Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Öffentlich-rechtliche Abteilung 1P.653/2004
Zurück zum Index I. Öffentlich-rechtliche Abteilung 2004
Retour à l'indice I. Öffentlich-rechtliche Abteilung 2004


1P.653/2004 /col

Arrêt du 11 janvier 2005
Ire Cour de droit public

MM. les Juges Féraud, Président,
Reeb et Fonjallaz.
Greffier: M. Jomini.

X. ________,
recourante, représentée par Me Stéphane Riand, avocat,

contre

Office du Juge d'instruction du Valais central,
Palais de Justice, 1950 Sion 2,
Procureur général du canton du Valais,
route de Gravelone 1, case postale 2282, 1950 Sion 2,
Tribunal cantonal du canton du Valais, Chambre pénale, Palais de Justice,
1950 Sion 2.

procédure pénale, déni de justice formel,

recours de droit public contre la décision de la Chambre pénale du Tribunal
cantonal du canton du Valais, du
18 octobre 2004.

Faits:

A.
Au mois d'août 2001, X.________, alors enseignante à l'école A.________, a
déposé une plainte administrative pour harcèlement psychologique et sexuel
contre le directeur de cet établissement, Y.________. Le 12 septembre 2001,
le Conseil d'Etat du canton du Valais a ouvert une enquête disciplinaire,
puis a rendu une décision le 19 décembre 2001 (mise au provisoire de
l'intéressé, transfert dans une autre fonction). Y.________ a recouru contre
cette décision auprès de la Cour de droit public du Tribunal cantonal.
L'affaire a été classée le 6 septembre 2002.

X. ________ a elle aussi recouru auprès du Tribunal cantonal contre la
décision du Conseil d'Etat. La Cour de droit public a déclaré ce recours
irrecevable par un arrêt du 6 septembre 2002.

B.
Le 8 juillet 2002, X.________ a ouvert action contre l'Etat du Valais en
demandant une indemnité pour tort moral ainsi que la réparation du dommage
subi à cause du harcèlement imputé à Y.________. En première instance, le
Juge II du district de Sion a rendu son jugement le 11 décembre 2003.
X.________ a interjeté appel auprès de la Cour civile du Tribunal cantonal.
Elle a également déposé un recours de droit public, dont l'instruction est
actuellement suspendue (cause 2P.10/2004).

C.
Le 14 mars 2002, Y.________ a déposé une plainte pénale contre X.________,
pour infractions contre l'honneur. Le Juge d'instruction de l'Office du
Valais central (ci-après: le Juge d'instruction) a décidé, le 1er décembre
2003, de ne pas donner suite à cette plainte. Y.________ a recouru en vain
contre cette décision auprès de la Chambre pénale du Tribunal cantonal.

D.
Le 22 avril 2002, X.________ a adressé au Juge d'instruction une dénonciation
pénale contre Y.________, pour dénonciation calomnieuse. Elle se référait à
la plainte du 14 mars 2002.

E.
Le 25 août 2003, X.________ a adressé au Juge d'instruction une dénonciation
contre Y.________ pour lésions corporelles graves. Elle invoquait une
atteinte grave à sa santé provoquée par les actes de harcèlement.

F.
Le 8 septembre 2003, X.________ a écrit au Juge d'instruction pour lui
demander "d'entreprendre toutes les démarches nécessaires liées à la question
de l'application de l'art. 307 CP (faux témoignage) en relation avec les
allégations émises par Y.________ par devant le Juge II du district de Sion
dans le cadre de la procédure civile" (cf. supra, let. B).

G.
Le Ministère public a été invité à se déterminer sur les dénonciations
émanant de X.________. Le Procureur général a déposé une première écriture le
10 octobre 2003 - qui se rapportait également à la plainte déposée par
Y.________, classée peu après (cf. supra, let. C) - puis une seconde le 13
juillet 2004, qui a été communiquée à X.________ le 30 août 2004. Celle-ci a
réagi le 31 août 2004 et le 6 septembre 2004, en critiquant la position du
Ministère public et en signifiant au Juge d'instruction qu'elle comptait sur
une décision prochaine sur ses dénonciations.

Y. ________ s'est également déterminé, le 28 septembre 2004.

H.
Le 29 septembre 2004, X.________ a adressé à la Chambre pénale du Tribunal
cantonal une plainte pour déni de justice formel, sur la base de l'art. 166
du code de procédure du canton du Valais (CPP/ VS), dirigée contre le Juge
d'instruction. Elle a fait valoir que ce magistrat n'avait toujours pas
procédé lui-même à son audition et qu'il n'avait pas inculpé Y.________,
quand bien même elle lui avait adressé, par l'intermédiaire de son avocat,
"maintes écritures qui n'ont eu pour effet que de prolonger la procédure".
Elle a demandé au Tribunal cantonal d'ordonner au Juge d'instruction de
suivre immédiatement avec diligence la procédure pénale.

Le Juge d'instruction s'est déterminé le 6 octobre 2004 en indiquant que la
procédure suivait son cours. A propos de la dénonciation pour faux
témoignage, il a relevé qu'il était dans l'attente du jugement du Tribunal
cantonal dans le procès civil.
La Chambre pénale a rejeté la plainte par une décision du 18 octobre 2004.
Elle a constaté, notamment, certains "ralentissements" dans le traitement des
trois procédures pénales en question mais aucun "temps mort" d'une durée
choquante. Effectuant une appréciation d'ensemble, elle a considéré que le
traitement des dénonciations était tributaire de l'avancement d'autres
procédures (celle ouverte par le Juge d'instruction à la suite de la plainte
pénale déposée par Y.________, ainsi que les procédures administrative et
civile concernant les actes de harcèlement imputés à ce dernier). Plus
précisément, s'agissant de la première démarche - où elle se prétendait
victime d'une dénonciation calomnieuse -, la plaignante avait admis qu'il
convenait d'attendre l'ordonnance de refus de donner suite du 1er décembre
2003. La deuxième dénonciation - pour lésions corporelles - se réfère à des
faits déjà invoqués auparavant dans la procédure civile. Quant à la troisième
dénonciation - pour faux témoignage -, elle concerne une déposition faite
dans le cadre de la procédure civile, ce qui justifie d'attendre le jugement
sur appel du Tribunal cantonal,  vraisemblablement au cours du premier
semestre 2005. Une dérogation à la règle de l'art. 8 ch. 1 CPP/VS, qui
prévoit la jonction des causes en cas de concours d'infractions, ne
s'imposait pas. La Chambre pénale a enfin considéré qu'il "appartiendra au
juge d'instruction de veiller d'ores et déjà à disposer des autres éléments
lui permettant de statuer sur la suite à donner aux dénonciations de dame
X.________ aussitôt qu'il sera suffisamment informé sur le sort de la cause
civile, de manière à ne pas prolonger encore plus la première phase des
procédures pénales pendantes".

I.
Agissant par la voie du recours de droit public pour déni de justice formel
(art. 29 al. 1 Cst.) et arbitraire (art. 9 Cst.), X.________ demande au
Tribunal fédéral d'ordonner immédiatement et sans délai à l'autorité
judiciaire cantonale de poursuivre la procédure pénale dans l'affaire qui
l'oppose à Y.________.

La Chambre pénale du Tribunal cantonal, le Juge d'instruction et le Procureur
général ont renoncé à répondre au recours.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Le Tribunal fédéral peut rejeter selon une procédure simplifiée les recours
manifestement infondés (art. 36a al. 1 let. b OJ). L'arrêt est alors
sommairement motivé (art. 36a al. 3 OJ).

2.
La recourante reproche au Juge d'instruction un retard injustifié à statuer,
et partant une violation de l'art. 29 al. 1 Cst. Elle fait valoir que la
Chambre pénale aurait dû admettre sa plainte (au sens de l'art. 166 CPP/VS),
moyen de droit disponible pour dénoncer un déni de justice formel. Elle
prétend en outre que la procédure pénale aurait été suspendue de manière
arbitraire, sans base légale en droit cantonal.

2.1 Aux termes de l'art. 29 al. 1 Cst., toute personne a droit, dans une
procédure judiciaire ou administrative, à ce que sa cause soit jugée dans un
délai raisonnable. Cette disposition consacre le principe de la célérité ou,
en d'autres termes, prohibe le retard injustifié à statuer. L'autorité viole
cette garantie constitutionnelle lorsqu'elle ne rend pas la décision qu'il
lui incombe de prendre dans le délai prescrit par la loi ou dans un délai que
la nature de l'affaire ainsi que toutes les autres circonstances font
apparaître comme raisonnable. Il faut se fonder à ce propos sur des éléments
objectifs; entre autres critères sont notamment déterminants le degré de
complexité de l'affaire, l'enjeu que revêt le litige pour l'intéressé ainsi
que le comportement de ce dernier et celui des autorités compétentes. La
durée du délai raisonnable n'est pas influencée par des circonstances
étrangères au problème à résoudre (cf., à propos de l'art. 29 al. 1 Cst. et
de la garantie correspondante déduite auparavant de l'art. 4 al. 1 aCst.: ATF
125 V 188 consid. 2a p. 191, 373 consid. 2b/aa p. 375; 119 Ib 311 consid. 5b
p. 325; 119 III 1 consid. 2 p. 3; 107 Ib 160 consid. 3c p. 165; 103 V 190
consid. 3c p. 195; cf. également ATF 124 I 139 consid. 2c p. 142).

Il s'agit dès lors de contrôler si, à la date de la décision de la Chambre
pénale, la durée de la procédure était excessive. Le grief d'arbitraire n'a
en l'espèce pas de portée indépendante. D'ailleurs, il ne ressort pas du
dossier qu'au jour du dépôt de la plainte selon l'art. 166 CPP/ VS, les trois
affaires pénales concernées auraient été formellement ou implicitement
suspendues.

2.2 En l'espèce, il est évident que le traitement des dénonciations pénales
est lié au sort d'autres procédures concernant le même complexe de faits, ce
que la recourante ne conteste pas de manière concluante. De plus, le Juge
d'instruction n'est pas resté inactif dans la période précédant la plainte à
la Chambre pénale. Au demeurant, la juridiction cantonale a invité le Juge
d'instruction à poursuivre son examen. Dans ces conditions, le grief de
violation de l'art. 29 al. 1 Cst. est manifestement mal fondé.

3.
Il s'ensuit que le recours de droit public doit être rejeté.

La recourante, qui succombe, doit payer un émolument judiciaire (art. 153,
153a et 156 al. 1 OJ).

Par ces motifs, vu l'art. 36a OJ, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours de droit public est rejeté.

2.
Un émolument judiciaire de 2'000 fr. est mis à la charge de la recourante.

3.
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire de la recourante, à
l'Office du Juge d'instruction du Valais central, au Procureur général et au
Tribunal cantonal du canton du Valais.

Lausanne, le 11 janvier 2005

Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le président:  Le greffier: