Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Öffentlich-rechtliche Abteilung 1P.737/2004
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1P.737/2004 /col

Arrêt du 31 mars 2005
Ire Cour de droit public

MM. les Juges Féraud, Président,
Aemisegger et Reeb.
Greffier: M. Zimmermann.

A. ________,
recourante, représentée par Me Christophe Tafelmacher, avocat,

contre

Juge d'instruction de l'arrondissement de Lausanne, chemin de Couvaloup 6,
1014 Lausanne,
Tribunal d'accusation du Tribunal cantonal du canton de Vaud, route du Signal
8, 1014 Lausanne.

ordonnance de non-lieu,

recours de droit public contre l'arrêt du Tribunal
d'accusation du Tribunal cantonal du canton de
Vaud du 27 août 2004

Faits:

A.
Le 1er juin 2003, A.________ a participé aux manifestations organisées à
Lausanne pour protester contre la tenue, à Evian, de la conférence
internationale dite du G-8. Lors du passage des manifestants à l'angle de
l'avenue du Denantou et du chemin Edouard-Sandoz, des incidents ont eu lieu
avec les forces de l'ordre. Des agents de police ont alors lancé dans la
direction des manifestants des grenades détonantes. L'une de celles-ci a
touché A.________ et provoqué des brûlures aux jambes, ainsi qu'au tendon
d'Achille et au talon.
Le 1er septembre 2003, A.________ a déposé plainte pénale pour abus
d'autorité et lésions corporelles.
Ses investigations n'ayant pas permis de découvrir l'auteur du lancer de
grenade, Jean-Pierre Chatton, Juge d'instruction de l'arrondissement de
Lausanne a, le 10 août 2004, rendu une ordonnance de non-lieu.
Par arrêt du 27 août 2004, le Tribunal d'accusation du Tribunal cantonal du
canton de Vaud a rejeté le recours formé contre cette décision, qu'il a
confirmée.

B.
Agissant par la voie du recours de droit public, A.________ demande au
Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt du 27 août 2004. Elle invoque les art. 29
al. 1 et 30 Cst. Elle requiert l'assistance judiciaire.
Le Tribunal d'accusation se réfère à sa décision.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Le Tribunal fédéral examine d'office et avec une pleine cognition la
recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 130 I 312 consid. 1 p. 317;
130 II 249 consid. 2 p. 250, 302 consid. 3 p. 303/304, et les arrêts cités).

2.
La recourante est une victime au sens de l'art. 2 al. 1 de la loi fédérale
sur l'aide aux victimes d'infractions, du 4 octobre 1991 (LAVI; RS 312.5; cf.
ATF 128 I 218 consid. 1.2 p. 220/221; 125 II 265 consid. 3a p. 268). Cela lui
donne en principe le droit d'intervenir comme partie dans la procédure pénale
(art. 8 al. 1 LAVI), notamment en formant contre le jugement les mêmes
recours que le prévenu; encore faut-il que la sentence touche ses prétentions
civiles ou puisse avoir des effets sur le jugement de ces dernières (art. 8
al. 1 let. c LAVI). En l'occurrence, la recourante élève des prétentions
civiles à raison du dommage qu'elle a subi consécutivement à l'intervention
des forces de l'ordre lors de la manifestation du 1er juin 2003. Or, selon
l'art. 5 de la loi vaudoise sur la responsabilité de l'Etat, des communes et
de leurs agents, du 19 mai 1961, ceux-ci ne sont pas tenus personnellement
envers le lésé de réparer le dommage. Faute de pouvoir obtenir un quelconque
dédommagement dans le cadre du procès pénal, la recourante ne bénéficie pas
du droit au recours institué par l'art. 8 al. 1 let. c LAVI (cf. ATF 125 IV
161 consid. 2 et 3 p. 163; cf. arrêt 1P.432/ 2004 du 27 octobre 2004, consid.
1).
Elle n'a pas davantage qualité pour agir au fond dans le cadre du recours de
droit public. En effet, selon une jurisprudence constante, le plaignant n'a
pas qualité pour agir au sens de l'art. 88 OJ, contre le classement ou
l'acquittement, au motif que l'action pénale appartient exclusivement à
l'Etat; elle est instituée dans l'intérêt public et ne profite
qu'indirectement au lésé. Celui-ci n'est dès lors pas habilité à recourir, au
regard de l'art. 88 OJ, contre une décision relative à la conduite de
l'action pénale; il n'est fait exception à cette règle que lorsque le lésé se
plaint de la violation des droits formels que lui reconnaît le droit cantonal
de procédure ou qui découlent directement de la Constitution ou de l'art. 6
CEDH (ATF 129 I 217 consid. 1.4 p. 222; 128 I 218 consid. 1.1 p. 219/220; 127
II 160 consid. 3b p. 167, et les arrêts cités). C'est au demeurant
précisément sur ce terrain que se place la recourante, puisqu'elle se plaint
d'un déni de justice formel et de la violation de son droit d'être entendue.
La recourante ne saurait toutefois remettre en cause par ce biais la décision
attaquée sur le fond, en critiquant l'appréciation des preuves ou en faisant
valoir que la motivation retenue serait matériellement fausse; l'examen de
telles questions ne se laisse en effet pas distinguer du fond (ATF 120 Ia 157
consid. 2a p. 159-161, 220 consid. 2a p. 221/222).
Il y a lieu d'entrer en matière.

3.
La recourante se plaint d'un déni de justice formel, en reprochant au
Tribunal d'accusation de n'avoir pas statué sur un grief qu'elle lui avait
soumis.

3.1 Toute personne a droit à ce que sa cause soit traitée équitablement (art.
29 al. 1 Cst.). L'autorité qui n'entre pas en matière sur un recours ou un
grief qui relève de sa compétence commet un déni de justice pour refus de
statuer (ATF 117 Ia 116 consid. 1a p. 117/118; 113 Ia 426 consid. 3 p. 430ss
et les arrêts cités).

3.2 Pour les besoins de son enquête, le Juge d'instruction s'est adressé, le
20 avril 2004, au Commandant de la police cantonale pour lui demander
d'identifier les policiers de faction sur les lieux de l'intervention au
cours de laquelle la recourante a été blessée. Le 28 mai 2004, le Commandant
de la police lui a répondu que cent-quatre-vingt-dix hommes, appartenant à
divers corps de police, avaient été engagés ce jour-là dans ce secteur, mais
qu'il lui était impossible d'indiquer de manière précise le nom des policiers
qui étaient intervenus à l'angle de l'avenue du Denantou et du chemin
Edouard-Sandoz à 10h. Le 10 juin 2004, le Juge d'instruction a adressé à la
recourante un avis de prochaine clôture de la procédure, en l'invitant à
faire les réquisitions qu'elle jugeait nécessaires (cf. art. 188 CPP/VD). Le
15 juillet 2004, la recourante a exprimé l'avis que le rapport du 28 mai 2004
était insuffisant; elle a demandé que les officiers et sous-officiers
responsables de l'engagement de la police, cités dans ce document, soient
entendus et produits les rapports établis par les policiers au sujet de
l'usage de leurs armes, spécialement des grenades détonantes. Invité par le
Juge d'instruction à se déterminer à ce propos, le Commandant de la police a
répondu, le 2 août 2004, que s'agissant de manifestations d'une telle
envergure, il n'exigeait pas des chefs de section de faire un rapport
détaillé de l'usage de grenades détonantes, hormis un décompte journalier. Le
6 août 2004, le Juge d'instruction a fait part à la recourante de son refus
d'entendre les officiers et sous-officiers cités dans son courrier du 15
juillet 2004, au motif que cette mesure ne permettrait pas d'atteindre le but
escompté, soit l'identification du policier qui avait lancé la grenade sur la
recourante. Il a ajouté ceci:
"Je ne perds pas mon temps à des opérations d'enquête dont on sait qu'elles
sont vouées à l'échec; j'ai d'autres priorités qui me sont dictées par le
volume du travail de mon greffe".
A raison du refus d'administrer les moyens de preuve requis et du passage
précité, la recourante a, dans le cadre du recours cantonal, demandé
l'annulation de la décision de non-lieu, la récusation du Juge Chatton et le
renvoi de l'affaire à un autre juge d'instruction.
Le Tribunal d'accusation a considéré qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur
la récusation du Juge d'instruction, dès lors que le non-lieu devait être
confirmé; pour le surplus, il n'existait aucun indice de partialité à
l'encontre du Juge Chatton. La recourante ne pouvait se méprendre sur le sens
de ce passage de l'arrêt, dont il ressort clairement que la demande de
récusation a été rejetée (même si le dispositif de la décision attaquée ne le
précise pas), au double motif que le Juge Chatton n'aurait pas manifesté de
la prévention à l'égard de la recourante, ni commis aucune faute de
procédure. Le Tribunal d'accusation a ainsi statué, de manière succincte mais
suffisante, sur le moyen soulevé.

4.
La recourante se plaint de la violation de son droit d'être entendue, garanti
par l'art. 29 al. 2 Cst.

4.1 Le droit d'être entendu inclut pour les parties celui de s'expliquer
avant qu'une décision ne soit prise à leur détriment, de fournir des preuves
quant aux faits de nature à influer sur la décision, d'avoir accès au
dossier, de participer à l'administration des preuves, d'en prendre
connaissance et de se déterminer à leur propos (ATF 129 I 85 consid. 4.1 p.
88/89; 129 II 497 consid. 2.2 p. 504/505; 127 I 54 consid. 2b p. 56, et les
arrêts cités). L'autorité peut toutefois renoncer au moyen de preuve offert
par une partie, pour autant qu'elle puisse admettre sans arbitraire que ce
moyen n'aurait pas changé sa conviction (ATF 130 II 425 consid. 2.1 p. 429;
124 I 241 consid. 2 p. 242; 124 V 90 consid. 4b p. 94, et les arrêts cités).
Le droit d'être entendu est violé lorsque l'autorité nie sans motifs
suffisants toute pertinence à un moyen de preuve (ATF 114 II 289 consid. 2a
p. 291).
Il découle en outre du droit d'être entendu que l'autorité doit indiquer dans
son prononcé les motifs qui la conduisent à sa décision (ATF 129 I 232
consid. 3.2 p. 236; 123 I 31 consid 2c p. 34; 112 Ia 107 consid. 2b p. 109).
Elle n'est pas tenue de discuter de manière détaillée tous les arguments
soulevés par les parties; elle n'est pas davantage astreinte à statuer
séparément sur chacune des conclusions qui lui sont présentées. Elle peut se
limiter à l'examen des questions décisives pour l'issue du litige; il suffit
que le justiciable puisse apprécier correctement la portée de la décision et
l'attaquer à bon escient (ATF 130 II 530 consid. 4.3 p. 540; 126 I 15 consid.
2a/aa p. 17; 125 II 369 consid. 2c p. 372, et les arrêts cités).

4.2 La recourante expose qu'à l'appui de sa plainte, elle a demandé
l'audition comme témoin de B.________, qui se trouvait à côté d'elle au
moment des faits. Elle a réitéré cette requête le 15 juillet 2004. Le Juge
d'instruction n'a pas statué explicitement à ce propos. Quant à la décision
attaquée, elle n'en dit rien. Il en ressort toutefois que le Tribunal
d'accusation a fait siennes les conclusions du Juge d'instruction qui a
estimé impossible d'identifier les policiers qui se trouvaient sur les lieux
au moment des faits. Compte tenu du nombre d'agents présents lors de
l'engagement, et de l'organisation de celui-ci, il était, selon le Juge
d'instruction, illusoire de penser que les officiers et sous-officiers
responsables soient en mesure de désigner exactement lesquelles de leurs
troupes se trouvaient à quel endroit et à quel moment précis. Sur la base de
cette constatation - qui ne fait pas l'objet du recours - le Tribunal
d'accusation pouvait, de manière implicite et sans arbitraire, tenir pour
superflue l'audition de B.________. Celle-ci aurait peut-être pu aider à
reconnaître parmi d'autres le policier qui a lancé la grenade sur la
recourante. Mais dès l'instant où les agents qui ont participé à cette action
ou qui se trouvaient à proximité des lieux n'ont pas pu être identifiés, la
mesure proposée n'avait plus de raison d'être. Ainsi, même si le Tribunal
d'accusation aurait pu être plus loquace sur ce point, les motifs du refus de
l'audition de B.________ ressortaient implicitement de sa décision.

5.
Selon la recourante, le Juge Chatton était prévenu contre elle; il aurait dû
être récusé. S'agissant de la récusation d'un juge d'instruction, l'art. 29
al. 1 Cst. offre au justiciable une protection équivalente aux conditions
imposées aux autorités judiciaires proprement dites selon l'art. 30 al. 1
Cst. Le juge d'instruction est ainsi tenu à une certaine impartialité (127 I
196 consid. 2b p. 198/199).

5.1 Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue par un tribunal
établi par la loi, compétent, indépendant et impartial (art. 30 al. 1 Cst. et
6 par. 1 CEDH), c'est-à-dire par des juges qui offrent la garantie d'une
appréciation parfaitement objective de la cause (ATF 129 III 445 consid.
3.3.3 p. 454; 129 V 196 consid. 4a.1 p. 198; 128 V 82 consid. 2a p. 84, et
les arrêts cités). Lorsque, comme en l'espèce, le recourant n'invoque pas les
prescriptions du droit cantonal, le Tribunal fédéral examine librement la
compatibilité de la procédure suivie avec les garanties offertes par les art.
30 al. 1 Cst. et 6 par. 1 CEDH (ATF 126 I 68 consid. 3b p. 73; 123 I 49
consid. 2b p. 51; 118 Ia 282 consid. 3b p. 284/285, et les arrêts cités). Des
circonstances extérieures au procès ne doivent influer sur le jugement d'une
manière qui ne serait pas objective, en faveur ou au préjudice d'une partie,
car celui qui se trouve sous de telles influences ne peut être un "juste
médiateur" (ATF 129 III 445 consid. 3.3.3 p. 454; 128 V 82 consid. 2a p. 84;
125 I 209 consid. 8a p. 217; 123 I 49 consid. 2b p. 51). Cette garantie est
assurée en premier lieu par les règles cantonales relatives à la récusation.
Mais, indépendamment de ces dispositions cantonales, la Constitution fédérale
et la CEDH assurent à chacun que seuls des juges qui ne font pas d'acception
de personnes statuent sur son litige. Si la simple affirmation de la
partialité ne suffit pas, mais doit reposer sur des faits objectifs, il n'est
pas davantage nécessaire que le juge soit effectivement prévenu; la suspicion
est légitime même si elle ne se fonde que sur des apparences, pour autant que
celles-ci résultent de circonstances examinées objectivement (ATF 129 III 445
consid. 3.3.3 p. 454; 128 V 82 consid. 2a p. 84; 124 I 121 consid. 3a p.
123/124, et les arrêts cités). D'éventuelles erreurs de procédure ou
d'appréciation commises par un juge ne suffisent pas à fonder objectivement
un soupçon de prévention. Seules des fautes particulièrement graves et
répétées pourraient avoir cette conséquence; même si elles paraissent
contestables, des mesures inhérentes à l'exercice normal de la charge du juge
ne permettent pas de suspecter celui-ci de partialité (ATF 113 Ia 407 consid.
2 p. 408-410; 111 Ia 259 consid. 3b/aa p. 264).

5.2 Dans un premier moyen, la recourante allègue que le Juge Chatton aurait
manifesté un parti-pris favorable à la police qui l'aurait conduit à ne pas
ordonner les mesures d'instruction indispensables pour identifier l'agent qui
avait jeté une grenade contre elle.
Cet argument n'est pas décisif. Le Juge Chatton a demandé au Com-mandant de
la police un rapport détaillé sur l'engagement des troupes dans le secteur du
Denantou, le 1er juin 2003. Le rapport du 28 mai 2004 a été soumis à la
recourante, qui a pu faire valoir ses objections et demander des mesures
complémentaires, que le Juge d'instruction a ordonnées. Sur le vu de la prise
de position complémentaire du Commandant de la police, du 2 août 2004, le
Juge d'instruction a tenu pour inutile la requête tendant à l'audition des
officiers et sous-officiers responsables de l'engagement, au motif qu'il leur
serait impossible de désigner nommément le policier qui avait lancé la
grenade sur la recourante. Même si celle-ci pouvait éprouver des doutes quant
à ce raisonnement - dont l'examen relève du fond de l'affaire, exorbitant à
l'objet du recours - la décision du Juge d'instruction ne dénotait pas, en
tant que telle, de la prévention contre la recourante.

5.3 Dans un deuxième moyen, celle-ci se réfère au passage précité du courrier
du 6 août 2004 (consid. 3.2 ci-dessus), dans lequel le Juge d'instruction a
considéré que les mesures d'investigations supplémentaires étaient
superflues. En soi et indépendamment du fond, une telle prise de position ne
constitue pas un indice objectif de prévention. Il n'en va pas autrement d'un
point de vue formel, même si les termes utilisés dénotent le sentiment
d'agacement que le Juge Chatton a éprouvé devant la persistance de la
recourante à présenter de nouvelles requêtes. Assurément maladroit dans son
expression, cet extrait de la prise de position du 6 août 2004 n'était
cependant pas de nature à remettre en cause l'aptitude du Juge Chatton à
apprécier impartialement la situation de la recourante.

5.4 Dans un troisième moyen, celle-ci fait valoir que le Juge d'instruction
a, dans sa décision de non-lieu du 10 août 2004, estimé que la prévention
d'abus d'autorité n'était pas réalisée, "les mesures prises et ordonnées
étant opportunes, proportionnées et adaptées aux circonstances du moment". En
l'occurrence, le non-lieu a été prononcé parce que le policier qui a lancé la
grenade sur la recourante n'a pu être identifié. Il était partant impossible
de poursuivre l'action pénale. Toute autre considération était superflue à
cet égard. De ce point de vue, le passage mis en exergue par la recourante
est effectivement inexact, puisque l'enquête n'a abouti à aucun résultat. Ce
point n'a au demeurant pas échappé au Tribunal d'accusation, qui a souligné
qu'il subsiste un doute sur l'éventuelle responsabilité de l'un ou l'autre
des responsables des policiers engagés. Sur ce point, le Juge d'instruction a
commis une erreur. Celle-ci n'était cependant pas grave au point d'entraîner
sa récusation. Considérée dans son ensemble, l'enquête du Juge d'instruction
a en effet été conduite de manière impartiale.

6.
Le recours doit ainsi être rejeté et la demande d'assistance judiciaire
admise (art. 152 OJ). Il est statué sans frais. Me Christophe Tafelmacher,
avocat à Lausanne, est désigné comme avocat d'office de la recourante. Il lui
est alloué une indemnité de 2000 fr. à titre d'honoraires.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
La demande d'assistance judiciaire est admise.

3.
Il est statué sans frais.

4.
Me Christophe Tafelmacher, avocat à Lausanne, est désigné comme avocat
d'office de la recourante. Il lui est alloué une indemnité de 2000 fr. à
titre d'honoraires.

5.
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire de la recourante, au
Juge d'instruction de l'arrondissement de Lausanne et au Tribunal
d'accusation du Tribunal cantonal du canton de Vaud.

Lausanne, le 31 mars 2005

Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le président:  Le greffier: