Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Öffentlich-rechtliche Abteilung 1P.248/2004
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1P.248/2004 /dxc

Arrêt du 14 juin 2004
Ire Cour de droit public

MM. les Juges Féraud, Juge présidant,
Reeb et Fonjallaz.
Greffier: M. Kurz.

X. ________,
recourant, représenté par Me Philippe Girod, avocat,

contre

Service cantonal d'avance et de recouvrement des pensions alimentaires du
canton de Genève (Scarpa), 3, rue des Savoises, 1205 Genève,
Procureur général du canton de Genève, place du Bourg-de-Four 1, case postale
3565, 1211 Genève 3,
Cour de justice du canton de Genève, Chambre pénale, case postale 3108, 1211
Genève 3.

art. 9 Cst. (procédure pénale),

recours de droit public contre l'arrêt de la Chambre pénale du 22 mars 2004.

Faits:

A.
Par jugement du 15 décembre 2003, le Tribunal de police du canton de Genève a
condamné X.________ à dix jours d'emprisonnement avec sursis pendant deux
ans, pour violation d'une obligation d'entretien, sur plainte du Service
genevois d'avance et de recouvrement des pensions alimentaires (Scarpa),
portant sur la période de juin 2001 à août 2003. La pension alimentaire en
faveur de sa fille avait été fixée à 600 fr., par jugement du Tribunal de
première instance du 27 octobre 1998. Au terme d'une procédure de
modification du jugement de divorce, la Cour de justice genevoise avait fixé
à 200 fr. la contribution d'entretien, dès le mois de juin 2001, considérant
que le débiteur était en incapacité de travail en raison de la maladie de
Crohn, mais percevait 1779 fr. de la part de l'Hospice général, ce qui lui
laissait un solde disponible de 504 fr. Le Tribunal de police a retenu que le
prévenu disposait de certains montants après règlement de ses dépenses de
première nécessité. Il n'avait toutefois rien versé au Scarpa, mais avait
préféré faire des présents à ses enfants à l'occasion de leurs visites; sa
fille avait cessé d'en profiter dès 2002 car il ne la voyait plus.

B.
Par arrêt du 22 mars 2004, la Chambre pénale de la Cour de justice genevoise
a confirmé ce jugement. Les juges civils avaient fixé le solde disponible à
500 fr., et l'appelant ne prétendait pas que sa situation s'était modifiée.
Le fait qu'il ne puisse plus voir sa fille était sans incidence sur
l'obligation alimentaire.

C.
X. ________ forme un recours de droit public contre cette arrêt, dont il
demande l'annulation. Il requiert l'assistance judiciaire.

La cour cantonale se réfère aux considérants de son arrêt. Le Procureur
général conclut au rejet du recours. Le Scarpa s'en rapporte à justice.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Le recours est formé en temps utile contre un arrêt rendu en dernière
instance cantonale. Le recourant, dont la condamnation se trouve confirmée, a
qualité pour recourir (art. 88 OJ).

2.
Le recourant se plaint d'une appréciation arbitraire des faits. Selon la
Chambre pénale, il ne prétendait pas que sa situation s'était modifiée depuis
le prononcé civil. Or, le recourant avait produit en appel un certificat
médical démontrant une aggravation de son état de santé. La guérison
envisagée par le juge civil ne serait plus possible, des démarches ayant été
entreprises auprès de l'assurance invalidité. La Chambre pénale a aussi jugé
que le fait que le recourant ne voyait plus sa fille était sans incidence sur
l'obligation alimentaire. En réalité, le recourant expliquait que les quelque
100 ou 200 fr. dont il pouvait disposer étaient dépensés lors des rencontres
avec son fils, et que sa fille ne pouvait en bénéficier puisqu'il ne la
voyait plus.

2.1  Il y a arbitraire, prohibé par l'art. 9 Cst., lorsque la décision
attaquée viole gravement une règle ou un principe juridique clair et
indiscuté ou lorsqu'elle contredit d'une manière choquante le sentiment de la
justice ou de l'équité. Le Tribunal fédéral ne s'écarte de la solution
retenue par l'autorité cantonale de dernière instance que si elle est
insoutenable ou en contradiction évidente avec la situation de fait, si elle
a été adoptée sans motif objectif ou en violation d'un droit certain. Par
ailleurs, il ne suffit pas que les motifs de la décision attaquée soient
insoutenables, encore faut-il que celle-ci soit arbitraire dans son résultat
(ATF 129 I 9 consid. 2.1 p. 9; 128 I 273 consid. 2.1 p. 275 et la
jurisprudence citée).

2.2  Le recourant n'ayant pas déposé d'écritures en appel, il n'est pas
possible de vérifier quels arguments ont été effectivement soumis à la
Chambre pénale. En revanche, il ne ressort pas clairement du certificat
médical produit en appel que la situation du recourant se serait aggravée
depuis le prononcé civil. Ce certificat, du 17 février 2004, fait état d'une
maladie de Crohn déclarée en 1988, avec des opérations subies en 1989 et
2001. Il est précisé que le patient "continue" d'avoir des poussées actives
et imprévisibles de sa maladie, ses capacités de travail étant "nettement
diminuées". Aucune aggravation significative de l'état de santé n'est
mentionnée, et il n'est pas fait allusion aux chances de guérison. Quant aux
démarches auprès de l'assurance invalidité, elles ne sont, selon le recourant
lui-même, qu'"envisagées". Sur le vu de ces indications, il n'est pas
arbitraire de retenir, comme l'a fait la cour cantonale, qu'il n'y avait pas
de modification notable de la situation du recourant. Celui-ci explique les
raisons pour lesquelles les sommes dont il dispose bénéficient en premier
lieu à son fils. Nonobstant l'absence de contact avec sa fille, il était
possible au recourant de verser une partie de cet argent au Service de
recouvrement. Les considérations de la cour cantonale sur ce point échappent,
elles aussi, au grief d'arbitraire.

3.
Sur le vu de ce qui précède, le recours doit être rejeté. Le recourant a
demandé l'assistance judiciaire, dont il dispose déjà en instance cantonale.
Elle peut lui être accordée pour la présente procédure. Me Girod est désigné
comme avocat d'office, rétribué par la caisse du Tribunal fédéral. Il n'est
pas perçu d'émolument judiciaire.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
La demande d'assistance judiciaire est admise; Me Philippe Girod est désigné
comme avocat d'office, et une indemnité de 1000 fr. lui est allouée à titre
d'honoraires, à payer par la caisse du Tribunal fédéral.

3.
Il n'est pas perçu d'émolument judiciaire, ni alloué de dépens.

4.
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant, au
Service cantonal d'avance et de recouvrement des pensions alimentaires
(Scarpa), au Procureur général et à la Cour de justice du canton de Genève,
Chambre pénale.

Lausanne, le 14 juin 2004

Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le juge présidant:  Le greffier: