le recourant a été admise par ordonnance présidentielle du 14 septembre
2004.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Dans une seule et même écriture - comme l'admet la jurisprudence (ATF 131 II
553 consid. 4.2 p. 559; 130 II 509 consid. 8.3 p. 511 s; 126 II 377 consid. 1
p. 381) -, le recourant a déposé simultanément deux recours, l'un de droit
administratif, l'autre de droit public, contre le même arrêt concernant à la
fois l'impôt fédéral direct et l'impôt cantonal et communal. Les deux recours
- qui  doivent contenir des motivations et des conclusions adaptées à chacun
des impôts en cause - soulèvent des griefs en grande partie similaires. Il se
justifie dès lors, par économie de procédure, de prononcer la jonction des
causes et de statuer sur les mérites des deux recours dans un seul et même
arrêt (art. 24 PCF et 40 OJ).

I.  Recours de droit administratif (2A.465/2004)

2.
2.1 Déposé en temps utile contre un arrêt rendu par une autorité judiciaire
statuant en dernière instance cantonale et fondé sur le droit public fédéral
dans la mesure où il concerne l'impôt fédéral direct, le présent recours est
en principe recevable en vertu des art. 97 ss OJ, de l'art. 112 al. 1 de
l'ancien arrêté du Conseil fédéral du 9 décembre 1940 concernant la
perception d'un impôt fédéral direct (AIFD; l'Arrêté sur l'impôt fédéral
direct; RO 56 2021), en vigueur jusqu'au 31 décembre 1994, et de l'art. 146
de la loi fédérale du 14 décembre 1990 sur l'impôt fédéral direct (LIFD; la
loi sur l'impôt fédéral direct; RS 642.11).

2.2 La loi sur l'impôt fédéral direct est entrée en vigueur le 1er janvier
1995 et a abrogé l'Arrêté sur l'impôt fédéral direct. Les prescriptions de
droit matériel de cette loi sont donc applicables à partir de la période
fiscale 1995/1996. Comme le présent litige concerne la période 1989-1990 et
1991-1992, le calcul des éléments imposables s'effectue encore selon le droit
en vigueur à cette époque, soit selon l'Arrêté sur l'impôt fédéral direct.

3.
Le recourant reproche aux autorités fiscales de ne pas avoir procédé à une
révision des taxations définitives relatives à la période fiscale 1989-1990,
entrées en force, pour tenir compte du résultat définitif de la promotion
immobilière "A.________" d'une grande ampleur qui s'est déroulée sur
plusieurs périodes fiscales successives. Le recourant avait déclaré, le 31
janvier 1990, comme gains estimatifs résultant de cette promotion les
montants suivants: 200'000 fr. pour 1985; 600'000 fr. pour 1986; 800'000 fr.
pour 1987 et 800'000 fr. pour 1988, soit au total 2'400'000 fr. Ces gains
avaient été admis par la Commission d'impôt et recette du district de
Z.________ (actuellement: Office d'impôt de Z.________) dans une décision  du
5 juillet 1990, qui n'a pas été attaquée. L'intéressé a toutefois annoncé, le
27 novembre 1998, à ladite autorité les bénéfices réels qu'il avait
finalement réalisés sur la promotion et sollicité - en vain - une
rectification de ses taxations en tenant compte des gains réels suivants:
532'355 fr. pour 1985, 225'901 fr. pour 1986; 3'320 fr. pour 1987 et 80'090
fr. pour 1988. Le 14 avril 2000, le  recourant a formellement demandé la
révision de la taxation 1989-1990 pour tenir compte du résultat définitif de
la promotion "A.________", requête qui a été rejetée.

3.1 A l'exception des cas de rectification d'erreurs de calcul (art. 127 al.
1 AIFD) et de soustraction fiscale (art. 129 ss AIFD) - qui n'entrent pas en
ligne de compte en l'espèce - l'arrêté du Conseil fédéral ne prévoit pas la
possibilité de modifier les décisions et prononcés entrés en force (art. 127
al. 3 AIFD). Toutefois, selon une jurisprudence constante (ATF 111 Ib 209
consid. 1 p. 210-211 et les références citées; Archives 55 p. 512 consid. 3b
p. 516; 48 p. 188 consid. 3 p. 191-193 et les arrêts cités), même en
l'absence de dispositions légales expresses, les décisions entrées en force
peuvent faire l'objet d'une révision par analogie avec la procédure prévue
aux articles 136 ss OJ. A cet égard, sont notamment des motifs de révision la
violation de règles essentielles de procédure, la découverte de faits
nouveaux importants ou de nouvelles preuves concluantes qui n'avaient pas pu
être invoqués dans la procédure précédente ou l'existence de faits importants
ressortant du dossier qui n'ont pas été pris en compte (ATF 105 Ib 245
consid. 3a p. 251-252 et les références citées; cf. également Ernst
Känzig/Urs R. Behnisch, Die direkte Bundessteuer, IIIe Partie, 2e éd., Bâle
1992, n. 15-20 ad art. 126). La révision est toutefois exclue lorsque le
contribuable, en faisant preuve de la diligence que l'on pouvait attendre de
lui, était à même de faire valoir ses griefs au cours de la procédure
ordinaire (ATF 111 Ib 209 consid. 1 p. 210-211 et les références citées).
En vigueur depuis le 1er janvier 1995, l'art. 147 LIFD énumère les motifs de
révision que le contribuable peut faire valoir à l'encontre d'une décision
entrée en force en matière d'impôt fédéral direct. Une telle révision peut
ainsi être effectuée lorsque des faits importants ou des preuves concluantes
sont découverts (al. 1 lettre a); lorsque l'autorité qui a statué n'a pas
tenu compte de faits importants ou de preuves concluantes qu'elle connaissait
ou devait connaître ou qu'elle a violé de quelque autre manière l'une des
règles essentielles de la procédure (al. 1 lettre b); lorsqu'un crime ou un
délit a influé sur la décision ou le prononcé (al. 1 lettre c). La révision
est toutefois exclue lorsque le requérant invoque des motifs qu'il aurait
déjà pu faire valoir au cours de la procédure ordinaire s'il avait fait
preuve de toute la diligence qui pouvait raisonnablement être exigée de lui
(art. 147 al. 2 LIFD).
Dans la mesure où la révision est soumise à des conditions similaires dans
l'ancien et le nouveau droit en matière d'impôt fédéral direct, la question
de savoir quelles sont les dispositions applicables au présent litige peut
rester indécise.

3.2 La décision de taxation provisoire pour la période 1989-1990 du 2 mars
1990 a été rendue définitive par avis des 4 et 26 mars 1997. La décision de
taxation définitive - qui tient compte pour la promotion "A.________" du
bénéfice provisoire de 800'000 fr. pour chacune des années de calcul 1987 et
pour 1988  - est entrée en force, faute d'avoir été attaquée.
Le recourant considère qu'il y a lieu de procéder à une révision de cette
taxation en se fondant sur les prétendues assurances données par la
Commission d'impôt et recette de district de Z.________ s'agissant de la
promotion immobilière "A.________". Cette autorité avait admis, dans sa
décision du 5 juillet 1990, les gains estimatifs déclarés par le recourant
lui-même, tout en précisant que ces gains provisoires figureraient dans les
déclarations d'impôt ordinaire et que le résultat final de cette opération
serait déterminé en tenant compte de ces bénéfices déjà déclarés et imposés.
Une telle décision (entrée en force) constituait la réponse à une lettre du
31 janvier 1990, par laquelle le recourant demandait à l'autorité fiscale
notamment d'admettre "la situation provisoire actuelle, ceci jusqu'à la vente
des derniers appartements, afin de pouvoir établir un prix de revient précis
[...] et permettant une équitable répartition sur les différents lots
vendus".

3.3 Ancré à l'art. 9 Cst., et valant pour l'ensemble de l'activité étatique,
le principe de la bonne foi confère au citoyen, à certaines conditions, le
droit d'exiger des autorités qu'elles se conforment aux promesses ou
assurances précises qu'elles lui ont faites et ne trompent pas la confiance
qu'il a légitimement placée dans ces promesses et assurances (ATF 130 I 26
consid. 8.1 p. 60; 129 I 161 consid. 4 p. 170; 129 II 361 consid. 7.1 p. 381;
128 II 112 consid. 10b/aa p. 125 et les arrêts cités; 118 Ib 580 consid. 5a
p. 582/583). Le principe de la bonne foi régit aussi les rapports entre les
autorités fiscales et les contribuables; le droit fiscal est toutefois dominé
par le principe de la légalité, de telle sorte que le principe de la bonne
foi ne saurait avoir qu'une influence limitée, surtout s'il vient à entrer en
conflit avec le principe de la légalité (cf. art. 5 et 9 Cst.; ATF 118 Ib 312
consid. 3b p. 316; cf. Jean-Marc Rivier, Droit fiscal suisse, L'imposition du
revenu et de la fortune, 2e éd., p. 132; Ernst Blumenstein/Peter Locher,
System des Steuerrechts, 5e éd., Zurich 1995, p. 25).

3.4 Contrairement à ce que prétend le recourant, la décision du 5 juillet
1990 précitée ne contient aucune assurance quant à la possibilité de demander
ultérieurement la révision de sa taxation définitive - par hypothèse entrée
en force - en rapport avec la promotion "A.________" et ce, indépendamment de
la réalisation ou non des conditions légales donnant lieu à révision. Même si
l'on examinait ladite décision à la lumière de la lettre du 31 janvier 1990 -
interprétée selon le principe de la confiance, c'est-à-dire d'après le sens
qui peut et doit lui être donné de bonne foi, d'après son texte et  son
contexte, ainsi que d'après toutes les circonstances qui l'ont  précédée et
accompagnée (ATF 130 III 417 consid. 3.2 p. 424; 129 III 118 consid. 2.5
p.122; 126 III 119 consid. 2a p. 120, 125 III 435  consid. 2a/aa p. 436/437)
- le recourant ne pourrait pas se prévaloir d'une quelconque promesse à ce
sujet. Dans son courrier, le recourant ne s'est en tout cas pas réservé - du
moins pas expressément - la faculté de demander ultérieurement la révision de
sa décision de taxation définitive entrée en force pour tenir compte du
résultat définitif de la promotion "A.________". Le mot "révision" n'y figure
même pas.

3.5 Reste à examiner si les conditions légales pour admettre une révision
sont réalisées. Selon le Tribunal administratif, tant le recou- rant que
l'autorité fiscale n'ignoraient pas que les gains annoncés en 1990 dans le
cadre de la promotion "A.________" n'avaient pas été calculés de manière
précise, mais résultaient d'une appréciation du contribuable lui-même. En
outre, ces gains "provisoires" ont été intégrés dans la déclaration d'impôt
ordinaire du recourant pour la période ici concernée, comme cela ressort de
la décision du 5 juillet 1990, entrée en force. Cela étant, le contribuable
n'a pas recouru contre la décision de taxation définitive entrée en force à
la suite des avis des 4 et 26 mars 1997, alors même qu'il savait que cette
taxation définitive était fondée sur des gains provisoires. Autrement dit, il
aurait pu et dû contester la décision de taxation définitive pour faire
valoir, dans le cadre d'une procédure de recours ordinaire, que les gains
immobiliers pour la période en cause n'étaient pas définitifs et demander que
la taxation demeure provisoire jusqu'à droit connu sur le résultat définitif
de la promotion "A.________". C'est donc à bon droit que les autorités
cantonales ont retenu que la révision était exclue. Force est de constater
que le recourant n'a pas fait preuve de toute la diligence que l'on pouvait
attendre de lui pour faire valoir ses griefs au cours de la procédure de
recours ordinaire. Point n'est donc besoin d'examiner plus avant si les faits
invoqués par le recourant à l'appui de sa demande de révision constituent
véritablement des faits nouveaux et importants, voire des  preuves nouvelles
et concluantes.

3.6 En définitive, le Tribunal administratif n'a pas violé le principe de
l'imposition selon la capacité contributive du recourant en estimant qu'il
n'y avait pas matière à révision s'agissant de la période 1989-1990.

4.
4.1 Le recourant s'en prend ensuite à  la taxation de la période fiscale
1991-1992, qui a fait l'objet d'une reprise de 1'700'000 fr. Cette somme
correspondait à la moitié de l'acompte reçu le 29 juillet 1988, date à
laquelle le recourant (promettant-vendeur), propriétaire de l'Hôtel
B.________, à Y.________, avait passé, en la forme authentique, une promesse
de vente et d'achat portant sur cet immeuble avec la société coopérative
C.________ et consorts (promettants-acheteurs) pour le prix de 22'525'000
fr.; un acompte de 3'400'000 fr. avait donc été versé au promettant-vendeur à
la signature de cet acte moyennant remise d'une cédule hypothécaire au
porteur du même montant aux promettants-acquéreurs en guise de garantie, le
solde devant être payé à la signature de l'acte de vente définitif; la
conclusion de la vente était subordonnée à l'adoption définitive d'un plan
partiel d'affectation relatif à l'immeuble en cause avant le 31 décembre
1992. Bien que ledit plan partiel d'affectation ait été adopté par le Conseil
d'Etat vaudois en octobre 1990 (devenu définitif trente jour après), les
promettants-acquéreurs ont refusé de signer, le 17 décembre 1990, l'acte de
vente, car ils n'étaient pas en mesure d'acquitter le solde du prix de vente.
Le recourant a gardé l'acompte de 3'400'000 fr., mais n'a déclaré comme
revenu que 1'700'000 fr., estimant que l'autre moitié de l'acompte ne lui
était pas acquis puisqu'il était exposé à restituer l'intégralité de
l'acompte. Par jugement du 24 janvier 1996, le Tribunal civil de
l'arrondissement de la Sarine a condamné la société C.________ à payer au
recourant la somme de 11'027'368 fr. 95 (non compris l'acompte de 3'400'000
fr. déjà versé) au titre de dommages-intérêts pour inexécution du contrat,
avec intérêts dès le 17 décembre 1990, et à lui restituer la cédule
hypothécaire au porteur d'un montant de 3'400'00 fr.
Le Tribunal administratif a estimé que le montant de 1'700'000 fr. devait
être considéré comme un revenu réalisé durant l'année de calcul 1990, étant
donné que la condition suspensive à laquelle était subordonnée la conclusion
du contrat de vente s'était accomplie en décembre 1990. Le recourant conteste
le moment de réalisation du revenu; selon lui, la somme de 1'700'000 fr. ne
devrait pas être imposée dans l'année de calcul 1990, mais en 1996, année au
cours de laquelle le Tribunal civil de l'arrondissement de la Sarine a rendu
son jugement. Bref, le recourant estime que ce n'est que par une compensation
avec une créance en dommages-intérêts reconnue judiciairement en 1996 que
l'acompte perçu en 1988 pouvait être considéré comme un revenu définitivement
acquis, partant imposable.

4.2 Le revenu n'est imposable que s'il est réalisé (Xavier Oberson, Droit
fiscal suisse, 2e éd., n. 12 p. 80). Un revenu est considéré comme réalisé,
d'après les principes généraux du droit fiscal, lorsque le contribuable peut
effectivement en disposer, c'est-à-dire lorsqu'un bien ou une prestation a
passé en sa possession ou lorsqu'il a acquis un droit ferme à obtenir un bien
ou une prestation. En règle générale, l'acquisition d'une prétention est déjà
considérée comme un revenu dans la mesure où son exécution ne paraît pas
incertaine. Ce n'est que si cette exécution paraît d'emblée peu probable que
le moment de la perception réelle de la prestation est pris en considération
(ATF 113 Ib 23 consid. 2e p. 26; 105 Ib 238 consid. 4a p. 242; RDAF 2003 II
622 consid. 3.2.1 p. 626, 2A.182/2002; Peter Locher, Kommentar zum DBG, Ière
Partie, n. 18 ss ad art. 16 p. 284; Markus Reich, in: Martin Zweifel/Peter
Athanas, Kommentar zum schweizerischen Steuerrecht, I/2a, Bundesgesetz über
die direkte Bundessteuer (DBG) Art. 1-82, n. 33 ss ad art. 16 p.138;
Jean-Marc Rivier, op. cit., p. 326 ss). Il faut que la prétention, de
potentielle, soit devenue actuelle par une concré- tisation la rendant
disponible (Walter Ryser/Bernard Rolli, Précis de droit fiscal suisse, 4e
éd., p.162).

4.3 En l'occurrence, c'est à bon droit que le Tribunal administratif a retenu
que la somme de 1'700'000 fr., soit la moitié de l'avance encaissée en 1988
par le recourant, devait être considérée comme un revenu réalisé le 17
décembre 1990, date à laquelle les promettants-acquéreurs étaient tenus de
signer le contrat de vente principal selon l'engagement contractuel qu'ils
avaient pris lors de l'acte de promesse d'achat et de vente. A partir de ce
moment-là, les promettants-acquéreurs étaient en demeure de s'exécuter. Quoi
qu'en dise le recourant, une interpellation de mise en demeure adressée aux
promettants-acquéreurs n'était pas nécessaire, puisque ceux-ci avaient
clairement manifesté leur volonté de ne pas s'exécuter en décembre 1990 déjà.
Dès lors, le recourant pouvait, au choix, demander que les
promettants-acquéreurs soient condamnés à la conclusion du contrat principal
ou actionner ceux-ci en dommages-intérêts. Le montant de 1'700'000 fr.
pouvait donc être considéré soit comme un acompte à valoir sur le prix de
vente, soit comme une avance sur l'indemnité en dommages-intérêts due par les
promet- tants-acquéreurs. Cette somme pouvait ainsi être considérée comme
définitivement acquise à partir de fin 1990. Le recourant pouvait en disposer
librement.

Le recourant prétend au contraire que la somme de 3'400'000 fr. versée à
titre d'acompte ne pouvait être considérée comme réellement acquise qu'en
1996, soit après reconnaissance judiciaire d'une créance en
dommages-intérêts. Toutefois, ce raisonnement ne peut être suivi, car le
moment de la réalisation du revenu ne saurait dépendre de la seule volonté du
contribuable d'intenter ou non une action en dommages-intérêts; si tel était
le cas, le contribuable pourrait différer,
et par là déterminer lui-même en fonction de ses convenances personnelles, le
moment de la réalisation du revenu imposable.

Le recourant souligne aussi le fait qu'il a été exposé au risque de devoir
restituer l'acompte reçu de 3'400'000 fr. aux promettants-acquéreurs jusqu'à
ce qu'un tribunal reconnaisse l'existence d'une créance en dommages-intérêts
en sa faveur. Or les autorités fiscales ont déjà (largement) tenu compte de
ce risque en considérant comme revenu imposable en 1990 non pas l'entier mais
seulement la moitié de l'acompte reçu (soit 1'700'000 fr.). En outre, il
ressort de l'arrêt attaqué - dont les faits lient le Tribunal fédéral dans la
mesure où ils ne sont pas manifestement erronés (art. 105 al. 2 OJ) - que le
recourant n'a pas établi un risque réel de remboursement de l'acompte entre
fin 1990 et 1996. Le recourant - qui avait d'ailleurs lui-même déclaré avoir
perçu en 1990 un revenu de 1'700'000 fr.- n'allègue même  pas que les
promettants-acquéreurs défaillants lui aient réclamé la restitution de
l'acompte en question ou qu'ils aient menacé de faire réaliser la cédule
hypothécaire en cas de non-remboursement dudit acompte. Le recourant cite
Markus Weidemann (Einkommensbegriff und Realisation, thèse Zurich 1995, p.
152), qui relève en substance que le montant obtenu dans le cadre d'une vente
publique d'un objet ordonnée par un juge (art. 93 CO) peut être considéré
comme un revenu imposable définitivement acquis lorsque les conditions d'une
demeure du créancier sont remplies et que toutes les mesures légales ont été
prises. Mais on ne voit pas très bien en quoi ce passage lui serait d'un
quelconque secours.

4.4 En résumé, la juridiction cantonale n'a pas violé le principe de
l'imposition selon la capacité contributive du recourant en fixant le moment
de la réalisation du revenu litigieux en décembre 1990.
II. Recours de droit public (2P.201/2004)

5.
5.1 Déposé en temps utile contre un arrêt final pris en dernière instance
cantonale, qui ne peut être attaqué que par la voie du recours de droit
public dans la mesure où il concerne les impôts cantonaux et communaux et qui
touche le recourant dans ses intérêts juridiquement protégés, le présent
recours est en principe recevable au regard des art. 84 ss OJ. L'arrêt
attaqué portant sur des périodes fiscales antérieures au 1er janvier 2001,
l'art. 73 al. 1 de la loi fédérale du 14 décembre 1990 sur l'harmonisation
des impôts directs des cantons et des communes (LHID; RS 642.14) ne trouve
pas application.

5.2 En vertu de l'art. 90 al. 1 lettre b OJ, l'acte de recours doit, sous
peine d'irrecevabilité, contenir un exposé des faits essentiels et un  exposé
succinct des droits constitutionnels ou des principes juridiques violés et
préciser en quoi consiste la violation. Lorsqu'il est saisi d'un recours de
droit public, le Tribunal fédéral n'a donc pas à vérifier de lui-même si
l'arrêt entrepris est en tous points conforme au droit et à l'équité. Il
n'examine que les griefs d'ordre constitutionnel invoqués et suffisamment
motivés dans l'acte de recours. Le recourant ne saurait se contenter de
soulever de vagues griefs ou de renvoyer aux actes cantonaux (ATF  130 I 258
consid. 1.3, 26 consid. 2.1; 129 III 626 consid. 4; 129 I 113 consid. 2.1;125
I 71 consid. 1c p. 76; 115 Ia 27 consid. 4a p. 30; 114 Ia 317 consid. 2b p.
318). En outre, dans un recours pour arbitraire fondé sur l'art. 9 Cst.,
l'intéressé ne peut se contenter de critiquer l'arrêt attaqué comme il le
ferait dans une procédure d'appel où l'autorité de recours peut revoir
librement l'application du droit. Il doit préciser en quoi cet arrêt serait
arbitraire, ne reposerait sur aucun motif sérieux et objectif, apparaîtrait
insoutenable ou heurterait gravement le sens de la justice (ATF 128 I 295
consid. 7a p. 312; 127 I 60 consid. 5a p. 70; 126 I 168 consid. 3a p. 170;
voir aussi ATF 110 Ia 1 consid. 2a p. 3/4).
C'est à la lumière de ces principes que doivent être appréciés les moyens
soulevés par le recourant.
En l'occurrence, l'acte de recours ne contient pas un exposé complet des
faits essentiels. Le recourant - qui se borne à développer un seul élément de
fait - renvoie pour le surplus aux faits retenus dans les deux arrêts
attaqués du Tribunal administratif. On peut se demander si le recours de
droit public est recevable sous cet angle. Point n'est toutefois besoin de
trancher cette question, du moment que le recours est de toute manière mal
fondé.

6.
Le recourant est d'avis que le droit de taxer la période fiscale 1987-1988
serait prescrit.

6.1 L'ancienne loi vaudoise du 26 novembre 1956 sur les impôts directs
cantonaux (ci-après: aLI/VD) - qui a été abrogée par la loi cantonale du 4
juillet 2000 sur les impôts (LI) entrée en vigueur le 1er janvier 2001 -
prévoit à son art. 98 (dans sa teneur applicable à la période fiscale en
cause) que le droit de procéder à une taxation définitive se prescrit par
quatre ans après la fin de la période de taxation (al. 1); la prescription ne
court pas ou elle est suspendue notamment pendant la durée des procédures de
recours et de révision (al. 2 lettre a); la prescription est acquise, dans
tous les cas, douze ans après la fin de la période de taxation (al. 4).

6.2 Par décision sur réclamation du 18 décembre 1997, l'Adminis- tration
cantonale des impôts a fixé à 179'200 fr. le revenu imposable du recourant
pour la période fiscale 1987-1988 en matière d'impôt cantonal et communal.
Cette décision a été entièrement confirmée sur recours par l'arrêt du
Tribunal administratif du 23 décembre 1999. Comme cet arrêt - qui présentait
les traits d'une décision finale pour la période de taxation 1987-1988 - n'a
pas fait l'objet d'un recours de droit public auprès du Tribunal fédéral, la
décision taxation est entrée en force. Le 6 mars 2000, l'Office d'impôt a
notifié à l'intéressé une nouvelle décision de taxation définitive confirmant
la fixation du revenu imposable à 179'200 fr. Le 14 mars 2000, l'Office
d'impôt a notifié à l'intéressé le bordereau  fixant le calcul et le montant
de l'impôt  pour 1987 et 1988. Le 6 avril 2000, le recourant a formé une
réclamation contre ces décisions de taxation et le calcul de l'impôt en
invoquant notamment la prescription; cette réclamation été rejetée selon
décision du 6 février 2004 de l'Administration cantonale des impôts, qui a
été confirmée sur recours par arrêt du Tribunal administratif du 18 juin
2004.

6.3 Dans cet arrêt, la juridiction cantonale a interprété l'art. 98a aLI en
ce sens que la décision de taxation se terminait par la fixation des éléments
imposables et qu'elle devait être rendue dans le délai de prescription
absolue de douze ans (décision de taxation au sens étroit), délai qui, en
l'espèce, était arrivé à échéance le 31 décembre 2000. Comme la décision de
taxation définitive pour 1987-1988 était entrée en force à la suite de
l'arrêt du Tribunal administratif du 23 décembre 1999, la prescription
absolue n'était pas acquise au 31 décembre 2000, quand bien même le bordereau
fixant le montant et le calcul de l'impôt cantonal et communal pour 1987 et
1988 notifié le 14 mars 2000 ne serait entré en force qu'après le 31 décembre
2000.

Le recourant considère pour sa part que le Tribunal administratif a fait
preuve d'arbitraire (sur cette notion, ATF 131 I 217 consid. 2.1; 57 consid.
2; 129 I 8 consid. 2.1, 173 consid. 3.1 et les arrêts cités) en adoptant
cette solution. A ses yeux, la procédure de taxation ne se terminerait que
par la fixation à la fois de l'assiette d'impôt et du montant d'impôt; la
décision de taxation (au sens large) doit donc être rendue dans le délai de
prescription. Ce faisant, le recourant oppose sa propre interprétation de la
loi cantonale à celle faite par le Tribunal administratif, sans expliquer en
quoi l'arrêt attaqué serait arbitraire dans son résultat. Il est douteux
qu'une telle argumentation - de caractère essentiellement appellatoire - soit
recevable. Quoi qu'il en soit, l'interprétation et l'application de la loi
cantonale défendues par l'autorité intimée ne s'avèrent pas insoutenables. Il
n'est en tout cas pas arbitraire de distinguer deux phases dans la taxation,
soit la fixation des éléments imposables d'une part et la détermination du
calcul et du montant d'impôt d'autre part, surtout si l'on considère que la
législation en la matière prévoit des délais de prescription distincts pour
le droit de taxer (art. 98a aLI) et pour celui de percevoir l'impôt (art. 118
aLI, selon lequel les créances fiscales se prescrivent par cinq ans dès
l'entrée en force de la décision qui les fonde [al. 1] et la prescription est
acquise dans tous les cas dix ans après la fin de l'année au cours de
laquelle la décision est devenue définitive [2]).

7.
7.1 Le recourant critique le refus de procéder à la révision des taxations
pour les périodes 1987-1988, 1989-1990 et 1991-1992 de l'impôt cantonal et
communal pour tenir compte du résultat définitif de la promotion
"A.________". Comme dans son recours de droit administratif, le recourant se
plaint à cet égard essentiellement d'une violation du principe de la bonne
foi. Ce moyen doit être rejeté pour les mêmes motifs que ceux exposés plus
haut (cf. consid. 3), étant précisé que la taxation pour la période 1989-1990
ne fait pas l'objet de la présente procédure de recours.

7.2 Dans une argumentation similaire à celle de son recours de droit
administratif, le recourant taxe d'arbitraire l'arrêt attaqué du Tribunal
administratif en tant qu'il considère comme un revenu acquis à fin 1990 la
moitié de l'acompte versé en 1988 dans le cadre de la promesse d'achat et
vente portant sur l'Hôtel B.________ à Z.________. Il n'indique toutefois pas
quel principe ou quelle disposition du droit cantonal auraient été violés.
Les griefs soulevés doivent donc être rejetés pour les mêmes motifs que ceux
mentionnés ci-dessus (consid. 4).

8.
Vu ce qui précède, le recours de droit administratif doit être rejeté. Le
recours de droit public doit être rejeté dans la mesure où il est recevable.
Succombant, le recourant doit supporter un montant global à titre de frais
judiciaires (art. 156 al. 1 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Les causes 2A.465/2004 et 2P.201/2004 sont jointes.

2.
Le recours de droit administratif (2A.465/2004) est rejeté.

3.
Le recours de droit public (2P.201/2004) est rejeté dans la mesure où il est
recevable.

4.
Un émolument judiciaire global de 20'000 fr. est mis à la charge du
recourant.

5.
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant, à
l'Administration cantonale des impôts et au Tribunal administratif du canton
de Vaud, ainsi qu'à l'Administration fédérale des contributions, Division
juridique impôt fédéral direct.

Lausanne, le 8 février 2006

Au nom de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le président:  Le greffier: