Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Öffentlich-rechtliche Abteilung 1P.368/2004
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1P.368/2004 /BMH

Arrêt du 9 juillet 2004
Ire Cour de droit public

MM. les Juges Aemisegger, Président de la Cour et Président du Tribunal
fédéral, Nay, Vice-président du Tribunal fédéral, et Reeb.
Greffier: M. Jomini.

G.________,
recourant,

contre

X.________,
intimée, représentée par Me Denis Bettems,
avocat,
Municipalité de la commune de Lausanne,
Greffe municipal, place de la Palud 2, 1002 Lausanne,
Tribunal administratif du canton de Vaud,
avenue Eugène-Rambert 15, 1014 Lausanne.

autorisations de construire,

recours contre l'arrêt du Tribunal administratif du canton de Vaud du 24 mai
2004.

Faits:

A.
Le 15 janvier 2004, la Municipalité de la commune de Lausanne a accordé à la
société anonyme X.________ des autorisations pour la construction de nouveaux
bâtiments à l'avenue de Cour 107 ainsi que pour la surélévation d'un bâtiment
existant à l'avenue de Rhodanie 50 (projet d'extension du siège de la
société, avec création de deux parkings souterrains, de 494 et 45 places).

G. ________, domicilié sur le territoire de la commune de Lausanne, au chemin
..., avait formé opposition durant l'enquête publique.

B.
Le 17 février 2004, G.________ a recouru contre les deux décisions
municipales auprès du Tribunal administratif du canton de Vaud. Il critiquait
ces décisions à différents égards (création de nouvelles nuisances par
l'augmentation du trafic routier, atteintes à la végétation du quartier,
notamment).

Le Tribunal administratif a déclaré le recours irrecevable par un arrêt rendu
le 24 mai 2004. Il a considéré en substance que G.________ - domicilié dans
les hauts de Lausanne alors que les terrains litigieux se trouvent au bas de
la ville, à proximité du lac, à plus de 3 km à vol d'oiseau du quartier du
recourant - ne pouvait pas se prévaloir d'un intérêt digne de protection à
l'annulation des décisions municipales; or c'est une condition posée à l'art.
37 al. 1 de la loi cantonale sur la juridiction et la procédure
administratives (LJPA), qui définit la qualité pour recourir au Tribunal
administratif.

C.
Par un acte intitulé "recours", daté du 24 juin 2004 et mis à la poste le 30
juin 2004, G.________ demande au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt du
Tribunal administratif afin qu'un "vrai débat sur le fond" ait lieu.

Il n'a pas été demandé de réponses.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Il n'y a pas lieu d'examiner si le recours doit être traité comme un recours
de droit administratif (art. 97 ss OJ) ou plutôt comme un recours de droit
public (art. 84 ss OJ). Les autres questions de recevabilité - notamment
celle de l'observation du délai de recours - peuvent également demeurer
indécises.

2.
Le recourant, qui admet habiter "aux antipodes" du quartier dans lequel se
trouvent les terrains litigieux, reproche au Tribunal administratif de ne pas
être entré en matière sur le fond. Son argumentation peut être résumée en ce
sens que la juridiction cantonale aurait dû examiner ses griefs car, par ses
activités commerciales - la vente de cigarettes -, la société intimée serait
responsable d'évolutions sociales préoccupantes.

2.1  La contestation porte sur l'application d'une règle du droit cantonal de
procédure, définissant la qualité pour recourir au Tribunal administratif
dans les termes suivants: "Le droit de recours appartient à toute personne
physique ou morale qui est atteinte par la décision attaquée et a un intérêt
digne de protection à ce qu'elle soit annulée ou modifiée" (art. 37 al. 1
LJPA). Le Tribunal fédéral ne peut, quoi qu'il en soit - dans la procédure de
recours de droit administratif ou dans celle de recours de droit public -,
que sanctionner le cas échéant une application arbitraire de cette règle
(pour la définition de la notion d'arbitraire, prohibé par l'art. 9 Cst., cf.
ATF 129 I 8 consid. 2.1 p. 9; 128 I 273 consid. 2.1 p. 275 et les arrêts
cités).

2.2  D'après l'arrêt attaqué, la définition de l'art. 37 al. 1 LJPA
correspond à celle de l'art. 103 let. a OJ, relative à la qualité pour former
un recours de droit administratif au Tribunal fédéral. Il s'ensuit que le
recourant doit être touché dans une mesure et avec une intensité plus grandes
que la généralité des administrés et l'intérêt invoqué - qui n'est pas
nécessairement un intérêt juridiquement protégé, mais qui peut être un
intérêt de fait - doit se trouver, avec l'objet de la contestation, dans un
rapport étroit, spécial et digne d'être pris en considération. Il faut donc
que l'admission du recours procure au recourant un avantage, de nature
économique, matérielle ou idéale. Le recours d'un particulier formé dans
l'intérêt général ou dans l'intérêt d'un tiers est en revanche irrecevable.
Ces exigences ont été posées de manière à empêcher l'"action populaire" (ATF
121 II 39 consid. 2c/aa p. 43, 171 consid. 2b p. 174; 120 Ib 48 consid. 2a p.
51, 379 consid. 4b p. 386 et les arrêts cités). Les conditions légales sont
en principe réalisées quand le recours est formé par le propriétaire d'un
immeuble directement voisin de la construction ou de l'installation
litigieuse. Il peut en aller de même, selon la jurisprudence, en l'absence de
voisinage direct mais quand une distance relativement faible sépare
l'immeuble du recourant de la construction projetée (cf. ATF 121 II 171
consid. 2b p. 174 où il est fait référence à des distances de 45 m, 70 m ou
120 m). La distance n'est toutefois pas l'unique critère pour déterminer si
le voisin a un intérêt digne de protection. S'il est certain ou très
vraisemblable que l'installation litigieuse sera à l'origine d'immissions -
bruit, poussières, vibrations, lumière, fumée - atteignant spécialement les
voisins, même situés à une certaine distance, ces derniers peuvent avoir
qualité pour recourir (cf. ATF 125 II 10 consid. 3a p. 15; arrêt 1A.179/1996
du 8 avril 1997 in RDAF 1997 I p. 242).

L'application, en l'espèce, de pareils critères n'est à l'évidence pas
arbitraire.

2.3  Le recourant ne conteste pas qu'il n'est pas un voisin direct de
l'emplacement des projets de l'intimée et que, résidant à plusieurs
kilomètres de là, dans un autre quartier de la ville, il ne serait pas exposé
aux immissions du trafic automobile lié à l'utilisation des nouveaux parcs de
stationnement. Il n'est pas question d'autres nuisances ou inconvénients pour
le voisinage. Il n'est donc pas arbitraire de considérer que le recourant n'a
pas d'intérêt digne de protection à l'annulation des deux autorisations de
construire. C'est à tort qu'il critique l'application, par le Tribunal
administratif, du droit cantonal de procédure.

3.
Il s'ensuit que le recours, manifestement infondé, doit être rejeté - en tant
qu'il est recevable - selon la procédure simplifiée de l'art. 36a al. 1 OJ.

Le recourant, qui succombe, doit payer l'émolument judiciaire (art. 156 al. 1
OJ). Aucun échange d'écritures n'ayant été ordonné, il n'y a pas lieu
d'allouer des dépens (cf. art. 159 OJ).

Par ces motifs, vu l'art. 36a OJ, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté, en tant qu'il est recevable.

2.
Un émolument judiciaire de 200 fr. est mis à la charge du recourant.

3.
Il n'est pas alloué de dépens.

4.
Le présent arrêt est communiqué en copie au recourant, au mandataire de
l'intimée, à la Municipalité de la commune de Lausanne et au Tribunal
administratif du canton de Vaud.

Lausanne, le 9 juillet 2004

Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le président:  Le greffier: