Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Öffentlich-rechtliche Abteilung 1P.359/2004
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1P.359/2004 /BMH

Arrêt du 14 septembre 2004
Ire Cour de droit public

MM. les Juges Féraud, juge présidant, Aeschlimann et Reeb.
Greffier: M. Zimmermann.

X. ________,
recourant,

contre

Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de cassation pénale, rte du Signal
8, 1014 Lausanne.

indemnisation de l'avocat d'office,

recours de droit public contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de
Vaud, Cour de cassation pénale, du 27 mai 2004.

Faits:

A.
X.  ________ a été poursuivi pour dommages à la propriété, violation de
domicile et incendie intentionnel.

Dans le cadre de cette procédure, le Président du Tribunal de
l'arrondissement de La Côte a désigné l'avocat Y.________ comme défenseur
d'office de l'accusé. Le 12 mai 2004, il l'a relevé de cette mission, à sa
demande, fixé à 3200 fr. le montant de son indemnité, et désigné l'avocat
Z.________ comme nouveau défenseur d'office d'X.________.

Celui-ci a recouru contre cette décision auprès du Tribunal cantonal du
canton de Vaud, le 17 mai 2004. Il a contesté le montant de l'indemnité
allouée à Y.________ et la désignation de Z.________.

Le 25 mai 2004, la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal, siégeant
avec les Juges de Mestral, Grec et de Montmollin, a « écarté » le recours.
Elle a considéré, en bref, qu'à défaut d'avoir été condamné au paiement des
frais de la cause, X.________ n'avait pas qualité pour contester le montant
de l'indemnité allouée à l'avocat Y.________ et qu'aucune voie de droit
n'était ouverte contre la désignation d'un défenseur d'office.

B.
X. ________ a saisi le Tribunal fédéral d'un recours contre cette décision.
Invoquant l'art. 9 Cst., il reproche aux Juges de Mestral, Grec et de
Montmollin de ne pas s'être récusés et critique le volet de la décision
attaquée concernant la fixation du montant de l'indemnité allouée à
Y.________. Il requiert en outre de connaître la composition de la cour
appelée à statuer sur le recours, afin de pouvoir exercer son droit de
récusation. Il demande l'assistance judiciaire.

Le 21 juillet 2004, le Tribunal fédéral a communiqué au recourant la liste
des juges fédéraux, titulaires et suppléants, ainsi que des gref-fiers,
rattachés à la Ire Cour de droit public.

Le 29 juillet 2004, le recourant a demandé la récusation de tous les juges
fédéraux, à raison d'une plainte pénale déposée par le Tribunal fédéral
contre lui.

Le Tribunal cantonal se réfère à sa décision.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
La récusation des juges fédéraux et de leurs greffiers est régie par les art.
22ss OJ. La loi distingue entre les motifs obligatoires (art. 22 OJ) et
facultatifs (art. 23 OJ) de récusation. La demande doit énoncer les faits sur
lesquels elle se fonde et les établir par titres (art. 25 al. 2 OJ). Aux
termes de l'art. 26 OJ, si un cas de récusation au sens des art. 22 et 23 est
contesté, la décision est prise, en l'absence des juges visés, par la section
compétente du tribunal (al. 1); si par suite des récusations, les juges ou
suppléants ne se trouvent plus en nombre suffisant, le président du tribunal
tire au sort, parmi les présidents des tribunaux suprêmes des cantons non
intéressés, le nombre de suppléants de tribunaux extraordinaires pour se
prononcer sur la demande de récusation et, le cas échéant, sur l'affaire
elle-même (al. 3).

1.1  La loi ne prévoit pas la possibilité de récuser en bloc le Tribunal
fédéral ou l'une de ses Cours (ATF 105 Ib 301; décision 1P.510/1989 du 1er
octobre 1990, consid. 3a, dans laquelle la Ire Cour de droit public a siégé
dans une composition formée uniquement de suppléants; arrêt 2P.243/1990 du 27
novembre 1991, consid. 2c). Il appartient au demandeur d'indiquer, de manière
précise, pour quels motifs tel ou tel juge serait empêché d'entendre sa
cause. Pour le surplus, le tribunal dont la récusation est demandée en bloc
peut déclarer lui-même la requête irrecevable ou manifestement mal fondée,
alors même que la décision incomberait, selon la loi de procédure applicable,
à une autre autorité (ATF 129 III 445 consid. 4.2.2 p. 464; 122 II 471
consid. 2b p. 476; 114 Ia 278; 105 Ib 301 consid. 1b p. 303; cf. également
les arrêts 1P.553/2001 du 12 novembre 2001 et 1P.396/2001 du 13 juillet
2001).

1.2  Le recourant a demandé que lui soit communiquée la composition de la
Cour
appelée à statuer, de manière à pouvoir exercer son droit de récusation. Le
Tribunal fédéral lui a remis la liste des juges (titulaires et suppléants),
ainsi que des greffiers rattachés à la Ire Cour de droit public, section
compétente du Tribunal fédéral (cf. art. 2 ch. 2, onzième tiret, RTF). Ce
renseignement allait au demeurant au-delà de ce qu'exige la jurisprudence,
selon laquelle le justiciable peut connaître la composition du Tribunal
fédéral, en consultant soit l'Annuaire fédéral, soit le site Internet des
autorités fédérales, www.admin.ch (arrêts 6C.1/2000 du 27 décembre 2000,
consid. 3a; 1P.63/1999 du 15 février 1999, consid. 2; cf. ATF 117 Ia 322
consid. 1c p. 323, et les arrêts cités). Dans le délai imparti à cet effet,
le recourant a récusé tous les juges fédéraux. Il a évoqué à ce propos le
fait que le Tribunal fédéral le considérerait « comme ennemi » et avait
déposé contre lui une plainte pénale (cf. act. 12).

1.3  Le premier moyen se rapporte, de manière implicite, au motif de
récusation visé à l'art. 23 let. b OJ, soit celui où les personnes dont la
récusation est demandée se trouvent dans un rapport d'inimitié personnelle
avec le requérant. Le recourant a maille à partir avec la justice vaudoise
depuis plusieurs années, en rapport soit avec une procédure de divorce, soit
avec la  procédure pénale à l'origine de la présente affaire. Il est possible
que le recourant, qui a demandé à plusieurs reprises la récusation des juges
cantonaux, ait développé un sentiment d'incompréhension, voire de
ressentiment, à l'égard de l'appareil judiciaire en général. Cela l'a conduit
à animer un groupe appelé « Appel au peuple » qui a pour but de dénoncer les
lacunes et les errements de la justice en Suisse. Le recourant aime à
brocarder les juges et les accuser de déloyauté, de malhonnêteté et de
corruption, notamment dans le traitement des affaires qui le concernent
personnellement. L'agressivité qui émaille ses écrits et les méthodes
utilisées à l'égard de certains juges cantonaux et fédéraux ne signifient pas
pour autant que les membres du Tribunal fédéral éprouveraient envers lui une
quelconque inimitié. A l'instar de tous les magistrats judiciaires, les juges
fédéraux ont le devoir et la capacité de s'élever au-dessus des contingences,
de considérer impassiblement les causes qui leur sont soumises et de statuer
en toute sérénité. Le recourant ne fait au demeurant état d'aucun élément
propre à démontrer que tel ou tel juge fédéral aurait témoigné de l'hostilité
à son égard.

1.4  Le deuxième moyen se rapporte, également de manière implicite, au motif
de récusation visé à l'art. 23 let. c OJ, soit celui où il existe des
circonstances de nature à donner aux personnes dont la récusation est
demandée l'apparence de la prévention. Le recourant se réfère à ce propos à
la plainte pénale déposée contre lui par le Tribunal fédéral.

Il est possible que le justiciable engagé dans un procès contre le juge
appelé à connaître de sa cause éprouve, à raison de ce fait, des craintes
objectivement fondées quant à l'impartialité du tribunal. De telles
circonstances n'existent toutefois pas en l'occurrence.

Selon une plainte pénale déposée le 27 mars 2003, le recourant s'est
introduit dans les locaux du Tribunal fédéral sans autorisation. Il s'est
caché au milieu d'un groupe de personnes admises dans le hall d'entrée pour
pénétrer dans le bâtiment. Il ne s'est pas soumis aux contrôles usuels, n'a
pas obtempéré aux ordres du personnel chargé de l'accueil des visiteurs et de
la sécurité, a tenté d'emprunter la rampe d'escaliers pour gagner les étages
supérieurs où se trouvent les bureaux des juges. Intercepté par le personnel
de surveillance, le recourant a finalement été repoussé à l'extérieur des
locaux. Il a reconnu avoir voulu se rendre dans le bureau d'un juge pour
l'obliger de s'entretenir avec lui.

La plainte du 27 mars 2003 émane du Tribunal fédéral en tant qu'institution
et non d'un juge ou de l'ensemble de ceux-ci. Elle est signée du Secrétaire
général, lequel exerce des fonctions administratives et non judiciaires (art.
29 RTF). L'incident à l'origine de la plainte ne concerne pas les juges comme
tels, qui ne sont pas davantage intéressés par l'issue de la procédure
pénale.

1.5  La demande de récusation est ainsi manifestement mal fondée.

2.
Sur le fond, le recourant invoque l'art. 9 Cst. prohibant l'arbitraire.
Le Tribunal cantonal n'est pas entré en matière sur les griefs du recourant.
Celui-ci ne démontre pas, d'une manière conforme aux exigences de l'art. 90
al. 1 let. b OJ (cf. ATF 130 I 26 consid. 2.1 p. 31; 129 I 113 consid. 2.1 p.
120; 128 II 50 consid. 1c p. 53/54, et les arrêts cités) en quoi le Tribunal
cantonal aurait arbitrairement violé le droit de procédure cantonal en
décidant comme il l'a fait. L'argumentation du recours se borne à contester
l'octroi d'une indemnité à l'avocat Y.________. Il ne contient aucun élément
propre à remettre en discussion l'appréciation selon laquelle le prévenu
disposerait du droit de contester le montant de la rémunération de son
défenseur d'office lorsque les frais ne sont pas (encore) mis à sa charge,
d'une part, et la désignation d'un nouveau défenseur d'office, d'autre part.

3.
Le recourant reproche aux juges cantonaux qui ont participé au prononcé de la
décision attaquée de ne pas s'être récusés.

3.1  Le grief tiré de la prévention des membres de l'autorité appelée à
statuer doit être soulevé aussitôt que possible. Celui qui omet de dénoncer
immédiatement un tel vice et laisse le procès se dérouler sans intervenir,
agit contrairement à la bonne foi et voit se périmer son droit de se plaindre
ultérieurement de la violation qu'il allègue (ATF 126 III 249 consid. 3c p.
253/254; 121 I 225 consid. 3 p. 229; 120 Ia 19 consid. 2c/aa p. 24; 118 Ia
282 consid. 3a p. 284, et les arrêts cités). Il n'est pas nécessaire que la
composition de l'autorité soit communiquée officiellement aux parties; il
suffit que cette information soit accessible au public, par exemple par le
truchement d'un répertoire officiel (ATF 117 Ia  322 consid. 1c p. 323; 114
Ia 278 consid. 3c p. 280).

3.2  Le recourant n'a pas demandé, dans la procédure cantonale, la récusation
des juges du Tribunal cantonal, alors qu'il en connaît bien la composition,
pour avoir plusieurs fois formulé des demandes analogues. Il est forclos sur
ce point.

4.
Le recours est ainsi irrecevable. Le recourant demande l'assistance
judiciaire, laquelle n'est accordée qu'à la double condition que le recourant
soit indigent et que ses conclusions ne soient pas vouées à l'échec d'emblée
(art. 152 OJ). La question de savoir si le recourant est effectivement démuni
des moyens d'agir à ses frais peut rester indécise, car de toute manière, sa
démarche était manifestement dénuée de toute chance de succès. La demande
d'assistance judiciaire doit être rejetée, et les frais mis à la charge du
recourant (art. 156 OJ). Il n'y a pas lieu d'allouer des dépens (art. 159
OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
La demande de récusation de l'ensemble des juges fédéraux est rejetée.

2.
Le recours est irrecevable.

3.
La demande d'assistance judiciaire est rejetée.

4.
Un émolument de 1000 fr. est mis à la charge du recourant.

5.
Le présent arrêt est communiqué en copie au recourant et au Tribunal cantonal
du canton de Vaud, Cour de cassation pénale.

Lausanne, le 14 septembre 2004

Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le juge présidant:  Le greffier: