Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Öffentlich-rechtliche Abteilung 1P.273/2004
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1P.273/2004/col

Arrêt du 23 septembre 2004
Ire Cour de droit public

MM. les Juges Aemisegger, Président de la Cour et Président du Tribunal
fédéral, Reeb et Fonjallaz.
Greffier: M. Parmelin.

la société A.________,
Communauté héréditaire de feu B.________,
formée de C.________, de D.________ et de E.________,
recourantes, représentées par Me Catherine de Preux, avocate,

contre

Conseil d'Etat du canton du Valais,
Palais du Gouvernement, 1950 Sion,
Tribunal cantonal du canton du Valais,
Cour de droit public, Palais de Justice,
avenue Mathieu-Schiner 1, 1950 Sion 2.

ordre d'évacuation d'un dépôt de matériaux en zone
à bâtir,

recours de droit public contre l'arrêt de la Cour de
droit public du Tribunal cantonal du canton du Valais
du 12 mars 2004.

Faits:

A.
B.  ________ était propriétaire de la parcelle n° 6058 du cadastre de la
commune de Sierre jusqu'à son décès survenu le 9 mars 1997. Cette parcelle de
9'021 mètres carrés, sise dans le quartier des Marais d'Itagne, accueille les
locaux de l'entreprise de marbrerie et de taille de pierre que B.________
exploitait depuis 1954 en premier lieu en raison individuelle, puis sous la
forme d'une société anonyme, avec ses deux fils D.________ et E.________.
Le 24 janvier 1990, B.________ a requis sans succès l'autorisation de
construire une halle et un pont roulant sur la parcelle n° 6058, alors
classée en zone de moyenne densité selon le plan d'affectation des zones
homologué le 12 septembre 1979 par le Conseil d'Etat du canton du Valais
(ci-après: le Conseil d'Etat). Le 9 mai 1990, il a déposé une nouvelle
demande d'autorisation de construire visant à transformer un dépôt en un
atelier de finition. Le 6 août 1990, le Conseil municipal de Sierre l'a
informé de sa décision prise en séance du 24 juillet 1990 de refuser
d'accéder à cette requête. Il indiquait en outre avoir entamé des démarches
afin de vérifier si l'entreprise respectait, dans son activité, les normes de
protection contre le bruit. Il exposait enfin avoir constaté qu'une vigne
avait été arrachée au sud-ouest de l'entreprise et qu'un réglage du terrain
avait été réalisé. Il précisait à ce propos que si ces opérations n'étaient
pas soumises à une autorisation de construire, il n'en allait pas de même au
cas où B.________ entendrait utiliser cette surface comme place de stockage.
Au cours de la procédure d'assainissement, le Conseil municipal de Sierre a
relevé que l'entreprise A.________ avait aménagé un dépôt permanent de
matériaux à l'emplacement de l'ancienne vigne, sans être au bénéfice d'une
autorisation de construire. Par décision du 20 juin 1995, il l'a sommée de
régulariser la situation en présentant une demande d'autorisation de
construire.
Le 22 janvier 1996, A.________ a soumis un projet d'assainissement de son
entreprise aux autorités communales. Le 6 mars 1996, le Conseil municipal de
Sierre a indiqué qu'il était disposé à entrer en matière sur une demande
formelle et complète d'autorisation de construire à la condition notamment
que la société présente simultanément une "demande réparatoire pour
l'aménagement du dépôt à ciel ouvert".
Le 28 juin 1996, A.________ a déposé une demande d'autorisation pour
l'assainissement de son entreprise. Elle a en revanche contesté la nécessité
d'une autorisation de construire pour l'aménagement du dépôt à ciel ouvert.
Après avoir une nouvelle fois vainement requis une enquête de régularisation,
le Conseil municipal de Sierre a décidé de dissocier les deux procédures et a
imparti à A.________ un délai de quatre mois pour évacuer le dépôt de
matériaux à ciel ouvert aménagé à l'ouest de la parcelle n° 6058, au terme
d'une décision prise le 20 décembre 1996.
Le 23 janvier 1997, A.________ et B.________, auxquels se sont substitués ses
héritiers légaux, à savoir son épouse, C.________, ainsi que ses deux fils,
D.________ et E.________ (ci-après: les hoirs de feu B.________), ont recouru
auprès du Conseil d'Etat contre cette décision en tant qu'elle ordonnait
l'évacuation du dépôt de matériaux. La procédure a été suspendue du 13 mai
1997 au 5 décembre 2002. Statuant le 8 juillet 2003, le Conseil d'Etat a
rejeté le recours. Il a considéré que l'ordre de remise en état des lieux du
20 décembre 1996 n'était pas périmé, car il était intervenu dans les dix ans
suivant l'aménagement du dépôt litigieux, conformément à l'art. 54 al. 5 du
décret valaisan du 31 janvier 1992 sur la procédure d'autorisation de
construire (DAC), applicable en l'espèce dès lors qu'aucune procédure de
police des constructions au sens de l'art. 65 al. 2 DAC n'était pendante lors
de l'entrée en vigueur du décret le 1er juillet 1992. Il a rejeté les autres
arguments tirés de la violation des principes de la proportionnalité et de la
protection de la situation acquise.
Par arrêt du 12 mars 2004, la Cour de droit public du Tribunal cantonal du
canton du Valais (ci-après: le Tribunal cantonal) a rejeté le recours
interjeté contre cette décision. Elle a confirmé que l'aménagement d'un dépôt
de matériaux à ciel ouvert était soumis à une autorisation de construire
préalable. Elle a estimé que le droit d'exiger la remise en état des lieux
n'était pas prescrit, étant donné que la procédure y afférente avait débuté
au plus tôt le 7 mars 1995, date à laquelle le Conseil municipal de Sierre a
invité A.________ à présenter un projet d'assainissement. Elle a retenu que
si l'entreprise bénéficiait d'une situation acquise, il n'en allait pas de
même de son extension sous la forme d'un dépôt de matériaux pierreux à ciel
ouvert, contraire aux dispositions réglementaires de la zone. Enfin, elle a
confirmé la proportionnalité de la mesure attaquée.

B.
Agissant par la voie du recours de droit public, A.________ et la communauté
héréditaire de feu B.________ demandent au Tribunal fédéral d'annuler cet
arrêt. Elles se plaignent à divers titres d'une constatation arbitraire des
faits et d'une application arbitraire du droit cantonal.
Le Tribunal cantonal et le Conseil d'Etat ont renoncé à se déterminer.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
En vertu de l'art. 34 al. 1 et 3 de la loi fédérale sur l'aménagement du
territoire (LAT; RS 700), seule la voie du recours de droit public est
ouverte contre l'arrêt attaqué qui confirme un ordre d'évacuation d'un dépôt
de matériaux en zone à bâtir, fondé sur le droit cantonal, dans la mesure où
les recourantes font essentiellement valoir une violation de leurs droits
constitutionnels. Formé en temps utile contre une décision finale prise en
dernière instance cantonale et qui touche celles-ci dans leurs intérêts
juridiquement protégés, le recours répond aux exigences des art. 86 al. 1, 88
et 89 al. 1 OJ.

2.
Les recourantes ne contestent pas qu'un dépôt de matériaux pierreux à ciel
ouvert était soumis à une autorisation de construire, selon le droit en
vigueur au moment de sa réalisation, ni qu'une telle autorisation n'aurait
pas pu être délivrée, si elle avait été requise, en raison de la
non-conformité de cet aménagement avec l'affectation de la zone. Elles sont
d'avis que le droit d'ordonner la remise en état des lieux était prescrit
lorsque le Conseil municipal de Sierre a statué le 20 décembre 1996, faute
d'avoir été exercé dans les cinq ans après l'exécution des travaux
irréguliers, conformément à l'art. 44 al. 5 de l'ordonnance valaisanne sur
les constructions du 5 janvier 1983 (aOC). En considérant qu'il n'y avait pas
de procédure pendante le 1er juillet 1992, au sens de l'art. 65 al. 2 DAC, et
en appliquant le délai de prescription de dix ans de l'art. 54 al. 5 DAC, le
Tribunal cantonal aurait fait preuve d'arbitraire.

2.1  Une décision est arbitraire et, partant, contraire à l'art. 9 Cst.,
lorsqu'elle méconnaît gravement une norme ou un principe juridique clair et
indiscuté ou lorsqu'elle heurte de manière choquante le sentiment de la
justice ou de l'équité. Le Tribunal fédéral ne s'écarte de la solution
retenue en dernière instance cantonale que si elle est insoutenable, en
contradiction manifeste avec la situation effective, si elle a été adoptée
sans motif objectif ou en violation d'un droit certain. Il ne suffit pas que
la motivation de la décision soit insoutenable; encore faut-il qu'elle soit
arbitraire dans son résultat (ATF 129 I 173 consid. 3 p. 178), ce qu'il
appartient au recourant de démontrer (art. 90 al. 1 let. b OJ; ATF 124 I 247
consid. 5 p. 250).

2.2  Selon l'art. 44 al. 5 aOC, cinq ans après l'exécution des travaux
irréguliers, la remise en état des lieux, conforme aux prescriptions en
matière de construction, ne peut plus être exigée sauf si elle est justifiée
par des intérêts publics importants. En revanche, l'art. 54 al. 5 DAC fixe un
délai de prescription de dix ans après le jour où l'état de fait contraire au
droit était reconnaissable pour exiger la remise en état des lieux, à la
condition que cette mesure soit commandée par des intérêts publics
impératifs. L'art. 51 al. 5 de la loi valaisanne sur les constructions du 8
février 1996 (LC), entrée en vigueur le 1er janvier 1997, a repris telle
quelle cette disposition, qui instaure également un délai de prescription
absolue de trente ans dès l'achèvement des travaux.
Jusqu'au 1er juillet 1992, les procédures d'autorisation de construire et de
police des constructions étaient régies par l'ordonnance sur les
constructions du 5 janvier 1983; cette ordonnance a été abrogée par le décret
du 31 janvier 1992 sur la procédure d'autorisation de construire, mais elle
demeure toutefois applicable aux procédures introduites avant l'entrée en
vigueur du décret, en vertu de l'art. 65 al. 2 DAC.

2.3  Le Tribunal cantonal a estimé que la procédure de remise en état des
lieux avait débuté au plus tôt le 7 mars 1995, date à laquelle le Conseil
municipal de Sierre a invité A.________ à présenter un projet
d'assainissement de l'entreprise, de sorte qu'à cette date, le décret était
seul applicable. Le Conseil d'Etat a pour sa part retenu que la première
mesure de police des constructions était intervenue le 20 juin 1995, lorsque
le Conseil municipal de Sierre avait sommé A.________  de présenter une
demande d'autorisation de construire en vue de régulariser la situation. Les
recourantes considèrent quant à elles que la procédure décisive a été engagée
le 6 août 1990, date à laquelle le Conseil municipal de Sierre a constaté
l'assujettissement du dépôt litigieux au régime de l'autorisation de
construire, et qu'elle était pendante le 1er juillet 1992, de sorte que le
droit d'exiger la remise en état des lieux était prescrit lorsque cette
autorité a ordonné l'évacuation du dépôt le 20 décembre 1996, en vertu de
l'art. 44 al. 5 aOC.
Le litige porte sur l'évacuation d'un dépôt de matériaux pierreux réalisé
sans droit sur la parcelle n° 6058. Il n'était donc nullement arbitraire
d'admettre que seule une procédure d'autorisation de construire, de police
des constructions ou de recours en relation avec cet ouvrage, pendante au 1er
juillet 1992, était propre à entraîner l'application de l'art. 44 al. 5 aOC
en vertu de l'art. 65 al. 2 DAC. Les recourantes ne le contestent pas
vraiment ou du moins pas dans les formes requises par l'art. 90 al. 1 let. b
OJ. En l'occurrence, à supposer que la décision du 6 août 1990 puisse être
qualifiée de décision en constatation de droit en tant qu'elle a trait à
l'assujettissement d'un dépôt de matériaux à une procédure d'autorisation de
construire, elle est restée sans effet étant donné que feu B.________ n'a
jamais déposé une demande d'autorisation portant sur une telle installation,
mais qu'il a au contraire procédé aux travaux litigieux sans en avertir les
autorités communales compétentes. Les demandes d'autorisation de construire
présentées au début de l'année 1990 concernaient d'autres objets sans rapport
avec cette installation; au demeurant, les procédures relatives à ces
demandes étaient définitivement closes le 1er juillet 1992. A cette date,
seule la procédure d'assainissement de l'entreprise était en cours; or, s'il
s'agit bien d'une procédure de police des constructions, au sens de l'art. 65
al. 2 DAC, elle n'a aucun rapport direct avec la procédure d'évacuation du
dépôt de matériaux litigieux, dont elle a d'ailleurs finalement été dissociée
dans la décision du 20 décembre 1996. Aux dires des autorités communales,
qu'aucun élément au dossier ne permet de mettre en cause, ce n'est que le 17
janvier 1995 que le Conseil municipal de Sierre a officiellement constaté que
la surface anciennement plantée en vigne était utilisée comme dépôt de
pierres; il a alors sommé A.________ de régulariser la situation en déposant
une demande d'autorisation de construire au terme d'une décision notifiée le
20 juin 1995. C'est à ce moment que la procédure décisive de remise en état
des lieux a officiellement été engagée (cf. à ce sujet, Magdalena Ruoss
Fierz, Massnahmen gegen illegales Bauen, Zurich 1999, ch. 3.2.4, p. 66).
Vu ce qui précède, le Tribunal cantonal n'a pas fait preuve d'arbitraire en
admettant qu'aucune procédure d'autorisation de construire ou de police des
constructions au sens de l'art. 65 al. 2 DAC n'était pendante le 1er juillet
1992, en relation avec le dépôt de matériaux litigieux, et en considérant que
l'ordre de remise en état des lieux n'était pas prescrit lorsqu'il a été
notifié aux recourantes le 20 décembre 1996, sans qu'il soit besoin
d'examiner s'il existe des motifs d'intérêt public tirés de la protection
contre le bruit, qui auraient commandé de faire abstraction du délai de
prescription (cf. Magdalena Ruoss Fierz, op. cit., ch. 3.2.1, p. 63 et les
références citées en note 61).

2.4  On observera au demeurant que l'ordre de remise en état des lieux ne
doit
pas absolument intervenir dans le délai de prescription. Ce dernier est
considéré comme respecté par l'invitation faite au perturbateur de
régulariser la situation par la mise en oeuvre d'une enquête publique (cf.
Magdalena Ruoss Fierz, op. cit., ch. 3.2.4, p. 66). Ainsi, à supposer que le
Conseil municipal de Sierre ait engagé une procédure de police des
constructions en relation avec le dépôt de matériaux litigieux par sa
décision du 6 août 1990, le délai de cinq ans fixé à l'art. 44 al. 5 aOC pour
ordonner la remise en état des lieux aurait de toute manière été respecté;
lorsque le Conseil municipal de Sierre a sommé A.________ à régulariser la
situation en présentant une demande d'autorisation de construire, le 20 juin
1995, moins de cinq ans s'étaient écoulés depuis l'achèvement des travaux,
puisque la place aménagée à l'ouest de la parcelle n° 6058 n'était pas encore
utilisée comme dépôt de matériaux ou, du moins, pas dans la mesure actuelle,
lors de l'inspection des lieux intervenue le 27 juin 1990. En tout état de
cause, l'arrêt attaqué ne serait à cet égard pas arbitraire dans son
résultat.

3.
Les recourantes prétendent que l'ordre de remise en état des lieux ne
tiendrait pas compte du fait que l'entreprise exploite depuis plus de
quarante ans un dépôt à ciel ouvert à proximité de la marbrerie et porterait
une atteinte inadmissible à ses droits acquis. Elles dénoncent à ce propos
une application arbitraire de l'art. 3 al. 1 LC, aux termes duquel les
constructions et installations existantes réalisées conformément au droit
antérieur, mais devenues contraires aux plans ou aux prescriptions en
vigueur, peuvent être entretenues et modernisées, transformées ou agrandies,
pour autant que les travaux n'engendrent pas une aggravation de leur
non-conformité au droit.
Le Tribunal cantonal a estimé que si l'entreprise établie en 1954 bénéficiait
d'une situation acquise au sens de cette disposition, il n'en allait pas de
même de son extension sous la forme d'un dépôt de matériaux pierreux à ciel
ouvert occupant une surface de 5'000 mètres carrés environ, un tel
aménagement, contraire à l'affectation de la zone, étant de nature à conduire
à une aggravation de la situation non conforme au droit. Les recourantes ne
discutent nullement cet argument. Il est douteux que leur recours satisfasse
sur ce point les exigences de motivation en matière d'arbitraire déduites de
l'art. 90 al. 1 let. b OJ (cf. ATF 129 III 626 consid. p. 629). Peu importe
en définitive, car celui-ci est de toute manière mal fondé. La protection de
la situation acquise, que tend à garantir l'art. 3 al. 1 LC, ne s'applique
qu'aux constructions et installations existantes qui doivent être maintenues
dans leur utilisation ou leurs structures actuelles; elle n'accorde pas un
droit inconditionnel de maintenir une installation ou un ouvrage non conforme
à la destination de la zone, dont l'emplacement et la surface pourraient
varier au gré de ses besoins. Celui qui déplace l'installation perd le droit
de se prévaloir de la situation acquise et doit respecter le droit en vigueur
(Konrad Willi, Die Besitzstandsgarantie für rechtswidrige Bauten und Anlagen
innerhalb der Bauzonen, thèse Zurich 2003, p. 21; cf. ATF 127 II 209 consid.
3d p. 214, s'agissant de la construction d'une nouvelle maison d'habitation
en zone agricole à quelque 260 mètres de la précédente). Or, si l'entreprise
de marbrerie et de taille de pierre exploitée aujourd'hui par A.________ a de
tout temps disposé d'un dépôt de matériaux de pierres à proximité de son
centre d'exploitation, l'emplacement et l'étendue de celui-ci ont varié au
gré des circonstances et des besoins. La surface faisant l'objet de l'ordre
de remise en état était plantée en vigne jusqu'au printemps 1990, avant
d'être progressivement utilisée comme dépôt de matériaux sans autorisation;
elle ne bénéficie de ce fait pas de la situation acquise et doit respecter le
droit en vigueur.
Le grief tiré de la violation de l'art. 3 al. 1 LC est ainsi mal fondé dans
la mesure où il est recevable.

4.
Les recourantes semblent enfin reprocher au Tribunal cantonal d'avoir violé
le principe de la proportionnalité en ne tenant pas compte de l'intérêt privé
prépondérant de l'entreprise et du voisinage au maintien des choses en
l'état. Elles lui font en outre grief de ne pas avoir précisé quel est l'état
antérieur qui devrait être rétabli.
La décision de remise en état des lieux du 20 décembre 1996 est très claire à
cet égard; elle ne demande pas que la surface soit replantée en vigne, mais
se borne à exiger l'évacuation du dépôt de matériaux aménagé sans
autorisation, laissant ainsi aux recourantes le soin de trouver à cet
emplacement une nouvelle affectation compatible avec la destination de la
zone. Elle est au surplus conforme aux principes dégagés par la jurisprudence
dans ce domaine (ATF 123 II 248 consid. 4a p. 255). Les recourantes ne
peuvent en effet se prévaloir de leur bonne foi puisque feu B.________ a
aménagé le dépôt litigieux sans autorisation, alors même qu'il avait été
rendu attentif à la nécessité d'obtenir au préalable une telle autorisation.
Par ailleurs, de par ses dimensions, le dépôt litigieux consacre une entorse
importante aux règles d'affectation de la zone. Les recourantes prétendent
certes qu'un dépôt de matériaux pierreux à proximité immédiate des locaux
d'exploitation serait indispensable au maintien de l'entreprise sur son site
actuel; ce faisant elles perdent de vue qu'une installation non conforme au
droit ne saurait être admise ou tolérée du seul fait qu'elle serait
nécessaire à l'exploitation d'une entreprise bénéficiant de la garantie de la
situation acquise (cf. ATF 115 Ib 295 consid. 3d p. 302; 114 Ib 317 consid.
4d p. 320). Compte tenu de la gravité de l'atteinte portée à l'affectation de
la zone, le Conseil municipal de Sierre pouvait sans arbitraire faire
prévaloir l'intérêt public à ne pas tolérer une situation contraire au droit
sur l'intérêt privé des recourantes à conserver une surface destinée à
entreposer des matériaux pierreux à proximité immédiate du centre
d'exploitation. Enfin, en se limitant à exiger l'évacuation du dépôt de
matériaux et en renonçant à exiger une replantation de la surface considérée
en vigne, il a pris une mesure qui tient compte de manière suffisante des
intérêts des recourantes. L'ordre de remise en état est ainsi conforme au
principe de la proportionnalité.

5.
Le recours doit par conséquent être rejeté aux frais des recourantes qui
succombent (art. 156 al. 1 OJ). Il n'y a pas lieu d'allouer des dépens aux
autorités concernées.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté, dans la mesure où il est recevable.

2.
Un émolument judiciaire de 3'000 francs est mis à la charge des recourantes.

3.
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire des recourantes, au
Conseil d'Etat et à la Cour de droit public du Tribunal cantonal du canton du
Valais, ainsi qu'à la Commune de Sierre, pour information.

Lausanne, le 23 septembre 2004

Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le président:  Le greffier: