Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Öffentlich-rechtliche Abteilung 1P.73/2004
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1P.73/2004 /col

Arrêt du 5 avril 2004
Ire Cour de droit public

MM. les Juges Aemisegger, Président de la Cour et Président du Tribunal
fédéral, Nay, Vice-président
du Tribunal fédéral, et Reeb.
Greffier: M. Zimmermann.

A. ________,
recourant, représenté par Me Bernard Delaloye,
avocat,

contre

Tribunal cantonal du canton du Valais, Cour pénale II, Palais de Justice,
1950 Sion 2.

dépens en procédure d'appel,

recours de droit public contre le jugement du Tribunal cantonal du canton du
Valais du 14 novembre 2003.

Faits:

A.
Par jugement du 13 janvier 2003, le Tribunal du IIème arrondissement pour le
district de Sierre a reconnu A.________ coupable d'instigation à brigandage,
d'instigation à incendie intentionnel et de complicité d'escroquerie. Il l'a
condamné à la peine de cinq ans de réclusion, sous déduction de
soixante-et-onze jours de détention préventive.
Par arrêt du 14 novembre 2003, le Tribunal cantonal du canton du Valais a
admis partiellement l'appel formé par A.________ contre le jugement de
première instance. Il a reconnu l'accusé coupable d'instigation à brigandage
et d'instigation à incendie intentionnel. Il l'a condamné à la peine de deux
ans de réclusion, sous déduction de la détention préventive subie (ch. 4 du
dispositif). Il a mis à la charge de l'Etat du Valais une indemnité de
2033,35 fr., en faveur de l'avocat Bernard Delaloye, défenseur de A.________
(ch. 20 du dispositif).

B.
Agissant par la voie du recours de droit public, A.________ demande au
Tribunal fédéral d'annuler le ch. 20 du dispositif de l'arrêt du 14 novembre
2003 et de renvoyer la cause au Tribunal cantonal pour nouvelle décision au
sens des considérants. Il invoque les art. 9 et 29 Cst.
Le Tribunal cantonal se réfère à son arrêt.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Le recourant reproche au Tribunal cantonal d'avoir violé arbitrairement les
prescriptions cantonales régissant la fixation des dépens. Comme partie à la
procédure cantonale, il est habilité à soulever ce grief (art. 88 OJ).

1.1 Une décision est arbitraire lorsqu'elle viole gravement une norme ou un
principe juridique clair et indiscuté, ou lorsqu'elle contredit d'une manière
choquante le sentiment de la justice et de l'équité; à cet égard, le Tribunal
fédéral ne s'écarte de la solution retenue par l'autorité cantonale de
dernière instance que si elle apparaît insoutenable, en contradiction
manifeste avec la situation effective, adoptée sans motifs objectifs et en
violation d'un droit certain. Il ne suffit pas que les motifs de la décision
critiquée soient insoutenables, encore faut-il que cette dernière soit
arbitraire dans son résultat (ATF 129 I 8 consid. 2.1 p. 9, 173 consid. 3.1
p. 178; 128 I 177 consid. 2.1 p. 182, 273 consid. 2.1 p. 275, et les arrêts
cités).

1.2 Aux termes de l'art. 210 CPP/VS, la décision par laquelle les frais sont
mis à la charge du fisc entraîne, pour l'Etat, l'obligation de payer les
frais, ainsi que les débours et dépens au tarif ordinaire de l'avocat du
prévenu (ch. 1); l'avocat fait valoir ses débours et dépens sous la forme
d'un décompte; la loi fixant le tarif des frais et dépens devant les
autorités judiciaires ou administratives s'applique pour le surplus (ch. 3).
Selon l'art. 3 de la loi valaisanne fixant le tarif des frais et dépens
devant les autorités judiciaires ou administratives, du 14 mai 1998 (LTar),
les dépens, arrêtés globalement, comprennent l'indemnité à la partie pouvant
y prétendre et ses frais d'avocat (al. 1), lesquels comprennent les
honoraires, calculés selon les art. 26ss, et les débours (al. 3). Les
honoraires de l'avocat, y compris la TVA, sont fixés entre un minimum et un
maximum prévu par la loi, d'après la nature et l'importance de la cause, ses
difficultés, l'ampleur du travail, le temps utilement consacré par l'avocat,
et la situation financière de la partie (art. 26 al. 1 et 3 LTar). Pour la
procédure d'appel devant le Tribunal cantonal, le montant des honoraires
varie entre 1000 et 8000 fr. (art. 36 let. i LTar).

1.3 En appel, le recourant a eu partiellement gain de cause. Il a été libéré
du chef de complicité d'escroquerie retenu contre lui en première instance.
En revanche, il n'a pas obtenu que soit retenue la qualification de
complicité de brigandage, ni l'octroi du sursis. La peine de cinq ans de
réclusion infligée en première instance a été réduite à deux ans.
L'appréciation du Tribunal cantonal, selon laquelle le recourant aurait ainsi
eu gain de cause sur les deux tiers des moyens soulevés en appel, n'apparaît
pas comme arbitraire.

1.4 Selon l'arrêt attaqué, le montant des débours alloués au recourant devait
être fixé à 3050 fr. au maximum. Le montant accordé, de 2033,35 fr., équivaut
aux deux tiers de ce maximum (cf. consid. 13.4 de l'arrêt attaqué, p. 73). Si
l'on se fonde sur un tarif horaire de l'ordre de 250 fr., le Tribunal
cantonal a ainsi admis que le travail fourni par le défenseur du recourant
avait dû correspondre à douze heures de travail, les honoraires étant
toutefois réduits dans la proportion d'un tiers, soit huit heures. Dans son
principe, cette réduction n'est pas critiquable (consid. 2.3 ci-dessus).
Sans être particulièrement complexe, l'affaire présentait une certaine
importance, non seulement au regard de la gravité des infractions commises
(deux brigandages et deux incendies intentionnels), du nombre des accusés
(cinq, dont le recourant) et des parties civiles (douze au total). L'arrêt
attaqué comporte soixante-dix-huit pages et la cause a donné passablement de
fil à retordre au Tribunal cantonal, tant pour ce qui concerne les faits que
les questions juridiques à résoudre. Le recourant a produit un décompte; il
estime que son défenseur a consacré vingt-sept heures et dix minutes à la
préparation du mémoire d'appel et de la plaidoirie; ce travail aurait coûté
6790 fr., montant auquel il fallait ajouter les débours, par 603,40 fr. TVA
comprise, la facture totale s'élèverait à 7'955,30 fr. L'allocation d'un tel
montant, qui s'approche du maximum prévu par l'art. 36 let. i LTar, n'entre
pas en ligne de compte, eu égard à l'issue de la cause. Même si le décompte
présenté par le recourant peut paraître excessif pour certains de ses postes
(comme par exemple, les douze heures retenues pour la préparation de la
plaidoirie), ce qu'il appartiendra à l'autorité cantonale d'examiner, le
montant alloué en définitive est trop bas; il est sans rapport avec le
travail effectivement fourni et la difficulté de la cause (cf. l'arrêt 1P.
17/2000 du 3 juillet 2000).

2.
L'appréciation du Tribunal cantonal est ainsi arbitraire dans son résultat.
Le recours doit être admis et le ch. 20 du dispositif de l'arrêt annulé. Il
est statué sans frais (art. 156 OJ). L'Etat du Valais versera au recourant
une indemnité à titre de dépens (art. 159 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est admis et le ch. 20 du dispositif de l'arrêt attaqué annulé.

2.
Il n'est pas perçu d'émolument judiciaire.

3.
Une indemnité de 2000 fr. est mise à la charge de l'Etat du Valais, en faveur
du recourant, à titre de dépens.

4.
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant et à la
Cour pénale II du Tribunal cantonal du canton du Valais.

Lausanne, le 5 avril 2004

Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le président:  Le greffier: