Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Öffentlich-rechtliche Abteilung 1P.606/2004
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1P.606/2004/col

Arrêt du 30 novembre 2004
Ire Cour de droit public

MM. les Juges Aemisegger, Président de la Cour et Président du Tribunal
fédéral, Féraud et Fonjallaz.
Greffier: M. Parmelin.

Société A.________,
B.________,
recourants,
tous deux représentés par Me Charles Poncet, avocat,

contre

Procureur général du canton de Genève,
case postale 3565, 1211 Genève 3,
Chambre d'accusation du canton de Genève,
case postale 3108, 1211 Genève 3.

plainte pénale; classement,

recours de droit public contre l'ordonnance de la Chambre d'accusation du
canton de Genève du 2 septembre 2004.

Faits:

A.
Le 17 septembre 2002, la Société X.________, devenue par la suite la Société
A.________, et B.________ ont déposé une plainte pénale pour violation du
secret de fonction et abus d'autorité contre le Juge d'instruction
C.________. Ils lui reprochaient d'avoir communiqué à la partie civile et au
dénonciateur certains documents confidentiels les concernant, versés au
dossier de deux procédures pénales dont il avait la charge, alors que
celles-ci n'étaient pas contradictoires faute d'inculpation.
Par ordonnance du 6 mai 2004, le Procureur général du canton de Genève a
classé la poursuite pénale dirigée contre C.________. La Chambre d'accusation
du canton de Genève (ci-après: la Chambre d'accusation) a confirmé cette
décision sur recours des plaignants au terme d'une ordonnance rendue le 2
septembre 2004.

B.
Agissant par la voie du recours de droit public, la Société A.________ et
B.________ demandent au Tribunal fédéral d'annuler cette ordonnance. Ils se
plaignent à divers titres d'un déni de justice formel en relation avec la
motivation de la décision attaquée qu'ils tiennent pour arbitraire.
La Chambre d'accusation se réfère aux considérants de sa décision. Le
Procureur général du canton de Genève conclut à l'irrecevabilité du recours.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Le Tribunal fédéral examine d'office et avec une pleine cognition la
recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 130 II 321 consid. 1 p.
324, 388 consid. 1 p. 389 et la jurisprudence citée).

1.1 Les recourants se plaignent sous divers aspects d'un déni de justice
formel prohibé par l'art. 9 Cst., soit d'un moyen relevant du recours de
droit public pour violation des droits constitutionnels des citoyens selon
l'art. 84 al. 1 let. a OJ (ATF 127 IV 215 consid. 2d p. 218). Ils prétendent
également que la décision attaquée, dans sa motivation, violerait le droit
fédéral en tant qu'elle dénoterait une volonté générale des autorités pénales
genevoises de ne pas poursuivre pénalement les infractions aux art. 312 et
320 CP commises par les juges d'instruction dans l'exercice de leur fonction.
C'est par la voie du pourvoi en nullité que ce grief aurait dû être invoqué
(ATF 120 IV 38 consid. 3 p. 43). La conversion du recours de droit public en
un pourvoi en nullité, comme le prévoit la jurisprudence (ATF 126 II 506
consid. 1b p. 509; 126 III 431 consid. 3 p. 437 et les arrêts cités), n'entre
pas en considération, car les recourants ont déposé un recours de droit
public contre la décision attaquée, alors même que celle-ci indiquait
expressément la possibilité de se pourvoir en nullité auprès du Tribunal
fédéral s'ils entendaient faire valoir une violation du droit fédéral (cf.
ATF 120 II 270 consid. 2 p. 272). Le recours est donc irrecevable sur ce
point.

1.2 Selon la jurisprudence relative à l'art. 88 OJ, celui qui se prétend lésé
par une infraction n'a en principe pas qualité pour former un recours de
droit public contre une ordonnance refusant d'inculper l'auteur présumé ou
prononçant un non-lieu en sa faveur. En effet, l'action pénale appartient
exclusivement à la collectivité publique et, en règle générale, le plaignant
n'a qu'un simple intérêt de fait à obtenir que cette action soit
effectivement mise en oeuvre. Un intérêt juridiquement protégé, propre à
conférer la qualité pour recourir, est reconnu seulement à la victime d'une
atteinte à l'intégrité corporelle, sexuelle ou psychique, au sens de l'art. 2
de la loi fédérale sur l'aide aux victimes d'infractions (LAVI; RS 312.5),
lorsque la décision de classement ou de non-lieu peut avoir des effets sur le
jugement de ses prétentions civiles contre le prévenu (ATF 128 I 218 consid.
1.1 p. 219; 121 IV 317 consid. 3 p. 323; 120 Ia 101 consid. 2f p. 109). Tel
n'est pas le cas des recourants s'agissant des infractions dénoncées, comme
ils l'admettent d'ailleurs. Indépendamment de leur légitimation au fond, ils
ont qualité, au sens de l'art. 88 OJ, pour se plaindre d'une violation de
leurs droits de partie à la procédure, lorsque cette violation équivaut à un
déni de justice formel (ATF 129 I 217 consid. 1.4 p. 222; 129 II 297 consid.
2.3 p. 301; 128 I 218 consid. 1.1 p. 219). Le droit d'invoquer des garanties
procédurales ne leur permet toutefois pas de mettre en cause, même de façon
indirecte, le jugement au fond; le recours ne peut donc pas porter sur des
points indissociables de ce jugement tels que le refus d'administrer une
preuve sur la base d'une appréciation anticipée de celle-ci ou le devoir de
l'autorité de motiver sa décision de façon suffisamment détaillée (ATF 129 I
217 consid. 1.4 p. 222; 125 I 253 consid. 1b p. 255).

1.3 Les recourants prétendent que la Chambre d'accusation n'aurait pas motivé
de façon suffisante son refus de poursuivre et violé ainsi leur droit d'être
entendus. Elle aurait retenu d'une manière arbitraire et excessivement
formaliste qu'ils avaient consenti à ce que le juge d'instruction transmette
des informations confidentielles et couvertes par le secret bancaire au
dénonciateur et, partant, à la violation des secrets de fonction et
d'instruction dont ils se plaignaient. Sous couvert de formalisme excessif ou
d'un déni de justice, les recourants tendent en réalité par leur
argumentation à démontrer que la décision attaquée serait arbitraire dans sa
motivation au fond, ce qu'ils ne sont pas en droit de faire selon la
jurisprudence précitée. On cherche en vain dans leur recours un grief portant
sur une violation de leurs droits de partie à la procédure.

2.
Le recours doit ainsi être déclaré irrecevable aux frais des recourants qui
succombent (art. 156 al. 1 OJ).

Par ces motifs, vu l'art. 36a OJ, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est irrecevable.

2.
Un émolument judiciaire de 2'000 fr. est mis à la charge des recourants.

3.
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire des recourants, au
Procureur général et à la Chambre d'accusation du canton de Genève.

Lausanne, le 30 novembre 2004

Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le président:  Le greffier: